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Décisions

CA Angers, 3e ch., 31 janvier 2000, n° 98-00179

ANGERS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Albert

Défendeur :

ADT Sécurité Services (Sté), Nomos (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Le Guillanton

Conseillers :

MM. Jegouic, Guillemin

Avocats :

Mes Fuhrer, Bellaiche.

Cons. prud'h. Le Mans, du 12 déc. 1997

12 décembre 1997

EXPOSE DU LITIGE

Monsieur Albert a été embauché par la société Sécuriville, devenue la SA Nomos, le 22 janvier 1996, par contrat écrit à durée indéterminée et à temps complet en qualité de VRP.

Licencié pour manque de résultats le 5 mars 1997, avec un préavis de 2 mois, Monsieur Albert a saisi le Conseil de prud'hommes du Mans aux fins d'obtenir paiement des sommes suivantes :

- 1 311,29 F au titre du rappel de salaire,

- 7 500 F au titre du préavis,

- 2 400 F au titre du challenge,

- 8 257 F au titre du rappel de commissions,

- 9 686,96 F au titre des congés payés,

- 3 600 F au titre du remboursement de l'assurance voiture,

- 112 398 F à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif,

- 3 500 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Il sollicitait en outre l'exécution provisoire et le paiement des intérêts au taux légal depuis la saisine du conseil pour les créances à caractère salarial.

Par jugement du 12 décembre 1997, le Conseil de prud'hommes du Mans a condamné la SA Nomos à payer à Monsieur Albert les sommes de 500 F au titre des commissions, 6 818,63 F au titre des congés payés, 1 500 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, ordonné l'exécution provisoire du jugement, sauf en ce qui concerne l'article 700 et les dépens, débouté Monsieur Albert du surplus de ses demandes, débouté la SA Nomos de sa demande reconventionnelle et l'a condamné aux dépens.

Monsieur Albert demande à la cour, par voie de réformation, de condamner la SA Nomos à lui payer les sommes suivantes :

- 120 000 F à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif,

- 10 000 F à titre de dommages et intérêts pour non-respect de la procédure,

- 2 958 F à titre de rappel de salaire pour la période du 1er mai 1996 au 31 août 1996,

- 9 337 F à titre de rappel de salaire pour la période du 1er septembre 1996 au 1er décembre 1996,

- 186 346 F à titre de rappel de salaire pour la période du 2 décembre 1996 au 9 mai 1997,

- 15 377,04 F à titre de congés payés sur la période de référence 96/97,

- 15 000 F au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel,

- les dépens.

II soutient :

Qu'il avait bien le statut de chef de ventes si bien qu'une insuffisance de résultat sur la base du statut de VRP ne saurait lui être reproché ;

Que son licenciement est abusif et lui a occasionné un important préjudice,

Que ses demandes au titre de rappel de salaire, dommages et intérêts et congés payés sont parfaitement justifiées ;

La société Nomos aux droits de laquelle vient la société ADT Sécurité Services anciennement dénommée Sécuriville, a également relevé appel de cette décision.

Elle demande à la cour de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a déclaré le licenciement reposant sur une cause réelle et sérieuse ;

De débouter Monsieur Albert de l'ensemble de ses demandes ;

D'infirmer le dit jugement en ce qu'il l'a condamnée au paiement de la somme 6 818,63 F au titre des congés payés ;

De condamner Monsieur Albert au paiement d'une somme de 5 000 F sur la base de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Elle fait valoir :

Que Monsieur Albert ne peut se prévaloir du statut de chef de ventes, mais simplement de celui de VRP ;

Que son licenciement est justifié par une insuffisance certaine de résultats ;

Que les différentes indemnités et sommes par lui réclamées ne sont pas fondées ;

Pour un plus ample exposé du litige, il est fait référence à la décision attaquée et aux écritures des parties ;

MOTIFS DE LA DECISION

Sur le statut de Monsieur Albert

Attendu que Monsieur Albert n'établit pas qu'à compter du 1er septembre 1996, son statut de VRP aurait été modifié de même que sa rémunération ;

Que la note interne de l'entreprise, sur laquelle il se fonde pour prouver la qualité alléguée de chef de ventes, ne constitue pas un avenant au contrat de travail ;

Que ce document ne comporte pas de valeur contractuelle ;

Qu'il s'agit, en effet, d'une note interne adressée par Monsieur Oliveri à Monsieur Snider Président Directeur Général de la Société ADT ; que tant au mois de septembre 1996 qu'au mois de décembre suivant, Monsieur Oliveri, simple VRP, n'était pas habilité à modifier le statut de Monsieur Albert, ce que ne pouvait manquer d'ignorer ce dernier ;

Que son contrat de travail initial avait été signé par le président directeur général de la société et que tout avenant devait nécessairement être également signé par le même PDG. Que cette note n'était pas adressée à Monsieur Albert, mais à la direction dont elle devait recevoir l'accord ; qu'un tel accord n'est jamais intervenu ;

Que par ailleurs, il n'était pas précisé dans ce document interne, qui n'était pas daté, que Monsieur Albert aurait exercé la fonction effective de chef de ventes ;

Que force est de constater que nul document contractuel n'a été signé entre la société ADT dûment représentée et Monsieur Albert quant à une modification de statut ;

Que ce dernier ne saurait, sur la base d'une note interne n'ayant pas date certaine et établie par Monsieur Oliveri à la seule destination de Monsieur Snider, revendiquer une modification contractuelle de son statut ;

Que de surcroît, les organigrammes de la société, ainsi que les grilles de salaires récapitulatives émanant de l'agence de Tours pour les mois d'octobre et de novembre 1996 démontrent, au contraire, que le statut de Monsieur Albert n'a pas été modifié et que celui-ci est resté VRP ; que les organigrammes de la société ne sauraient être taxés de faux alors que les organigrammes versés au débat par Monsieur Albert ne peuvent attribuer à Monsieur Oliveri la qualité de chef d'agence ; que la mention " chef d'équipe " figurant sur ces organigrammes est suspecte dans la mesure ou leur présentation est différente de celle utilisée par la société ADT dans les agences où il existe effectivement un chef des ventes ;

Attendu que Monsieur Albert n'est pas non plus fondé à soutenir que le statut de chef de ventes aurait été mis en œuvre à son égard ;

Que le rapport sur ventes, établi en décembre 1996 seulement, ne saurait constituer la preuve d'un changement de statut prétendu qui serait intervenu depuis le mois de septembre précédent ;

Que les deux contrats invoqués sont insuffisants à démontrer qu'un avenant a été conclu pour modifier son contrat de travail ;

Que Monsieur Albert n'a pas été rémunéré sur la base du nouveau statut invoqué ; car au mois de septembre 1996, sa rémunération a été conforme à son statut de VRP, ce qui n'a fait l'objet d'aucune contestation ; qu'un remboursement de frais d'un montant de 6 000 F lui a été versé ainsi qu'une prime ;

Que si la société ADT a accepté de verser à son salarié un montant forfaitaire de 6 000 F, c'est en raison de sa situation d'endettement dont il est fait état dans le calcul de son préjudice pour licenciement prétendument abusif ; que de même un véhicule lui a été prêté en raison de ces mêmes difficultés financières et non en raison du nouveau statut dont il se prévaut ;

Qu'enfin, l'acompte de 10 000 F, loin de prouver une modification de son statut, démontre l'inverse, puisqu'il s'agit d'une somme versée entre particuliers, à savoir Monsieur Oliveri directement à l'appelant, ce que ce dernier ne conteste pas ;

Qu'en première instance, Monsieur Albert a sollicité le paiement d'une prime " challenge " qui n'est versée qu'aux VRP dans l'hypothèse où ils ont atteint l'objectif fixé ; qu'il y avait contradiction à revendiquer le statut d'un chef de vente et à demander le paiement de cette prime ;

Que Monsieur Albert n'est pas fondé à se prévaloir de la modification de son statut depuis le mois de septembre 1996 sur la base d'un projet de contrat de travail portant la mention " références Avenant CDV - 09.96 " ; que cette mention est afférente à la date des mises à jour des documents internes de l'entreprise ;

Attendu que monsieur Albert ne peut donc soutenir avoir changer de statut et n'être pas tenu des objectifs qui lui étaient fixés en tant que VRP ;

Sur le licenciement

Attendu qu'aux termes du contrat conclu entre la société ADT et Monsieur Albert ce dernier était tenu de réaliser un nombre minimum de six contrats économiques mensuels et qu'il était expressément prévu que la société était en droit de résilier le contrat dans le cas où les objectifs ne seraient pas réalisés à 80 %;

Qu'il est constant que les objectifs fixés n'ont pas été réalisés;

Que sur les six derniers mois d'activité les résultats ont été les suivants :

- septembre 1996 : 0,70

- octobre 1996 : 4,22

- novembre 1996 : 1,15

- décembre 1996 : 5,97

- janvier 1998 : 0,60

- février 1998 : 0

Soit, une moyenne de 2,08 contrats économiques ce qui est insuffisant au regard de l'objectif fixé à savoir six contrats par mois.

Attendu que le licenciement, fondé sur un manque de résultat, est ainsi pourvu d'une cause réelle et sérieuse;

Sur les sommes réclamées par Monsieur Albert ;

Sur le rappel de salaire jusqu'au 31 août 1996

Attendu qu'il ressort des pièces produites que Monsieur Albert n'a pas été totalement payé de ses commissions en tant que VRP entre le mois de mai et le mois de septembre 1996 pour un montant total de 2 958 F calculé selon la méthode définie à l'article 7 et à l'annexe 1 du contrat de travail en date du 22 janvier 1996.

Qu'il convient de condamner La société ADT, qui ne fournit pas d'explications précises sur ce chef de demande, à la dite somme de 2 958 F ;

Sur les congés payés

Attendu que Monsieur Albert n'a droit à un rappel de congés payés que sur la base de son statut de VRP ;

Que dans ce cadre, l'examen de ses bulletins de salaire fait apparaître qu'il lui est dû une somme de 6 818,63 F ;

Que la prime exceptionnelle de 7 000 F n'a pas à être déduite des congés payés, comme n'ayant pas la nature de tels congés payés ;

Que la demande de Monsieur Albert au titre des congés payés ne sera consacrée qu'à hauteur de la somme de 6 818,63 F, ce dernier ne pouvant revendiquer un calcul de ses congés payés sur la base d'un statut de chef de ventes ;

Attendu, que de même, Monsieur Albert se verra débouté de ses demandes de salaires à compter du 1er septembre 1996 sur la base d'un statut de chef de ventes ainsi que ses demandes en dommages et intérêts pour licenciement abusif ;

Sur le prêt du véhicule

Attendu que le fait qu'un prêt de véhicule ait été accordé à Monsieur Albert en raison de ses difficultés financières ne saurait exonérer celui-ci de son obligation conventionnelle de contracter une assurance, conformément aux dispositions de l'article 10 de son contrat de travail, lui imposant d'être assuré tous risques et de procéder, par conséquent, au paiement de la prime d'assurance ;

Que c'est à juste titre que la société ADT a décompté à Monsieur Albert ses frais d'assurance, ce qui n'a jamais été contesté par ce dernier pendant la durée des relations contractuelles ;

Sur le surplus

Attendu que le jugement déféré sera seulement réformé en ce qu'il l'a condamné la société Nomos au paiement d'une somme de 500 F au titre de rappel de commission pour la période du 1er mai au 31 août 1996, alors qu'il est dû une somme de 2 958 F ;

Qu'il sera confirmé pour le surplus par adoption de ses exacts motifs ;

Attendu que Monsieur Albert, qui succombe principalement en appel, supportera les dépens exposés devant la juridiction du second degré et se verra débouté de sa demande au titre des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Attendu que la société Nomos aux droits de laquelle est venue la société ADT, qui ne triomphe pas totalement en ses prétentions, ne se verra pas attribuer en équité une somme sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Par ces motifs : Réformant le jugement entrepris, Condamne la société Nomos SA, aux droits de laquelle est venue la société ADT Sécurité Services, à payer à Monsieur Albert une somme de 2 958 F à titre de rappel de rémunération pour la période du 1er mai au 31 août 1996 ; Le confirme pour le surplus ; Laisse à Monsieur Albert la charge des dépens d'appel ; Rejette toute prétention autre ou contraire.