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Décisions

CA Montpellier, 2e ch. A, 9 novembre 1995, n° 93-6930

MONTPELLIER

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Yves Delsart (SARL)

Défendeur :

Bodaine (Epoux)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Ottavy

Conseillers :

MM. Torregrosa, Prouzat

Avoués :

SCP Salvignol-Guilhem, SCP Capdebila-Gabolde

Avocat :

Me Delran.

T. com. Montpellier, du 2 nov. 1993

2 novembre 1993

Les faits, la procédure et les prétentions :

M. Bodaine était lié à la société Delsart par deux contrats d'agent commercial signé en 1981 et 1984.

Par jugement en date du 2 novembre 1993, le Tribunal de Commerce de Montpellier a homologué le rapport d'expertise de M. Jobert ordonné en référé et condamné la société Delsart à payer à M. Bodaine 167 417 F au titre des commissions restant dues et 511 000 F au titre de l'indemnité de clientèle.

La demande de dommages et intérêts de Mme Bodaine a été rejetée.

La société Delsart a relevé appel et sollicite l'infirmation du jugement susvisé dans toutes ses dispositions M. Bodaine sera déclaré irrecevable dans sa demande de paiement d'une indemnité de clientèle et sera condamné à rembourser à la SARL Delsart 105 095,98 F ; somme indûment perçue au titre des commissions.

Une somme de 100 000 F est réclamée à titre de dommages et intérêts au titre du préjudice commercial.

La société Delsart estime ne pas avoir résilié les contrats, la résiliation par le mandant constituant l'une des conditions du droit à l'indemnité de clientèle.

De nombreuses fautes ont été commises par M. Bodaine que la société Delsart aurait pu invoquer pour mettre fin aux contrats (conclusions du 24 mars 1994 et du 1er février 1995).

M. Bodaine et son épouse concluent à la confirmation avec allocation d'une somme de 50 000 F à titre de dommages et intérêts, outre 50 000 F au titre des frais irrépétibles.

Les calculs effectués par la société Delsart relativement aux commissions sont contestés.

Pour M. Bodaine, la Cour devra homologuer le travail précis et contradictoire de l'expert sur ce point.

Pour le reste, M. Bodaine n'avait nullement l'intention d'arrêter son activité d'agent commercial puisqu'il a du se faire radier de la liste des agents commerciaux lorsqu'il s'est rendu compte après plusieurs mois de commissions impayées et de tracasseries orchestrées que la société Delsart avait décidé de se débarrasser de lui. (conclusions du 27 octobre 1995 et du 1er août 1995) ;

Sur ce :

Sur l'indemnité de rupture :

Attendu que la loi du 25 juin 1991 prévoit au bénéfice de l'agent commercial une " indemnité compensatrice " en réparation du préjudice subi, en cas de " cessation de ses relations avec le mandant " ;

Attendu qu'il ne s'agit pas d'une indemnité de rupture ;

Attendu que l'article 13 de la même loi ne prévoit la perte de cette indemnité que dans trois cas :

- faute grave de l'agent commercial ;

- cessation du contrat résultant de l'initiative de l'agent, à moins que cette cessation ne soit justifiée par des circonstances imputables au mandant ;

- Cession du contrat d'agence à un tiers (non réalisée en l'espèce) ;

Attendu qu'il est donc sans portée juridique d'invoquer le fait que les contrats n'ont jamais été résiliés à son initiative, ainsi que le conclut la société Delsart, dès lors qu'il n'est pas contestable que les relations entre Delsart et Bodaine ont cessé ;

Attendu que seule la faute grave de Bodaine ou son initiative personnelle pour cesser les relations contractuelles peuvent lui faire perdre le bénéfice de l'indemnité compensatrice;

Attendu que dans ce cadre juridique reprécisé, il est certain que les termes de l'ordonnance de référé du 11 juin 1990 qui ne sont pas revêtus de l'autorité de chose jugée n'ont aucunement tranché au fond l'une ou l'autre de ces deux questions, la société Delsart (courrier du 26 juin 1990) se retranchant derrière la " perte de confiance " relevée par l'ordonnance et qui permettrait selon le juge de considérer que " les contrats d'agents commerciaux ont été rompus ", et M. Bodaine se faisant radier du registre spécial dès le 28 août 1990 ;

Attendu que par contre, les termes de l'assignation en référé reflètent l'argumentation de M. Bodaine et doivent être mis en perspective avec les deux seuls courriers qu'il a envoyés le 10 mai et le 12 mai 1990, malgré le nombre élevé de courriers dont Delsart justifie sur la période du 27 avril 1990 jusqu'au 26 juin et même ensuite :

Attendu qu'en effet, les courriers multiples de Delsart recoupent des griefs qu'il convient d'examiner à la lumière des éléments de réponse fournis, des pièces versées aux débats et des constatations de l'expert ;

Attendu qu'au delà des griefs ponctuels concernant l'exécution de tel ou tel marché précis, la SARL Delsart reprochait à Bodaine :

- de ne pas communiquer les coordonnées des sous-agents et de ne pas les présenter ;

- de ne pas faire mentionner le nom du représentant et sa signature sur le bon de commande (courrier du 27 avril 1990) ;

- de ne pas être joignable au téléphone ;

- de ne pas visiter personnellement les clients (courrier du 11 mai) et de ne pas vérifier la prospection des sous-agents (même courrier) ;

- de se contenter d'employer le téléphone (5 juin 1990) ;

- d'employer un VRP d'une entreprise tiers qui proteste (même courrier et courrier du 12 juin 1990) ;

- de pratiquer pour le compte de la maison Bodaine la vente d'articles fabriqués par la concurrence et similaires à ceux commercialisés par Delsart (courrier du 6 juin 1990 l'enjoignant d'y mettre fin) ;

- de s'abstenir de tout compte rendu (courrier du 13 juin 1990) ;

Attendu que les courriers du 15 juin 1990 et du 18 juin 1990 récapitulent ces griefs : absence de signature du représentant sur les commandes ainsi que du tampon, absence de compte-rendu de visites, absence de définition des projets, amalgame entre Monsieur et Madame Bodaine, activité de commandes d'articles issus de la symbolique militaire et capables de concurrencer les marchandises commercialisées par la société ;

Attendu qu'en regard de ces griefs qui ont été repris devant l'expert, M. Bodaine a envoyé deux courriers dont la teneur n'est pas du tout la même ;

Attendu qu'il a dans un premier temps (courrier du 10 mai 1990) pris l'engagement de visiter personnellement un certain nombre de clients dont il a fourni la liste, et abandonné les autres clients (dont " vous pourrez disposer ") puis questionné Delsart sur des points techniques ;

Attendu qu'il ne peut se déduire de ces termes que M. Bodaine considérait le 10 mai 1990 qu'il ne pouvait plus assumer ses mandats, ses engagements allant bien plus dans le sens d'une restructuration acceptée ;

Attendu que M. Bodaine reconnaît implicitement mais sûrement qu'il ne visitait plus personnellement les clients de la liste qu'il a lui même fournie, la logique voulant que pour les autres secteurs qu'il abandonnait à Delsart la situation était la même et qu'il n'y avait plus d'intérêt pour lui à reprendre les visites ;

Attendu que dans le second courrier du 12 mai 1990, M. Bodaine n'adopte plus du tout le même ton, certainement à cause des termes de la lettre Delsart du 11 mai lui demandant de stopper le recrutement de représentants sur la France et de cesser les tournées Desanzani et Anne ;

Attendu que M. Bodaine en tire la conclusion qu'il ne lui reste plus de secteur suffisant (" que me reste-t-il ? ") entre ceux qu'il a abandonnés (courrier du 10 mai) et ceux qu'ils considère que Delsart lui retire ;

Attendu que dans ce courrier, M. Bodaine répond par ailleurs aux différents griefs articulés par Delsart et les conteste, mais joint une liste de commandes tout en estimant " qu'il y a des procédés plus corrects en me disant franchement votre désir de me voir partir " ;

Attendu qu'après ce courrier, M. Bodaine a assigné en référé (5 juin 1990) à propos de commission non payées, mais n'a pas pour autant indiqué qu'il considérait que les relations étaient rompues, exposant que

" devant une telle situation particulièrement confuse et du seul fait de la société Delsart, (il) est bien fondé dans l'attente de la position qui sera prise par (Delsart) quant à une éventuelle rupture du contrat de mandat qui lui incombera en totalité...

de solliciter une expertise ;

Attendu qu'il peut se déduire avec certitude de l'échange de courriers qu'à la date du 10 mai 1990, M. Bodaine agissait comme si, prenant bonne note des griefs relatifs aux sous-agents, il acceptait de continuer les visites personnelles sur un secteur réduit (mais choisi par lui) et abandonnait explicitement les autres secteurs à son mandant ;

Attendu que ce n'est que le 12 mai qu'apparaît par écrit l'impossibilité de continuer sur un secteur trop réduit (" que me reste-t-il "), M. Bodaine interprétant l'abandon exigé des tournées de certains sous-agents comme un retrait unilatéral de leurs secteurs à son détriment, grief qui - assez paradoxalement- n'est pas repris dans l'assignation en référé dont il a été motivé supra la prudence des termes, y compris sur l'existence de la rupture du contrat ;

Attendu qu'il peut donc être affirmé, lorsque l'on sait au surplus de certaines commandes ont été réalisées après le 5 juin 1990, que la preuve n'est pas rapportée de circonstances imputables au mandant qui ont justifié la cessation du contrat par l'agent commercial, eu égard à l'imprécision de l'argumentation et à l'incohérence de l'attitude de M. Bodaine entre le 10 mai et le 5 juin 1990, référence faite au caractère constant des griefs formulés par Delsart à compter du 27 avril ;

Attendu que ni la commande Marchandeau ni le rapport Philippart ne suffisent à démontrer une stratégie d'éviction ;

Attendu que la commande Marchandeau du 29 mai 1990 a fait l'objet d'une commission payée à Bodaine (CF expertise), la première protestation de ce dernier étant adressée à Marchandeau et non à Delsart à l'encontre duquel la preuve n'est par rapportée d'un ordre de prospection donné en mai 1990, l'expert précisant que les clients n'ont été avertis du changement d'agent que le 27 juin 1990 ;

Attendu que le rapport Phillipart dont les termes sont reprochés à Delsart ne concernait que le secteur de l'Est qui ne relève pas de Bodaine (à l'exception de Montbeliard), la restructuration projetée avec Marchandeau ne concernant donc pas obligatoirement l'exclusivité de Bodaine lorsque le rapport a été rédigé ;

Attendu qu'il est significatif que ce rapport nécessairement rédigé après le 14 juin 1990 ( les tournées ont eu lieu avant ces dates) reprend les griefs articulés dans des courriers antérieurs à l'encontre de Bodaine, et qui tous se ramènent à une nécessaire reprise en mains de la clientèle par une prospection plus claire et plus régulière ;

Attendu que sur ce point précis qui constitue en réalité le noeud du litige et la raison de la perte de confiance, les expertises réalisées démontrant objectivement la légitimité de Delsart à s'inquiéter auprès de Bodaine à partir d'Avril 90, et l'irrespect par ce dernier de certaines clauses contractuelles précises compatibles avec son statut d'agent commercial ;

Attendu que l'expertise établit sans conteste une baisse de 7 % du chiffre des commandes de Bodaine sur la période Janvier Mai 1990 comparée à la même période 89 ;

Attendu que ce premier phénomène s'est doublé en Avril 1990 d'une baisse de 46,47 % du chiffre Bodaine par rapport à Avril 89, ce qui a donné lieu à un rapport du directeur de fabrication en date du 4 mai 1990 qui n'a pu être rédigé à l'évidence dans le cadre d'une stratégie d'éviction évoquée dans les conclusions de M. Bodaine ;

Attendu que cette baisse anormale nécessitait à l'évidence une réaction commerciale et légitimait les demandes pressantes de Delsart, dès lors que ces demandes étaient conformes au statut d'agent commercial et respectaient les contrats passés entre les parties, qui font leur loi et dont l'examen recèle en définitive la clef du présent litige ;

Attendu qu'en effet, et quel que soit le mode d'exécution passé des conventions, l'agent commercial ne saurait, en cas de difficultés commerciales et lorsque la demande lui en est faite explicitement, se refuser à satisfaire à l'obligation de renseignements qui est la sienne dans le cadre du mandat d'intérêt commun auquel il est astreint ;

Attendu qu'à cet égard, le premier contrat ne prévoyait rien à propos des sous-agents, le second, qui augmentait le secteur prospecté considérablement, indiquait la possibilité d'emploi de sous-agents, souhaitant " qu'ils soient présentés dans un simple souci de relations humaines ";

Attendu que ce deuxième contrat spécifiait en son article 3 " en sa qualité de représentant mandataire, M. Bodaine exercera son activité en toute indépendance. Cependant, afin de faciliter la gestion informatisée de la fabrication ainsi que le suivi de la clientèle, il lui sera demandé de tenir informé la société Delsart, en fin de chaque mois, du bilan du mois écoulé et des activités prévues pour le mois suivant, chaque client devant être visité au minimum une fois par bimestre, cette périodicité étant jugée par M. Bodaine compatible avec le caractère d'indépendance de son mandat... ",

Attendu que le premier contrat prévoyait déjà dans son article 3 :

" Il est toutefois convenu que M. Bodaine adressera néanmoins à M. Delsart des comptes rendus sur son activité à la fin de chaque trimestre civil, cette périodicité étant jugée par M. Bodaine compatible avec le caractère d'indépendance de l'exercice de son mandat. "

Attendu que l'expertise établit clairement qu'aucun compte rendu n'a été établi, que la société Delsart a été tenue dans l'ignorance des coordonnées et conditions d'emploi exactes des sous-agents, de leur secteur d'activité ;

Attendu que si la société Delsart ne pouvait exiger de diriger la prospection de Bodaine, il n'en demeure pas moins que ce dernier s'était engagé à rendre compte de l'activité qu'il restait libre d'organiser, et qu'il a jugé compatible cette obligation avec son statut ;

Attendu que ni le caractère nouveau des exigences de Delsart, dès lors qu'elles sont contractuellement prévues, ni les visites " amicales " à Sens, ne peuvent expliquer que M. Bodaine ai totalement omis de rendre compte malgré les rappels ;

Attendu qu'ainsi sont restées inexpliquées quoique établies l'importance des commandes téléphoniques, l'emploi du VRP d'une société tiers, l'absence d'apposition du cachet de la signature des clients sur les bons de commandes, l'emploi irrégulier de M. Desenzani ;

Attendu que l'expertise a établi que des sous-agents avaient été employés en 1989, M. Bodaine n'ayant donc pas produit devant l'expert les bulletins de paye versés au dossier de Mme Anne, Gatineau et Mlle Bodaine qui cessent en Avril 1990 ;

Attendu que malgré les paiements de frais d'autoroute dont il est justifié, l'on peut s'interroger sur l'adéquation entre les nombre de sous-agents - surtout à partir de fin 1989 et l'ampleur du secteur à prospecter ;

Attendu que l'ensemble de ces imprécisions ne fait qu'ajouter à l'irrespect du contrat sur ce point, l'explication fournie dans le courrier du 12 mai 1990 de M. Bodaine ne valant nullement preuve de comptes rendus loyaux et motivés par l'intérêt commun des deux partenaires ;

Attendu qu'il n'est pas superflu d'ajouter à cet égard que sont fournis en même temps au dossier un bulletin de salaire de Mlle Bodaine pour mars 1990, et la preuve de commandes passées par elle pour le concurrent Ballard le 29 août 1990, relative au marché annuel de 1990 (foyer du soldat 67RI Soissons, secteur de M. Bodaine) ;

Attendu que même si Mlle Bodaine est majeure et agit en n'engageant que sa personne, il convient de rappeler que M. Bodaine son père s'est engagé " à s'interdire... de représenter ou de s'intéresser directement ou indirectement à des maisons fabriquant ou vendant des articles similaires ou susceptibles de concurrencer ceux de M. Delsart... " (contrat de 1981) et qu'il " s'interdit formellement toute activité se rapportant la fabrication ou à la commercialisation de tous articles susceptibles de concurrencer ceux dont la représentation lui est ici concédée " (contrat de 1984);

Attendu que face aux demandes précises de Delsart sur ce deuxième volet des griefs, il est certain que les résultats de l'expertise de l'activité de Mme Bodaine ont établi qu'il s'agissait pour elle de vendre aux mêmes clients (foyers de soldats) des articles de fantaisie, mais aussi des articles de la symbolique militaire ;

Attendu qu'il est vrai que la société Delsart a vendu certains articles à Mme Bodaine et ne pouvait donc ignorer son activité ;

Attendu qu'il n'en demeure pas moins que M. Bodaine n'a pas véritablement répondu au reproche précis évoqué sur ce point par le courrier Delsart du 20 avril 1990 et n'a pris aucun engagement, et qu'il serait naïf de ne pas mettre en perspective sa cessation des relations contractuelles avec Delsart en juin 1990, l'activité de son épouse dès 1988 (qui prospectait pour elle ?), celle de sa fille en qualité de sous-agent jusqu'en mars 1990, le passage de cette dernière à la concurrence à une date non précisée au dossier mais qui n'a pas été postérieure à Août 1990, et la création en Juillet 1993 d'une société familiale Bodaine où Mlle Bodaine a apporté en nature " une carte d'exclusivité-vente d'insignes pour le compte des Etablissements Ballard " ;

Attendu quereplacée dans un tel contexte, il est clair que la thèse d'une stratégie d'éviction de M. Bodaine n'est pas prouvée et laisse entières les fautes commises par Bodaine en ne donnant aucun compte rendu de son activité alors que la société connaissait une baisse anormale de son chiffre d'affaires, en employant de façon irrégulière ou pouvant prêter à confusion des sous-agents aux identités et attributions qui n'ont pas été clarifiées y compris lors de l'expertise, et en ne faisant pas visiter de façon irrégulière telle que prévue au contrat la clientèle ;

Attendu que ce faisceau de fautes, qui n'a pas fait l'objet de reproches tant que la conjoncture était favorable, a acquis un caractère de gravité dès lors que M. Bodaine, averti d'avoir à respecter ses obligations, a pris certains engagements (lettre du 10 mai) pour finalement préférer une stratégie de rupture en invoquant une impossibilité de continuer son mandat qui ne résiste pas à l'examen du dossier;

Attendu qu'il y a donc lieu de retenir la faute grave de M. Bodaine, la Cour ayant au surplus motivé sur l'initiative qui a été la sienne d'opter pour une stratégie de rupture (malgré les termes de son courrier du 10 mai) qui n'était nullement motivé par des circonstances imputables au mandant;

Attendu qu'il convient en conséquence de réformer le jugement initial en jugeant que M. Bodaine a perdu son droit à toute indemnité de rupture ;

Sur les commissions :

Attendu que l'expert a porté à ce titre au crédit de Bodaine la somme de 167 422,60 F ,

Attendu que les arguments tirés de conditions préférentielles, de livraisons directes à des revendeurs, de la rétention de collections ne résistent pas à l'examen du dossier dépourvu sur ce volet de toute pièce probante à valeur certaine ;

Attendu que par contre, M. Bodaine indique par voie de conclusions avoir réglé les factures 900-67 et 900-592 qu'il reconnaît par conséquent ;

Mais attendu que la preuve de ces paiements n'apparaît pas au dossier ; qu'il convient donc de faire droit à la demande de compensation ;

Attendu que la somme due par les Etablissements Delsart est donc égale à 167 422,50 F moins les deux factures de 355,80 F et 18 587,59 F, soit 148 479,21 F ;

Sur les demandes annexes :

Attendu que le fondement précis de la demande de dommages et intérêts à l'encontre de Bodaine n'est pas suffisamment caractérisé ; qu'il en est de même pour la demande adverse ;

Attendu qu'il n'apparaît pas équitable de faire application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile pour l'une ou l'autre partie ;

Attendu que les dépens de première instance de référé et d'expertise ont été normalement mis à la charge de Delsart, puisqu'en tout hypothèse l'expertise était justifiée par le problème des commissions qui étaient dues ;

Attendu que l'appel se révèle justifié à titre principal, pour ce qui concerne l'indemnité de rupture ; que les dépens d'appel seront donc à la charge de M. Bodaine ;

Attendu qu'il n'est ni fondé ni équitable de confirmer la condamnation à payer des frais irrépétibles à Mme Bodaine ;

Par ces motifs : LA COUR, statuant publiquement et contradictoirement, Déclare l'appel recevable ; Y faisant droit partiellement, réforme le jugement initial en ce qu'il a condamné la société Delsart à payer à M. Bodaine une indemnité de 511 000 F et rejette toute demande de M. Bodaine sur ce point, Réforme le jugement initial en ce qu'il a condamné la société Delsart à payer des frais irrépétibles à Mme Bodaine ; Confirme le surplus, sauf à minorer le montant de la condamnation due au titre des commissions par la société Delsart qui est fixée après compensation à 148 479,21 F ; Dit que toute provision versée sera déduite du montant de cette condamnation ; Condamne M. Bodaine aux dépens d'appel qui seront recouvrés par application de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.