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Décisions

CA Paris, 5e ch. B, 21 septembre 1990, n° 88-16126

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Massey-Ferguson (SA)

Défendeur :

Établissements Hubert (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Schoux

Conseillers :

M. Bourelly, Mme Vigneron

Avoués :

SCP Regnier-Sevestre, Me Bolling

Avocats :

Mes Briants, Imbach.

T. com. Paris, 3e ch., du 18 mai 1988

18 mai 1988

Par déclaration remise au secrétariat greffe le 13 juillet 1988, la société anonyme Massey Ferguson a interjeté appel du jugement du 18 mai 1988 par lequel le Tribunal de commerce de Paris l'a déclarée responsable de la résiliation du contrat la liant à la société anonyme Etablissements Hubert (ci-après dénommée société Hubert), l'a condamnée à payer à cette société la somme provisionnelle de 100 000 F à titre de dommages et intérêts et avant dire droit sur le préjudice subi par la société Hubert, a ordonné une expertise.

La société Massey Ferguson expose que la société Hubert est le distributeur agréé de ses matériels agricoles en vertu d'un contrat du 1er janvier 1983, renouvelable chaque année par tacite reconduction sauf dénonciation trois mois avant terme. Elle soutient que le tribunal a considéré, à tort, qu'elle avait résilié ce contrat sans respecter le préavis qui expirait le 31 octobre 1985 alors que par lettre du 11 septembre 1985, elle a clairement signifié à la société Hubert que le contrat de distribution agréé ne sera pas renouvelé à compter du 1er février 1986 en lui indiquant qu'il sera remplacé par un contrat de concessionnaire exclusif.

Par ailleurs, la société Massey Ferguson fait grief au tribunal d'avoir rejeté sa demande d'indemnisation de son préjudice consécutif aux manœuvres frauduleuses de la société Hubert qui ont consisté à vouloir conserver la distribution des matériels Massey Ferguson tout en acceptant d'être le concessionnaire exclusif des matériels concurrents Fiat.

En conséquence la société Massey Ferguson demande d'infirmer le jugement déféré en déboutant la société Hubert de ses prétentions et en la condamnant à lui payer les sommes de 100 000 F et de 25 000 F respectivement à titre de dommages et intérêts et de frais non répétibles.

La société Hubert réplique qu'elle n'a pas reçu la lettre du 11 septembre 1985 et que la société Massey Ferguson a résilié, sans motifs valables le contrat qui s'était renouvelé par tacite reconduction du 1er février 1986 au 31 janvier 1987, en l'absence de dénonciation au plus tard le 31 juillet 1985, conformément à l'article 8 alinéa 2 de ce contrat.

La société Hubert allègue également qu'elle n'était pas tenue de distribuer exclusivement du matériel Massey Ferguson et qu'elle pouvait donc distribuer également du matériel concurrent Fiat.

La société Hubert conclut donc à la confirmation du jugement en ce qu'il a déclaré la société Massey Ferguson responsable de la rupture des relations contractuelles mais demande d'évoquer la liquidation de son préjudice en condamnant la société Massey Ferguson à lui payer la somme de 1 100 000 F déduction faite de la provision précédemment allouée, et ce, conformément à l'estimation de l'expert judiciaire, ainsi que la somme de 200 000 F en réparation de son préjudice moral et commercial et celle de 25 000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

La société Massey Ferguson rétorque que la dénonciation du contrat litigieux n'a pas entraîné une chute du chiffre d'affaires de la société Hubert et ne lui a donc causé aucun préjudice.

Sur le fond du litige :

Considérant que par acte sous seing privé daté du 1er janvier 1983 la société Massey Ferguson a confié à la société Hubert la distribution de ses matériels agricoles et de leurs pièces de rechange, étant précisé que ce contrat qui prendra fin le 31 octobre suivant, pourra se renouveler par tacite reconduction pour une durée d'une année sauf dénonciation par l'une ou l'autre des parties, par lettre recommandée avec avis de réception, au plus tard le 31 juillet de chaque période annuelle,

Considérant qu'à compter de l'année 1984, la société Massey Ferguson a fixé son exercice annuel du 1er février au 31 janvier et en conséquence a reporté à cette date l'échéance du contrat susvisé, ce qui est expressément admis par la société Hubert ;

Considérant que la seule modification de la date d'échéance du contrat n'a pas entraîné de modification de la date limite de préavis qui avait été fixée le 31 juillet de chaque période annuelle par la volonté commune des parties et non trois mois avant le terme du contrat.

Considérant que par lettre du 22 janvier 1986, la société Massey Ferguson avisait la société Hubert qu'elle dénonçait le contrat de distribution agréé qui venait à expiration le 31 de ce même mois ;

Mais considérant que ce contrat qui n'avait pas été dénoncé avant le 31 juillet 1985, s'est renouvelé par tacite reconduction pour une période d'une année à compter du 1er février 1986 selon les mêmes stipulations;

Que la société Massey Ferguson a donc commis une faute en rompant unilatéralement les relations contractuelles ce qui a causé un préjudice à la société Hubert en la privant brutalement de la commercialisation des matériels Massey Ferguson;

Considérant qu'il n'est pas opportun d'évoquer la liquidation du préjudice de la société Hubert ;

Considérant que compte tenu des éléments susvisés, il y a lieu de confirmer la provision que le tribunal a allouée à la société Hubert ;

Considérant que la société Hubert, qui n'était pas tenue de distribuer exclusivement des matériels Massey Ferguson, n'a commis aucune faute en distribuant également des matériels concurrents Fiat;

Considérant qu'il n'y pas lieu de rechercher si la société Hubert s'était engagée à vendre exclusivement des matériels Fiat dès lors que la société Massey Ferguson est tiers au contrat liant la société Hubert à la société Fiat et que seule celle-ci pourrait éventuellement se plaindre de la violation de l'obligation d'exclusivité souscrite à son profit par la société Hubert ;

Que c'est donc à bon droit que dans ses motifs le tribunal a débouté la société Massey Ferguson de sa demande reconventionnelle en paiement de dommages et intérêts ;

Considérant qu'eu égard aux circonstances de la cause, il paraît inéquitable de laisser à la charge de la société Hubert ses frais non répétibles exposés en appel à concurrence de la somme de 3 000 F ;

Par ces motifs : Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions, Dit n'y avoir lieu à évoquer la liquidation des dommages et intérêts de la société anonyme Etablissements Hubert, Y ajoutant, Déboute la société anonyme Massey Ferguson de ses prétentions, Condamne la société anonyme Massey Ferguson à payer à la société anonyme Etablissements Hubert la somme de 3 000 F au titre des frais non répétibles exposés en appel, Condamne également la société anonyme Massey Ferguson aux dépens d'appel, Accorde un droit de recouvrement direct au profit de Maître Bolling, avoué.