CA Lyon, 3e ch., 13 septembre 1996, n° 94-02278
LYON
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Nouvelle La Sweaterie (Sté)
Défendeur :
Veyre (Époux), Belat (ès qual.)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Karsenty
Conseillers :
Mmes Martin, Robert
Avoués :
SCP Junillon Wicky, SCP Dutrievoz
Avocats :
Mes Flaugere, Serfaty.
FAITS, PROCEDURE, PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Le 17-05-1985 la société La Sweaterie a signé avec M. Francisque Veyre un contrat de franchise dans le cadre de l'exploitation d'un commerce de vêtements à Bourg-en-Bresse.
Suite à la mise en redressement de la société La Sweaterie le 19-10-1988 le contrat a été poursuivi par le repreneur de la Société Nouvelle La Sweaterie du groupe Alain Manoukian ;
Se prévalant des manquements répétés de cette société aux obligations découlant du contrat M. Veyre a cessé toute relation avec elle à compter de décembre 1991 et procédé à la mise en vente de son fonds de commerce ;
Se prétendant alors titulaire envers ce dernier d'une créance d'un montant de 483 883,12 F la société nouvelle La Sweaterie a fait opposition le 04-11-1992 sur le prix de cession du fonds ;
Saisi en mainlevée de cette opposition le juge des référés du Tribunal de Commerce de Bourg-en-Bresse a renvoyé les parties devant le tribunal que la société La Sweaterie avait parallèlement saisi par exploit délivré le 22-12-1992 aux époux Veyre aux fins de les voir condamner au paiement de la somme de 460 548 F à laquelle elle a définitivement arrêté sa créance ;
Par jugement en date du 14-01-1994 le tribunal, après avoir joint les deux instances, a prononcé la mise hors de cause de Mme Veyre, étrangère au contrat de franchise, prononcé la nullité du contrat de franchise pour non-respect des exigences légales en matière d'approvisionnement exclusif, condamné en conséquence la société La Sweaterie à rembourser à M. Veyre la somme de 142 698,22 F au titre des royalties indûment payées, celle de 71 160 F au titre de la redevance initiale et celle de 27 216,29 F au titre de sa participation aux campagnes publicitaires, le tout assorti des intérêts au taux légal à compter du jugement et augmenté d'une indemnité de procédure de 5 000 F ;
La Société Nouvelle La Sweaterie a relevé appel de ce jugement et déposé des conclusions tendant à sa réformation aux motifs :
- que le tribunal a rejeté sa demande en paiement sans exposer les motifs justifiant cette décision ;
- qu'il n'avait pas à mettre Mme Veyre hors de cause alors qu'elle est bénéficiaire du contrat de franchise et que c'est en cette qualité qu'elle a été placée en liquidation judiciaire ;
- qu'enfin le motif retenu par le tribunal pour prononcer la nullité du contrat de franchise est erroné dès lors que la clause d'approvisionnement exclusif prévoit que les marchandises seront facturées au prix du marché, et non pas selon la libre appréciation du vendeur ;
Elle demande donc à la cour de débouter les défendeurs de leurs prétentions et moyens de défense, de lui adjuger l'entier bénéfice de sa demande en condamnant ceux-ci à lui verser 483 883,12 F au titre du contrat majorés des intérêts légaux à compter de l'assignation, ainsi que 20 000 F à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et 8 000 F en vertu de l'article 700 du NCPC majorés des intérêts légaux à compter de l'arrêt à intervenir ;
M. Francisque Veyre, et Me Belat agissant en qualité de mandataire à la liquidation judiciaire de Mme Veyre ont déposé des conclusions de confirmation au soutient desquelles ils font valoir :
- que c'est à juste titre que le tribunal a rejeté la demande de la société La Sweaterie en l'absence de toute pièce justificative de la créance alléguée ;
- que Mme Veyre n'est pas partie au contrat de franchise ;
- que celui-ci est nul pour comporter une clause d'approvisionnement exclusif ne comportant aucune stipulation relative à la détermination du prix et des quotas ;
Ils demandent donc à la cour de débouter la société La Sweaterie de son appel et de la condamner à leur verser une nouvelle indemnité de procédure de 15 000 F ;
SUR QUOI, LA COUR,
1° sur la mise hors de cause de Mme Veyre et de Me Belat ès qualités :
Attendu que la société La Sweaterie fonde sa demande sur un contrat de franchise qu'elle a signé avec M. Francisque Veyre seul, sans intervention de son épouse séparée de biens ; qu'elle ne démontre ni ne prétend que celle-ci aurait participé à l'exploitation du fonds de commerce objet de la franchise aux côtés de son mari et qu'elle soit de ce fait tenue personnellement au paiement de la dette ;
Que c'est donc à juste titre que le tribunal l'a déboutée des prétentions formées contre Mme Veyre et mis celle-ci hors de cause ;
2° sur la nullité du contrat :
Attendu que le contrat de franchise stipule, à la charge du franchisé, une obligation d'approvisionnement exclusif qui prévoit que " les marchandises livrées seront facturées au prix du marché " ;
Or attendu qu'en l'absence de toute stipulation relative aux éléments entrant dans la détermination du " prix du marché " par référence aux prix pratiqués par les distributeurs d'un secteur géographique défini, c'est à juste titre que le tribunal a considéré qu'au regard des dispositions de l'article 1129 du code civil cette convention de fourniture exclusive était nulle pour indétermination du prix ;
Qu'il en a justement déduit qu'engagée en vertu de cette convention la demande en paiement de la société La Sweaterie était dépourvue de fondement ;
Que le jugement sera donc confirmé en toutes ses dispositions ;
Attendu que l'équité commande que la société La Sweaterie indemnise les intimés des frais qu'elle les a contraint à exposer en appel et qu'il convient d'évaluer à 6 000 F ;
Par ces motifs et ceux non contraires des premiers juges, Confirme le jugement entrepris ; Y ajoutant, Condamne la Société Nouvelle La Sweaterie à verser aux intimés une nouvelle indemnité de 6 000 F en vertu de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; Rejette toutes autres demandes ; Condamne l'appelante aux dépens avec droit de recouvrement direct au profit de la SCP Dutrievoz, avoués.