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Décisions

Cass. com., 25 juin 1996, n° 94-15.322

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Interbrew France (SA)

Défendeur :

Gurrieri (Époux)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bézard

Rapporteur :

M. Grimaldi

Avocat général :

Mme Piniot

Avocats :

SCP Ryziger, Bouzidi, SCP Waquet, Farge, Hazan.

T. com. Romans, du 27 mai 1992

27 mai 1992

LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt déféré (Grenoble, 28 mars 1994), que M. et Mme Gurrieri ont conclu, le 10 janvier 1985 et pour une durée de neuf années, un contrat d'approvisionnement exclusif avec la brasserie Sébastien Artois qui, en contrepartie, leur a fait consentir un prêt bancaire qu'elle a cautionné ; que, le 20 juillet 1989, ils ont cédé leur fonds de commerce, en omettant d'imposer au cessionnaire le maintien du contrat d'exclusivité, et remboursé le prêt ; que la société Interbrew France (société Interbrew), venant aux droits de la brasserie Sébastien Artois, a formé opposition sur le prix de vente du fonds pour avoir paiement de l'indemnité de rupture de contrat qu'elle prétendait lui être due et qui était garantie par un nantissement pris sur le fonds ;

Sur les premier et deuxième moyen, ce dernier pris en ses deux branches, réunis : - Attendu que la société Interbrew reproche à l'arrêt d'avoir ordonné la mainlevée de l'opposition et de l'inscription du nantissement alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'il résulte des stipulations contractuelles que l'engagement d'approvisionnement exclusif pris par les époux Gurrieri avait pour cause l'octroi d'un prêt par le Crédit lyonnais, prêt qui a été consenti, la société Interbrew s'étant portée caution des époux Gurrieri ; qu'ayant constaté que la contrepartie du contrat d'exclusivité résidait dans les avantages financiers obtenus par le client, en l'espèce, l'octroi d'un prêt du Crédit lyonnais, la cour d'appel qui, en l'état de ces constatations, décide que, dans la mesure où le prêt était remboursé par anticipation, il est certain que la contrepartie acceptée par les emprunteurs n'avait plus de cause, les époux Gurrieri par l'effet de l'extinction de la dette et du cautionnement étant déchargés à l'égard de la société Interbrew de leur engagement d'approvisionnement exclusif, n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations, d'où il résultait que la société Interbrew avait exécuté son engagement et que le contrat était donc causé, et par là même a violé les articles 1131 et suivants du Code civil ; alors, d'autre part, qu'il résulte de la convention que " le client se fournira soit auprès de la brasserie, soit auprès de tel entrepositaire qui lui sera désigné " ; que la société Interbrew faisait valoir que les époux Gurrieri, suite à la liquidation judiciaire de la société Chabeuil Boissons, n'avaient jamais fait part de leurs difficultés d'approvisionnement cependant qu'aux termes du contrat il était stipulé une option laissant le choix aux époux Girrieri de se fournir auprès de la société Interbrew ou de la société Chabeuil Boissons, distributeur désigné au contrat ; qu'en considérant qu'il résultait du contrat que la fourniture devait s'effectuer auprès du dépositaire désigné par la société Sébastien Artois, celle-ci, après que la société Chabeuil Boissons ait cessé ses livraisons en raison de la procédure collective dont elle faisait l'objet n'ayant pas désigné d'autre dépositaire aux époux Gurrieri, contrairement à la convention ci-dessus, la cour d'appel, qui n'a pas pris en considération le fait que les époux Gurrieri pouvaient s'approvisionner auprès de la société Interbrew comme stipulé au contrat, a violé l'article 1134 du Code civil ; et alors, enfin, qu'il résulte de la convention que le client se fournira aurpès de la société Interbrew soit auprès de tel entrepositaire qui lui sera désigné ; que la société Interbrew faisait valoir que les époux Gurrieri suite à la liquidation judiciaire de la société Chabeuil Boissons n'avaient jamais fait part de leurs difficultés d'approvisionnement, cependant qu'aux termes du contrat il était stipulé une option laissant le choix aux époux Gurrieri de se fournir auprès de la société Interbrew ou de la société Chabeuil Boissons, distributeur désigné au contrat; qu'en ne recherchant pas si les époux Gurrieri avaient sollicité la société Interbrew afin d'être approvisionnés conformément au contrat, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil ;

Mais attendu qu'après avoir stipulé une option pour M. et Mme Gurrieri à s'approvisionner " soit auprès de la brasserie, soit auprès de tel entrepositaire " qui leur sera désigné, le contrat ajoute que la brasserie désigne " pour l'exécution du présent contrat " la société Chabeuil Boissons; qu'en l'état de l'ambiguïté créée par le rapprochement de ces termes, la cour d'appel a souverainement estimé que M. et Mme Gurrieri devaient s'approvisionner auprès de la seule société Chabeuil Boissons; qu'ainsi, abstraction faite des motifs erronés mais surabondants critiqués par la première branche, la cour d'appel a légalement justifié sa décision; que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ces trois branches ;

Et sur le troisième moyen : - Attendu que la société Interbrew reproche encore à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer à M. et Mme Gurrieri la somme de 10 000 francs à titre de dommages-intérêts alors, selon le pourvoi, que ces derniers, comme le constate l'arrêt, sollicitaient l'allocation de la somme de 5 000 francs à titre de dommages-intérêts ; qu'en condamnant cependant la société Interbrew à payer la somme de 10 000 francs à M. et Mme Gurrieri pour avoir maintenu abusivement le nantissement et l'opposition formée entre les mains du notaire, la cour d'appel a méconnu les termes du litige et violé les articles 4 et 5 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu, dès lors que la société Interbrew reproche à l'arrêt d'avoir accordé à M et Mme Gurrieri plus qu'il n'a été demandé, il lui appartenait de présenter requête à la juridiction qui a statué, dans les conditions prévues aux articles 463 et 464 du nouveau Code de procédure civile ; que le moyen est donc irrecevable ;

Par ces motifs, rejette le pourvoi.