Cass. soc., 19 juillet 1988, n° 85-43.886
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Blondel
Défendeur :
Séphériades (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Goudet (conseiller le plus ancien faisant fonction)
Rapporteur :
M. Goudet
Avocat général :
M. Dorwling-Carter
Avocats :
M. Hennuyer, SCP Guiguet, Bachellier, Potier de la Varde.
LA COUR : - Sur le premier moyen, pris en ses deux branches : - Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Douai, 22 mai 1985), que M. Blondel a été engagé le 25 avril 1957, en qualité de VRP, par la société Séphériades ; que, le 1er janvier 1976, a été conclu entre les parties un nouveau contrat se substituant au contrat initial et contenant une clause selon laquelle l'employeur se réservait la faculté de modifier la composition du secteur attribué au VRP ; qu'en janvier 1981, la société a proposé à l'ensemble de ses représentants une modification du système de rémunération, le fixe étant maintenu au taux de 1980, mais la commission passant de 2,1 % à 2,4 % ; que M. Blondel ayant refusé cette proposition, la société, par lettre du 14 mai 1981, lui a offert soit d'accepter la modification du mode de rémunération mais avec l'attribution d'un nouveau département, soit de s'en tenir à la revalorisation du fixe avec maintien de la commission de 2,1 % et maintien du même secteur ; que M. Blondel a opté pour la seconde solution ; qu'en octobre 1981, la société a procédé, avec effet au 1er janvier 1981, à une réorganisation des secteurs de tous ses représentants ; que M. Blondel soutenant que par l'accord du 14 mai 1981 s'était opérée une novation du contrat conclu le 1er janvier 1979, privant la société de la faculté de modifier la composition de son secteur, a refusé d'appliquer les nouvelles directives de l'employeur ; qu'ayant persisté dans son refus, malgré plusieurs mises en demeure, M. Blondel a été, après entretien, licencié, le 19 mars 1982, avec effet immédiat ;
Attendu que M. Blondel fait grief à l'arrêt de l'avoir débouté de ses demandes en paiement des indemnités de rupture et d'une indemnité pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a dénaturé l'accord novatoire du 14 mai 1981, violant ainsi les articles 1134, 1271 et suivants du Code civil, L. 122-4 et suivants, L. 751-1 et suivants du Code du travail ; alors, d'autre part, que la modification durable d'un secteur par l'employeur refusée par le VRP rend la rupture imputable à l'employeur, a fortiori, lorsque, comme M. Blondel l'avait souligné dans ses conclusions d'appel demeurées sur ce point sans réponse, elle se traduit par une augmentation considérable de la clientèle à prospecter ; qu'ainsi, l'arrêt attaqué procède d'une méconnaissance des articles L. 122-4 et suivants et L. 751-1 et suivants du Code du travail, et 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu, d'une part que la cour d'appel a relevé en l'espèce que l'accord du 14 mai 1981, conclu seulement en vue de régler un différend portant sur le mode de rémunération, ne comportait, en cas de maintien, sur ce point, du statu quo, aucune garantie de secteur et ne substituait pas de nouvelles clauses à d'anciennes ; qu'appréciant ainsi souverainement la commune intention des parties, elle a légalement justifié sa décision ; Attendu, d'autre part, que la cour d'appel a relevé, en premier lieu, que le nouveau secteur attribué à M. Blondel n'imposait pas à celui-ci des distances plus longues à parcourir que l'ancien, en second lieu, que la société s'était engagée à prendre en charge les diminutions de rémunération consécutives à la modification du secteur; qu'en l'état de ces motifs, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre M. Blondel dans le détail de son argumentation, n'a fait qu'user de son pouvoir souverain d'appréciation en décidant que les relations contractuelles entre les parties n'avaient subi aucune modification substantielle; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Sur le second moyen, pris en ses deux branches : - Attendu que M. Blondel reproche encore à la cour d'appel d'avoir statué comme elle l'a fait alors, selon le pourvoi, d'une part, que la faute grave se trouvait exclue dès lors que le comportement du représentant était dû à un désaccord sur la modification unilatérale par l'employeur des secteurs de représentation qu'il prétendait lui attribuer et que l'arrêt ne constate pas l'existence pour l'employeur d'un préjudice certain résultant pour lui de cette prétendue faute grave, alors, d'autre part, que dans ses conclusions d'appel demeurées sans réponse, l'intéressé avait souligné que son ancienneté de vingt-quatre ans comme l'absence de tout reproche antérieur était de nature à atténuer la gravité de la faute invoquée ; qu'ainsi, l'arrêt attaqué a méconnu les articles L. 122-5, L. 122-8, L. 122-9 du Code du travail et 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que la cour d'appel a relevé que M. Blondel n'acceptant pas, malgré des mises en demeure réitérées, d'exécuter les instructions de son employeur, avait continué à visiter la partie de son ancien secteur attribuée à un autre représentant, au risque de nuire à la crédibilité de la société, et refusé de visiter ses nouveaux clients, au risque de les voir perdus pour la société ; qu'elle a pu en déduire, sans être tenue de suivre le VRP dans le détail de son argumentation, que l'attitude de celui-ci constituait une faute grave justifiant la rupture immédiate du contrat de travail ; Qu'ainsi, le moyen n'est fondé dans aucune de ses branches ;
Par ces motifs : Rejette le pourvoi.