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Décisions

Cass. soc., 13 mars 1991, n° 88-43.638

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Cacao Barry (Sté)

Défendeur :

Michelet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Guermann (faisant fonction)

Rapporteur :

M. Ferrieu

Avocat général :

M. Graziani

Avocats :

SCP Vier, Barthélemy, SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez.

Limoges, ch. soc., du 31 mai 1988

31 mai 1988

LA COUR : - Vu la connexité, joint les pourvois n° 88-43.638 et 88-43.728 ; - Donne acte à M. Michelet du désistement de son pourvoi en tant qu'il est dirigé contre l'arrêt rendu le 13 mai 1986 par la cour d'appel de Limoges ; - Sur la première branche du second moyen du pourvoi formé par la société Cacao Barry : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Limoges, 31 mai 1988), que M. Michelet, engagé en 1971 par la société Cacao Barry en qualité de représentant à carte unique, a été licencié le 9 mars 1983 pour avoir refusé la transformation de son contrat de travail en contrat d'attaché commercial, entraînant notamment la perte du statut de VRP et une modification de son mode de rémunération aboutissant dans l'immédiat à une réduction de celle-ci ;

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir condamné la société à verser à son ancien salarié une somme forfaitaire à titre de solde de "commissions sur échantillonnages", alors, selon le moyen, qu'en allouant de telles commissions pour la période postérieure au 10 septembre 1983, tout en constatant que l'intéressé n'établissait pas l'existence d'un usage l'autorisant à percevoir de telles commissions pour une durée excédant celle de trois mois ayant expiré à la date susvisée et pour laquelle il avait été intégralement rempli de ses droits, la cour d'appel n'a pas déduit de ses propres constatations les conséquences légales qui s'en évinçaient nécessairement au regard des dispositions de l'article L. 751-8 du Code du travail ;

Mais attendu qu'ayant relevé qu'il résultait des documents versés aux débats que les commissions dont le représentant réclamait le règlement concernaient des commandes par lui recueillies mais dont l'exécution s'échelonnait sur douze mois, la cour d'appel a pu en déduire, sans se contredire, ni violer l'article visé au moyen, que le représentant restait créancier des commissions afférant à l'exécution différée de ces contrats ;

Mais sur la seconde branche du second moyen du pourvoi de la société Cacao Barry et la première branche du second moyen du pourvoi de M. Michelet : - Vu l'article 1134 du Code civil ; - Attendu que, pour allouer au salarié, après avoir retenu le bien-fondé de la demande, une somme arbitrée forfaitairement à titre de complément de commissions, la cour d'appel a énoncé qu'une expertise complémentaire serait aléatoire, coûteuse et longue ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'une créance purement salariale ne peut donner lieu à une évaluation forfaitaire, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Et sur le premier moyen du pourvoi de la société Cacao Barry : - Vu les articles L. 122-14-3, L. 122-14-4 du Code du travail et 455 du nouveau Code de procédure civile ; - Attendu que pour décider que le licenciement du salarié était dépourvu de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel s'est bornée à relever que l'intéressé avait pu, à bon droit, refuser une modification substantielle de son contrat de travail ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le fait que la rupture soit imputable à l'employeur ne privait pas nécessairement le licenciement de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;

Et sur la première branche du premier moyen du pourvoi de M. Michelet : - Vu les articles L. 751-9 du Code du travail et 14 de l'accord national interprofessionnel des VRP du 3 octobre 1975 ; - Attendu que pour débouter le salarié de sa demande d'indemnité de clientèle, la cour d'appel a retenu que l'intéressé, qui avait reçu et effectivement encaissé les sommes versées par son employeur à titre d'indemnités conventionnelle ou spéciale de rupture, non cumulables avec l'indemnité de clientèle, avait renoncé à celle-ci ;

Qu'en statuant ainsi, alors que seule une renonciation expresse du salarié à l'indemnité de clientèle, dans les conditions prévues par l'article 14 de l'accord national interprofessionnel des VRP du 3 octobre 1975, est de nature à affranchir l'employeur de son obligation au paiement de ladite indemnité, la cour d'appel a violé les textes susvisés;

Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche des deux moyens du pourvoi de M. Michelet : Casse et annule, sauf en ce qu'il a reconnu que celui-ci pouvait prétendre à un solde de commissions sur des commandes prises avant son départ, mais dont l'exécution pouvait s'échelonner sur douze mois, l'arrêt rendu le 31 mai 1988, entre les parties, par la cour d'appel de Limoges ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Poitiers.