CA Angers, 1re ch. A, 26 novembre 1996, n° 9500976
ANGERS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Waterair Industries (SA)
Défendeur :
JMH Piscines (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Micaux
Conseillers :
M. Chesneau, Mme Lourmet
Avoués :
SCP Gontier-Langlois, SCP Chatteleyn, George
Avocats :
Mes Muller, Meyre.
Faits, procédure, prétentions des parties :
Par arrêt avant dire droit du 10 juin 1996, auquel il est fait référence pour l'exposé de la procédure antérieure et des prétentions des parties, cette Cour a ordonné la réouverture des débats à l'audience du mardi 1er octobre 1996 à 13 heures 30 afin que les parties puissent formuler toutes observations qu'elles estimeraient utiles sur le fait que M. Hany ait conclu contre la société Waterair Industries, sans avoir été intimé et sans avoir constitué avoué.
Par conclusions déposées le 27 septembre 1996, M. Hany demande à la Cour de lui décerner acte de ce qu'il confirme en tant que de besoin son intervention volontaire à la cause et son adjonction pleine et entière aux écritures précédemment formulées, étant rappelé au demeurant que le seul fait de conclure impliquait nécessairement ces intervention et constitution, lesquelles ne sont soumises à aucune condition de forme particulière, et de lui adjuger en conséquence le bénéfice desdites écritures et des prétentions y formulées, dans l'hypothèse notamment où elles ne pourraient être adjugées au bénéfice de JMH Piscines.
Par conclusions déposées le 30 septembre 1996, la Société Waterair Industries demande à la Cour de déclarer irrecevable l'acte d'intervention volontaire de M. Hany, en application de l'article 554 du nouveau Code de procédure civile, et de condamner M. Hany aux dépens de son intervention et à payer à la société Waterair Industries un montant de 5 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Motifs de la décision :
Sur la demande de révocation de l'ordonnance de clôture :
Par conclusions additionnelles déposées le 19 avril 1996, la société Waterair Industries a sollicité la révocation de l'ordonnance de clôture pour cause grave, à la suite de la demande de rejet de ses conclusions déposées le 21 mars 1996 et de ses pièces communiquées le même jour.
Elle fait valoir qu'il ne résulte d'aucun texte qu'une partie ne pourrait signifier ses conclusions additionnelles et en réponse à une semaine de l'ordonnance de clôture, que si elle a étoffé quelque peu son argumentation d'appel, elle n'a présenté aucune demande nouvelle, que si la société JMH Piscines estimait qu'un délai d'une semaine ne lui était pas suffisant pour répondre à ses écritures, il lui était loisible de solliciter un report de l'ordonnance de clôture de 3 voire même 4 semaines, que dès lors que la société JMH Piscines a choisi d'éviter le débat sans solliciter la révocation de cette ordonnance de clôture, elle ne peut prétendre à l'irrecevabilité de ses écritures additionnelles signifiées le 21 mars 1996.
Tout d'abord, il convient d'observer que la simple réouverture des débats n'a pas emporté la révocation de l'ordonnance de clôture.
Alors que la société Waterair Industries, appelante, avait obtenu par ordonnance du premier président de cette Cour du 1er juin 1995, la suspension de l'exécution provisoire, qu'elle avait conclu le 16 août 1995, que la SARL JMH Piscines avait conclu le 22 janvier 1996, que l'affaire avait été fixée une première fois à l'audience du 18 mars 1996, puis refixée à celle du 29 avril 1996, la clôture devant intervenir le 28 mars 1996, des conclusions dites " additionnelles " de 67 pages, dont une quinzaine de pages consacrées à la critique en droit de la décision déférée, écritures qui constituent en fait ses véritables conclusions puisque sa discussion dans ses premières conclusions était contenue en une seule page.
Cette manière d'agir est contraire aux dispositions de l'article 15 du nouveau Code de procédure civile selon lesquelles les parties doivent se faire connaître en temps utile les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu'elles produisent et les moyens de droit qu'elles invoquent.
Dans ces conditions, il n'y a pas lieu de révoquer l'ordonnance de clôture de la procédure, aucune cause grave n'étant établie, et il convient de rejeter des débats les conclusions déposées le 21 mars 1996 au nom de la société Waterair Industries en violation du principe de la contradiction.
Ainsi qu'il ressort d'un bordereau de pièces communiquées, la société Waterair Industries a communiqué, le 21 mars 1996, 67 pièces. Cette communication faite une semaine avant la clôture de la procédure ne respecte pas le principe de la contradiction. Toutefois, il y a lieu de noter qu'un certain nombre de ces pièces ont été également produites par la SARL JMH Piscines ou avaient déjà été communiquées en première instance et n'ont pas fait l'objet d'une demande de nouvelle communication en cause d'appel. Seront donc rejetées des débats les pièces communiquées par la société Waterair Industries le 21 mars 1996, à l'exception des pièces numérotées 1, 3, 4, 10, 12, 13, 14, 18, 20, 29, 30, 32, 51, 52, 59, 60, 61.
Sur la recevabilité de l'intervention volontaire à la cause de M. Hany :
M. Hany confirme être intervenu volontairement à la cause en concluant devant la Cour.
L'intervention volontaire en cause d'appel prévue à l'article 554 du nouveau Code de procédure civile n'est permise qu'aux personnes qui n'ont été ni parties, ni représentées en première instance ou qui y ont figuré en une autre qualité.
M. Hany était partie en première instance. Il n'est donc pas recevable à intervenir volontairement à la cause devant la Cour.
M. Hany pouvait certes former un appel provoqué.
Cependant, ni dans les motifs ni dans le dispositif des conclusions déposées en son nom et au nom de la SARL JMH Piscines le 22 janvier 1996, il n'a indiqué qu'il demandait que la société Waterair Industries soit condamnée envers lui. L'infirmation du jugement était demandée " en ce qui concerne le montant des commissions dues à la société JMH Piscines ". Il était écrit dans les motifs : " qu'en l'espèce, le préjudice subi par la société JMH Piscines est considérable puisqu'elle s'est trouvée amputée du jour au lendemain d'une clientèle importante constituée en 12 années de collaboration ". Il ne peut être considéré dans ces conditions que M. Hany ait formé un appel provoqué.
M. Hany demande à la Cour, dans ses conclusions déposées le 27 septembre 1996, de lui adjuger le bénéfice des écritures précédemment formulées dans l'hypothèse notamment où elles ne pourraient être adjugées au bénéfice de JMH Piscines. Cependant, la faculté donnée par l'article 783 alinéa 2 du nouveau Code de procédure civile de déposer des conclusions d'intervention après l'ordonnance de clôture ne saurait permettre à une partie qui avait déjà conclu avant cette ordonnance de former un appel provoqué qu'elle n'avait pas formé en temps utile.
Sur la recevabilité des demandes de la société JMH Piscines :
La société Waterair Industries fait valoir qu'il n'existait aucun contrat de mandat et qu'il n'y a jamais eu de relations commerciales entre elle et la SARL JMH Piscines.
La SARL JMH Piscines fait valoir que, dès sa constitution, des commissions lui avaient été payées par la Société Waterair, et que si M. Hany a toujours refusé de régulariser le contrat de partenariat que lui proposait cette société, c'est que ce contrat constituait une véritable novation des rapports juridiques entre les parties, en créant un certain nombre d'obligations nouvelles à la charge de l'agent commercial, qui étaient totalement inacceptables pour celui-ci.
La société JMH Piscines verse aux débats copie d'une lettre adressée, le 18 mai 1992, par la société Waterair à M. Hany et accusant réception de l'extrait K bis à elle envoyé le 7 mai 1992 et concernant la SARL JMH Piscines. La société Waterair écrivait à M. Hany : " j'ai été fort surpris en découvrant que cette société est en activité depuis le 1er juillet 1991 sans qu'à aucun moment vous ayez cru nécessaire de m'informer de sa création... ".
La société JMH Piscines produit encore copie d'une lettre adressée le 27 mai 1992 par M. Hany à Waterair et dans laquelle celui-ci écrit : " j'ai eu personnellement Mme Cholley au téléphone pour lui signifier qu'au 1er juillet 1991 il fallait stipuler les chèques au nom de JMH Piscines et non plus à M. Hany. Ce qui a été fait et une vérification peut se faire au niveau des chèques. Évidemment je n'ai pas envoyé l'extrait K bis puisqu'à mes yeux rien ne changeait... ".
La société JMH Piscines produit les photocopies de trois chèques émis par Waterair Industries au nom de " JMH Piscines ".
Compte tenu de ce que le transfert de l'activité d'agent commercial de M. Hany à la société JMH Piscines et la création de cette société n'avaient pas été portés à la connaissance de la société Waterair Industries, l'émission de quelques chèques à l'ordre de " JMH Piscines " ne permet pas de considérer que la société Waterair Industries avait accepté de contracter désormais avec la société JMH Piscines.
La société JMH Piscines reconnaît avoir refusé de signer le contrat de partenariat que lui proposait la société Waterair Industries après avoir découvert son existence.
Dans ces conditions, la société JMH Piscines, qui n'établit pas que le transfert à son profit du mandat d'agent commercial conclu avec M. Hany ait été accepté par la société Waterair et que des relations contractuelles aient existé entre elle et cette société, doit être déclarée irrecevable en toutes ses demandes entre la société Waterair Industries.
Sur la demande reconventionnelle de la Sté Waterair Industries contre la SARL JMH Piscines :
La société Waterair Industries demande à la Cour de dire que la SARL JMH Piscines s'est livrée à des actes de concurrence illicite en tout cas déloyale lui portant préjudice, d'ordonner une expertise comptable afin de déterminer le préjudice commercial résultant pour elle de toutes ventes d'accessoires (ou autres) de marques autres que Waterair effectuées directement ou indirectement par JMH Piscines jusqu'à la rupture, et de condamner la société JMH Piscines à lui payer une provision correspondant au préjudice déjà connu à la date de la demande reconventionnelle.
La société JMH Piscines conteste que M. Hany se soit livré à des actes de concurrence déloyale.
La société JMH Piscines a commencé son exploitation le 1er juillet 1991.
Or il ressort des pièces produites que la quasi-totalité des actes de concurrence déloyale reprochés par la société Waterair Industries à la société JMH Piscines sont antérieures à la constitution de cette société et n'auraient donc pu être commis que par M. Hany contre lequel la société Waterair Industries n'a pas fait appel. En ce qui concerne les actes postérieurs à la constitution de la société JMH Piscines, il n'est pas établi qu'ils puissent être imputés à cette société, les pièces faisant état de JMH Piscines et non de la SARL JMH Piscines.
Il convient, en conséquence, de débouter la société Waterair Industries de sa demande reconventionnelle.
La société JMH Piscines étant déclarée irrecevable en ses demandes contre la société Waterair Industries, il y a lieu d'ordonner la restitution à cette société du montant de la somme consignée en exécution de l'ordonnance du premier président de cette Cour du 1er juin 1995, ainsi que le demande la société Waterair Industries. Il n'y a pas lieu à fixation d'une astreinte.
Il est équitable de ne pas prononcer de condamnation au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Par ces motifs : Statuant publiquement, contradictoirement, en suite de son arrêt du 10 juin 1996, Dit n'y avoir lieu de révoquer l'ordonnance de clôture de la procédure ; Rejette des débats les conclusions déposées au nom de la société Waterair Industries le 21 mars 1996 et les pièces communiquées par la société Waterair Industries le 21 mars 1996, à l'exception des pièces numérotées 1, 3, 4, 10, 12, 13, 14, 18, 20, 29, 30, 32, 51, 52, 59, 60, 61 ; Déclare irrecevable l'intervention volontaire en cause d'appel de M. Jean-Marie Hany ; Infirmant le jugement déféré, Déclare la SARL JMH Piscines irrecevable en toutes ses demandes contre la société Waterair Industries ; Déboute la société Waterair Industries de sa demande reconventionnelle ; Ordonne la restitution à la société Waterair Industries, sur la production d'une expédition du présent arrêt revêtu de la formule exécutoire, du montant de la somme consignée en exécution de l'ordonnance du premier président de cette Cour en date du 1er juin 1995 au compte CARPA du conseil de la SARL JMH Piscines ; Déboute les parties de leurs demandes au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; Condamne la SARL JMH Piscines aux dépens de première instance et d'appel, à l'exclusion des dépens afférents à l'intervention en cause d'appel de M. Hany qui seront à la charge de celui-ci ; Dit que les dépens d'appel seront recouvrés conformément à l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.