Livv
Décisions

CA Lyon, 3e ch., 22 décembre 1995, n° 95-00571

LYON

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Guépin (ès qual.), Walczak (ès qual.)

Défendeur :

Dubois (ès qual.)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Karsenty

Conseillers :

M. Durand, Mme Martin

Avoués :

SCP Junillon-Wicky, SCP Aguirand

Avocats :

Mes Jakubowicz, Legrand.

T. com. Lyon, du 10 janv. 1995

10 janvier 1995

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

En 1990, la société Studio Création aux droits de laquelle est venu ultérieurement la société Clémentine Création, a consenti aux Sociétés Chloé Passion, Chloé Option et Chloé Annecy, toutes animées par les mêmes dirigeants, un contrat de franchise portant sur la vente au détail de vêtements de prêt-à-porter féminin de luxe.

Par jugement en date du 10 août 1993, le Tribunal de Commerce de Lyon a constaté l'état de cessation des paiements de la Société Clémentine Création et a prononcé l'ouverture d'une procédure de redressement puis de liquidation judiciaire.

Maître Dubois a été désigné aux fonctions de liquidateur de ladite société.

Par ordonnance en date du 9 septembre 1993, Madame le Juge-Commissaire de la liquidation judiciaire, a autorisé la cession du stock et du matériel dépendant de la SA Clémentine Création à la Société JM Actifs pour la somme de 2 500 000 F.

Le 8 octobre 1993, les Sociétés Chloé Passion, Chloé Option, Chloé Annecy faisaient par huissier restituer à la Société JM Actifs l'intégralité des stocks Clémentine et dans le même temps déclaraient au passif de la liquidation judiciaire de Clémentine Création des créances représentant la restitution de ce stock à concurrence de :

- 223 813,61 F pour Chloé Passion

- 256 712,76 F pour Chloé Annecy

- 72 306,86 F pour Chloé Option

La société JM Actifs faisait restituer les marchandises aux Sociétés Chloé qui les refusaient.

Maître Dubois rejetait les déclarations de créance et par ordonnances du 10 janvier 1995, le Juge-Commissaire rejetait l'opposition formée par les Sociétés Chloé.

Maître Walczak, liquidateur des Sociétés Chloé Passion et Chloé Option a relevé appel de ces décisions.

Maître Guepin, liquidateur de la Société Chloé Annecy, a relevé appel de l'autre décision.

Il soutient que la Société JM Actifs a tenté d'imposer des modalités de règlement des factures totalement différentes de celles convenues avec la Société Clémentine Création, dans le cadre du contrat de franchise de sorte qu'il n'a pas été possible de poursuivre ce contrat, ce qui a entraîné la restitution du stock, conformément aux stipulations contractuelles (article 12) ; que les marchandises ont été acceptées sans réserve par la Société JM Actifs, laquelle ne les a pas restituées aux Sociétés Chloé ; qu'ainsi les créances doivent être admises au passif de la Société Clémentine Création.

L'appelant conclut à l'admission des créances des Sociétés Chloé au passif de la liquidation judiciaire pour les sommes déclarées et sollicite la somme de 10 000 F au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Maître Dubois, es-qualité, conclut à la confirmation des décisions entreprises et sollicite la somme de 15 000 F au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Il soutient que les contrats de franchise n'ont jamais été résiliés ni par lui-même ni par les Sociétés Chloé ; que l'intention des parties était de poursuivre les contrats sinon la Société JM Actifs ne se serait pas engagée à racheter le stock et le matériel de Clémentine Création pour 2 500 000 F et le Juge-Commissaire n'aurait pas mis à la charge du repreneur l'obligation d'honorer les commandes en cours et de livrer les clients de Clémentine Création.

Maître Dubois considère qu'à supposer la résiliation acquise au jour du jugement déclaratif de liquidation judiciaire, le 10 août 1993, le délai contractuel d'expiration du contrat était le 25 août 1993 alors que la restitution a été faite le 8 octobre 1993.

Il soutient que la restitution ne pouvait être faite auprès de JM Actifs car le stock repris n'incluait pas des restitutions de marchandises ; que celle-ci ne pouvait accepter le coup de force qui lui était imposé par les Sociétés Chloé qui ont tenté, à bon compte, de se débarrasser de marchandises invendues ; que selon le contrat, la réclamation ne pourrait porter que sur 50 % du prix d'achat.

MOTIFS ET DECISION

Attendu qu'il est de l'intérêt d'une bonne justice d'ordonner la jonction des instances pour les juger ensemble ;

Attendu que par ordonnance du 2 septembre 1993, le Juge-Commissaire a autorisé le liquidateur à céder le stock de la Société Clémentine Création au repreneur la Société JM Actifs afin notamment d'approvisionner les franchisés ;

Attendu que le contrat de franchise stipule que le contrat pourra être résilié de plein droit dans le cas de redressement judiciaire ou liquidation judiciaire, ou d'inexécution par l'une des parties de l'une quelconque de ses obligations auquel cas la résiliation interviendra quinze jours après la mise en demeure restée infructueuse ;

Attendu que les Sociétés Chloé qui ont poursuivi le contrat après la liquidation judiciaire se sont prévalu du manquement par la Société JM Actifs de ses obligations quant aux conditions de paiementet ont, le 9 septembre 1993, mis fin au contrat de franchise en demandant à Maître Dubois où et à qui la marchandise devait être remise ; demande réitérée le 21 septembre 1993 ;

Attendu que le contrat de franchise stipule que l'expiration du contrat entraînera la restitution de l'intégralité des stocks réglés ou non réglés dans un délai de quinzaine à dater de la date d'expiration ;

Que dès lors les Sociétés Chloé étaient fondées à restituer leur stock ;

Attendu que dans un courrier du 8 septembre 1993, Maître Dubois a indiqué aux Sociétés Chloé qu'apprenant qu'elles n'entendaient pas lui régler les sommes qu'elles devaient, leur a indiqué qu'elles pouvaient adresser le stock à la Société JMA 302 rue Garibaldi à Lyon ; que les 7 et 10 octobre 1993 les Sociétés Chloé ont remis, sous le contrôle d'un huissier de justice, les marchandises à la Société JM Actifs 26 rue du Plat à Lyon et ont informé Maître Dubois de cette restitution le 4 novembre 1993 ;

Attendu que le 9 décembre 1993, la gérante des Sociétés Chloé a refusé le retour des marchandises représentées par la Société JM Actifs en présence d'un huissier de justice ;

Attendu que les marchandises ayant été restituées conformément aux dispositions stipulées dans le contrat de franchise les créances des Sociétés Chloé doivent être admises à titre chirographaire au passif de la Société Clémentine Création;

Attendu que Maître Walczak ne conteste pas que les marchandises restituées concernaient la saison été 1993 qui était terminée ; qu'ainsi conformément au contrat de franchise les marchandises ne peuvent être reprises que pour 50 % du prix d'achat ;

Attendu que dans ces conditions, les créances des Sociétés Chloé seront admises pour les montants suivants :

- Chloé Passion : 111 906 F

- Chloé Option : 36 153 F

- Chloé Annecy : 94 356 F

Attendu qu'il n'est pas inéquitable de laisser aux parties la charge des frais non compris dans les dépens qu'elles ont exposés ,

Par ces motifs, LA COUR, Ordonne la jonction des procédures 95-571, 95-617 et 95-618 ; Admet au passif de la liquidation judiciaire de la Société Clémentine Création à titre chirographaire : - la créance de la Société Chloé Passion pour 111 906 F - la créance de la Société Chloé Option pour 36 153 F - la créance de la Société Chloé Annecy pour 94 356 F ; Rejette les demandes d'application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ; Condamne Maître Dubois, es-qualité, aux dépens de la première instance et d'appel avec droit de recouvrement direct au profit de la SCP Junillon et Wicky, Avoués.