Cass. com., 15 décembre 1987, n° 86-11.099
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Jacobson
Défendeur :
Chiffons (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Perdriau (conseiller doyen faisant fonction)
Rapporteur :
M. Cordier
Avocat général :
M. Jéol
Avocats :
Me Guinard, SCP Labbé, Delaporte.
LA COUR : - Sur le moyen unique, pris en ses deux branches : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 4 octobre 1985), que, pour la diffusion des produits de sa fabrication, M. Jacobson a engagé des pourparlers avec la société Chiffons en vue de l'établissement d'un contrat de franchisage entre les parties ; qu'après que celles-ci eussent, entre le 31 octobre et le 6 novembre 1980, échangé diverses correspondances à l'effet de rédiger le contrat de franchisage, M. Jacobson a, le 12 novembre suivant, adressé à la société Chiffons quatre exemplaires de ce contrat en lui demandant de les lui " retourner signés dans les meilleurs délais " et en lui réclamant, pour sûreté de ses engagements, la garantie hypothécaire " convenue " entre eux sur l'appartement, propriété de la gérante ; que, le 22 novembre 1980, la société Chiffons a renvoyé à M. Jacobson, signés, les documents adressés, en lui annonçant que sa banque la garantissait, ce que l'établissement a effectivement fait par courrier du surlendemain en offrant à M. Jacobson de se porter caution des engagements de sa cliente à son égard ; que, dans sa lettre du 22 novembre 1980, la société Chiffons précisait encore que " les formalités d'hypothèque et de nantissement demandant de longs délais administratifs ", ces sûretés seraient " mises en place par la suite " si M. Jacobson venait à " l'exiger " ; que, le 25 novembre suivant, M. Jacobson a mis fin unilatéralement à ses relations avec la société Chiffons ; que celle-ci l'a assigné en paiement de dommages-intérêts pour rupture fautive de contrat ;
Attendu que M. Jacobson fait grief à l'arrêt d'avoir dit qu'il avait commis une faute en rompant sans motif le contrat de franchisage qui le liait à la société Chiffons et de l'avoir condamné à verser à celle-ci des dommages-intérêts, alors, selon le pourvoi, d'une part, que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites suivant l'article 1134 du Code civil ; que la cour d'appel n'a pas constaté la rencontre de la volonté des parties sur la garantie hypothécaire exigée par M. Jacobson au titre de la condition préalable et substantielle de la conclusion du contrat litigieux; qu'en effet, l'offre par la société Chiffons d'une caution bancaire ultérieure est une contre proposition faite par celle-ci à M. Jacobson qui avait cependant exigé une sûreté réelle; que, faute d'accord entre les parties sur la nature de la sûreté destinée à garantir l'opération litigieuse, la cour d'appel ne pouvait légalement déclarer le contrat formé entre les parties ; qu'elle a ainsi violé l'article 1134 du Code civil ; et alors, d'autre part, que, suivant l'article 1382 du Code civil, la rupture de pourparlers entre commerçants n'est fautive que si elle a été faite de mauvaise foi ; qu'en l'état de la rupture des pourparlers à l'initiative de M. Jacobson pour une cause imputable à la société Chiffons, laquelle ne faisait pas diligence dans une opération urgente pour le fabricant et n'avait pas offert à ce dernier la sûreté réelle immobilière qu'il exigeait préalablement au contrat de franchisage envisagé entre les parties, la cour d'appel, qui n'a pas relevé en quoi la rupture litigieuse résultant du jeu normal de la concurrence aurait été faite de mauvaise foi par M. Jacobson, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1382 du Code civil ;
Mais attendu, d'une part, que la cour d'appel n'avait pas à constater l'existence de l'accord des parties au sujet de la garantie hypothécaire que désirait obtenir M. Jacobson dès lors qu'elle a estimé, dans l'exercice de son pouvoir souverain, que cette sûreté " ne constituait pas une condition dont aurait dépendu la formation du contrat " ;
Attendu, d'autre part, qu'ayant retenu que M. Jacobson avait engagé sa responsabilité contractuelle, la cour d'appel n'avait pas à faire application de l'article 1382 du Code civil;
Que le moyen n'est donc fondé en aucune de ses branches ;
Par ces motifs : rejette le pourvoi.