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Décisions

Cass. civ., 13 mai 1885

COUR DE CASSATION

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Fiat

Défendeur :

Fiat-Forey

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Rapporteur :

M. Manau

Avocat général :

M. Desjardins

Avocats :

Mes Pérouse, Lehman

Grenoble, du 29 avr. 1882

29 avril 1882

LA COUR : - Statuant sur la première branche du moyen unique du pourvoi ; - Vu les articles 1134 et 2004 du Code civil; - Attendu en droit, que lorsque le mandat a été donné dans l'intérêt du mandant et du mandataire, il ne peut pas être révoqué par la volonté de l'une ou même de la majorité des parties intéressées, mais seulement de leur consentement mutuel, ou pour une cause légitime reconnue en justice, ou enfin suivants les clauses et conditions spécifiées par le contrat ;

Attendu, en fait, que l'arrêt attaqué reconnaît le principe ; qu'il vise et analyse ensuite les actes authentiques des 4 décembre 1837, 18 et 19 octobre 1863, et 6 décembre 1868 qui ont organisé la constitution syndicale des habitants de Gavet et Livet, copropriétaires de bois, montagnes et pâturages, situés dans la commune du même nom ; qu'il fait état notamment de l'acte du 2 mars 1879, aux termes duquel la commission syndicale, composée de sept membres, et nommée pour cinq ans, a choisi comme syndic gérant, pour le même espace de temps, le sieur Frédéric Fiat, copropriétaire des biens dont l'administration lui était confiée ; qu'il déclare enfin qu'il est impossible de trouver en dehors d'une satisfaction d'amour-propre, quel intérêt réel et sensible Frédéric Fiat pourrait avoir à conserver pendant cinq ans un mandat que les communistes refusent en très grande majorité de lui continuer ; et que, sans se livrer à l'examen, qu'il juge inutile, de prétendus abus d'administration articulés contre le susnommé, il s'appuie sur cet unique motif, pour décider qu'il a été régulièrement révoqué de ses fonctions de syndic gérant par ladite majorité et remplacé par le sieur Fiat-Forey ;

Mais attendu que l'arrêt, ne contestant pas au sieur Frédéric Fiat sa qualité de copropriétaire des biens dont l'administration lui avait été confiée pour cinq ans, ne pouvait légalement refuser de reconnaître l'intérêt pécuniaire qu'il avait par sa qualité même, à l'exécution de son mandat ; et qu'en déclarant qu'il était impossible dans l'espèce de trouver quel intérêt réel et sensible il pouvait avoir à conserver ce mandat, l'arrêt n'a pas exercé souverainement son droit d'appréciation, mais qu'il a méconnu les conditions du contrat telles qu'elles résultent clairement des actes visés par lui, et notamment celui du 2 mars 1879 ;

Attendu par suite qu'il a faussement appliqué l'article 2004 du Code civil et qu'il a ainsi violé cet article en même temps que l'article 1134 du même code ;

Par ces motifs, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres branches du moyen proposé par le pourvoi ;

Casse, etc.

Ordonne, etc.

Ainsi jugé, etc. - Chambre civile.