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Décisions

CA Paris, 18e ch. A, 5 février 2002, n° 01-34186

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Santamaria

Défendeur :

Education et Culture (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Dujardin

Avocats :

Mes Bernadeaux, Vandenbogaerde

Cons. prud'h. Evry, sect. encadrement, d…

16 mai 2001

Madame Rolande Santamaria e été engagée en qualité de VRP par la SA Education et Culture qui e pour activité la Diffusion auprès de particuliers d'ouvrages à caractère encyclopédique, par contrat à durée indéterminée en date du 15 mars 1983, Elle a démissionné le 25 juillet 1986 puis à sa demande e été réembauchée le 18 septembre 1988. En 1990 puis en 1993, elle a sollicité des prêts respectivement de 10 000 et 15 000 F auprès de son employeur. Le 1er septembre 1994, des protocoles d'accord ont été signés entre les parties quant aux modalités du remboursement de l'avance consentie sur plusieurs mois (respectivement par une retenue d'un maximum de 25 % du montant des Commissions pour la somme de 13 500 F et une retenue de 550 F pour la somme de 9 172 F). Le Tribunal d'instance de Juvisy-sur-Orge ouvrait sur sa demande, par jugement du 21 juillet 1994, une procédure de redressement judiciaire civil et [e 1er février 1995 constatait son impossibilité de payer ses dettes autres que les charges courantes et reportait notamment le règlement de la somme de 22 672 F due à la SA Education et Culture au 1er février 2000 et ce sans intérêts. La rupture des relations contractuelles se situerait, selon le certificat de travail, le 4 juillet 1996. Par ordonnance d'injonction de payer du 7 novembre 2000 puis par jugement du 28 juin 2001, le tribunal d'instance de Juvisy a condamné Madame Santamaria à rembourser à la SA Education et Culture la somme de 22 672 F. Madame Santamaria a saisi le conseil de Prud'hommes le 7 juin 2000.

Elle a relevé appel du jugement du conseil de prud'hommes d'Evry en date du 16 mai 2001 qui :

- a condamné la SA Education et Culture à lui payer une somme de 6 090 F à titre de congés payés pour la période de février 1995 à février 1996 en deniers ou quittances,

- l'a déboutée de ses autres demandes notamment de Commissions, d'indemnités de préavis et de licenciement et de dommages-intérêts pour non respect de la procédure de licenciement.

PRETENTIONS DES PARTIES

La Cour se réfère au jugement pour les faits et la procédure ainsi que, pour l'exposé de leurs prétentions et moyens, aux conclusions des parties régulièrement communiquées visées le 17 décembre 2001 et à leurs explications développées oralement à l'audience.

Madame Santamaria demande à la Cour :

- de dire que la rupture du contrat de travail résulte du comportement fautif de l'employeur,

- de dire que la SA Education et Culture a procédé au licenciement sans cause réelle et sérieuse et sans respecter la procédure prévue, de la condamner à lui verser les sommes de :

- 1 075,57 euro (soit 7 055,30 F) à titre de dommages-intérêts pour non respect de la procédure de licenciement,

- 3 226,72 euro (soit 21 165,90 F) au titre de l'indemnité de préavis,

- 4 573,47 euro (soit 30 000 F) à titre d'indemnité de clientèle,

- 6 402,86 euro (soit 42 000 F) à titre d'indemnité de rupture du contrat de travail,

- à titre subsidiaire et pour le cas où la Cour ne ferait pas droit à l'indemnité de clientèle, de condamner la SA Education et Culture à lui payer une somme de 80 668 euro (soit 5 291,47 F) à titre d'indemnité légale de licenciement,

- d'ordonner l'exécution provisoire,

- de condamner la SA Education et Culture à lui verser une indemnité de 1 219,59 euro (soit 8 000 F) au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

La SA Education et Culture conclut en réplique :

- au constat que la rupture du contrat est due à la démission de Madame Santamaria,

- au débouté de l'intégralité de ses demandes,

- à l'infirmation du jugement entrepris sur le chef de demande relatif aux congés payés,

- par l'effet de la prescription de l'article 2277 du Code civil, au constat que les demandes de Madame Santamaria ne peuvent concerner que les salaires antérieurs au 15 juin 1995,

- au constat que la moyenne des derniers mois de salaire de Madame Santamaria est de 843,63 F,

- à la condamnation de Madame Santamaria au paiement de la somme de 10 000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la rupture du contrat de travail

Il résulte des pièces versées aux débats que par courrier du 1er juillet 1996, la SA Education et Culture informe Madame Santamaria qu'elle n'a plus aucune nouvelle d'elle depuis plusieurs mois, prend acte de sa cessation d'activité et lui demande quand elle rendra le matériel en sa possession et réglera sa position de débitrice.

Par lettre du 4 juillet 1996, Madame Santamaria répond qu'elle ne peut en aucun cas accepter que l'on baisse son salaire, que le matériel est à la disposition de la société et que celle-ci est la seule responsable de sa position de débitrice.

Il n'est pas contesté qu'à la suite de cet échange de correspondances, Madame Santamaria n'a pas repris son travail et n'a pas justifié de son absence, demandant seulement le 26 janvier 1998 à son employeur de lui fournir un certificat de travail de 1988 à 1996 puis le 1er mars 2000 une déclaration d'emploi et de rémunération pour l'année 1996 sans remettre en cause la cessation d'activité et n'introduisant la présente procédure que le 7 juin 2000, soit près de 4 ans après cet échange de correspondance litigieux.

Cette lettre du 4 juillet 1996, qui n'est pas claire et non équivoque, ne peut être interprétée comme une démission de Madame Santamaria.

La lettre du 1er juillet 1996 est une prise d'acte de rupture de l'employeur qui équivaut à un licenciement dont les motifs sont énoncés l'absence de nouvelles de Madame Santamaria et son absence d'activité.

L'examen des fiches de paie de Madame Santamaria montre que te montant de ses Commissions était en baisse importante puisque le montant de ses salaires bruts cumulés était de 84 654,89 F en 1993, 10 840,18 F en 1994, de 11 622,97 F en septembre 1995 et négatifs en février 1996.

Dans sa lettre du 4 juillet 1996, elle fait valoir que cette situation est due à la proposition de la SA Education et Culture de diminuer le pourcentage de ses Commissions.

Aucune pièce n'établit que la SA Education et Culture avait modifié le bare des Commissions en annexe à son contrat de travail qu'elle a signé le 21 mars 1989 et l'attestation de Madame Ruocco-Harweg, en litige prud'homal avec la société, indiquant que le PDG lui avait donné l'ordre de ne plus lui donner de matériel d'une part, ne peut emporter la conviction de la Cour et d'autre part, se trouve en contradiction avec la teneur de l'échange de correspondance entre les parties puisque Madame Santamaria ne conteste pas avoir reçu les lettres des 1er décembre 1994 et 3 mars 1995 lui annonçant et lui envoyant un nouveau produit avec un chiffre d'affaires Commissionné de la même manière que les autres produits et pris en compte dans tes bares de son contrat et qu'elle répond elle-même dans sa lettre du 4 juillet 1996, à la demande de ta société dans la lettre du 1er juillet 1996, que le matériel de la société est à sa disposition.

Ce licenciement repose donc sur une cause réelle et sérieuse.

Le jugement entrepris sera donc infirmé et il sera alloué à Madame Santamaria, ainsi qu'il sera précisé au dispositif, une indemnité de préavis et de licenciement calculé sur la base de ses 12 derniers mois de salaire en l'absence de preuve de l'inobservation par l'employeur de son obligation de lui procurer du travail et de maintenir les modalités de sa rémunération.

Sur le non-respect de la procédure

La SA Education et Culture n'ayant pas respecté la procédure légale de licenciement, il sera alloué à Madame Santamaria une somme de 128,61 euro (soit 843,63 F).

Sur l'indemnité de clientèle

Aux termes de l'article 751-9 du Code du travail, le versement de cette indemnité est subordonné, outre la rupture du contrat de travail due à l'employeur, à la création, l'apport ou le développement par le représentant d'une clientèle dont il serait privé en raison de la rupture du contrat de travail.

Or, il n'est pas contesté que Madame Santamaria ne visitait que des particuliers pour leur vendre des encyclopédies. Il n'y a donc pas formation d'un réseau de clientèle susceptible de rester attaché à l'entreprise et sur laquelle elle est en droit de compter à l'avenir.

Elle sera donc déboutée de cette demande.

Sur l'indemnité légale de licenciement

Madame Santamaria sollicite à défaut d'indemnité de clientèle, le paiement de l'indemnité légale de licenciement sur la base de huit années d'ancienneté.

Comme ci-dessus, la Cour retiendra, au vu des fiches de paie communiquées pour les 12 derniers mois et de la moyenne des salaires fixée par l'employeur, un salaire moyen de 843,63 F.

Il lui est donc dû une indemnité légale de licenciement de 102,89 euro (soit 674,90 F).

Sur les congés payés 1995-1996

Compte tenu de la prescription quinquennale, Madame Santamaria ne peut demander que le paiement des sommes à caractère salarial dues depuis le 7 juin 1995.

Au soutien de cette demande, Madame Santamaria ne produit que ses bulletins de paie de juin à septembre 1995, janvier et février 1996 qui mentionnent un montant de salaire brut de 2 243,66 F.

Dans ses écritures, la SA Education et Culture demande à la Cour de constater que la moyenne de ses derniers mois de salaire est de 843,63 F.

Le jugement entrepris sera donc infirmé et il lui sera accordé au titre des congés payés la somme de 115,75 euro (soit 759,26 F).

Sur les frais irrépétibles

II serait inéquitable de laisser à Madame Santamaria la charge de la totalité des frais engagés pour cette procédure d'appel. Il lui sera par conséquent alloué la somme de 15 245 euro (soit 1 000 F).

Par ces motifs : Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions, Statuant à nouveau : Condamne la SA Education et Culture à payer à Madame Santamaria les sommes de : 115,75 euro (cent quinze euro soixante quinze centimes) (soit la somme de 759,26 F) (sept cent cinquante neuf F vingt six centimes) au titre des congés payés 1995/96 ; 128,61 euro (cent vingt huit euro soixante et un centimes) (soit la somme de 84 363 F) (huit cent quarante trois F soixante trois centimes) à titre d'indemnité pour non respect de la procédure ; 385,83 euro (trois cent quatre vingt cinq euro quatre vingt trois centimes) (soit 2 503,89 F) (deux mille cinq cent trois F quatre vingt neuf centimes) à titre d'indemnité de préavis ; 102,89 euro (cent deux euro quatre vingt neuf centimes) (soit 674,90 F) (six cent soixante quatorze F et quatre vingt dix centimes) à titre d'indemnité légale de licenciement ; Déboute Madame Santamaria de sa demande d'indemnité de clientèle ; Condamne la SA Education et Culture à payer à Madame Santamaria la somme de 152,45 euro (cent cinquante deux euro quarante cinq centimes) (soit 1 000 F) (mille F) au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; Déboute la SA Education et Culture de sa deman de sur ce même fondement ; Laisse les dépens de première instance et d'appel à la charge de la SA Education et Culture.