Cass. soc., 29 janvier 1975, n° 74-40.071
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Sogecopro (Sté)
Défendeur :
Francou
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Hertzog
Rapporteur :
M. Hertzog
Avocat général :
M. Lesselin
Avocats :
Mes Celice, Desaché.
LA COUR : - Sur le premier moyen, pris en ce qui concerne le cumul des commissions de retour sur échantillonnages et de l'indemnité compensatrice de préavis, de la violation des articles 29 k et suivants du livre 1er du Code du travail et 102 du décret du 20 juillet 1972, défaut, contradiction de motifs, manque de base légale : - Attendu que la société Sogecopro fait grief à l'arrêt attaqué (Aix, 11 juillet 1973) de l'avoir condamnée à payer à Francou, représentant qu'elle avait congédié, une indemnité de préavis et d'avoir en même temps admis le droit de l'intéressé à recevoir des commissions de retour sur échantillonnage, alors que l'indemnité compensatrice de préavis et les commissions de retour sur échantillonnage ont le même objet et ne peuvent légalement être cumulées ;
Mais attendu qu'en vertu de l'article 29 n du livre 1er du Code du travail, quelles que soient la cause et la date de la cessation des services du voyageur, représentant ou placier, celui-ci a toujours droit, à titre de salaire, aux commissions et remises sur les ordres, qui, bien que non encore transmis à la date de son départ de l'établissement, sont la suite directe des échantillonnages et des prix faits antérieurement à l'expiration du contrat; que les commissions de retour sur échantillonnage ne font donc pas double emploi avec l'indemnité compensatrice de préavis qui représente la rémunération que l'intéressé aurait dû normalement percevoir pendant la durée du délai congé au cours de laquelle son activité lui aurait permis de réaliser de nouvelles affaires; que le premier moyen n'est donc pas de ce chef fondé ;
Sur le second moyen, pris en ce qui concerne le montant de l'indemnité compensatrice de préavis, de la violation des articles 23 et suivants, 29 k et suivants du livre 1er du Code du travail, 102 et 109 du décret du 20 juillet 1972, défaut, contradiction de motifs et manque de base légale : - Attendu que la société reproche encore à la décision attaquée de l'avoir condamnée à verser à Francou une somme de 8 691,40 F à titre d'indemnité compensatrice de délai congé, aux motifs que la moyenne mensuelle des commissions des neuf derniers mois de travail de Francou, retenue comme base de calcul des diverses indemnités qui lui sont allouées avait été fixée à la somme de 4 134 F en fonction de son chiffre d'affaires, alors que c'est par une erreur que la cour d'appel a calculé la moyenne mensuelle de Francou en prenant pour base le chiffre d'affaires annuel et en le répartissant sur 9 mois et non sur 12 mois ;
Mais attendu que selon les énonciations de la cour d'appel, l'expert désigné par le Conseil des prud'hommes avait évalué l'indemnité compensatrice de préavis à 4 134 F en se fondant sur la moyenne des commissions des 9 derniers mois de travail de Francou ; qu'il ne résulte pas de l'arrêt attaqué et que la société ne justifie pas qu'elle ait en cause d'appel critiqué ce mode de calcul de base déjà adopté par les premiers juges ; d'ou il suit que le moyen est de ce chef nouveau et que mélangé de fait et de droit, il ne saurait être accueilli ;
Par ces motifs : rejette le premier moyen du chef du cumul des commissions de retour sur échantillonnage et de l'indemnité compensatrice de préavis et le second moyen du chef du montant de ladite indemnité ;
Mais sur le premier moyen, pris en ce qui concerne le cumul des indemnités de licenciement de clientèle : - Vu les articles 2 de l'ordonnance n° 67-581 du 13 juillet 1967 et 29 0 du livre 1er du Code du travail ; - Attendu que l'indemnité légale de licenciement instituée par le premier de ces textes est une indemnité minimum ;
Attendu que pour reconnaître à Francou des droits éventuels à la fois à une indemnité de clientèle et à l'indemnité de licenciement prévue par l'article 2 de l'ordonnance du 13 juillet 1967, et ordonner une expertise pour en déterminer les montants, la cour d'appel a énoncé que Francou ne pouvait prétendre qu'à une indemnité de clientèle calculée en fonction de la clientèle créée, apportée ou augmentée depuis qu'il était le représentant de la société et qu'a une indemnité de licenciement en fonction des années passées par lui au service de cette entreprise ; qu'en outre il n'avait commis aucune faute grave susceptible de le priver de ces indemnités de rupture ;
Attendu cependant que l'indemnité de clientèle calculée d'après le dommage résultant pour le représentant de l'impossibilité de continuer à bénéficier des ordres de la clientèle apportée par lui-même à son employeur est destinée comme l'indemnité légale de licenciement à réparer le préjudice subi par le salarié du fait de son départ de l'entreprise, ainsi que cela résulte au surplus de la loi du 9 mai 1973; d'où il suit qu'en reconnaissant à Francou le droit au cumul des deux indemnités, destinées aux mêmes fins, alors que l'indemnité légale de licenciement constituant un minimum, seule la plus élevée était due, les juges du fond ont violé les textes susvisés; et sans qu'il soit besoin d'examiner le second moyen tant qu'il concerne un acompte sur l'indemnité de licenciement ;
Par ces motifs : casse et annule des chefs relatifs au cumul de l'indemnité de clientèle et de l'indemnité de licenciement et à l'acompte sur cette dernière, l'arrêt rendu entre les parties le 11 juillet 1973 par la Cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties au même et semblable état où elles étaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Nîmes.