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Décisions

CA Orléans, ch. com., 29 août 2000, n° 99-02015

ORLÉANS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Tiag France (SARL)

Défendeur :

Saulnier (ès qual.)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président de chambre :

M. Remery

Conseillers :

Mmes Magdeleine, Boury

Avoués :

SCP Laval-Lueger, Me Bordier

Avocats :

Mes Sitterle, Fournier.

T. com. Orléans, du 19 mai 1999

19 mai 1999

Exposé du litige :

LA COUR statue sur l'appel d'un jugement du Tribunal de commerce d'Orléans rendu le 19 mai 1999, interjeté par la société Tiag France, suivant déclarations des 2 juin (n° 2015-99) & 19 juillet 1999 (n° 2221-99), qui ont donné lieu à jonction par ordonnance du 3 août 1999 sous le n° 2015-99.

Pour l'exposé complet des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties, il est expressément renvoyé à la décision déférée et aux dernières conclusions des parties signifiées les 3 et 5 mai 2000.

Dans le present arrêt, il sera seulement rappelé que, par un contrat conclu le 20 mai 1987, et soumis au droit allemand, la société - établie en Allemagne - Tabbert Caravan GmbH, devenue la société Tiag Produktiongesellschaft GmbH (société Tabbert), a confié à M. Haddouk la distribution exclusive sur le territoire francais des caravanes qu'elle fabrique, de marque Tabbert. M. Haddouk ayant éprouvé, surtout à partir de 1996, des difficultés de trésorerie dans ses relations avec la société Tabbert, différents accords ont été conclus entre lui et cette dernière. Ces accords ont donné lieu, notamment, à la signature d'un acte du 16 décembre 1996 intitulé "protocole d'accord", passé entre la société Tabbert et M. Haddouk. Aux termes de cet acte, il était fixé un plafond au montant du crédit-fournisseur, la dette de M. Haddouk envers la société Tabbert était réaménagée au moyen d'un prêt à court terme et des garanties étaient mises en place.

Par lettre de son conseil du 24 juin 1997, la société Tabbert résiliait le contrat de distribution exclusive avec effet immédiat.

Le 13 novembre 1997, un contrat d'agent commercial était conclu entre M. Haddouk et la société Tiag France, société à responsabilité limitée de droit français, immatriculée au registre du commerce et des sociétés depuis le 16 avril 1997 qui, faisant partie du groupe Tabbert, assurait désormais la distribution des produits de cette marque sur le territoire français.

La société Tiag France, cessionnaire des créances de la société Tabbert sur M. Haddouk, concluait avec celui-ci le 13 novembre 1997, en même temps que le contrat d'agent commercial ci-dessus, un nouvel accord aux termes duquel elle lui consentait un prêt à long terme en réaménagement de sa dette.

Face à de nouvelles difficultés, la société Tiag France résiliait le contrat d'agent commercial avec effet au 4 février 1998.

C'est dans ces conditions que M. Haddouk, par un acte d'huissier du 12 juin 1998, assignait la société Tiag France en paiement de dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat d'agent commercial et de diverses sommes.

Par jugement du 29 juillet 1998, le tribunal de commerce d'Orléans prononçait la liquidation judiciaire immédiate de M. Haddouk et désignait M. Saulnier en qualité de liquidateur de la procédure collective, la date de cessation des paiements étant, ensuite, reportée au 29 janvier 1997 par jugement du 21 juillet 1999.

Par le jugement entrepris, le tribunal, sur l'action de M. Haddouk, reprise et complétée par son liquidateur, a condamné la société Tiag France à payer à ce dernier les sommes de 8 948 700 F pour rupture abusive du contrat d'agent commercial et de 17 819 245 F "au titre des garanties opérées à son seul profit sur le patrimoine de M.Haddouk et d'indemnisation pour appropriation du fonds de commerce" de celui-ci, outre diverses autres sommes à titre d'arriéré de commissions, de prix de vente de véhicules d'occasion et de frais de stationnement de caravanes. La société Tiag France a relevé appel de cette décision, dont elle demande l'infirmation, tandis que M. Saulnier, ès qualités, a formé un appel incident.

L'instruction a été clôturée par ordonnance du 9 mai 2000.

Motifs de l'arrêt :

Attendu que la cour, par l'appel principal et l'appel incident, est saisie de plusieurs demandes qu'il convient d'analyser dans l'ordre suivant ;

Sur la rupture abusive du contrat d'agent commercial :

Attendu, d'abord, que le liquidateur s'oppose, y compris, à titre principal, sur cette partie du litige, au sursis à statuer qui est demandé par la société Tiag France, laquelle fait valoir qu'elle a porté plainte avec constitution de partie civile pour abus de confiance à l'encontre de M. Haddouk entre les mains du doyen des juges d'instruction du Tribunal de grande instance d'Orléans ;

Que cette demande de sursis à statuer sera, comme le liquidateur le sollicite, rejetée, dès lors que l'action publique n'a pas, pour les faits que la cour retiendra ci-après, d'influence sur le litige dont elle est saisie ;

Attendu, ensuite, que, même conclue pour une durée déterminée, de trois ans en l'espèce, le contrat d'agent commercial est susceptible d'être résilié à tout moment, sans préavis, par le mandant, en cas de faute grave de l'agent, ainsi qu'en dispose l'article 11, dernier alinéa, de la loi du 25 juin 1991 relative aux rapports entre les agents commerciaux et leurs mandants ;

Attendu, enfin, que, sans qu'il soit nécessaire de retenir les faits de retention d'acomptes reprochés à M. Haddouk dans la plainte analysée ci-dessus, ou de se fonder sur le comportement de ce dernier antérieur à l'entrée en vigueur du contrat d'agent commercial, le 13 novembre 1997, il suffit, pour justifier la résiliation, de retenir qu'à deux reprises au moins, pendant la période couverte par le contrat, M. Haddouk a délibérément méconnu les instructions de son mandant relatives aux reprises de caravanes d'occasion; que, suivant un bon de commande du 28 novembre 1997, ayant donné lieu à observations de la société Tiag France par lettre du 30 décembre 1997, il a ainsi accepté la reprise d'une caravane (appartenant à Mme Hery) en portant la mention "état 'neuve" pour le prix de 67 000 F, alors que cette caravane était endommagée et que le montant de la reprise était excessif; que, suivant bon de commande du 9 janvier 1998, ayant donné lieu à nouveau rappel des instructions du mandant par lettre du 12 janvier 1998, il a encore repris, pour le prix de 78 000 F, une caravane (appartenant à Mme Florès) en portant sur le bon la mention "état impeccable" sans aucune vérification de sa part et alors que, même dans ce cas, la côte ne pouvait, selon le tarif du constructeur qu'il connaissait et devait appliquer, dépasser 43 000 F; que c'est donc à juste titre que la société Tiag France a résilié le contrat d'agent commercial pour méconnaissance délibérée de sa politique tarifaire, notamment sur les reprises de caravanes d'occasion, comme elle le fait valoir en pp. 16, 46 & 47 de ses conclusions d'appel, peu important que la lettre de résiliation du 4 février 1998 fasse état d'un autre motif, purement circonstanciel, dès lors qu'elle n'est que l'ultime courrier adressé à M. Haddouk, après maints rappels des instructions du mandant sur différents points, et qu'elle fait suite à de multiples lettres, dont celles du 30 décembre 1997 et du 12 janvier 1998, particulièrement circonstanciées, l'invitant à changer d'attitude et à respecter ses obligations de mandataire dans l'intérêt de l'image de la marque; qu'il est ainsi démontré que M. Haddouk n'a cessé, pendant toute la période pendant laquelle il était liée à la société Tiag France, depuis le 13 novembre 1997, de mépriser volontairement les instructions de celle-ci, n'hésitant d'ailleurs pas à insulter son personnel parce qu'il lui refusait une nouvelle reprise à prix exorbitant, comme le 30 décembre 1997 (caravane de Mme Doerr), ce qui ne l'empêchait pas de récidiver en janvier avec la caravane de Mme Florés; que l'existence d'une faute grave au sens de l'article 11, dernier alinéa, de la loi du 25 juin 1991 est établie;

Que c'est donc à tort que le tribunal de commerce a accueilli la demande du liquidateur tendant à qualifier d'abusive la rupture du contrat d'agent commercial ; qu'il y a donc lieu d'infirmer le jugement en ce qu'il a alloué au liquidateur la somme de 8 491 200 F à titre de dommages-intérêts pour cette rupture, et, bien entendu, de déclarer non fondé son appel incident tendant à voir porter cette somme à celle de 33 740 000 F ;

Sur la responsabilité de la société Tiag France pour soutien abusif de M. Haddouk, appropriation prétendue du fonds de commerce de celui-ci et détournements d'actifs du débiteur :

Attendu que la société Tiag France fait observer que l'action en responsabilité pour soutien abusif aurait dû, le cas échéant, être dirigée à l'encontre de la société Tabbert, qui n'est pas en cause dans le présent litige, et que, formée à son encontre, elle n'est pas recevable ;

Que le liquidateur oppose d'abord à ce moyen de défense son caractère nouveau, qui le rendrait irrecevable ; que, cependant, outre le fait, qu'il s'agit plus précisément d'une fin de non-recevoir, fondée sur un défaut de qualité qui est proposable en tout état de cause et donc pour la première fois en appel, par application des dispositions de l'article 123 du nouveau Code de procédure civile, l'article 563 du même Code permet aussi d'invoquer, sans limite, des moyens nouveaux devant la cour d'appel, de tels moyens étant irrecevables seulement devant la cour de cassation ; que, par conséquent, la fin de non-recevoir ou le moyen proposé par la société Tiag France sont recevables ;

Que ces moyens sont aussi fondés ; qu'en effet, contrairement à ce que prétend le liquidateur, le fait que la société Tabbert ait cédé à la société Tiag France ses créances sur M. Haddouk, ne suffit pas à la rendre débitrice d'une obligation quasi-délictuelle envers la procédure collective de celui-ci, la cession de créance n'entraînant pas, comme il est soutenu à tort, "la reprise des obligations" de la société Tabbert ; qu'autrement dit, la cession de créance, qui n'est en rien une cession de dettes, n'a pas pour effet de permettre la poursuite de la société Tiag France pour des fautes imputables, le cas échéant, à la société Tabbert ; que, par ailleurs, et alors que ces deux sociétés sont distinctes, mêmes si elles font partie du même groupe, le liquidateur n'allègue, et démontre encore moins, que la société Tiag France serait fictive, ou qu'elle aurait confondu son patrimoine avec celui de la société Tabbert ;

Que, par conséquent, la société Tiag France n'encourt aucune responsabilité pour soutien abusif du fait de l'accord du 16 décembre 1996, passé entre la société Tabbert et M. Haddouk, du fait encore de la résiliation du contrat de distribution exclusive par la société Tabbert, du fait enfin des exigences que contiendrait la lettre de cette dernière du 24 juin 1997, dès lors que cette lettre n'émane pas de la société Tiag France ;

Attendu que le soutien abusif imputable à cette dernière ne peut donc être caractérisé que par des actes ou des faits concomitants ou postérieurs à la signature, le 13 novembre 1997, du contrat d'agent commercial et du second accord de rééchelonnement de la dette de M. Haddouk auquel la société Tiag France est partie ;

Que s'agissant de la conclusion, puis de la résiliation, du contrat d'agent commercial, on ne voit pas en quoi, cependant, elles pourraient par elles-mêmes manifester un soutien abusif à M. Haddouk, si la conclusion s'est faite à des conditions normales, et si la résiliation est intervenue conformément à la loi et aux stipulations contractuelles, ce qui est le cas, ainsi qu'il a été vu ;

Que, par ailleurs, le fait que la société Tiag France, par suite de la résiliation, sur l'initiative de la société Tabbert, du contrat de distribution exclusive, puis de la résiliation du contrat d'agent commercial, soit devenue aujourd'hui le seul distributeur des produits Tabbert en France, au lieu et place de M. Haddouk, ne suffit pas à démontrer qu'elle se serait approprié indûment sa clientèle ou son fonds de commerce, à moins que ne soit prouvée une faute de sa part, qui ne peut guère consister qu'en un abus dans la résiliation du contrat d'agence, lequel abus a été écarté plus haut par la cour ; qu'en réalité, la rupture du contrat d'agent commercial étant exclusivement imputable à M. Haddouk qui, au mépris de ses propres interêts, y a mis fin par son comportement personnel, c'est exclusivement par sa faute qu'il a perdu la représentation des produits Tabbert en France, alors que le maintien de ce contrat lui aurait permis de la conserver dans de bonnes conditions financières pour lui-même ;

Que, là-encore, le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a alloué au liquidateur une "indemnisation pour appropriation du fonds de commerce de Châteauneuf caravanes" enseigne sous laquelle M. Haddouk exercait en partie son activité, indemnisation qu'il a fixée - dans ses motifs, en p. 13 - à la somme, curieusement égale à celle des dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat d'agent commercial, de 8 491 200 F ; que, de même, il y a lieu de rejeter la demande du liquidateur tendant à voir porter cette somme à celle de 40 883 100 F ;

Attendu que le liquidateur fait encore état de détournements d'actifs du débiteur pour lesquels il réclame une indemnité de 31 000 000 F, alors que le tribunal l'aurait fixée à la somme de 9 328 045 F ; que, cette somme qu'on ne retrouve pas, telle qu'elle est ici indiquée, au dispositif du jugement entrepris, paraît être comprise dans celle de 17 819 245 F accordée globalement "au titre des garanties opérées à son seul profit [celui de la société Tiag France] sur le patrimoine de M. Haddouk et d'indemnisation pour appropriation du fonds de commerce de Châteauneuf-Caravanes", déjà évoquée, puisque la différence entre 17 819 245 F et 8 491 200 F (pour l'appropriation du fonds) est bien de 9 328 045 F ; que, d'après le tribunal et le liquidateur, cette somme correspondrait, si l'on comprend bien, au montant de garanties que la société Tiag France aurait prises sur le patrimoine de M. Haddouk ; que rien n'est moins clair cependant ;

Qu'il ressort seulement du document intitulé "protocole d'accord" signé le 13 novembre 1997 entre M. Haddouk et la société Tiag France que, aprés la cession de créance consentie par la société Tabbert à cette dernière, M. Haddouck était débiteur de la société Tiag France pour un montant de 16 230 908,97 F, ramené à 10 130 908,97 F, par imputation, sur le montant de sa dette, du prix global, de 6 100 000 F, de divers immeubles que lui-même ou des sociétés civiles immobilières dont il était associé, ont vendus à la société Tiag France ; que le "protocole" précise que ce prix a été réglé à M. Haddouk par compensation avec sa dette ; que, très curieusement, alors que cette compensation est intervenue en période suspecte - la date de cessation des paiements ayant été reportée au 29 janvier 1997 - le liquidateur n'en poursuit pas l'annulation, et ne cherche pas, pour cela, à démontrer qu'il s'agirait d'un paiement d'un créancier fait par un mode anormal ; qu'au lieu, donc, de réclamer l'annulation, sinon de la vente - qui s'est faite au prix correct du marché évalué par un expert - au moins du paiement par compensation lui-même, le liquidateur demande la somme de 31 000 000 F pour "détournement d'actifs", en se fondant sur des éléments qui ne sont pas pertinents ;

Qu'en effet, après avoir rappelé ses différents griefs à l'encontre de la société Tabbert, que la cour a écartés, le liquidateur n'invoque précisément (p. 18 de ses conclusions), à l'encontre de la société Tiag France elle-même, que la signature du contrat d'agent commercial, qui est sans incidence, puis l'immixtion de cette société dans la gestion de l'entreprise de M. Haddouk - qui n'est pas davantage établie, le fait que la société Tiag France ait fait des efforts pour aider M. Haddouk à redresser son entreprise, que ses collaborateurs aient pu parfois être présents au sein de celle-ci et aient donné des instructions pour le respect de la politique commerciale de la société Tiag France ne suffisant pas à démontrer que cette société se soit comportée comme le dirigeant de fait de l'entreprise de M. Haddouk, ni même qu'elle se soit immiscée dans la gestion de celle-ci, le comportement de M. Haddouk, déjà décrit, son refus de toute collaboration sérieuse démontrant au contraire qu'il demeurait le seul maître de ses affaires - et, enfin, son immixtion dans la vie privée de M. Haddouk, tout aussi peu fondée, et dont la cour, au surplus, ne voit pas l'incidence dans le présent litige ; que, d'ailleurs, en p. 22 de ses conclusions, le liquidateur, à propos de l'augmentation du passif qu'il impute à la société Tiag France, après avoir chiffré la créance de celle-ci aux 31 000 000 F qu'il lui réclame, ne déduit précisément son soutien abusif que de l'octroi d'un crédit-fournisseur de 3 000 000 marks et d'un prêt sur 36 mois de 2 789 362,94 marks, qui sont le fait exclusif de la société Tabbert, aux termes de l'accord du 16 décembre 1996 ; que la demande portant sur la somme de 31 000 000 F, correspondant, dans les écritures du liquidateur, tantôt à l'augmentation du passif, tantôt au montant de détournements d'actifs, ce qui n'est pas même prouvé puisque les ventes d'immeubles se sont faites, comme il a déjà été dit, au prix du marché, sera rejetée, d'autant plus que la compensation opérée n'est pas attaquée en tant que telle ;

Attendu, enfin, que le liquidateur, au dispositif de ses conclusions (p.31), demande que la société Tiag France soit condamnée à lui payer la somme de 39 933 093,81 F, qui correspondrait à la totalité du passif de M. Haddouk, tout en reconnaissant qu'une partie de ce passif est contestée ; que le tribunal n'a prononcé aucune condamnation de ce chef et que, nulle part dans les conclusions du liquidateur, une telle demande ainsi chiffrée n'est examinée clairement avant le dispositif des conclusions ; que, d'ailleurs, d'une facon générale, les conclusions de l'intimé multiplient les demandes portant sur des sommes très importantes qui se recoupent et dont la cour a beaucoup de difficultés à comprendre l'articulation ; que, notamment, elle ne saisit pas précisément la différence entre les sommes de 31 000 000 F et de 39 933 093,81 F qui lui sont demandées ;

Qu'en tout cas, à l'encontre de la société Tiag France elle-même, il n'est allégué aucun fait probant de soutien abusif pouvant justifier la réclamation d'une somme de 39 933 093,81 F ; que, même dans le dispositif des conclusions (p. 31), la création du passif de M. Haddouk, ou son aggravation, paraît encore rattachée, par le biais d'une demande subsidiaire, à l'octroi du crédit-fournisseur et du prêt en devises, et que, dans le corps des conclusions (pp. 22 et 23), c'est aussi à l'octroi initial de ces deux crédits qu'est imputée, plus clairement que dans le dispositif des écritures, l'augmentation du passif, alors qu'ils ont été accordés par la société Tabbert et ne peuvent pas, par eux-mêmes, caractériser un soutien abusif de la part de la société Tiag France, sous prétexte que celle-ci serait devenue titulaire des créances correspondantes ;

Que la demande principale en paiement de la somme de 39 933 093,81 F, comme la demande subsidiaire (p. 31) en paiement du montant des deux crédits en devises, sera donc rejetée ;

Sur l'arriéré de commissions :

Attendu que la somme réclamée à ce titre, de 426 258 F, n'est pas due ; qu'en effet, M. Haddouk calcule l'arriéré de commissions que réclame le liquidateur de sa procédure collective sur 40 ventes de caravanes neuves en fonction de prix de vente qu'il déterminait arbitrairement lui-même sans respect pour les tarifs qu'il devait appliquer, aboutissant, dans son intérêt, à des majorations de prix entraînant l'augmentation de ses commissions; que, la société Tiag France a été amenée à modifier, conformément à ses tarifs, le prix de vente de ces caravanes, au moment de l'acceptation des commandes correspondantes et donc à minorer le montant des commissions de M. Haddouk ; que la demande en paiement d'une somme de 426 258 F sera rejetée;

Sur le paiement du prix de véhicules d'occasion :

Attendu que le liquidateur pretend que 6 véhicules vendus par M. Haddouk à la société Tiag France n'ont pas été réglés par elle ; que, pour établir l'existence de ces ventes, contestées, il est fait état de "déclarations d'achat en préfecture" au nom de la société Tiag France ; qu'aucun de ces documents n'est cependant produit ; que, faute de preuve, la demande sera rejetée ;

Sur les frais de stationnement des caravanes :

Attendu que la société Tiag France reconnaît avoir stationné sur des terrains appartenant à M. Haddouk des caravanes ;

Qu'aucun contrat - dont la qualification est, au surplus, assez imprécise dans les conclusions de l'intimé, qui hésite entre le bail et le dépôt - n'a, cependant, été passé à ce sujet ; que le stationnement de ces caravanes ayant été fait au vu et au su de M. Haddouk, qui n'a jamais demandé, avant la rupture des relations contractuelles, la moindre somme pour cela, à quelque titre que ce soit, était en fait toléré gratuitement par lui, M. Haddouk n'ayant plus, lui-même, l'usage de ces terrains ; qu'il ne résulte d'aucune pièce qu'un gardiennage était assuré ; que la demande sera rejetée ;

Sur les demandes accessoires :

Attendu que succombant sur la totalité de ses demandes, le liquidateur supportera les entiers dépens de première instance et d'appel et, à ce ce titre, sera tenu de payer à la société Tiag France la somme de 50 000 F par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Par ces motifs : rejette la demande de sursis à statuer ; confirme le jugement en ce qu'il a rejeté la demande de M. Saulnier, ès qualités de liquidateur de la procédure collective de M. Haddouk, tendant au paiement par la société Tiag France de la totalité du passif de ce dernier, estimé à la somme de 39 933 093,81 F, ou, à titre subsidiaire, au paiement de la contre-valeur des sommes de 3 000 000 et de 2 789 362,94 marks ; l'infirme, dans toutes ses autres dispositions et, statuant à nouveau, rejette toutes les demandes de M. Saulnier, ès qualités, à l'encontre de la société Tiag France, savoir - sa demande en paiement d'une somme de 33 740 000 F pour rupture abusive du contrat d'agent commercial signé le 13 novembre 1987 ; - sa demande en paiement d'une somme de 31 000 000 F pour détournement d'actifs de M. Haddouk ; - sa demande en paiement d'une somme de 40 883 100 F à titre de dommages-intérêts pour appropriation du fonds de commerce de M. Haddouk ; - sa demande en paiement d'une somme de 426 258 F à titre d'arriéré de commissions ; - sa demande en paiement d'une somme de 160 000 F pour prix de vente de six véhicules d'occasion - sa demande en paiement d'une somme de 422 100 F pour frais de stationnement de caravanes ; condamne M. Saulnier, ès qualités, aux entiers dépens de première instance et d'appel ; le condamne à payer à la société Tiag France la somme de 50 000 F par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; accorde à la SCP Laval-Lueger, avoué, le droit reconnu par l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.