CA Paris, 1re ch. D, 6 novembre 1996, n° 96-81935
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Deoflor (SRL)
Défendeur :
Benouaich
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
(faisant fonctions): M. Cahen-Fouque
Conseillers :
M. Linden, Mme Boitaud
Avocats :
Mes Mourre, Benazerah.
M. Benouaich a été engagé en 1989 par la société Deoflor, dont le siège est à Confienza (Italie), en qualité d'agent commercial, pour la représentation exclusive de cette société sur le territoire français.
Le 8 juillet 1995, il a mis fin aux relations contractuelles, en imputant la rupture à la société Deoflor ; il reprochait à cette dernière d'avoir réduit indûment le taux de ses commissions et de traiter directement avec ses clients.
M. Benouaich a assigné la société Deoflor devant le Tribunal de grande instance de Paris en paiement :
- de la somme de 657 214 F à titre de solde de commissions ;
- de la somme de 202 840 F à titre de dommages-intérêts pour non-respect du préavis ;
- de la somme de 1 622 724 F à titre d'indemnités pour résiliation abusive ;
- de la somme de 308 697 F, représentant le montant à régler à la direction générale des impôts à titre de plus-value.
M. Benouaich a également sollicité la communication sous astreinte du chiffre d'affaires réalisé par lui du mois de mai au 7 juillet 1995.
La société Deoflor ayant soulevé une exception d'incompétence au profit du Tribunal de Vigevano (Italie), le tribunal saisi a, par jugement du 17 mai 1996, retenu sa compétence en considérant que les obligations mises à la charge des parties contractantes étaient exécutées en France.
La société Deoflor a formé contredit en soutenant que l'indemnité pour rupture abusive, sollicitée par M. Benouaich dans le cadre de sa demande principale, était assimilable à l'indemnité de fin de contrat prévue par l'article 12 de la loi du 25 juin 1991, relative aux rapports entre les agents commerciaux et leurs mandants, de sorte qu'elle présentait un caractère autonome et que l'obligation servant de base à cette demande, au sens de l'article 5-1 de la Convention de Bruxelles, devait s'exécuter, en application de l'article 1247 du Code civil, au lieu de son siège, en Italie.
M. Benouaich conclut à la confirmation du jugement et sollicite une somme de 15 000 F en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Motivation :
Les parties étant domiciliées respectivement en France et en Italie, la juridiction compétente doit être déterminée au regard des dispositions de la Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968.
Selon la Cour de justice des communautés européennes (arrêt Arcado SPRL du 8 mars 1988), un litige relatif à la rupture abusive d'un contrat d'agence commerciale autonome et au paiement de commissions dues en exécution de ce contrat est un litige en matière contractuelle au sens de l'article 5-1 de la Convention de Bruxelles.
Selon la règle de conflit de loi française, applicable en l'absence de référence à une loi étrangère, le contrat d'agent commercial est régi par la loi du pays dans lequel l'agent commercial exécute son activité, en l'espèce la loi française.
En l'espèce, il n'est pas discuté que l'obligation litigieuse principale est celle d'indemnité pour rupture abusive du contrat.
En droit français, la demande d'indemnités pour rupture abusive du contrat d'agent commercial trouve son fondement dans le non-respect de ce contrat.
Le lieu d'exécution de l'obligation litigieuse, qui se substitue à celle considérée comme fautivement inexécutée de poursuivre la mise en œuvre du contrat, est situé en France.
Par suite, c'est à juste titre que les premiers juges ont retenu leur compétence.
Le contredit sera donc rejeté.
La société Deoflor, condamnée aux frais, devra verser à M. Benouaich une indemnité de procédure de 10 000 F.
Par ces motifs, Rejette le contredit ; Condamne la société Deoflor à payer à M. Benouaich la somme de 10 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; La condamne aux frais.