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Décisions

Cass. com., 9 janvier 1985, n° 83-15.272

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

British Racing Car (Sté)

Défendeur :

British Leyland France (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Baudoin

Rapporteur :

M. Justafré

Avocat général :

M. Galand

Avocats :

SCP Lyon-Caen, Fabiani, Liard, SCP Martin-Martinière, Ricard.

Paris, du 9 juin 1983

9 juin 1983

LA COUR : - Sur le premier moyen, pris en ses quatre branches : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 9 juin 1983) que la société British Leyland France (la société BLF) a concédé à la société British Racing Car (la société BRC) le droit de revendre ses véhicules sur le territoire de l'arrondissement de Bastia par un contrat du 15 janvier 1976 conclu pour une durée déterminée, destiné à prendre effet le 1er janvier 1976 pour se terminer le 31 décembre suivant, de plein droit, sans possibilité de tacite reconduction ni d'indemnité en cas d'absence de conclusion d'un nouveau contrat à son expiration ; que des lettres des 19 novembre et 9 décembre 1976 par lesquelles la société BLF mettait en demeure la société BRC de lui régler divers impayés et de lui consentir l'engagement personnel d'une caution étant demeurées sans effet et la société BLF ayant appris que depuis le 1er janvier 1977 la société BRC était devenue le concessionnaire de la marque concurrente Volkswagen, la société BLF par une lettre du 11 janvier 1977, l'a informée qu'aucun contrat de concession pour l'exercice 1977 ne serait présenté à sa signature, que toutefois à titre précaire, elle satisferait ses demandes de véhicules neufs et de pieces de rechange à des conditions déterminées différentes de celles applicables aux concessionnaires ;

Attendu qu'il est reproché à la cour d'appel d'avoir débouté la société BRC de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour refus abusif de renouvellement du contrat de concession alors, selon le pourvoi, d'une part, que dans ses écritures d'appel, la société BRC faisait valoir que le reproche formulé à son encontre, tiré de ce qu'elle restait devoir de l'argent à la société BLF n'avait été invoqué par cette dernière, comme motif de non renouvellement, que sur le tard, en cours de procédure, et que jamais auparavant, que ce fut dans sa lettre du 19 novembre 1976 ou dans celle du 11 janvier 1977, la société BLF ne lui avait dit ni même laissé entendre que cet incident pourrait constituer un obstacle à la signature, à l'avenir, d'un nouveau contrat ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen, duquel il pouvait résulter que le refus opposé par la société BLF de renouveler le contrat de concession procédait d'une légèreté blâmable, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions caractéristique d'un défaut de motifs et a ainsi violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile, alors, d'autre part, que dans ses écritures d'appel, la société BRC faisait également valoir que le grief formulé à son encontre, tiré de l'insuffisance des ventes par rapport à l'objectif fixé, n'avait été invoqué par la société BLF comme motif de non renouvellement que sur le tard, en cours de procédure, et que jamais auparavant, la société BLF ne lui avait adressé le moindre reproche à ce sujet ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen, duquel il pouvait résulter que le refus opposé par la société BLF de renouveler le contrat de concession procédait d'une légèreté blâmable, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions caractéristique d'un défaut de motifs et a ainsi violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile, alors, au surplus, que dans ses écritures d'appel, la société BRC faisait valoir que l' attestation de M. Wyffels, préposé de la société BLF, selon laquelle le concessionnaire lui aurait confié ne vouloir assurer à l'avenir que la représentation des voitures Volkswagen, n'était pas admissible en preuve, en tant que ce témoignage n'émanait pas d'un tiers au sens de l'article 199 du nouveau Code de procédure civile, et ajoutait qu'en tout état de cause, compte tenu de l'ancienneté des relations commerciales des parties, la société BLF ne pouvait, sans légèreté blâmable, refuser de renouveler le contrat de concession en se fondant sur les seuls dires de l'un de ses préposés, sans s'être au préalable assurée de la véracité de ces informations auprès du concessionnaire lui-même ; qu'en ne répondant pas à ce moyen, la cour d'appel a violé de plus fort l'article 455 du nouveau Code de procédure civile, et alors, enfin que dans ses écritures d'appel, la société BRC soutenait que la société BLF avait commis une faute génératrice de responsabilité à son egard en ne l'informant pas de sa décision de ne pas renouveler le contrat dans un delai suffisamment raisonnable pour lui permettre de prendre les dispositions nécessaires à une reconversion ; que faute d'avoir répondu à ce moyen, les juges du fond ont, une fois encore, violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu, en premier lieu, que la société BLF n'étant pas tenue de justifier d'un motif légitime de refus de renouvellement de la convention, la cour d'appel qui n'a fait qu'appliquer la loi du contrat en statuant comme elle l'a fait, n'avait pas à répondre aux arguments invoqués dans les trois premières branches du moyen ;

Attendu, en second lieu, qu'ayant relevé que la société BLF démontrait le choix fait par la société BRC en faveur de la représentation exclusive Volkswagen, la cour d'appel n'avait pas à répondre aux conclusions invoquées par la quatrième branche concernant l'avis du non renouvellement du contrat dans un délai raisonnable pour permettre une reconversion alors que celle-ci se trouvait réalisée ; d'ou il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Sur le second moyen, pris en ses deux branches : - Attendu qu'il est encore fait grief à la cour d'appel d'avoir débouté la société BRC de sa demande en paiement de dommages-intérêts fondée sur la pratique par la société BLF de prix et conditions de vente discriminatoires à son détriment alors, selon le pourvoi, d'une part, que dans ses écritures d'appel, la société BRC faisait valoir qu'à compter du 1er janvier 1977 la société BLF avait refusé de la faire bénéficier du paiement des primes découlant du volume des achats de véhicules neufs et pièces de rechange, au seul motif qu'elle n'était plus concessionnaire, et offrait de prouver ce fait en versant aux débats la lettre que lui avait adressée le 11 janvier 1977 la société BLF ; qu'en s'abstenant dès lors de rechercher si, comme elle y était expressément invitée, les faits dénoncés par la société BRC dans ses écritures ne constituaient pas la pratique de prix et conditions de vente discriminatoires, la cour d'appel n'a pas donné une base légale à sa décision au regard des articles 37, alinéa 1, de la loi du 27 décembre 1973 et 1382 du Code civil, et alors, d'autre part, que la cour d'appel, qui n'explique pas en quoi consistent les "obligations" prétendument mises à la charge des concessionnaires par la société BLF, et qui n'explique pas davantage en quoi ces "prétendues obligations" justifient les prix et conditions de vente particuliers dont bénéficient seuls lesdits concessionnaires, à l'exclusion de ceux qui n'avaient pas cette qualité, ne permet pas à la Cour de cassation d'exercer son contrôle et prive de ce fait sa décision de base légale au regard des articles 37, alinéa 1, de la loi du 27 décembre 1973 et 1382 du Code civil ;

Mais attendu qu'ayant relevé que, par la lettre du 11 janvier 1977, la société BLF proposait à titre transitoire de vendre à la société BRC des véhicules neufs et des pièces de rechange par un arrangement qui, ne constituant pas un contrat de concessionnaire BLF, ne permettait pas à la société BRC de prétendre bénéficier des primes offertes aux concessionnaires sous contrat, la cour d'appel a retenu à juste titre que les conditions particulières consenties à ceux-ci trouvent leur cause dans les diverses obligations mises à leur charge qu'elle n'avait pas à expliciter et qu'il n'était pas justifié de pratiques discriminatoires; d'ou il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Par ces motifs : rejette le pourvoi formé contre l'arrêt rendu le 9 juin 1983 par la Cour d'appel de Paris.