CA Paris, 4e ch. A, 6 septembre 1995, n° 94-006776
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Garage du Progrès (SA), Gery (ès qual.), Katz Sulzer (ès qual.)
Défendeur :
VAG France (SA), VAG Financement (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Duvernier
Conseillers :
Mmes Mandel, Marais
Avoués :
SCP Varin Petit, SCP Barrier Monin
Avocats :
Mes Denis, Spira, SCP Vogel.
Statuant sur les appels interjetés par la société Garage du progrès des jugements rendus les 12 juillet 1991 et 3 avril 1992 par le TGI de Paris dans des litiges l'opposant aux sociétés VAG France et VAG financement.
Faits et procédure :
Référence étant faite aux jugements entrepris pour l'exposé des faits, de la procédure et moyens antérieurs des parties, il suffit de rappeler les éléments essentiels suivants :
Depuis mars 1972, date de sa création, la société Garage du progrès a été concessionnaire de la marque " Volkswagen " en vertu de contrat successifs à durée déterminée d'une année, constamment renouvelés.
A compter de 1986 et pour respecter le règlement communautaire 123-85 VAG France a appliqué un contrat de concession à durée indéterminée.
Le 24 janvier 1990 fut signé entre Garage du progrès et VAG un nouveau contrat, à compter rétroactivement du 1er janvier 1990, précisant notamment :
- en son article II-2 que " le contrat peut à tout moment faire l'objet d'une résiliation ordinaire. La résiliation ordinaire est la faculté conférée à chaque partie de mettre fin au contrat sans devoir fournir aucun motif à l'autre partie ; chaque partie pourra procéder à la résiliation ordinaire de ce contrat par une notification adressée à l'autre partie par lettre RAR moyennant un préavis d'un an commençant à courir dès la réception de la notification ",
- en son article XV-2 que : " le contrat sera en outre résilié de plein droit avec effet immédiat et sans préavis, ni notification préalable lorsque cette sanction est déjà expressément prévue par une des dispositions contractuelles ainsi que dans l'un quelconque des cas ci-après énumérés ;
- protêts des effets de commerce ou chèques impayés ou non règlement de tout autre moyen de paiement accepté par le concessionnaire ".
Les relations entre les parties se sont déroulées normalement jusqu'en 1989.
A partir de mars 1989 VAG s'inquiète de la situation financière et comptable de son concessionnaire, plusieurs réunions ont lieu et les parties échangent plusieurs courriers.
Le bilan au 30 avril 1990 n'étant pas satisfaisant aux yeux de VAG, celle-ci demande au cours de l'été 1990 à Garage du progrès d'envisager diverses options et notamment la cession de la société.
Chaque partie convient de faire procéder à une évaluation de la société et de se rencontrer au plus tard en octobre pour arrêter une décision définitive quant à l'avenir des relations commerciales.
C'est dans ces circonstances que VAG procède par lettre recommandée avec avis de réception en date du 19 décembre 1990 à la résiliation ordinaire du contrat de concession avec un préavis d'un an expirant le 31 décembre 1991.
Pendant la durée du préavis de nouvelles difficultés vont naître entre les parties en ce qui concerne le montant de l'encours accordé à Garage du progrès, la constitution de cautions, divers impayés et le règlement à VAG de véhicules livrés à des clients.
Par lettre en date du 12 avril 1991 VAG constatant que le montant des créances impayés avait peu évolué compte tenu des nouveaux incidents de paiement survenus pendant cette période, et qu'à nouveau des châssis livrés à des clients n'avaient pas été réglés à VAG financement ou VAG France, décide de recourir à la résiliation immédiate du contrat de concession.
Garage du progrès assignait VAG en référé mais le juge des référés s'étant déclaré incompétent, Garage du progrès assignait VAG à jour fixe devant le TGI de Paris pour faire déclarer nulle la résiliation du 12 avril 1991.
Elle demandait que le contrat se poursuive jusqu'au 31 décembre 1991 dans les conditions résultant de l'échange de lettres des 4 et 15 mars 1991 et subsidiairement sollicitait la condamnation de VAG à lui payer pour rupture fautive du contrat une indemnité provisionnelle à valoir sur son préjudice à déterminer par expertise.
VAG et VAG financement laquelle intervenait volontairement concluaient au débouté de Garage du progrès et formaient une demande reconventionnelle en paiement de diverses sommes.
Le tribunal par jugement en date du 12 juillet 1991 après avoir retenu que la résiliation du 12 avril 1991 n'était pas intervenue dans des conditions abusives, a débouté Garage du progrès de ses demandes et avant dire droit sur les demandes reconventionnelles a ordonné une expertise aux frais avancés de VAG et VAG financement.
Garage du progrès a interjeté appel de ce jugement le 31 juillet 1991.
Par ailleurs Garage du progrès a introduit le 18 novembre 1991 une seconde procédure devant le Tribunal de grande instance de Paris aux fins de voir juger que le contrat de concession était un mandat d'intérêt commun qui ne pouvait être résilié unilatéralement sans indemnisation et qu'en tout état de cause VAG avait agi abusivement, ne s'était pas comportée de bonne foi en résiliant le contrat le 19 décembre 1990.
En conséquence elle sollicitait la condamnation de VAG à lui payer une indemnité provisionnelle à valoir sur son préjudice à déterminer par expertise et le bénéfice de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
VAG concluait au débouté de Garage du progrès.
Le tribunal par jugement en date du 3 avril 1992 retenant d'une part que Garage du progrès avait lors de la précédente procédure "t" nue pour valable et même convenue avec le constructeur la résiliation ordinaire " du contrat, d'autre part qu'elle n'alléguait avoir découvert depuis son acceptation de la résiliation " ordinaire " un élément nouveau qui caractériserait l'abus de droit de procéder à cette résiliation, l'a déboutée de toutes ses demandes.
Garage du progrès a interjeté appel de ce jugement le 25 mai 1992.
Par ordonnance en date du 28 septembre 1993 le conseiller de la mise en état a ordonné la jonction des deux procédures.
Par jugement en date du 21 décembre 1993 le Tribunal de commerce de Bobigny a ouvert une procédure simplifiée de redressement judiciaire à l'égard de Garage du progrès et a désigné Me Katz Sulzer en qualité de représentant des créanciers.
Celui-ci est intervenu à la procédure le 24 mai 1995.
Par jugement en date du 3 août 1994 le même tribunal a arrêté le plan de cession de Garage du progrès à la société Cogepar, désigné Me Gery commissaire à l'exécution du plan et maintenu Me Katz Sulzer comme représentant des créanciers.
Me Gery est intervenu à la présente procédure le 23 janvier 1995.
Dans le dernier état de ses écritures Me Katz Sulzer ès qualités reprenant l'ensemble des moyens soulevés par Garage du progrès demande à la Cour de :
- infirmer le jugement du 12 juillet 1991 et juger que la résiliation intervenue le 12 avril 1991 a revêtu un caractère manifestement abusif et fautif,
- vu l'article 1134 alinéa 3 du Code civil d'infirmer le jugement du 3 avril 1992 et de dire que VAG a causé un préjudice grave à Garage du progrès et à l'ensemble de ses créanciers,
- en conséquence condamner VAG France à payer une indemnité dont il laisse à la Cour le soin de fixer le quantum,
- condamner VAG à lui payer une somme de 10 000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Garage du progrès et Me Gery ès qualités demandent à la Cour de :
- infirmer le jugement du 12 avril 1991,
- juger nulle et de nul effet la résiliation unilatérale du 12 avril 1991,
- dire que VAG devra poursuivre l'exécution du contrat de concession jusqu'à son échéance contractuelle du 31 décembre 1991, et ce selon les termes et conditions du contrat tels qu'ils résultent des échanges de lettres des 4 et 15 mars 1991,
- subsidiairement dire que VAG a procédé à une résiliation unilatérale fautive du contrat et la condamner à lui payer à titre provisionnel la somme de 10 millions de francs à valoir sur son préjudice à déterminer par expertise,
- infirmer le jugement du 3 avril 1992,
- juger que VAG ne s'est pas comportée en cocontractant de bonne foi et s'est rendue coupable d'une faute délictuelle,
- condamner VAG France au paiement d'une part de la somme de 50 millions de francs à titre provisionnel et pour le surplus du préjudice ordonner une expertise, d'autre part d'une somme de 100 000 F en vertu de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,
- dire irrecevable toutes demandes en paiement de VAG France et VAG financement,
- constater qu'aucune demande en fixation de prétendues créances n'est formée,
- très subsidiairement et vu les déclarations de créance dire que toutes éventuelles demandes de ces sociétés seraient irrecevables
- pour VAG France au-delà de 5 404 090,58 F
- pour VAG financement au delà de 2 395 088,67 F
- dire et juger toutes autres éventuelles créances de ces sociétés éteintes,
- constater l'absence de déclarations de prétendues créances d'intérêts,
- à titre subsidiaire dire irrecevables toutes demandes tendant à la fixation d'une éventuelle créance d'intérêt postérieurement au 20 décembre 1993.
VAG France et VAG financement poursuivent la confirmation des deux jugements sauf en ce qu'une expertise a été ordonnée pour faire les comptes entre les parties.
Formant appel incident de ce chef, elles demandent, dans le dernier état de leurs écritures, à la Cour de fixer leurs créances à un montant de 5 404 090,58 F augmentée des intérêts légaux du 12 avril 1991 au 20 décembre 1993 pour VAG France et à un montant de 2 395 088,67 F augmentée des intérêts légaux pour la même période pour VAG financement.
Par ailleurs elles prient la Cour de déclarer irrecevables les prétentions nouvelles développées par les appelants dans leurs conclusions du 26 décembre 1994.
Enfin elles sollicitent paiement de la somme de 30 000 F HT en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Sur ce, LA COUR,
I- Sur les écritures du 26 décembre 1994 :
Considérant que les sociétés VAG font valoir que ces écritures en ce qu'elles développent des prétentions nouvelles par rapport à celles formulées par les demandeurs au principal en première instance sont irrecevables.
Mais considérant que si dans lesdites écritures les appelantes font valoir que la Commission Européenne a tout récemment notifié à VAG 17 griefs rendant son contrat type de concession non conforme aux normes communautaires, ils n'en tient aucune conséquence de droit quant à la validité du contrat signé par Garage du progrès.
Qu'ils se prévalent de ce moyen uniquement pour démontrer que les griefs formulés à l'encontre de VAG en ce qui concerne la résiliation du contrat de concession sont pertinents mais ne formulent aucune demande nouvelle.
Que le moyen soulevé par les sociétés VAG n'est donc pas fondé.
II- Sur la résiliation " ordinaire " :
Considérant que Garage du progrès fait valoir que cette résiliation présente un caractère abusif et n'a été dictée que par la volonté de VAG d'évincer M. et Mme Chemidling de la gestion de Garage du progrès et de faire procéder à la vente de celle-ci à un autre concessionnaire.
Qu'elle expose que si VAG avait eu à se plaindre, comme elle le soutient aujourd'hui, de la gestion du Garage du progrès, elle ne lui aurait pas attribué un prix " excellence " en récompense de sa dynamique de vente.
Qu'elle ajoute que VAG ne peut lui faire grief d'avoir vendu des véhicules hors du ressort territorial attribué dès lors que ce motif de résiliation n'avait pas été invoqué dans la lettre de résiliation.
Considérant enfin qu'elle se prévaut du fait que la Commission Européenne aurait fait " grief au contrat type de prévoir en son article XV de multiples hypothèses de résiliation vagues, discrétionnaires ou vénielles instituant une présomption de faute contractuelle du concessionnaire et pour VAG un droit discrétionnaire à résiliation ".
Mais considérant qu'en application de l'article II-2 du contrat VAG était en droit de le résilier avec un préavis d'un an.
Que s'agissant d'un contrat à durée indéterminée, le concédant est en droit d'y mettre fin sans donner de motifs mais à la condition que cette résiliation n'ait pas un caractère abusif.
Que le concédant se doit simplement de respecter l'obligation générale de loyauté édictée par l'article 1134 alinéa 3 du Code civil.
Qu'il importe donc peu que la Commission des Communautés Européennes ait relevé que le contrat comportait des motifs vagues et discrétionnaires de résiliation.
Considérant que les pièces mises aux débats révèlent certes, que Garage du progrès était un concessionnaire dynamique et performant, qui s'était vu attribuer en septembre 1990 une récompense pour le nombre de ses ventes de véhicules neufs.
Mais considérant qu'il n'en demeure pas moins que depuis 1989, VAG justifie avoir demandé à son concessionnaire de prendre les mesures nécessaires pour améliorer sa situation financière, avoir une comptabilité plus rigoureuse et s'abstenir de procéder à des ventes parallèles et hors concession (lettres du 15 mars et 25 mai 1989 ainsi que le 16 janvier 1990).
Qu'ultérieurement pas moins de quatre lettres furent adressées à Garage du progrès pour lui demander de cesser de vendre des véhicules hors de son secteur (lettres des 1er et 26 mars, 23 mai et 10 décembre 1990).
Qu'en ce qui concerne la situation financière, le bilan arrêté au 30 avril 1990 et adressé à VAG courant juillet 1990, ayant confirmé les craintes du concédant (résultat net - 347 000 F), il résulte de la correspondance échangée que les parties se sont rencontrées le 29 août 1990 et ont envisagé plusieurs options dont la cession de la société.
Que c'est manifestement dans cette optique que Garage du progrès a fait elle-même évaluer son fonds de commerce par le cabinet Parizot dont elle produit le rapport en date du 5 décembre 1990.
Que celui-ci relève notamment que l'entreprise connaît un mal d'exploitation, que les résultats sont obérés par un certain nombre de charges excessives ou un manque de production dans certains postes et que la situation financière de la société est difficile.
Que contrairement à ce que soutient Garage du progrès, les termes des lettres adressées par VAG courant 1990 n'exprimaient pas un sentiment de totale satisfaction mais étaient indéniablement de nature à inquiéter Garage du progrès sur la poursuite des relations contractuelles.
Qu'enfin il n'est pas démontré que VAG ait exercé de juillet à septembre 1990, des pressions sur Garage du progrès pour lui imposer un repreneur.
Que le fonds n'a été cédé qu'en 1994, dans le cadre de la procédure collective, à la société Sogepar et qu'il n'est établi ni que cette société ait été antérieurement pressentie par VAG ni même qu'elle ait conclu un contrat de concession avec cette dernière.
Considérant enfin que les premiers juges ont justement relevé que dans le cadre de la procédure relative à la résiliation " extraordinaire ", Garage du progrès n'avait pas contesté la validité de la résiliation intervenue le 19 décembre 1990.
Qu'en conséquence, en résiliant à cette date, avec un préavis d'un an le contrat de concession, VAG n'a pas agi par surprise et de manière abusive.
Que le jugement du 3 avril 1992 doit donc être confirmé en ce qu'il a débouté Garage du progrès de ses demandes de ce chef.
III- Sur la résiliation extraordinaire :
Considérant que Garage du progrès, Mes Gery et Katz Sulzer ès qualités critiquant le jugement du 12 juillet 1991, font valoir que la résiliation intervenue le 12 avril 1991 présente un caractère abusif et fautif aux motifs que :
- aucun préavis n'a été accordé,
- aucun motif de résiliation n'est visé dans la lettre du 12 avril 1991,
- VAG n'a plus envoyé les véhicules nécessaires au bon fonctionnement de la concession, n'a pas respecté les engagements qu'elle avait pris le 7 janvier 1991 et lui a imposé des conditions financières extrêmement lourdes et contraignantes dans le but de l'asphyxier et d'appréhender son fonds de commerce.
Considérant que VAG réplique que les conditions de mise en œuvre de l'article XV-2 du contrat de concession étaient réunies dès lors que Garage du progrès ne s'était pas conformée à ses propres obligations contractuelles notamment celles relatives aux conditions de paiement et à l'apport de garanties ;
Qu'elle précise qu'entre le 11 février et le 12 avril 1991 onze lettre de change étaient revenues impayées et qu'elle avait mis dès le 15 mars 1991 Garage du progrès en garde contre tout nouvel incident de paiement.
Qu'elle expose que si, à cette dernière date, elle a été contrainte de réduire l'encours, c'est en accord avec Garage du progrès.
Qu'elle ajoute que les appelants confondent les notions d'encours de crédit fournisseur et d'impayés.
Considérant qu'il convient tout d'abord de relever que la demande de Garage du progrès tendant à ce que le contrat se poursuive jusqu'au 31 décembre 1991 est devenue sans objet, ce terme étant dépassé.
Considérant ceci exposé qu'à juste titre les premiers juges ont rappelé que pendant la durée du préavis le contrat demeure en application aux mêmes conditions.
Qu'il en résulte qu'en cours de préavis et dès lors que les conditions en sont réunies la résiliation " extraordinaire " prévue à l'article XV-2 peut-être invoquée.
Considérant sur le moyen tiré de la pertinence des griefs de résiliation, qu'il appartient uniquement à la Cour de rechercher si les conditions d'application de la clause résolutoire étaient réunies, sans qu'elle puisse apprécier la gravité des manquements imputés au concessionnaire, étant au demeurant souligné que l'annulation du contrat n'a pas été sollicitée.
Considérant que le paragraphe 1 dudit article précise : " qu'en cas de carence d'une partie dans l'exécution de l'une quelconque des obligations énoncées au contrat, l'autre partie pourra le résilier par une notification par lettre recommandée avec effet immédiat si la partie coupable n'a pas mis fin ou remédié à l'infraction constatée dans un délai d'un mois suivant l'envoi d'une lettre recommandée dénonçant l'infraction et la mettant en demeure d'y remédier ".
Que le paragraphe 2 de cet article énonce notamment que le contrat " sera résilié de plein droit avec effet immédiat et sans préavis ni notification préalable dans l'hypothèse suivante : protêts des effets ou chèques impayés ou non règlement de toute autre moyen de paiement accepté par le concessionnaire ".
Considérant que par lettre du 12 avril 1991 VAG, constatant que le montant des créances impayées avait peu évolué compte tenu de nouveaux incidents de paiement et que des châssis avaient été livrés à des clients sans être réglés à VAG ou VAG financement, procédait à la résiliation immédiate du contrat.
Considérant sur le second motif de résiliation avec effet immédiat que l'article IV-4 " paiement " du contrat précise que :
" sauf stipulation contraire en particulier le régime des prêts, expositions, le concessionnaire doit s'acquitter au comptant (c'est à dire en espèces, chèque de banque ou certifié) du règlement de toute commande avant même sa remise à l'expédition par VAG ou lors de son enlèvement du parc ",
" toutefois le concédant se réserve de proposer par voie de circulaires applicables à l'ensemble du réseau, des modalités de règlement par traites, LCR, ou tout autre moyen de paiement dans des conditions et pour des produits contractuels précisément définis ".
Considérant que par lettre recommandée avec avis de réception en date du 11 février 1991, VAG faisait observer à Garage du progrès que neuf véhicules livrés n'avaient pas été soldés et qu'à défaut de régularisation de leur règlement au 13 février, elle résilierait immédiatement le contrat.
Considérant qu'en réponse Garage du progrès faisait principalement valoir ses difficultés financières mais ne régularisait pas la situation.
Considérant que le 15 mars 1991 VAG adressait une nouvelle mise en demeure à Garage du progrès d'avoir à régler un certain nombre de châssis livrés à des clients et insistait sur le fait que tout nouvel incident entraînerait la résiliation extraordinaire du contrat.
Considérant que Garage du progrès ne justifiant pas avoir réglé dans le mois de la mise en demeure, l'intégralité des châssis livrés à des clients, VAG était donc fondée pour ce motif à résilier immédiatement le contrat le 12 avril 1991.
Considérant sur l'autre motif de résiliation " extraordinaire " qu'il est établi qu'à la date du 12 avril 1991, onze lettres de change pour un montant total de 1 914 217 F étaient demeurées impayées à leur échéance.
Que cinq d'entre elles étaient exigibles depuis février 1991.
Que Garage du progrès n'a pas contesté sérieusement ce point mais a fait valoir dans sa lettre en réponse du 14 avril qu'un certain nombre de crédits, primes, garanties ne lui avaient pas été crédités sans justifier toutefois de leur exigibilité à cette date.
Considérant qu'ainsi que l'ont retenu les premiers juges l'encours de crédit fournisseur consenti par VAG à Garage du progrès ne permettait pas à cette dernière de laisser impayées des lettres de change à concurrence du montant de l'encours.
Que cet encours représente seulement le montant maximal des commandes que Garage du progrès était autorisée à passer, tout en continuant à bénéficier de 35 jours pour les véhicules neufs et à 55 jours pour les pièces détachées.
Que le non paiement à son échéance, d'une lettre de change émise dans le cadre précisément de cet encours, ne rentre pas dans les limites de celui-ci mais constitue un impayé au sens de l'article XV-2 du contrat.
Considérant que Garage du progrès ne peut pas soutenir que les conditions financières imposées par VAG ont eu pour effet de l'asphyxier et sont la manifestation d'une intention de nuire.
Considérant en effet que si après avoir accepté en janvier 1991 de lui consentir un encours fournisseur de 9 510 000 F, VAG l'a ramené en mars à 2 000 000 F, il apparaît que c'est parce que Garage du progrès avait tardé à fournir les cautions bancaires réclamées et que entre le 7 janvier et le 11 février 1991 VAG et VAG financement avaient enregistré le retour d'impayés pour plus de 2 millions de francs, somme qui n'a fait qu'augmenter ultérieurement.
Qu'il convient de relever que Garage du progrès était parfaitement consciente de la précarité de sa situation financière et qu'elle ne peut valablement soutenir que VAG a cherché à l'asphyxier en ne lui accordant qu'un encours de 2 millions.
Qu'en ce qui concerne les livraisons de véhicules, Garage du progrès ne produit aucune pièce établissant que des commandes n'aient pas été satisfaites.
Que s'agissant du paiement par LCR à 55 jours pour les pièces de rechange et à 35 jours pour les véhicules neufs, Garage du progrès n'établit pas avoir bénéficié de conditions plus favorables avant le 19 décembre 1990, observation étant faite qu'elle a elle-même sollicité ces conditions par lettre en date du 4 mars 1991.
Considérant que si les intimées n'avaient exigé de Garage du progrès aucun apurement de sa dette et avait maintenu un encours de 9 510 000 F, elles seraient vraisemblablement accusées aujourd'hui de soutien abusif d'une entreprise en difficulté.
Considérant que pour ces différents motifs, VAG était bien fondée à se prévaloir du bénéfice de l'article VX du contrat et à le résilier avec effet immédiat le 12 avril 1991.
Que le jugement du 12 juillet 1991 doit donc être confirmé en ce qu'il a débouté Garage du progrès de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour résiliation abusive.
IV- Sur les demandes de VAG et VAG financement :
Considérant que les sociétés VAG et VAG financement font valoir que c'est à bon droit que les premiers juges ont constaté que " la résiliation extraordinaire du contrat de concession avait pour effet de rendre exigible l'intégralité des créances détenues par VAG France conformément aux dispositions de l'article XVI-2 du contrat ainsi que les créances résultant de la résiliation des conventions connexes avec VAG financement " mais critiquent leur décision en ce qu'ils ont ordonné une expertise pour faire les comptes.
Que sur ce point, elles exposent qu'elles produisent des justificatifs et décomptes établissant que leurs créances respectives à l'encontre de Garage du progrès s'élèvent à 5 404 090,58 F et 2 395 088,67 F.
Qu'elles demandent dans le dernier état de leurs écritures à la Cour de fixer leurs créances à ces montants augmentés des intérêts légaux courus du 12 avril 1991 au 20 décembre 1993.
Considérant que Garage du progrès et les intervenants répliquent d'une part que toutes demandes de VAG et VAG financement tendant à la fixation du montant de leurs créances au-delà des sommes en principal susvisées seraient irrecevables, d'autre part que les créances d'intérêts sont éteintes, les déclarations de créances ne comportant aucune demande de ce chef.
Qu'à titre subsidiaire, ils soutiennent que le cours des intérêts seraient en tout état de cause arrêté au 20 décembre 1993, date d'ouverture de la procédure collective.
Considérant ceci exposé, que VAG et VAG financement justifient avoir les 10 février et 12 janvier 1994 déclaré leurs créances entre les mains de Me Katz Sulzer représentant des créanciers de Garage du progrès pour 5 404 090,58 F s'agissant de VAG et pour 2 395 088,67 F s'agissant de VAG financement.
Que la déclaration de VAG ne comporte aucune demande à titre d'intérêts au taux légal.
Que celle de VAG financement qui fait état d'une créance
privilégiée pour 108 369,84 F
chirographaire pour 1 776 719,95 F
garantie pour 509 998,88 F
comporte des intérêts de retard pour mémoire s'agissant de la créance garantie et des intérêts comptabilisés jusqu'en août 1993 en ce qui concerne la créance chirographaire.
Considérant que la déclaration de créance ne pouvant être faite pour une somme provisoire et devant contenir, en application de l'article 53 de la loi du 25 janvier 1985, le montant de la créance due au jour d'ouverture et les modalités de calcul des intérêts dont le cours n'est pas arrêté, il en résulte qu'à défaut en l'espèce de toute indication par VAG d'un calcul d'intérêts, celle-ci ne peut solliciter de fixation d'une créance de ce chef.
Que VAG financement fait exclusivement mention d'intérêts jusqu'en août 1993 (tableau impayés) est irrecevable à réclamer une fixation de créance d'intérêts au-delà de cette date.
Considérant en revanche que Garage du progrès, Mes Katz Sulzer et Gery ès qualités n'émettant de contestation ni sur les montants des créances en principal ni sur les décomptes et documents produits par VAG et VAG financement, il convient de fixer les créances de ces sociétés aux montants mentionnés ci-après au dispositif.
V- Sur l'article 700 du nouveau Code de procédure civile :
Considérant que Garage du progrès et Mes Katz Sulzer et Gery ès qualités qui succombent seront déboutés de leur demande de ce chef.
Considérant que l'équité commande d'allouer à VAG et VAG financement une somme de 20 000 F pour les frais hors dépens par elles engagés tant en première instance qu'en appel.
Par ces motifs : Donne acte à Me Katz Sulzer et Gery de leur intervention en qualité respectivement de représentant des créanciers et de commissaire à l'exécution du plan de Garage du progrès, Dit recevables les conclusions signifiées le 26 décembre 1994, Confirme le jugement du 3 avril 1992 en toutes ses dispositions, Confirme le jugement du 12 juillet 1991 sauf en ce qu'il a avant dire droit sur la demande reconventionnelle de VAG et VAG financement ordonné une expertise, Le réformant de ce chef et statuant à nouveau, Fixe la créance de VAG France au passif de Garage du progrès à la somme de : 5 404 090,58 F, Fixe la créance de VAG financement au passif du Garage du progrès à la somme de : 2 395 088,67 F, Déboute VAG et VAG financement du surplus de leurs demandes, Condamne Garage du progrès et Me Katz Sulzer et Gery ès qualités à leur payer une somme de 20 000 F en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens d'instance et d'appel; Admet la SCP Barrier Monin avoué au bénéfice de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.