CCE, 27 juillet 1994, n° 94-594
COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES
Décision
ACI
LA COMMISSION DES COMMUNAUTES EUROPEENNES,
Vu le traité instituant la Communauté européenne, vu l'accord sur l'Espace économique européen, vu le règlement (CEE) n° 1017-68 du Conseil, du 19 juillet 1968, portant application des règles de concurrence aux secteurs des transports par chemin de fer, par route et par voie navigable (1), modifié par l'acte d'adhésion de la Grèce, et notamment son article 5, vu la publication de l'essentiel du contenu des accords en cause (2), conformément à l'article 12 paragraphe 2 du règlement (CEE) n° 1017-68, vu la décision de la Commission, du 27 mai 1993, de soulever des doutes sérieux au sens de l'article 12 paragraphe 3 du règlement (CEE) n° 1017-68, vu la publication (3) donnant aux tiers intéressés l'occasion de réagir au projet de la Commission d'exempter l'accord, conformément aux dispositions de l'article 26 paragraphe 3 du règlement (CEE) n° 1017-68, après consultation du comité consultatif en matière d'ententes et de positions dominantes dans le domaine des transports, considérant ce qui suit :
I. LES FAITS
A. La notification
(1) Le 13 novembre 1992, la Commission a reçu de British Railways Board (BR), de la Société nationale des chemins de fer français (SNCF) et d'Intercontainer (IC) une demande de déclaration de non-applicabilité de l'article 2 du règlement (CEE) n° 1017-68 à deux accords qu'ils ont conclus entre eux, conformément à l'article 5 dudit règlement.
B. Les parties en cause
(2) BR et la SNCF sont deux entreprises ferroviaires à statut privé au moment de la signature des accords, dont l'activité principale est la fourniture de prestations de transport de marchandises et de voyageurs par chemin de fer et qui disposent pour ce faire de moyens de traction ferroviaire propres.
(3) IC est une société coopérative, filiale commune de vingt-quatre entreprises ferroviaires dont BR et la SNCF, spécialisée dans le transport combiné de marchandises en Europe.
(4) Fret Manche Europe (FME) est un groupement d'intérêt économique de droit français, constitué par la SNCF et IC.
(5) Allied Continental Intermodal Services Limited (ACI) est une société créée conjointement par BR, la SNCF et IC qui se partagent son capital à hauteur respectivement de 25 %, 25 % et 50 %.
C. Les spécificités du secteur des transports combinés
(6) Dans le secteur du transport combiné de marchandises, les entreprises ferroviaires ne vendent pas de prestations de transport directement aux chargeurs, sauf à de très rares exceptions pour des envois importants.
(7) Les prestations de transport combiné sont mises au point et vendues aux chargeurs par des opérateurs de transport combiné, le cas échéant filiales d'entreprises ferroviaires. Ces opérateurs sont des entreprises de transport, qui disposent d'un matériel spécifique : engins de manutention, wagons spécialisés. Ils démarchent leur clientèle, effectuent les transports par trains complets ou par envois isolés, accomplissent les démarches administratives et douanières lors du passage des frontières et assurent la réception des chargements à l'arrivée.
(8) Pour réaliser leurs prestations, les opérateurs doivent toutefois acheter les services de traction ferroviaire et l'accès aux infrastructures aux entreprises ferroviaires qui sont seules en mesure de les fournir.
D. Le marché en cause
(9) Le marché en cause est celui du transport international entre le Royaume-Uni et le continent européen de marchandises circulant dans un même contenant, sans déchargement de la marchandise, le contenant pouvant être un véhicule routier, un conteneur ou une caisse mobile.
(10) En l'absence du tunnel sous la Manche, ces transports étaient réalisés par camions ou par trains jusqu'à un port maritime, puis pris en charge par un navire avant un nouveau transport terrestre.
(11) A la suite de l'ouverture sous la Manche, ces transports peuvent être réalisés :
- par camions utilisant les services ferroviaires de navettes exploitées par Eurotunnel,
- par camions utilisant les services d'un transporteur maritime,
- par trains internationaux reliant un terminal au Royaume-Uni et un terminal sur le continent.
E. Les accords en cause
(12) ACI a été constituée par BR, la SNCF et IC le 2 septembre 1992, afin d'utiliser les possibilités offertes par l'ouverture du tunnel sous la Manche pour ce qui concerne le transport, entre le Royaume-Uni et le continent, de marchandises qui circulent dans des véhicules routiers, conteneurs, caisses mobiles, semi-remorques ou autres unités de chargement convenant au transport intermodal.
(13) Selon les parties à l'accord, ACI interviendra sur le marché au même niveau qu'IC, c'est-à-dire en qualité d'opérateur de transport combiné. Selon les mêmes parties, BR et la SNCF, en qualité de fournisseurs de traction ferroviaire, interviendront à un niveau différent de celui d'ACI.
(14) ACI sera principalement spécialisée dans la vente de services ferroviaires de transport intermodal " terminal à terminal ". Elle prendra également en charge certains services accessoires, notamment la fourniture de wagons, les opérations de manutention dans les terminaux, les opérations de dédouanement et la gestion des " pools-wagons " pour d'autres organisations.
(15) Dans un premier temps, les itinéraires desservis relieront le Royaume-Uni à des localités situées en Italie, en Espagne, en Suisse, en Autriche, en Allemagne et en France. Le conseil d'administration d'ACI décidera de la desserte éventuelle de nouveaux itinéraires.
(16) Il est prévu qu'ACI vende ses services en qualité de grossiste à tout client intéressé, mais en premier lieu aux transitaires et aux opérateurs intermodaux et intégrés, y compris les sociétés apparentées aux entreprises ferroviaires européennes.
(17) La durée de l'accord ACI est identique à celle de l'accord du 29 juillet 1987 entre Eurotunnel, BR et la SNCF, relatif à la mise à la disposition de BR et de la SNCF d'une partie des sillons horaires disponibles dans le tunnel sous la Manche, soit cinquante-cinq années. La durée dudit accord peut toutefois être réduite par accord des différentes parties, ou si une des parties prend le contrôle de la totalité du capital d'ACI.
(18) Le deuxième accord conclu par ACI, BR et FME est un accord de fourniture de wagons aux termes duquel BR et FME s'engagent à fournir à ACI des wagons de chemin de fer spéciaux surbaissés, destinés au transport de marchandises par conteneurs. BR et FME doivent fournir 720 wagons de ce type en 1993 et 1 200 en 1994 (une option permet d'élever ce chiffre jusqu'à 1 800 si certaines conditions sont remplies). BR souhaite en outre acheter jusque 2 000 de ces wagons spécialisés et la SNCF en possède pour sa part 300.
(19) Pour mener à bien ses activités, ACI prendra en location des wagons auprès de FME et BR conformément aux conditions générales stipulées dans l'accord de fourniture de wagons ou, en cas d'insuffisance, selon toute autre modalité jugée adéquate par ACI.
(20) Au cas où elle disposerait d'un excédent de wagons sur une longue période, ACI envisage de les proposer en sous-location, dans l'ordre suivant :
1) aux fournisseurs de wagons, dans une mesure égale au nombre de wagons qu'ils ont fournis à ACI sur des itinéraires empruntant le tunnel sous la Manche ;
2) aux autres opérateurs de transport intermodal pour leur utilisation sur les itinéraires empruntant le tunnel sous la Manche ;
3) aux fournisseurs de wagons, pour leur utilisation sur des itinéraires n'empruntant pas le tunnel sous la Manche, dans une mesure égale au nombre de wagons qu'ils ont fournis à ACI ;
4) aux autres opérateurs de transport intermodal pour leur utilisation sur des itinéraires n'empruntant pas le tunnel sous la Manche.
II. APPRECIATON JURIDIQUE
A. Les dispositions juridiques applicables
(21) Lors de la notification, les parties à l'accord ont demandé une déclaration de non-applicabilité de l'article 2 du règlement (CEE) n° 1017-68, conformément à l'article 5 dudit règlement.
Pour les raisons exposées dans sa décision 93-174-CEE (4) relative à une structure tarifaire commune en transports combinés de marchandises, la Commission est d'avis que, dans le domaine des transports terrestres, les dispositions de l'article 85 paragraphe 1 du traité s'appliquent. L'octroi d'exemptions est par contre régi par l'article 12 du règlement (CEE) n° 1017-68 qui prévoit une procédure d'opposition, et trouve son fondement dans l'article 5 dudit règlement. Les accords en cause étant susceptibles d'avoir des effets sur le territoire de l'Espace économique européen, l'article 53 de l'accord EEE s'applique également.
B. La notion d'accord entre entreprises
(22) ACI est une société dont le capital est contrôlé à hauteur de 50 % par IC et à hauteur de 25 % par chacune des deux entreprises ferroviaires BR et la SNCF. Le conseil d'administration est composé de deux représentants de BR, deux représentants de la SNCF et quatre représentants d'IC. Ses décisions sont adoptées à la majorité simple des membres, à l'exception des décisions importantes qui nécessitent l'accord d'un représentant des trois sociétés mères. Le président est désigné pour deux ans sur la base d'une rotation entre les membres du conseil d'administration.
(23) Il convient donc de constater que BR, la SNCF et IC exercent conjointement le contrôle sur ACI qui constitue une entreprise commune au sens de la communication de la Commission sur le traitement des entreprises communes à caractère coopératif au regard de l'article 85 du traité (5).
(24) ACI développe ses activités de façon durable et prendra en charge toutes les fonctions d'une unité économique autonome.
(25) Il convient toutefois de constater que parmi les entreprises fondatrices, Intercontainer, et, dans une certaine mesure, BR et la SNCF, ne se retirent pas entièrement et de façon permanente du marché d'ACI. Par ailleurs, BR et la SNCF restent prioritairement actives sur un marché en amont, celui des services ferroviaires indispensables que les entreprises ferroviaires vendent aux opérateurs de transport combiné.
(26) En conséquence, la Commission est d'avis que l'entreprise commune en cause a pour objet et pour effet une coordination du comportement concurrentiel d'entreprises qui restent indépendantes.
(27) ACI constitue dès lors une entreprise commune de nature coopérative qui entre dans le champ d'application de l'article 85 du traité.
C. Les restrictions de concurrence
a) Restrictions de la concurrence entre les fondateurs et effets vis-à-vis des tiers
(28) IC est un opérateur de transport combiné habitué à vendre des services internationaux de transport combiné. IC pourrait donc sans difficulté majeure fournir seul des services de transport combiné entre le Royaume-Uni et le continent en achetant les services ferroviaires indispensables aux entreprises ferroviaires.
(29) Par ailleurs, BR et la SNCF disposent des moyens techniques et financiers pour fournir chacune individuellement des services sur le même marché qu'ACI.
(30) BR et la SNCF peuvent donc exercer une concurrence potentielle sur ce marché d'autant que, en vertu de l'article 10 paragraphe 2 de la directive 91-440-CEE du Conseil (6), les entreprises ferroviaires établies dans un Etat membre se voient désormais accorder un droit d'accès à l'infrastructure des autres Etats membres aux fins de l'exploitation de services de transports combinés internationaux de marchandises.
(31) Or, en confiant la commercialisation de ces services à une entité commune, BR, la SNCF et IC annulent ou restreignent considérablement cette concurrence qu'elles pourraient se faire en fournissant individuellement les mêmes services.
(32) IC est un des principaux opérateurs de transport combiné en Europe. Par ailleurs, BR et la SNCF conservent une position dominante sur le marché de la fourniture des services ferroviaires indispensables aux opérateurs de transport combiné, respectivement au Royaume-Uni et en France.
(33) L'existence de relations privilégiées entre les sociétés mères et leur filiale commune risque ainsi de placer les autres opérateurs de transport combiné dans une situation concurrentielle défavorable pour l'acquisition de services ferroviaires indispensables.
(34) De même, les parties aux accords contrôlent l'essentiel des wagons spécialisés indispensables pour fournir les services en cause via le tunnel, tandis que les opérateurs indépendants ne sauraient supporter seuls des investissements similaires.
(35) Il convient aussi de prendre en considération la convention d'utilisation signée entre Eurotunnel et BR/la SNCF. En l'espèce, même si en application du droit communautaire BR et la SNCF ne devaient pas pouvoir bénéficier de la totalité des sillons disponibles pour les trains internationaux, elles disposeront d'une partie significative de ces sillons pour exploiter des trains internationaux et faire face à leurs engagements vis-à-vis d'Eurotunnel.
(36) Dès lors, eu égard à la puissance économique des entreprises fondatrices, la création d'ACI risque d'entraver l'accès au marché d'opérateurs de transport combiné ferroviaire susceptibles de concurrencer ACI.
b) Renforcement des restrictions résultant de la présence de réseaux d'entreprises communes
(37) En général, des réseaux d'entreprises communes peuvent restreindre d'une façon particulière la concurrence parce qu'ils renforcent les effets d'entreprises communes individuelles sur la politique commerciale des fondateurs ainsi que sur la position des tiers sur le marché.
Dès lors, la création de toute nouvelle entreprise commune multiplie chaque fois les liens entre les fondateurs de telle sorte que la concurrence qui existe encore entre eux s'en trouve davantage affaiblie. Tel est le cas lorsque les fondateurs créent plusieurs entreprises communes pour des services complémentaires ou des services non complémentaires.
(38) La Commission considère que tel est le cas pour la présente affaire. BR et la SNCF participent à différents degrés à un réseau d'entreprises communes pour l'exploitation de services de transport de marchandises, notamment par transport combiné, ainsi que de transport de voyageurs.
(39) Dans le secteur du transport combiné, BR et la SNCF participent ainsi avec d'autres entreprises ferroviaires au capital d'IC. Par ailleurs, en ce qui concerne les transports via le tunnel sous la Manche, les deux entreprises participent également à la création d'European Night Services Ltd pour le transport des passagers et BR participe à la création d'Autocare Europe pour le transport ferroviaire de véhicules automobiles.
(40) La création d'ACI s'insère dans ce réseau d'entreprises communes et limite encore davantage la concurrence entre les parties qui, en raison de leurs investissements réalisés en commun pour ces projets, seront peu disposées à se concurrencer sur les marchés en cause ou sur d'autres marchés.
(41) Cet effet de réseau est notamment multiplié par le fait que ces entreprises communes visent à fournir des services via le tunnel sous la Manche dans lequel BR et la SNCF disposent conjointement d'une partie très importante des sillons horaires disponibles pour les trains internationaux.
(42) En conséquence, il résulte des éléments visés aux considérants 29 à 41 que les accords relatifs à ACI ont pour objet et pour effet de restreindre la concurrence en violation des dispositions de l'article 85 paragraphe 1 du traité.
D. Affectation du commerce entre Etats membres
(43) ACI a pour objet l'exploitation de services de transport entre le Royaume-Uni et le continent. Cet accord affecte donc le commerce entre Etats membres au sens de l'article 85 paragraphe 1.
E. Article 3 du règlement (CEE) n° 1017-68
(44) Il ressort du libellé de cet article qu'il s'applique aux accords qui ont pour seul objet et pour seul effet :
- l'application d'améliorations techniques
ou
- la coopération technique,
étant entendu que, pour atteindre ces objectifs, les entreprises disposent des moyens énumérés par ledit article 3 points a) à g).
(45) Il ressort de la notification présentée par les entreprises en cause que le principal objet de l'entreprise commune est la commercialisation des services de transport combiné et de services annexes entre le Royaume-Uni et le continent.
(46) Par ailleurs, sur le plan commercial, l'entreprise commune vise trois objectifs :
- exploiter les possibilités commerciales créées par l'ouverture du tunnel sous la Manche pour le transport de marchandises en conteneurs,
- permettre à BR et à la SNCF d'exploiter des trains internationaux via le tunnel sous la Manche conformément à leurs obligations en vertu de la convention d'utilisation qu'ils ont signée avec Eurotunnel,
- partager les risques financiers liés à l'exploitation de trains réguliers dès l'ouverture du tunnel.
(47) Dès lors, la Commission considère que l'accord ACI n'a pas pour seul effet l'application d'améliorations techniques ou la coopération technique et que les conditions prévues à l'article 3 du règlement (CEE) n° 1017-68 ne sont pas réunies.
F. Article 5 du règlement (CEE) n° 1017-68
a) La contribution au progrès économique
(48) L'ouverture du tunnel sous la Manche offre de nouvelles possibilités pour les entreprises ferroviaires et les opérateurs de transport combiné.
Dans ce cadre, la création d'ACI s'analyse comme une mesure destinée à utiliser ces possibilités en ouvrant de nouveaux services de transport.
(49) La fonction de groupage effectuée par ACI constitue notamment un élément important pour le développement du transport combiné.
(50) Par ailleurs, bien que la substituabilité entre les modes de transport ne soit pas totalement établie, les services offerts par ACI peuvent être de nature, dans certaines circonstances, à accroître la concurrence vis-à-vis des transports maritimes.
(51) D'une façon générale, la constitution d'ACI est donc de nature à promouvoir le progrès économique.
b) Avantages pour les utilisateurs
(52) Les utilisateurs tirent un avantage direct de la mise en place par ACI de services qui, antérieurement, n'existaient pas.
c) Caractère indispensable des restrictions
(53) Il convient de rappeler la présence parmi les sociétés mères d'IC, qui est un important opérateur de transport combiné, fournissant des services à l'échelle européenne depuis de nombreuses années, et qui pourrait donc être considéré comme en mesure de fournir seul de nouveaux services entre le Royaume-Uni et le continent.
(54) Par ailleurs, en vertu des dispositions de l'article 10 de la directive 91-440-CEE, BR et la SNCF ont également la faculté de fournir seules des services internationaux de transport combiné.
(55) Il importe toutefois de prendre en considération les spécificités du cas d'espèce, et particulièrement le fait qu'il s'agit d'un service totalement nouveau, dont l'efficacité requiert la mise en place immédiate de trains desservant plusieurs itinéraires de façon régulière et impliquant donc des risques financiers importants qu'une entreprise ne peut supporter seule.
(56) Par ailleurs, la mise en commun du savoir-faire et des moyens matériels et humains des trois entreprise en cause constitue un atout important pour assurer le lancement de service réguliers dès l'ouverture du tunnel.
(57) Toutefois, il convient que la Commission impose des conditions afin de limiter au maximum les restrictions de concurrence et de garantir en particulier la présence sur le marché d'opérateurs de transport combiné concurrents d'ACI.
(58) Dans ces conditions, la Commission est d'avis que les restrictions de concurrence qui résultent de la constitution d'ACI sont nécessaires, au moins pendant une période transitoire et compte tenu de la situation spécifique du marché en cause.
d) Absence d'élimination de la concurrence
(59) Des opérateurs de transport autres qu'ACI et IC existent déjà en Europe et peuvent offrir les mêmes services. Dès lors, la création d'ACI n'élimine pas la concurrence pour une partie substantielle du marché en cause.
G. Modalités de l'exemption
(60) En vertu des dispositions de l'article 13 du règlement (CEE) n° 1017-68, la décision d'exemption doit indiquer pour quelle période elle s'applique et peut être assortie de conditions et de charges.
(61) Les opérateurs de transport combiné estiment généralement qu'une période de cinq années est nécessaire pour mettre en place et assurer la viabilité de nouveaux services.
(62) Par ailleurs, une telle période apparaît nécessaire pour assurer le transfert du savoir-faire des sociétés mères, particulièrement d'IC, à la filiale commune.
(63) Enfin, il convient de prendre en compte le fait que les conditions de fonctionnement du marché sont susceptibles d'être modifiées de façon substantielle au cours des prochaines années et qu'il est en conséquence impossible de prévoir avec certitude quelle sera la situation de la concurrence au-delà de cinq années.
(64) Dès lors, la Commission considère que la durée de l'exemption peut être fixée à cinq années à compter de la date d'ouverture du tunnel sous la Manche aux trains de marchandises.
(65) L'octroi de l'exemption doit cependant être soumis à certaines conditions destinées à éviter que les restrictions de concurrence excèdent ce qui est indispensable.
(66) A cet effet, il importe tout d'abord que les chargeurs et autres opérateurs de transport combiné puissent acquérir auprès de BR et de la SNCF les mêmes services ferroviaires indispensables qu'elles fournissent à ACI.
(67) Par ailleurs, il convient que BR et FME acceptent de louer à tout opérateur ou chargeur leurs wagons spécialisés, non utilisés pendant une période minimale de six mois, dans le cadre de contrats d'au minimum six mois afin que ces derniers puissent fournir des services en concurrence avec ACI via le tunnel. Dans ce cadre, une priorité ne doit pas être donnée à des demandes émanant d'entreprises filiales ou liées.
(68) Toutefois, en raison de la spécialisation des wagons, une priorité peut être donnée pour la prestation de services via le tunnel,
A ARRÊTE LA PRESENTE DECISION :
Article premier
Conformément à l'article 5 du règlement (CEE) n° 1017-68 et à l'article 53 paragraphe 3 de l'accord EEE, les dispositions de l'article 85 paragraphe 1 du traité CE et de l'article 53 paragraphe 1 de l'accord EEE sont déclarées inapplicables pour une période de cinq années à compter de la date d'ouverture du tunnel sous la Manche aux trains de transport de marchandises, aux accords entre British Railways Board, la Société nationale des chemins de fer français et Intercontainer, relatifs à Allied Continental Intermodal Services Ltd.
Article 2
L'exemption prévue à l'article 1er est assortie des conditions suivantes :
a) les entreprises ferroviaires parties à l'accord ACI doivent fournir à tout chargeur ou opérateur de transport combiné les mêmes services ferroviaires qu'elles fournissent à leur filiale ACI, sur une base non discriminatoire ;
b) BR et FME doivent louer à tout opérateur ou chargeur les wagons spécialisés dont elles disposent pour les transports de conteneurs via le tunnel sous la Manche, et non utilisés pendant une période minimale de six mois, dans le cadre de contrats d'au minimum six mois. Les parties de l'accord ne doivent pas donner de priorité à des entreprises filiales ou liées, mais peuvent accorder une priorité pour les entreprises qui fournissent des services via le tunnel sous la Manche.
Article 3
Les entreprises suivantes sont destinataires de la présente décision :
British Railways Board
Euston House
24 Eversholt Street
GB-London NW1 1DZ
SNCF
88, rue Saint-Lazare
F-75009 Paris
Intercontainer
Rue de France 85
B-1070 Bruxelles.
(1) JO n° L. 175 du 23. 7. 1968, p. 1.
(2) JO n° C 57 du 27. 2. 1993, p. 5.
(3) JO n° C 115 du 26. 4. 1994, p. 5.
(4) JO n° L. 73 du 26. 3. 1993, p. 38.
(5) JO n° C 43 du 16. 2. 1993, p. 2.
(6) JO n° L. 237 du 24. 8. 1991, p. 25.