Cass. soc., 14 novembre 1990, n° 87-41.134
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
PARTIES
Demandeur :
Invernizzi
Défendeur :
Société de Créations Graphiques
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Cochard
Rapporteur :
Mlle Sant
Avocat général :
M. Chauvy
Avocats :
SCP Delaporte, Briard, SCP Masse-Dessen, Georges, Thouvenin.
LA COUR : - Sur le premier moyen : - Attendu selon l'arrêt attaqué (Paris, 3 décembre 1986) qu'engagée par la Société de créations graphiques le 10 mars 1980, en qualité de "contact woman-secrétaire de fabrication", Mme Invernizzi, promue au poste de directeur des ventes à compter du 1er janvier 1982, a démissionné par lettre du 26 octobre 1982 pour le 31 janvier 1983 ; qu'ayant été dispensée d'exécuter son dernier mois de préavis, elle a quitté l'entreprise le 31 décembre 1982 ;
Attendu que Mme Invernizzi fait grief à l'arrêt de lui avoir dénié la qualité de représentant statutaire et de l'avoir en conséquence déboutée de ses demandes de commissions sur échantillonnage et d'indemnité pour clause de non-concurrence, alors, selon le moyen, d'une part qu'en déclarant que Mme Invernizzi ne prenait pas d'ordres, la cour d'appel a dénaturé par omission les attestations versées aux débats par la salariée qui établissaient que la "contact woman" prenait les commandes, négociait les conditions particulières de remise et étudiait les devis de sorte que ses fonctions n'étaient pas limitées à l'entretien de bons rapports commerciaux entre les clients et la société, et a ainsi violé l'article 1134 du Code civil ; alors, d'autre part, que l'intermédiaire qui remplit les conditions de l'article L. 751-1 du Code du travail se voit attribuer impérativement la qualité de VRP, nonobstant la stipulation expresse du contrat écartant le statut, le cumul d'activités du salarié au sein de la société, le défaut de carte professionnelle ou le régime fiscal auquel le salarié a été soumis ; que, dès lors, en l'espèce, peu importait que le contrat de travail de Mme Invernizzi ait fait référence à la convention collective nationale des imprimeries de labeur et industries graphiques, que la salariée ait exercé concomitamment les fonctions de directrice des ventes et de "contact woman", qu'elle n'ait pas demandé la carte professionnelle et les avantages fiscaux qui y sont attachés ; qu'il s'ensuit que ces motifs retenus par la cour d'appel sont inopérants et ne pouvaient permettre d'écarter le statut de voyageur, représentant, placier ; qu'ainsi, la cour d'appel a violé l'article L. 751-1 du Code du travail ;
Mais attendu qu'appréciant la valeur et la portée des preuves qui lui étaient soumises, hors toute dénaturation,la cour d'appel a retenu que la salariée n'avait que très occasionnellement pris elle-même certaines commandes ; qu'elle a pu en déduire que la salariée n'avait pas la qualité de représentant statutaire ; que le moyen, qui n'est pas fondé dans sa première branche et qui, pour le surplus, critique des motifs surabondants de l'arrêt, ne saurait être accueilli ;
Sur le troisième moyen : - Attendu que la salariée fait encore grief à l'arrêt de l'avoir déboutée de sa demande en paiement d'un rappel de congés payés prenant en compte des primes d'objectif, alors, selon le moyen, que doivent être prises en compte pour le calcul de l'indemnité de congés payés les primes liées à la production de l'entreprise ou à l'activité du salarié, telles que primes de rendement, de productivité, d'assiduité, primes sur les résultats ou sur les bénéfices ; que, dès lors, en excluant de l'assiette de calcul de l'indemnité de congés-payés les primes mensuelles versées à Mme Invernizzi, la cour d'appel a violé l'article L. 223-11 du Code du travail ;
Mais attendu qu'ayant relevé que les primes qui étaient calculées sur le chiffre d'affaires réalisé dans l'entreprise dans l'année ou dans le mois n'étaient pas effectuées par la prise des congés annuels, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le deuxième moyen : - Vu l'article L. 122-8 du Code du travail ; - Attendu que selon ce texte, la dispense par l'employeur de l'exécution du travail pendant le délai-congé ne doit entraîner, jusqu'à expiration de ce délai, aucune diminution de salaires et avantages que le salarié aurait reçus s'il avait accompli son travail ;
Attendu que pour débouter la salariée de sa demande en paiement de prime pour janvier 1983, ainsi que celle incidente de congés payés, la cour d'appel a énoncé que l'intéressée, dispensée d'exécuter le préavis, ne pouvait prétendre réclamer la prime d'objectif du secteur, dès lors qu'elle ne pouvait de toute évidence atteindre ce mois là son objectif ; Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Par ces motifs : Casse et annule, mais seulement en celles de ses dispositions relatives à la prime pour janvier 1983 et l'incidence de congés payés, l'arrêt rendu le 3 décembre 1986, entre les parties, par la Cour d'appel de Paris ; Remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Paris, autrement composée ;