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Décisions

Cass. com., 7 avril 1992, n° 90-21.260

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Pepsico (Inc), Pepsi-Cola France (SARL)

Défendeur :

Source Perrier (Sté), Compagnie française de boissons gazeuses, Société générale des grandes sources d'eaux minérales françaises

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bézard

Rapporteur :

M. Gomez

Avocat général :

M. Raynaud

Avocats :

Me Choucroy, SCP Delaporte, Briard.

T. com. Paris, 18e ch., sect. B, du 25 m…

25 mai 1990

LA COUR : - Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué (Paris, 20 septembre 1990) que le 20 mars 1962, la société Pepsi-Cola, devenue Pepsico (société Pepsico) et la Compagnie Française de boissons gazeuses aux droits de laquelle sont venues la société Source Perrier et la Société générale de grandes sources d'eaux minérales françaises (société Perrier) ont conclu un contrat aux termes duquel la société Perrier s'engageait pour une durée de 60 ans, à mettre en bouteille, à partir d'un concentré fourni exclusivement par la société Pepsico et selon un conditionnement fixé par celle-ci, une boisson gazeuse destinée à être distribuée sur le territoire français et en Principauté de Monaco, la société Perrier à s'interdisant de mettre en bouteille et de commercialiser aucune autre boisson semblable à une boisson au cola, ou comportant dans sa dénomination le mot " Cola " ou imitant la boisson produite à partir du concentré de la société Pepsico ; qu'à partir de 1988, des difficultés résultant de ce que la société Perrier, devenue concessionnaire d'autres sociétés, commercialisait d'autres boissons gazeuses que celle prévue par le contrat, ont surgi entre ces deux sociétés, que le 31 octobre 1989, la société Pepsico a résilié unilatéralement le contrat, puis, le 6 décembre 1989, assigné la société Perrier en caducité de la clause d'exclusivité et en nullité de la totalité du contrat ; que la cour d'appel a considéré que les dispositions de l'article 1er de la loi du 14 octobre 1943 n'étaient pas applicables en la cause ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche : - Vu l'article 1er de la loi du 14 octobre 1943 ; - Attendu qu'aux termes de ce texte, est limitée à 10 ans la durée maximum de toute clause d'exclusivité par laquelle l'acheteur, cessionnaire ou locataire de bien meubles s'engage vis-à-vis du vendeur, cédant ou bailleur, à ne pas faire usage d'objets semblables ou complémentaires en provenance d'un autre fournisseur;

Attendu qu'après avoir retenu que l'engagement unilatéral pris par la société Perrier de s'approvisionner exclusivement auprès de la société Pepsico en concentré servant à la fabrication de la boisson gazeuse s'analysait en un accord de distribution exclusive, l'arrêt retient pour écarter l'application au contrat de l'article 1er de la loi du 14 octobre 1943, que l'obligation mise à la charge de la société Perrier de n'acheter qu'à la société Pepsico les produits visés au contrat ne modifiait pas l'économie de la convention qui avait pour objet la fabrication et la commercialisation de ces produits à partir du concentré fourni par la société Pepsico ;

Attendu qu'en statuant ainsi alors, qu'elle se trouvait en présence d'une clause d'exclusivité, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et sur la troisième branche du moyen : - Vu l'article 1er de la loi du 14 octobre 1943, ensemble l'article 1338 du Code civil ; - Attendu que les actes dont la nullité est absolue étant dépourvue d'existence légale ne sont pas susceptibles de confirmation;

Attendu que la Cour d'appel retient encore que l'exécution sans réserve par la société Pepsico de l'accord d'exclusivité jusqu'au 5 octobre 1989 et la conclusion de contrats annuels de publicité traduisait la volonté de renoncer à se prévaloir de la nullité de la clause d'exclusivité ;

Attendu qu'en statuant ainsi alors que les relations contractuelles des parties entraient dans les prévisions de la loi du 14 octobre 1943, dont l'application peut être demandée par toute personne y ayant intérêt, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les deuxième, quatrième et cinquième branches du moyen, casse et annule, en toutes dispositions, l'arrêt rendu le 20 septembre 1990, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles.