CA Nîmes, ch. soc., 15 septembre 1988, n° 88-1169
NÎMES
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Hilpert (Epoux)
Défendeur :
Etablissements Economiques Casino Guichard Perrachon et Cie
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Volpei
Conseillers :
MM. Deltel, Cousseau
Avocats :
Mes Garnier, Pesseguier
Faits, procédure et prétentions des parties :
Le 16 mars 1988, les époux Michel Hilpert ont régulièrement formé un contredit à l'encontre du jugement rendu le 2 mars 1988 par le Conseil de prud'hommes d'Avignon qui s'était déclaré incompétent ratione materiae au profit du tribunal de commerce de la même ville, au motif que les actions qui lui étaient soumises concernaient les modalités commerciales d'exploitation de la succursale dont ils avaient accepté la gérance de la part des Etablissements Casino et non les conditions du travail, même si les faits qui soutendaient ces actions avaient été la cause de la résiliation desdits contrats de gérance et s'ils servaient de fondement aux demandes en dommages-intérêts des indemnités diverses formées par les contredisants.
Ils exposent, aussi bien dans les motifs de leur contredit que dans leurs conclusions ultérieures, qu'il appartenait au conseil de prud'hommes de statuer sur les motifs de la résiliation de leur contrat, dont ils contestaient le bien fondé et qui avait abouti à la suppression de leur emploi ; que cette situation les apparentait en fait aux salariés et que la baisse du chiffre d'affaires qui leur était reprochée avait son origine dans les mauvaises conditions de travail, ce qui justifiait la compétence prud'homale.
Les Etablissements Casino sollicitent la confirmation du jugement attaqué aux motifs d'une part, que lesdits contrats étaient des contrats de co-gérants non salariés conformes aux dispositions de la loi du 3 juillet 1944 relatif au statut des gérants mandataires des maisons d'alimentation à succursales multiples, reprises dans les dispositions de l'article 782.7 du Code du travail et d'autre part, que les causes du licenciement reposaient sur une baisse du chiffre d'affaires, ce qui se rapporte aux modalités commerciales d'exploitation des succursales, dont les dispositions de l'article L.782-5 du Code du travail attribuent le contentieux aux tribunaux de commerce.
Discussion et motifs de la décision de la cour :
1/ Sur la jonction :
Attendu que par erreur, l'unique contredit formé contre l'unique jugement du conseil de prud'hommes, par les époux Hilpert, a fait l'objet de deux enrôlements devant la cour ; qu'il y a lieu d'ordonner la jonction de ses deux procédures ;
2/ Sur le fond :
Attendu que le législateur a voulu que les relations contractuelles des gérants non salariés et des entreprises à succursales multiples soient régies sur certains points par les dispositions du Code du travail pour que ces gérants disposent d'une certaine protection sociale, équivalente à celle des salariés ;
Attendu que notamment, les dispositions de l'article L.782-5 du Code du travail disposent que les différends entre ces entreprises et leurs gérants non salariés relèvent des conseils de prud'hommes lorsqu'ils ont pour origine les conditions de travail de ces derniers ;
Attendu, par contre, que les dispositions du premier alinéa dudit article précisent que lorsque les différends concernent les modalités commerciales d'exploitation de ces succursales, ils relèvent de la compétence des tribunaux de commerce ;
Attendu qu'il suffit donc que le litige concerne les modalités commerciales d'exploitation pour que les juridictions consulaires soient compétentes, sans qu'en soit exclue l'une quelconque des conséquences que ces différends aient pu entraîner et notamment une résiliation du contrat de gérance;
Attendu au surplus qu'aucune disposition du Code du travail ne donne expressément compétence au conseil de prud'hommes pour statuer sur les contestations découlant de la résiliation des contrats des gérants non salariés;
Attendu qu'il est incontestable que le différend qui oppose les parties concerne les modalités commerciales d'exploitation de la succursale dont les époux Hilpert assuraient la co-gérance puisqu'il porte sur la baisse du chiffre d'affaires et ses causes;
Attendu qu'il n'appartient donc pas à la juridiction prud'homale de statuer sur ce différend commercial pour dire s'il était fondé ou non;
Attendu que c'est donc à bon droit que le Conseil de prud'hommes d'Avignon s'est déclaré incompétent, ratione materiae, au profit du tribunal de commerce de la même villeet qu'il y a lieu de confirmer cette décision ;
Par ces motifs et ceux non contraires des premiers juges, LA COUR : Statuant publiquement, contradictoirement, en matière prud'homale et en dernier ressort ; Ordonne la jonction des deux procédures N° 1179 et 1180-88 ; En la forme, reçoit le contredit ; Au fond, confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ; Condamne les époux Hilpert aux éventuels dépens d'appel.