Cass. soc., 6 février 1990, n° 86-44.185
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Allard-Nemery (Sté)
Défendeur :
Dias
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Cochard
Rapporteur :
M. Saintoyant
Avocat général :
M. Graziani
Avocats :
Me Parmentier, SCP Desaché, Gatineau.
LA COUR : - Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches : - Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Reims, 30 juin 1986) que M. Dias, VRP multicartes, a été engagé en mai 1957 par la société Allard-Nemery, fonderie de bronze, en qualité de représentant ; que suivant l'article 7 d'un contrat écrit du 10 avril 1968, la société a confirmé l'accord donné à l'exercice d'une activité de ce représentant pour d'autres entreprises non concurrentes qui étaient énumérées et M. Dias s'est engagé à ne pas accepter d'autres représentations sans l'accord des établissements Allard ; que par un article 4 d'un avenant du 1er décembre 1977, il a été stipulé que tout manquement à cette dernière obligation constituerait une faute grave justifiant la rupture immédiate ; que par lettre du 28 novembre 1983, la société a licencié M. Dias sans préavis, en lui reprochant l'insuffisance de son activité professionnelle entraînant la non-réalisation des objectifs durant les années 1980 et 1981 et la prise d'une nouvelle représentation sans autorisation ;
Attendu que la société fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer à M. Dias une indemnité de préavis et une indemnité de clientèle, alors, selon le moyen, qu'aux termes de l'article 4 du contrat de représentation, le représentant s'engageait à " ne prendre en cours de contrat aucune représentation sans l'autorisation de la maison représentée ; que tout manquement de sa part aux engagements résultant de cet article pourra être considéré comme faute grave entraînant à la seule volonté de la maison représentée la rupture immédiate du contrat sans indemnité de quelque sorte que ce soit " ; qu'après avoir constaté que M. Dias avait pris une nouvelle représentation au service de la société Bellier, sans autorisation de la société Allard-Nemery, la cour d'appel ne pouvait lui accorder des indemnités de préavis et de licenciement ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ; alors qu'il résulte de l'article L. 751-9 du Code du travail que les indemnités de clientèle et de préavis ne sont pas dues en cas de faute grave du VRP ; qu'après avoir constaté une baisse du chiffre d'affaires liée à une baisse d'activité elle-même provoquée par l'entrée au service d'une autre société depuis deux ans, sans autorisation de la société représentée, la cour d'appel était tenue de déduire l'existence d'une faute grave privatrice des indemnités de clientèle et de préavis ; qu'en accordant néanmoins ces indemnités, la cour d'appel a violé l'article L. 751-9 du Code du travail ;
Mais attendu que les dispositions de l'article L. 751-7 du Code du travail étant d'ordre public, il appartient aux juges du fond non seulement de constater la réalité des faits imputés à faute, mais encore d'apprécier si le caractère de gravité que leur attribue l'employeur, le contrat ou le règlement intérieur ne tend pas à faire échec aux prescriptions de la loi ;
Attendu que dès lors, après avoir relevé que l'intéressé avait, sans autorisation préalable, accepté de représenter une autre maison, la cour d'appel qui a constaté que les produits fabriqués par celle-ci n'étaient pas concurrentiels de ceux de la société Allard-Nemery et que si le chiffre d'affaires de ce VRP avait baissé, ces résultats étaient imputables à la fois à une diminution de son activité et à la conjoncture, a pu, sans violer les textes visés au moyen, décider qu'en dépit de la qualification que le contrat donnait au premier, les manquements reprochés ne constituaient pas une faute grave, susceptible de le priver des indemnités de préavis et de clientèle; que le moyen n'est donc pas fondé en ses deux premières branches ;
Sur le moyen unique, pris en ses troisième et quatrième branches : (sans intérêt);
Par ces motifs : Rejette le pourvoi.