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Décisions

Cass. com., 22 octobre 1996, n° 94-20.488

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Arban Grosfillex (SARL)

Défendeur :

Loustalot

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bézard

Rapporteur :

M. Grimaldi

Avocat général :

M. Lafortune

Avocats :

SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, Me Boullez.

T. com. Toulouse, du 8 oct. 1992

8 octobre 1992

LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt partiellement confirmatif déféré (Toulouse, 12 septembre 1994), que, par un contrat régi par le décret du 23 décembre 1958, la société Arban Grosfillex (société Arban) a confié la représentation de ses produits, pour un secteur déterminé, à M. Loustalot ; que le contrat stipulait que, après une période d'essai d'une année expirant le 30 novembre 1987, il serait d'une durée de 3 années puis renouvelable d'année en année par tacite reconduction ; que la société Arban ayant fait connaître à M. Loustalot, par lettre recommandée du 29 août 1991, que le contrat ne serait plus renouvelé le 1er décembre 1991, celui-ci l'a assignée en paiement de dommages-intérêts et en paiement de commissions ;

Sur le premier moyen, pris en ses deux branches ; - Attendu que la société Arban reproche à l'arrêt d'avoir décidé que la rupture du contrat lui était imputable, alors, selon le pourvoi, d'une part, que sous l'empire des dispositions du décret du 23 décembre 1958 aucune indemnité n'était due en cas de non-renouvellement d'un contrat à durée déterminée ; que la reconduction d'année en année d'un contrat à durée déterminée ne modifiait pas la nature de celui-ci ; qu'ainsi en estimant que la reconduction, à partir du 1er décembre 1989 jusqu'au 1er décembre 1990 et de cette date au 1er décembre 1991, avait transformé le contrat d'agence à durée déterminée en contrat à durée indéterminée dont la rupture donnait droit à indemnisation pour l'agent, l'arrêt a, tout d'abord, violé l'article 1134 du Code civil, ensuite violé l'article 3 du décret du 23 décembre 1958 ; et alors, d'autre part, que la société Arban avait fait valoir que M. Loustalot avait conditionné la poursuite des relations contractuelles à une augmentation des commissions qui lui étaient dues et qu'aucun accord n'avait pu être trouvé ; qu'en décidant que la rupture du contrat pour laquelle aucun motif réel et sérieux n'était allégué était imputable à la seule société Arban, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions équivalent à un défaut de motifs, violant ainsi l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que, répondant aux conclusions prétendument délaissées, l'arrêt, par motifs adoptés, relève que " le nouveau contrat proposé par la société Arban prévoyait une réduction du taux de commission " et retient que la fin des relations entre les parties est due " uniquement au refus de M. Loustalot d'accepter les réductions de commissionnements demandées par la société Arban " ; qu'il retient encore, par motifs propres, que c'est " à bon droit que les premiers juges ont considéré que la rupture du contrat, pour laquelle aucun motif réel et sérieux n'était allégué, était imputable à la seule société Arban " ; qu'ayant ainsi fait ressortir le caractère abusif du refus de renouvellement du contrat, la cour d'appel, abstraction faite du motif critiqué par la première branche qui est surabondant, a légalement justifié sa décision ; que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses deux branches ;

Mais sur le second moyen ; - Vu l'article 1134 du Code civil ; - Attendu que, pour condamner la société Arban, qui résistait à ce chef de demande en se prévalant de la clause de ducroire insérée à l'article 11 du contrat, à payer à M. Loustalot la somme de 378 927 francs au titre des commissions dues sur deux clients, l'arrêt retient que cette clause " ne peut se comprendre qu'au regard des dispositions de l'article 10 " du même contrat, selon lesquelles M. Loustalot s'engage à ne pas prendre de commandes auprès de clients notoirement insolvables, et que la société Arban se borne à constater l'existence d'impayés, sans offrir d'établir qu'était réalisée la condition d'insolvabilité prévue à l'article 10 du contrat ;

Attendu qu'en se déterminant par ces seuls motifs, alors qu'à défaut de toute stipulation contraire, fût-elle implicite, la clause de ducroire garantit le défaut de paiement à l'échéance par un tiers et non la solvabilité de celui-ci, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Par ces motifs, casse et annule, mais seulement en ce qu'il a condamné la société Arban Grosfillex à payer à M. Loustalot la somme de 378 927 francs au titre des commissions dues sur les clients Cadralu et Socreha, l'arrêt rendu le 12 septembre 1994, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Agen.