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Décisions

Cass. com., 14 mars 1995, n° 93-15.261

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Plastiques de l'Arvor (SA)

Défendeur :

Le Berre

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bézard

Rapporteur :

M. Grimaldi

Avocat général :

M. Mourier

Avocats :

SCP Le Bret, Laugier, SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez.

T. com. Bordeaux, prés., du 14 janv. 199…

14 janvier 1992

LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt partiellement confirmatif déféré (Rennes, 3 mars 1993), que, par un contrat d'agent commercial du 31 mars 1989, la société Plastiques de l'Arvor (société PDA) a confié la représentation de ses produits à M. Le Berre ; que la société PDA ayant rompu le contrat, avec effet au 1er février 1991, M. Le Berre l'a assignée en paiement du montant de l'indemnité compensatrice du préjudice subi, sur le fondement de l'article 3 du décret du 23 décembre 1958 ;

Sur le premier moyen ; - Attendu que la société PDA reproche à l'arrêt d'avoir confirmé le jugement qui avait accueilli cette demande alors, selon le pourvoi, que l'article 9 du contrat du 31 mars 1989, spécialement invoqué par la société PDA, imposait à l'agent commercial d'informer régulièrement son mandat par la transmission d'un "rapport tous les six mois, de l'état du marché dans son secteur, des souhaits de la clientèle et des actions de la concurrence" ; que cette obligation, non soumise à une quelconque mise en demeure préalable, dispensait le mandant de toute réclamation auprès de son agent, auquel il appartenait, par suite, de justifier de l'envoi desdits rapports et de l'exécution correcte de cette obligation, dont dépendait, une fois consommée la rupture, l'avantage de l'indemnité compensatrice réclamée par M. Le Berre ; qu'en accordant à ce dernier le bénéfice de l'indemnité compensatrice, tout en le dispensant de justifier de l'envoi des rapports imposés par l'article 9 du contrat, l'arrêt a inversé le fardeau de la preuve au détriment de la société PDA ayant rapporté la preuve de l'obligation pesant sur son agent, et violé les articles 1315, alinéa 2, du Code civil et 7 du décret du 23 décembre 1958 ;

Mais attendu que la société PDA ayant fait valoir que l'article 9 du contrat mettait à la charge du mandataire une obligation d'information, avec envoi de comptes rendus semestriels, l'arrêt, après avoir relevé que M. Le Berre "expose qu'il passait une journée chaque semaine dans l'entreprise, précisément pour rendre compte de sa mission", retient, par un motif adopté des premiers juges et non critiqué, que si M. Le Berre ne s'est pas acquitté de son obligation d'envoyer des rapports semestriels à son mandant, "il a, en revanche, entretenu des liens étroits" avec celui-ci et, par motifs propres, que "la remise de tels rapports ne lui a jamais été demandée et qu'il ne lui avait jamais été fait grief d'une absence de transmission desdits rapports, y compris lors de la rupture" ; qu'en l'état de ces constatations, la cour d'appel a pu estimer, sans encourir le grief du pourvoi, que la violation partielle de l'article 9 du contrat ne constituait pas "une faute du mandataire justifiant, au sens de l'article 3 du décret du 23 décembre 1958, la résiliation du contrat par le mandant" ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen ; - Attendu que la société PDA reproche encore à l'arrêt d'avoir, par infirmation partielle du jugement, élevé de 550 000 à 800 000 francs le montant de l'indemnité compensatrice du préjudice subi par M. Le Berre alors, selon le pourvoi, que l'arrêt ne pouvait d'office déclarer non écrit l'article 12 du contrat, retenu par le Tribunal, invoqué par la société PDA et non argué de nullité par M. Le Berre, sans inviter préalablement les parties à s'expliquer sur ce moyen ; qu'en s'en abstenant, l'arrêt, faussant ainsi son évaluation de l'indemnité compensatrice, a méconnu le principe de la contradiction et violé l'article 16 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que le moyen tiré de ce que M. Le Berre avait droit, nonobstant toute clause contraire, à une indemnité compensant exactement le préjudice consécutif à la rupture du contrat était dans le débat, ce dont il résulte que la cour d'appel n'a pas méconnu le principe de la contradiction ; que le moyen est sans fondement ;

Par ces motifs : rejette le pourvoi.