Cass. com., 3 décembre 1991, n° 90-13.306
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
PARTIES
Demandeur :
Castanet
Défendeur :
Tricots Alain Manoukian (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Bézard
Rapporteur :
M. Leclercq
Avocat général :
M. Curti
Avocats :
SCP Matteï-Dawance, Me Choucroy.
LA COUR : - Sur le moyen unique, pris en ses cinq branches : - Vu les articles 1134 et 1184 du Code civil ; - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 11 janvier 1990), que Mme Castanet est devenue franchisée de la société Alain Manoukian pour la commercialisation de vêtements féminins, par deux contrats lui accordant " l'exclusivité de la franchise pour l'ouverture de boutiques pour la ville de Toulouse et sa zone urbaine ", la société Alain Manoukian se réservant la vente de ses produits dans le même " secteur géographique par le canal de magasin non franchisé, en particulier ses anciens clients, ainsi que par les grands magasins " ; qu'en 1985, elle a constaté, à proximité de son propre fonds, l'ouverture d'un autre magasin exploité par la société Cambus et vendant exclusivement des articles de la société Alain Manoukian, sous l'enseigne de celle-ci ;
Attendu que pour débouter Mme Castanet de sa demande de résiliation des contrats aux torts de la société Alain Manoukian et en dommages-intérêts, la cour d'appel a retenu que l'exclusivité reconnue à Mme Castanet n'était pas absolue, ne s'appliquant ni à la commercialisation d'articles autres que les vêtements féminins, ni à l'usage de la marque ou de l'enseigne, et qu'en l'espèce, la preuve n'a pas été apportée de ce que la société Cambus ait vendu sous la marque Alain Manoukian seulement de tels vêtements, ni qu'un contrat de franchise ait été conclu entre elle et la société Alain Manoukian ;
Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs, sans rechercher, comme elle y était invitée par Mme Castanet dans ses conclusions, si les méthodes de vente mises en œuvre dans le magasin de la société Cambus, avec le concours de la société Alain Manoukian, l'organisation des lieux, les caractéristiques attractives pour la clientèle, les contraintes imposées à l'exploitante même et les conditions de son approvisionnement n'étaient pas semblables à celles auxquelles étaient soumis les franchisés et ne leur portaient ainsi pas une concurrence incompatible avec l'exclusivité reconnue à ceux-ci, sous les seules exceptions prévues pour des modes de commercialisation différents, ainsi qu'avec la collaboration que leur avait promise la société Alain Manoukian en vue du développement de leurs ventes, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision;
Par ces motifs : casse et annule, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 11 janvier 1990, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon.