Livv
Décisions

CA Paris, 5e ch. B, 18 mars 1988, n° 86-9080

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Automobiles Peugeot (Sté)

Défendeur :

Montoise Automobiles (SA), Berthes (ès qual.), Crouzet (ès qual.), Cordier

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Schoux (faisant fonctions)

Conseillers :

MM. Serre, Chavanac

Avoués :

Me Bourdais Virenque, SCP Roblin Chaix de Lavarene

Avocats :

Mes Chresteil, Meresse.

T. com. Paris, du 21 avr. 1986

21 avril 1986

LA COUR statue sur l'appel de la société Automobiles Peugeot (Peugeot) venant aux droits de la société Automobiles Talbot (Talbot) et sur l'appel de la société Montoise Automobiles (SMA) en état de règlement judiciaire et assistée de ses deux co-syndics Maîtres Crouzet et Berthe, du jugement prononcé le 21 avril 1986 par le Tribunal de commerce de Paris, dans les circonstances de faits suivantes :

Au début de l'année 1979, à un moment où la société SMA, concessionnaire Simca, puis Chrysler et Talbot depuis 1936 à Mont-de-Marsan en vertu de contrats à durée déterminée successifs, rencontrait d'importantes difficultés commerciales, son président directeur général M. Dehez de santé déficiente est entré en relations avec M. Paul Cordier qui était intéressé par la reprise de l'affaire ; par lettre du 22 juin 1979, ce dernier a présenté sa candidature à la société concédante qui, le 28 juin 1979, lui a confirmé qu'elle ne donnerait son accord définitif qu'à la condition, notamment, que le fonds de roulement soit fixé à 600 000 F, somme portée ensuite, le 22 juillet 1979, à 700 000 F ; le 20 août 1979, M. Cordier faisait l'acquisition des actions de SMA et assurait l'exploitation du garage à compter du 1er octobre 1979, dans le cadre du contrat de concession en cours, venant à expiration le 31 décembre 1979 ; le 2 janvier 1980, la société Talbot lui consentait un nouveau contrat pour la durée d'un an, avec un objectif de vente de 380 véhicules neufs ; malgré des résultats favorables au cours des premiers mois, les difficultés financières de la société ne firent que s'accentuer par la suite et le 30 septembre 1980 Talbot notifiait sa décision de ne pas présenter un nouveau contrat pour 1981 ; le 9 octobre 1980, SMA déposait son bilan et le lendemain elle était déclarée en état de règlement judiciaire ;

Estimant que Talbot avait commis des fautes précontractuelles ayant amené SMA à s'engager, celle-ci, assistée de son syndic, Maître Claudine Crouzet seule en fonction à l'époque et M. Paul Cordier agissant à titre personnel ont assigné le concédant devant le Tribunal de commerce de Paris ;

Par un premier jugement du 18 mai 1982 le tribunal a écarté la responsabilité précontractuelle de Talbot sur le plan général de sa politique à l'égard de l'ensemble de ses concessionnaires avant 1980 mais, sur les faits spécifiques allégués par les demandeurs concernant la présentation d'un bilan prévisionnel prétendument trompeur, il a ordonné une expertise et commis M. Ronfort pour y procéder.

Par arrêt du 4 juillet 1985, cette Cour a confirmé les premières dispositions du jugement relatives aux faits d'ordre général et a déclaré Talbot irrecevable en son appel concernant celles intéressant le compte prévisionnel ;

Après dépôt du rapport le 15 mars 1985, le tribunal, au vu de l'avis de l'expert et des conclusions des parties, a retenu, dans le jugement critiqué, que Peugeot, venant aux droits de Talbot, avait engagé sa responsabilité à l'égard de SMA et de M. Cordier d'abord par des prévisions irréalistes sur des parts de marché et des résultats inaccessibles, et, ensuite, par un abus de droit, en refusant de présenter un nouveau contrat pour 1981 ; il a condamné le concédant, outre aux dépens, à payer à SMA et à son syndic la somme de 843 408 F avec les intérêts légaux à compter de sa décision, à reprendre le stock de pièces détachées, à payer à M. Cordier la somme de 679 120 F avec les intérêts à compter de la décision et à verser aux demandeurs 25 000 F au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile précisant qu'il appartenait au tribunal du lieu d'ouverture du règlement judiciaire, de fixer le montant de la créance du concédant sur la société concessionnaire, et prononçant d'ores et déjà la compensation entre cette créance et celle résultant de la condamnation prononcée au profit de cette dernière ;

Peugeot souligne, en ce qui concerne la responsabilité précontractuelle qui lui est imputée, que M. Cordier est un professionnel averti, ayant travaillé dans des sociétés exploitant des concessions consenties par des fabricants d'automobiles ; que ce dernier a élaboré lui-même le compte prévisionnel d'exploitation en cause, sur un formulaire 05 78 en collaboration avec M. Thebault, conseiller de gestion de Talbot, qu'il a rédigé de sa main plusieurs pages, ainsi que l'a estimé dans son rapport (il est vrai officieux) Mme de Ricci, expert graphologue ; qu'il avait la capacité de vérifier les informations dites " optimistes " ou " euphorisantes " qui lui ont été communiquées par le conseiller Talbot ; que le document litigieux ne doit pas être considéré comme une " garantie de marché minimum ", donnait la mesure des efforts à accomplir pour atteindre l'objectif prévu ; qu'au surplus M. Cordier avait déjà pris la décision de prendre le contrôle de SMA avant d'établir le compte prévisionnel ; que ce n'est pas ce document qui l'a déterminé ; elle estime qu'aucune faute délictuelle ne peut lui être reprochée ;

Peugeot fait valoir, par ailleurs, sur le non renouvellement du contrat, que les conventions passés en 1980 étaient à durée déterminée sans tacite reconduction ; que sa lettre de préavis du 30 septembre 1980 et celle du 5 novembre 1980 en réponse aux griefs qui lui étaient adressés, se référaient uniquement à la faculté qui lui était réservée par le contrat de ne pas en proposer un nouveau pour 1981 ; que c'est seulement par la suite qu'elle a fait état des résultats insuffisants de la concession ; que jamais, elle n'a subordonné à la restructuration de l'exploitation, le maintien de relations contractuelles au-delà du 31 décembre 1980 ; elle conteste tout abus dans l'exercice de ses droits ;

Sur le compte entre les parties, elle précise avoir été admise provisionnellement pour 1 F par jugement du 5 novembre 1982 du Tribunal de commerce de Mont-de-Marsan qui a estimé ne pouvoir " se substituer au juge du fond " ; elle fait observer que le Tribunal de commerce de Paris devait donc, se prononcer sur le montant de sa créance à l'égard de la société concessionnaire tel que l'a fixé l'expert ;

Elle prie en conséquence la Cour,

- d'infirmer le jugement entrepris,

- de débouter SMA et ses co-syndics de leur demande au titre de la responsabilité précontractuelle, de l'abus de droit, du comblement du passif et de la reprise du stock de pièces détachées ;

- de rejeter également les prétentions de M. Cordier à titre personnel, à défaut de preuve tant d'un préjudice personnel et d'un lien de causalité avec le nom renouvellement du contrat que de sa qualité à agir pour la partie de sa demande concernant de prétendues pertes subies par un tiers à l'instance ;

- de faire droit à se demande reconventionnelle pour le quantum déterminé par l'expert ;

Elle souligne subsidiairement que le tribunal a calculé à tort le préjudice de SMA par rapport aux marges brutes, au lieu de se référer aux marges nettes, et demande, au cas de confirmation, que le principe de la compensation ordonnée par les premiers juges soit maintenu ;

SMA, assistée de ses deux co-syndics Maîtres Crouzet et Berthe, reprend son argumentation de première instance et fait valoir que M. Cordier a acheté en 1979 les parts représentant son capital, parce qu'elle était concessionnaire Talbot et pas seulement parce qu'elle exploitait un garage ;

Elle approuve le tribunal d'avoir retenu les estimations de l'expert et décidé que la société concédante a commis une faute, de nature délictuelle, dans l'établissement de compte d'exploitation prévisionnel et dans la définition des éléments de base servant à la détermination de ce compte ;

Elle sollicite à ce titre 702 840 F.

Elle reproche également à Peugeot d'avoir commis un abus de droit pour avoir refusé de lui présenter un nouveau contrat pour 1981 et sollicite tant la somme de 1 616 601,60 F représentant l'insuffisance d'actif née du dépôt de bilan, que celle de 468 560 F égale aux marges brutes perdues postérieurement au dépôt de bilan ainsi que la reprise du stock de pièces détachées ;

Elle soutient que la demande reconventionnelle de Peugeot est irrecevable en l'état, même par voie de compensation et qu'il appartient à cette société de se pourvoir contre la décision l'admettant provisionnellement pour 1 F ;

M. Cordier sollicite de son côté 848 900 F en réparation de son préjudice personnel et prie la Cour de condamner Peugeot à la garantir en principal, intérêts et frais des engagements de caution souscrits par SMA au profit des sociétés Sovac et ELF ;

Ils sollicitent les intérêts sur ces sommes à compter du 2 janvier 1981 et subsidiairement du 18 mai 1982, ainsi que 40 000 F en vertu de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

Considérant, cela étant exposé, qu'en ce qui concerne l'incident de vérification d'écriture, il n'est pas déterminant de rechercher qui, de M. Cordier ou de M. Thebault, conseiller de gestion de Talbot, a rédigé les chiffres et les mentions manuscrites des pages constituant le compte d'exploitation prévisionnel et les études de marges brutes et de calcul du fond de roulement ;

Qu'il n'est pas exclu que celui qui a rempli ces pages l'ait fait à partir d'indications dont il n'établit pas l'auteur ; qu'il ressort en fait des éléments produits aux débats que ces documents ont été élaborés en commun, sans qu'il soit nécessaire d'établir lequel des deux les a matériellement rédigés ;

Que dans ces conditions, l'incident de vérification d'écriture est sans objet ;

Considérant, sur la responsabilité précontractuelle de Peugeot, que ces documents datés de la fin du deuxième trimestre 1979, basés sur un chiffre d'affaires correspondant à la vente de 400 véhicules neufs (VN) se sont révélés " optimistes " par rapport aux résultats réalisés concrètement au cours des mois qui ont suivi et particulièrement à partir d'avril 1980 ;

Que si M. Ronfort a observé une brusque remontée, au plan national, du taux de pénétration de Chrysler de février à juin 1978 (11 à 12 %) grâce au modèle " l'Horizon ", il précise avoir enregistré une baisse de ce pourcentage : 9,2 % fin décembre 1978, 9 % fin février 1979 et 8,6 % au 30 juin 1979 ; que la régression devait se confirmer par la suite, 7,9 % à la fin de 1979 ;

Que selon l'expert, l'objectif de 400 VN, équivalent à un taux de pénétration de 10,74 %, ne correspondait pas aux tendances du marché et que le taux de 8,4 % aurait été une approche plus raisonnable ;

Que cependant en dépit de leur optimisme, ces prévisions élaborées en commun par Cordier et Chrysler, ne présentaient pas, à l'époque où elles se situent, un caractère véritablement utopique ;

Que les ventes de véhicules neufs de la marque (VN) avaient progressé sur le territoire national, en 1978 par rapport à 1977 (10,2 % contre 9,4) puis avaient peu à peu régressé au cours de 1979 (8,7 % en janvier et 6 % en décembre) ; qu'en juin 1979, le pourcentage était de 8,3 % ;

Que les performances réalisées par SMA dans son secteur ont été de 10,2 % et de 7,7 % en 1979 pour l'année entière ;

Que les fluctuations n'étaient pas de nature à exclure, au milieu de l'année 1979, tout espoir de redressement, d'autant plus qu'après la réussite du modèle " Horizon " sorti en janvier 1978, le constructeur en préparait deux autres : la " Solara " en mars 1980 et la " Mata Murena " en décembre 1980 ;

Qu'il doit être observé que dans le même temps, Cordier âgé de 36 ans paraissait apte à donner l'impulsion nécessaire au rétablissement d'une affaire que son prédécesseur, de santé fragile, avait laissée péricliter ; que d'ailleurs les premiers mois d'exploitation ont donné des résultats favorables ;

Que par ailleurs, comme le souligne Peugeot, Cordier est un professionnel de l'automobile, capable de vérifier les informations qui lui étaient communiquées et de se faire une opinion valable sur l'évolution du marché ; qu'il connaissait les difficultés qu'avaient rencontrées SMA au cours des années antérieures, qu'il savait que celle-ci avait vendu 362 VN en 1978, et, proportionnellement un nombre moindre pendant le premier semestre 1979 (198 VN au 30 septembre 1979);

Qu'il était parfaitement conscient du caractère ambitieux d'un objectif annuel fixé à 400 VN; qu'à la page 39 de son rapport, l'expert précise que dans une note manuscrite sur la nouvelle organisation de la concession, ce dernier avait indiqué que " l'objectif défini avec la direction Simca est de réaliser 400 VN par an, soit 10,74 % de pénétration " ;

Que Cordier devait avoir d'autant plus conscience des difficultés de son entreprise qu'il avait participé aux études fondées sur ce quota et se trouvait en mesure d'en peser les aléas ; qu'il pouvait éventuellement prendre conseil auprès de spécialistes de son choix ;

Qu'il ne pouvait ignorer, en tous cas, qu'en étudiant avec lui les perspectives commerciales de SMA, Talbot ne contractait à son égard aucune garantie de réalisation de ces prévisions dans un marché concurrencé comportant de nombreux impondérables ;

Qu'il s'est estimé si peu trompé par les résultats des premiers mois d'exploitation que le 2 janvier 1980, il a signé, au nom de SMA le nouveau contrat qui lui a été proposé pour un an ;

Que, d'autre part, si le budget prévisionnel mentionne à la première page, comme date, celle de la " fin du deuxième trimestre 1979 " il doit être observé qu'en réponse à son acte de candidature du 22 juin 1979, Talbot lui proposait de lui " indiquer tous les éléments indispensables à l'établissement du prévisionnel ", ce qui conduit à penser qu'à cette époque, il n'était pas encore réalisé ;

Que, par suite, il n'est pas démontré que M. Cordier qui, dès le 22 juin 1979, dans sa demande d'agrément, précisait, avoir déjà passé avec M. Dehez " un protocole d'accord ", ait été déterminé dans sa décision par le document litigieux;

Que, pas davantage les intimés n'apportent la preuve que Talbot ait sciemment, au milieu de l'année 1979, fourni des éléments erronés ou tronqués, qu'elle est seule à connaître, dans le but de tromper M. Cordier et de l'inciter à acheter une affaire dont elle savait pertinemment que, par suite du recul irrémédiable de la marque, l'exploitation ne pourrait être que déficitaire ;

Que, dans ces conditions, aucune faute de nature délictuelle n'est établie à la charge de Peugeot; que les intimés doivent être déboutés de leurs prétentions à ce titre ;

Considérant , sur l'imputation d'abus de droit, que les conventions du 2 janvier 1980 étaient conclues pour un an, sans possibilité de tacite reconduction ; que par lettre du 30 septembre 1980, observant le préavis de trois mois prévu par l'article IV du contrat, Peugeot a informé son concessionnaire de son intention de ne pas lui en proposer un nouveau pour 1981;

Que dans cette lettre le constructeur s'est borné à se référer aux dispositions contractuelles sans fournir aucune précision sur les motifs de sa décision ;

Que le tribunal ne pouvait retenir que ce dernier avait, dans ses conclusions, justifié le non renouvellement par une prétendue insuffisance d'activité de son concessionnaire, alors qu'il convient de se placer au 30 septembre 1980 pour apprécier l'existence d'un éventuel abus de droit ;

Que si, après la cession des actions du mois d'août 1979, SMA a accompli des efforts méritoires, l'expert a noté (page 66) qu'à partir du 1er avril 1980 la chute des immatriculations, générale à l'ensemble des concessionnaires Talbot, ne permet plus à la concession de couvrir ses frais de structures ;

Que les circonstances dans lesquelles par la suite Peugeot a cherché des justifications à sa décision, ne sont pas susceptibles en tout état de cause, de constituer l'abus de droit qui lui est reproché;

Que s'il est vrai que le 12 septembre 1980, après un entretien de la semaine précédente et au vu des conclusions d'un audit, Peugeot a conseillé à SMA, notamment pour remédier à l'insuffisance du fond de roulement, de prendre certaines mesures d'ordre financier, il ne résulte d'aucun élément qu'elle ait renoncé à la faculté stipulée à l'article IV susvisé et pris l'engagement de proposer un nouveau contrat pour 1981 ; qu'elle n'a jamais subordonné sa décision sur ce point à la restructuration de l'entreprise;

Que d'ailleurs SMA ne justifie pas avoir été en mesure de réaliser, dans une conjoncture économique défavorable à la marque, la mesure propre à assainir sa situation ;

Que l'importance des investissements antérieurement effectués dans le cadre des conventions à durée déterminée, non renouvelables par tacite reconduction, ne pouvait conférer à SMA aucun droit au maintien des relations contractuelles, au delà de l'expiration du contrat;

Que le repli général de la pénétration Talbot, dont Peugeot ne peut être tenue pour responsable, a eu pour effet de compromettre le résultat escompté des solutions qui avaient été étudiées ;

Que l'agrément donné à SMA, en 1979, à la suite des transformations survenues dans son conseil d'administration, ne valait que pour la période restant à courir, période qui a été le 2 janvier 1980 reconduite pour un an ;

Que, par suite, la Cour ne trouve pas dans l'attitude du constructeur le 30 septembre 1980, quelle qu'en ait pu être la rigueur vis à vis du concessionnaire, les éléments constitutifs de l'abus de droit dont ce dernier fait état;

Que, dans ces conditions, SMA ne peut qu'être déboutée de ce chef de ses prétentions ;

Que, pour les mêmes raisons, il doit être de même pour M. Cordier, agissant à titre personnel, tant pour sa demande de paiement de dommages-intérêts que pour son recours en garantie contre Peugeot ;

Considérant qu'à défaut de responsabilité établie à la charge du constructeur dans le dépôt de bilan auquel a procédé SMA le 9 octobre 1980, cette dernière doit être déboutée de son action en comblement du passif ;

Considérant sur le stock de pièces détachées, que l'article XX-B du contrat n'en prévoyait la reprise par le concédant, que dans le cas où le concessionnaire cesserait de bénéficier de la concession par le fait du constructeur; qu'au surplus, SMA ne justifie pas avoir formulé sa réclamation dans le mois de la cessation du contrat ; que ses prétentions de ce chef ne sauraient prospérer ;

Considérant, sur le compte entre les parties, que l'expert en fixe le solde créditeur au profit de Peugeot à 989 817,90 F ;

Que cette dernière prie la Cour d'entériner ce chiffre et de fixer sa créance à ce montant, en exécution du jugement prononcé le 5 novembre 1982 par le Tribunal de commerce de Mont-de-Marsan qui a estimé ne pas devoir se substituer aux juges du fond et l'a admise à titre provisionnel pour 1F ;

Que SMA soutient que cette demande n'est pas justifiée et que par ailleurs Peugeot doit respecter la procédure prévue à cet effet devant ce dernier tribunal ;

Que cependant, Talbot, qui avait produit pour 972 238,63 F au passif de SMA, s'est pourvue devant le Tribunal de commerce de Mont-de-Marsan contre la décision du juge commissaire l'admettant sur l'état des créances à titre provisionnel pour 1 F ; que cette juridiction, compte tenu de l'instance introduite par cette société devant le Tribunal de commerce de Paris en paiement de dommages-intérêts a renvoyé le litige devant les magistrats parisiens pour qu'ils procèdent à la fixation de la créance alléguée par Peugeot ; qu'en application de l'article 103 de la loi du 13 juillet 1967, cette décision n'est susceptible d'aucun recours ;

Que pour éviter une contrariété de décision, qui risquerait d'aboutir à un conflit négatif de juridiction, il convient, dans le souci d'une bonne administration de la justice, de déclarer recevable la réclamation de Peugeot qui a été invitée à la porter devant les juges saisis de l'ensemble du litige ;

Que l'expert a examiné contradictoirement avec les parties les éléments du compte que celles-ci lui avaient soumis ; que SMA qui a eu la possibilité de présenter toutes observations utiles au cours de l'expertise, ne précise pas les points sur lesquels elle conteste l'évaluation de M. Ronfort, relatives pour 267 107,88 F aux " pièces détachées et divers " et pour 722 710,02 F, aux voitures neuves ; qu'elle n'est pas fondée maintenant à élever des critiques d'ordre général sans mettre la Cour en état de d'examiner l'article du compte incriminé et d'en vérifier la régularité ; qu'à cet égard également, ses contestations doivent être rejetées ;

Que l'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

Par ces motifs et ceux non contraires des premiers juges : Déclare sans objet la demande de vérification d'écritures et réformant le jugement entrepris, Déclare que la société Montoise Automobiles et les deux syndics Maîtres Crouzet et Berthe qui l'assistent mal fondées en leurs prétentions relatives à la responsabilité précontractuelle de la société Automobiles Peugeot, à l'abus de son droit de ne pas présenter un nouveau contrat pour 1981, au comblement du passif, à la reprise du stock de pièces détachées et à l'application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; Les en déboute ; Déboute M. Paul Cordier de ses demandes formées en son nom personnel, en paiement de dommages-intérêts et au titre de son recours en garantie ; Déclare la société Automobiles Peugeot recevable en sa demande reconventionnelle, Fixe le montant de sa créance sur la société Montoise Automobiles à la somme de 989 817,90 F et admet sa production au passif de cette dernière pour ce montant, Condamne la société Montoise Automobiles et ses deux co syndics aux dépens de première instance et d'appel y compris les frais d'expertise, et admet Maître Bourdais Virenque, avoué, au bénéfice de l'article 699 du code susvisé.