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Décisions

CCE, 6 décembre 2000, n° M.1940

COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

Décision

Framatome/Siemens/Cogéma/JV

CCE n° M.1940

6 décembre 2000

LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,

Vu le traité instituant la Communauté européenne, vu l'accord sur l'Espace économique européen, et notamment son article 57, paragraphe 2, point a), vu le règlement (CEE) n° 4064-89 du Conseil du 21 décembre 1989 relatif au contrôle des opérations de concentration entre entreprises (1), modifié en dernier lieu par le règlement (CE) n° 1310-97 (2), et notamment son article 8, paragraphe 2, vu la décision de la Commission du 11 août 2000 d'engager la procédure dans cette affaire, après avoir donné aux entreprises concernées la possibilité de faire connaître leurs observations sur les objections soulevées par la Commission, après consultation du comité consultatif en matière de concentrations (3), considérant ce qui suit:

(1) Le 10 juillet 2000, la Commission a reçu notification d'un projet de concentration portant sur la création par Framatome SA (ci-après dénommée "Framatome"), France, Siemens AG (ci-après dénommée "Siemens"), Allemagne, et Cogéma SA (ci-après dénommée "Cogéma"), France, d'une entreprise commune de plein exercice (ci-après dénommée "nouvelle entreprise commune").

(2) Le 11 août 2000, la Commission a décidé d'engager la procédure concernant cette affaire, en application de l'article 6, paragraphe 1, point c), du règlement sur les concentrations et de l'article 57 de l'accord sur l'Espace économique européen (ci- après dénommé "accord EEE").

I. PARTIES ET OPÉRATION

(3) Framatome conçoit et construit des centrales nucléaires et produit l'équipement principal des systèmes primaires, qui constituent le cour d'une centrale nucléaire. En outre, Framatome conçoit, produit et commercialise des assemblages de combustible pour les centrales nucléaires. Framatome opère également dans le secteur de la production de connecteurs pour des applications électriques et électroniques. L'Etat français détient, directement ou indirectement (notamment par l'intermédiaire de Cogéma), environ 85 % des actions de Framatome.

(4) Siemens est une société anonyme opérant dans le domaine du génie électrique et de l'électronique, qui couvre les secteurs de l'énergie, de l'industrie, de l'automation, des transports, du génie médical, de l'information et des communications, ainsi que des semi conducteurs. Dans le secteur du nucléaire, Siemens conçoit et fournit divers types de centrales nucléaires, y compris les composants et matériels nécessaires à leur fonctionnement, tels que les assemblages combustibles. Siemens fabrique des équipements pour les centrales nucléaires, par exemple, des systèmes d'instrumentation et de commande, diverses pièces de remplacement, etc.

(5) Cogéma, une entreprise appartenant au secteur public par l'intermédiaire du Commissariat à l'énergie atomique (CEA), opère essentiellement dans le domaine du nucléaire. Ses activités couvrent la totalité du cycle du combustible nécessaire pour assurer le fonctionnement continu des centrales nucléaires, c'est-à-dire, entre autres, la prospection de l'uranium, la conversion chimique et l'enrichissement de l'uranium, le retraitement du combustible nucléaire épuisé et les activités d'ingénierie qui y sont liées. En outre, Cogéma fabrique des assemblages combustibles et produit du combustible nucléaire à base d'un mélange d'oxyde d'uranium et d'oxyde de plutonium (combustible MOX) (4).

(6) Framatome et Siemens apporteront la majorité de leurs activités nucléaires à la nouvelle entreprise commune. Les activités commerciales de Cogéma ne seront pas transférées à la nouvelle entreprise commune. Toutefois, Cogéma participera à la nouvelle entreprise commune, dans la mesure où des aspects commerciaux et technologiques du combustible MOX sont concernés par certaines clauses du pacte d'actionnaires. Framatome détiendra 66 % et Siemens 34 % des actions de la nouvelle entreprise commune. Cogéma sera détentrice d'une action spéciale assortie de droits particuliers.

II. DIMENSION COMMUNAUTAIRE

(7) Le chiffre d'affaires total mondial réalisé par les entreprises concernées est supérieur à 5 milliards d'euros (5). Framatome, Cogéma et Siemens réalisent chacune dans la Communauté un chiffre d'affaires total supérieur à 250 millions d'euros, mais elles ne réalisent pas plus des deux tiers de leur chiffre d'affaires total dans la Communauté à l'intérieur d'un seul et même Etat membre. L'opération notifiée a donc une dimension communautaire. La présente opération relève également de l'accord sur la coopération avec les pays de l'AELE.

III. CONCENTRATION

(8) La nouvelle entreprise commune sera contrôlée conjointement par les trois sociétés mères, car les décisions commerciales stratégiques requièrent un vote de tous les membres du conseil.

(9) La nouvelle entité sera une société de plein exercice, dans la mesure où Framatome et Siemens apporteront leurs activités nucléaires respectives dans la nouvelle entreprise commune.

(10) L'opération proposée constitue donc une concentration au sens de l'article 3, paragraphe 1, point b), du règlement sur les concentrations.

IV. APPRÉCIATION SOUS L'ANGLE DE LA CONCURRENCE

Introduction

(11) Toutes les parties notifiantes opèrent dans le secteur du nucléaire. Les considérations qui suivent portent sur les secteurs dans lesquels, selon le point de vue préliminaire de la Commission, l'opération proposée créerait ou renforcerait une position dominante, qui aurait pour effet d'entraver une concurrence effective de manière significative dans le Marché commun ou une partie substantielle de celui-ci. Ces secteurs sont en particulier ceux: A. des assemblages combustibles; B. des systèmes d'instrumentation et de commande, et C. des râteliers de stockage du combustible épuisé.

(12) Les centrales nucléaires sont utilisées par les entreprises publiques d'électricité pour la production commerciale d'électricité. Les centrales nucléaires se classent en différentes catégories, selon qu'elles utilisent de l'eau ordinaire ou de l'eau lourde comme liquide de refroidissement et comme modérateur. Environ 80 % des réacteurs du monde entier sont construits sur la base de seulement deux conceptions américaines de réacteurs à eau ordinaire et représentent près de 88 % de la capacité nucléaire mondiale totale. Les réacteurs à eau ordinaire (REO) utilisent comme combustible nucléaire de l'oxyde d'uranium enrichi en isotope fissile, qui est modéré et refroidi par de l'eau hautement purifiée. Il existe deux types principaux de REO: le réacteur à eau pressurisée (REP) et le réacteur à eau bouillante (REB). Parmi les autres types de centrales nucléaires figurent, entre autres, celles à réacteurs à eau lourde pressurisée (également appelés réacteurs CANDU), les réacteurs VVER (la version russe du REP) ou encore des réacteurs refroidis au métal ou au gaz.

(13) Une centrale nucléaire complète est constituée de deux parties principales: l'îlot nucléaire (IN) et l'îlot conventionnel (IC). L'IN est la partie nucléaire à proprement parler d'une centrale nucléaire et comprend l'ensemble complet des systèmes et des équipements nécessaires pour fournir la vapeur à l'IC et pour assurer la sûreté du réacteur. L'IN est composé de la chaudière nucléaire et du solde de l'îlot nucléaire ou "SIN" (ensemble complet des systèmes et des équipements auxiliaires). L'IC est essentiellement constitué de l'ensemble turbogénérateur et de son système auxiliaire, abrités dans des bâtiments spécifiques, totalement séparés du bâtiment de l'IN. La conception de l'IC ne diffère pas foncièrement d'autres concepts de centrales électrogènes, par exemple, ceux des centrales électriques alimentées au charbon ou au gaz.

(14) Dans le tableau repris ci-dessous figure la liste des types de réacteurs les plus répandus dans le monde.

(15) Tableau 1: Types de réacteurs installés dans l'EEE et d'autres grandes régions du monde

EMPLACEMENT TABLEAU

A. ASSEMBLAGES COMBUSTIBLES

1. MARCHÉS DE PRODUITS EN CAUSE

(16) Les assemblages combustibles (AC) constituent le dispositif sous la forme duquel est livré le combustible pour son intégration dans le cour du réacteur nucléaire.Un AC comprend une structure métallique, appelée le squelette, et un certain nombre de tubes contenant des pastilles de combustible. Framatome et Siemens développent et fabriquent toutes deux des AC pour divers types de réacteurs, principalement pour les réacteurs à eau ordinaire.

(17) Selon les parties notifiantes, les AC pour réacteurs à eau ordinaire et les AC pour d'autres types de centrales nucléaires constituent des marchés séparés. Les réacteurs à eau lourde (REL) fonctionnent avec un modérateur et un liquide de refroidissement différent, à savoir de l'eau lourde D2O, au lieu de l'eau ordinaire H2O. La conception et la fabrication d'AC pour les REL nécessitent donc des compétences et des équipements de production spécifiques.En outre, aucun concepteur d'AC, à l'exception de KNFC (Corée du Sud), ne conçoit et produit des AC à la fois pour les REO et les REL. Les réacteurs refroidis au gaz (RRG) et les réacteurs avancés refroidis au gaz (RAG), qui sont utilisés exclusivement au Royaume-Uni, fonctionnent avec du graphite comme modérateur et du gaz en tant qu'agent de refroidissement. Les AC pour ces types de réacteurs doivent par conséquent répondre à des spécifications techniques différentes.Actuellement, seul BNFL/Westinghouse/ABB fournit des AC pour les RRG/RAG. Bien que le passage de la production d'AC pour les REO à celle d'AC pour les RAG semble techniquement possible, il nécessiterait un investissement important en équipements additionnels. Toutefois, le nombre restreint de centrales nucléaires de type RAG justifierait difficilement de tels investissements financiers.

(18) Dans les REO sont utilisés deux types différents de combustibles, en l'occurrence de l'uranium enrichi et du combustible MOX. Les deux types de combustibles sont utilisés sous forme de petites pastilles cylindriques de 6 à 7 grammes, qui sont soumises à la fission par une réaction en chaîne contrôlée dans un REC. L'uranium enrichi (souvent appelé dioxyde d'uranium ou "UC2", qui désigne sa composition chimique) est principalement utilisé dans les REO. Le combustible UO2, peut être subdivisé en uranium naturel enrichi [" UNE " (6)] et uranium de retraitement enrichi [" URE " (7)]. La fabrication du combustible MOX fait appel au recyclage du plutonium récupéré durant le retraitement du combustible UO2 épuisé. Les AC ont une fonction de conditionnement, c'est-à-dire qu'ils sont utilisés comme dispositif mécanique pour l'intégration du combustible (UO2 ou MOX) dans le cour du réacteur (8). Les parties notifiantes estiment que, pour ce qui concerne la substituabilité, au niveau de l'offre, entre les AC à UO2 et les AC à MOX, il semble qu'il suffise de considérer que les deux catégories d'AC constituent des sous-ensembles d'un marché intégré des AC pour les REO. Les parties notifiantes indiquent en particulier qu'un concepteur et fabricant d'AC à UO2, peut passer à la production d'AC à MOX (et vice versa), car les composants sont identiques pour les AC à UC, et les AC à MOX.

(19) En ce qui concerne les types d'AC à URE, des fabricants tiers ont souligné que les installations de production doivent pouvoir résoudre le problème que posent les faibles concentrations de produits fissiles résiduels. Outre des installations supplémentaires, la production requiert également des procédures spéciales de manipulation pour assurer la protection des ouvriers. Ces deux exigences sont coûteuses et ne s'avèrent en général justifiées que lorsqu'il y a une demande d'AC de type URE en nombre suffisant. L'enquête a montré que la plupart des exploitants de centrales nucléaires n'utilisent pas du tout de combustible URE (9), même lorsqu'ils sont autorisés à utiliser du combustible de retraitement. Néanmoins, les réponses des tiers semblent largement confirmer le point de vue des parties notifiantes, selon lequel les installations de production d'AC à URE peuvent servir à produire des AC à UNE. Il apparaît donc que aux fins de la présente affaire, les AC à URE peuvent être considérés comme faisant partie du même marché que les AC à UNE.

(20) Le combustible MOX est très toxique et requiert des équipements de production spécialisés pour la fabrication de pastilles de MOX, le remplissage des tubes de gainage et le montage des AC, en particulier en raison du fort taux de rayonnement nécessitant des mesures de protection spéciales. Les coûts de fabrication qu'engendré la production d'AC à MOX sont par conséquent beaucoup plus élevés que ceux de la production d'AC à UO2. Eu égard à la haute toxicité du combustible MOX, mais également en raison de la faible fraction que représentent les ventes de combustible MOX par rapport au combustible UNE, les AC à MOX utilisables dans les REP et dans les REB sont fabriqués et manipulés dans les mêmes installations de production. Même si la fabrication de MOX peut avoir lieu sur le même site de production que celle du combustible UNE, elle a lieu dans des installations de production séparées.

(21) Du point de vue de la demande, les AC pour les REP et les REB ne peuvent se substituer les uns aux autres. L'exploitant d'un REP ne peut utiliser des AC conçus pour des REB (ou vice versa), car il y a des différences importantes de conception entre les AC pour les REP et ceux pour les REB. La géométrie, c'est-à-dire les faisceaux d'AC, sont habituellement plus petits pour les REB et plus grands pour les REP. Par ailleurs, les tubes guides des AC sont différents pour les deux types de réacteurs. Ceux destinés aux REP sont utilisés pour guider des barres de contrôle, tandis que ceux conçus pour les REB maintiennent ensemble des barres et des canaux de circulation d'eau.

(22) Les parties notifiantes soutiennent que, en raison de la capacité des fournisseurs d'AC pour les REB à passer facilement à une production d'AC pour les REP (et vice-versa), les deux types d'AC devraient être considérés comme faisant partie du même marché. Il a été souligné que, malgré les différences de conception entre les AC pour les REB et les AC pour les REP, il se profile depuis quelques années une nette tendance à accéder à des conceptions communes pour les deux catégories d'AC. En outre, les parties notifiantes indiquent que les équipements et les processus de production d'AC pour les REB et pour les REP sont similaires et que le passage de la production d'une catégorie à l'autre est peu coûteuse et réalisable rapidement.

(23) Les tiers qui ont répondu à l'enquête de la Commission ont toutefois souligné que bien que les conceptions des REB et des REP soient semblables, il existe des différences majeures au niveau des matériaux, de la composition des divers éléments des AC, de la configuration du coeur et des éléments nécessaires au fonctionnement, conduisant à des différences significatives entre les AC pour les REB et ceux pour les REP en terme d'analyse technique, de procédés de fabrication et de prix facturés aux clients. Par exemple, les pastilles contenues dans les AC sont de tailles différentes.Comme indiqué plus haut, la géométrie des faisceaux d'AC est généralement plus petite dans les AC pour les REB et plus grande dans les AC pour les REP. Ces derniers sont dépourvus de boîtier. En outre, les AC pour les REB présentent une structure carrée métallique en plus. Enfin, les AC pour les REB comprennent un plus grand nombre d'arrangements de compositions de matières, du fait de différences d'enrichissement du combustible et/ou de configuration de l'absorbeur à l'intérieur de l'assemblage. Le passage de la production d'AC pour les REB à celle d'AC pour les REP (ou vice-versa) a été considéré comme très coûteux et comme nécessitant des investissements importants.

(24) Enfin, les prix diffèrent significativement entre les AC pour les REP et les AC pour les REB, en moyenne de [15-25 %] (*)

(25) D'après les parties notifiantes, il est également possible de faire une distinction entre les différentes géométries des AC. Les AC pour les REP et les AC pour les REB sont proposés respectivement avec sept et trois géométries standard. Les AC pour les REO avec des géométries (et des longueurs) différentes appartiennent au même marché, dans la mesure où différentes géométries peuvent être mises au point assez facilement une fois qu'une conception de base des AC a été développée (les principales différences résidant dans les dimensions des grilles d'espacement et des embouts). Un fabricant d'AC pourrait donc facilement passer de la production d'un type de faisceaux à celle d'un autre, y compris sur une même chaîne de production. En outre, les parties notifiantes prétendent que, une fois qu'une licence de fabrication a été obtenue pour une géométrie donnée, il est nettement plus facile d'obtenir une licence pour une autre géométrie à l'intérieur de la même famille d'AC. Des fabricants tiers d'AC ont largement confirmé que des géométries différentes ne sont pas motif à distinction entre les AC pour les REP et les AC pour les REB.

Conclusion

(26) Compte tenu des éléments visés ci-dessus, on peut conclure que les AC pour les REP et les AC pour les REB appartiennent à des marchés de produits différents. En outre, il paraît approprié de considérer les AC à MOX comme constituant un marché distinct au sein de la catégorie des AC pour les REO (10)

2. MARCHÉS GÉOGRAPHIQUES EN CAUSE

(27) D'après le point de vue des parties notifiantes, le marché pour la conception et la fabrication d'AC est de dimension mondiale, et il s'étend en tout état de cause au moins à l'EEE. En ce qui concerne le produit en tant que tel et les procédés de production, les AC pour les REO sont essentiellement les mêmes dans le monde entier (11). Les frais de transport sont généralement [< 5 %] du prix de fabrication d'un AC pour les REO, c'est-à-dire du prix de l'AC hors matière fissile. Les règles de sécurité en matière de transport et d'utilisation des AC pour les REO diffèrent selon les régions du monde, mais ces variations ne constituent en général pas un obstacle significatif aux échanges commerciaux. Alors que les autorisations d'exploiter des conceptions d'AC sont habituellement délivrées à un niveau national au sein de l'Union européenne, l'octroi d'une autorisation dans un Etat membre accélère considérablement les procédures d'obtention d'une autorisation d'exploiter dans d'autres Etats membres. De plus, les principaux vendeurs d'AC ont déjà obtenu des autorisations dans de nombreux pays dans le monde entier. Les droits de douane sur les AC pour les REO importés dans l'Union européenne sont actuellement de l'ordre de 4 % du prix des AC complets, c'est-à-dire uranium enrichi compris, indépendamment du pays d'origine des AC importés. Les droits de douane sur les AC importés aux Etats-Unis d'Amérique (Etats-Unis) s'élèvent à environ 4 % du prix des AC. Dans le cadre du GATT/OMC, les droits de douane sur les importations dans l'Union européenne seront progressivement abaissés à 2,2 %.

(28) Les parties notifiantes ont également indiqué que les prix dans les diverses parties du monde semblent converger. Du fait d'une baisse importante des prix en Europe au cours des dernières années, la différence entre les prix américains et européens tant des AC pour les REB que des AC pour les REP a été ramenée à [15-25 %]. Cette différence est due en partie à des différences de coûts de main-d'œuvre. Les parties notifiantes mentionnent par ailleurs que le traité Euratom s'applique à tous les échanges commerciaux dans le domaine du nucléaire. De plus, les accords de coopération Euratom sont applicables, en particulier avec les États-Unis (12) et avec quelques autres partenaires commerciaux.

(29) Toutefois, l'étude du marché a indiqué que les marchés des AC pour les REP et les REB ne s'étendent pas au-delà de l'EEE. Tout d'abord, la proximité du fournisseur d'AC est un point important pour les centrales nucléaires. Selon les réponses des tiers, les fabricants russes et asiatiques, par exemple, sont désavantagés du fait que les AC devraient être transportés en toute sécurité sur de longues distances et passer plusieurs frontières. Des autorisations sont requises, en particulier pour faire passer du combustible d'un pays dans un autre. Les frais de transport augmentent encore (et peuvent ainsi devenir très élevés), dans la mesure où divers pays ont différentes exigences quant aux conteneurs requis pour le transport du combustible. La traversée de plusieurs frontières peut également présenter des niveaux de risque élevés en raison des incertitudes pesant sur le passage du produit dans divers environnements réglementaires. De plus, les délais d'approvisionnement en nouveaux AC peuvent être très longs, car les fournisseurs doivent obtenir des exploitants de centrales nucléaires un statut de fournisseur qualifié. Le délai est en général de cinq à sept ans. La proximité du fournisseur d'AC, c'est-à-dire son implantation au moins dans la même région du monde que celle de l'exploitant de la centrale nucléaire, semble indispensable pour éviter un surcoût significatif. En outre, selon les tiers, alors que la plupart des régions du monde ont adopté les positions des Etats-Unis en matière d'exigences et de règles de sécurité, les organismes de réglementation de l'EEE, particulièrement en France et en Allemagne, appliquent des exigences et des règles de sécurité en partie plus strictes, ce qui conduit à des frais plus élevés pour des conceptions d'AC nécessitant des autorisations spéciales.

(30) En ce qui concerne les importations d'AC dans l'Union européenne, des tiers insistent également sur le fait qu'elles sont soumises à un droit d'importation qui s'élève à environ 3,5 % de la valeur totale des AC (13). Comme la fabrication des AC ne représente que [20-30 %] de la valeur des faisceaux d'AC, c'est-à-dire de l'AC sans le combustible nucléaire, l'incidence relative de ce droit peut être considérée comme étant en fait quatre fois plus élevée, c'est-à-dire égale à 14 %. C'est pourquoi, seules de rares livraisons ont eu lieu d'autres régions du monde vers l'Union européenne ou vers les pays de l'EEE (14). Exceptionnellement, la Suisse, la Slovénie et la République tchèque ont reçu des envois d'un fournisseur établi aux Etats-Unis. Selon l'un des fournisseurs d'AC, ces échanges commerciaux particuliers (quelques exportations vers des pays européens, mais très rarement vers l'Union européenne) sont des indicateurs de l'effet protecteur des droits de douane perçus par l'Union européenne.

(31) Une autre indication dans ce sens est le fait que les concepteurs et les fabricants d'AC établis dans d'autres régions du monde ont réalisé la majeure partie de leurs ventes dans leur propre région. À cet égard, il convient de mentionner qu'il est interdit à au moins un grand fournisseur japonais d'AC, dans le cadre d'un accord conclu entre le gouvernement japonais et celui des États-Unis, d'exporter des AC dans d'autres régions du monde. Les niveaux de prix dans les différentes régions du monde varient en moyenne entre [25-35 %]. Les tiers n'ont pas confirmé que les prix aux Etats-Unis et dans l'EEE convergeront dans les prochaines années. Bien que l'EEE et les Etats-Unis aient connu une baisse des prix dans l'absolu au cours des dernières décennies, la différence de prix relative entre I'EEE et les États-Unis est restée relativement stable, de l'ordre de [25-35 %] (15) en moyenne.

(32) Compte tenu des éléments mentionnés ci-dessus, on peut conclure que le marché géographique en cause pour les AC pour REP et les AC pour les REB apparaît comme étant un marché à l'échelle de I'EEE. Cela a été largement confirmé par des concurrents tiers.

(33) Pour ce qui concerne les AC à MOX, le combustible nucléaire de retraitement n'est autorisé que dans certains pays du monde. Dans I'EEE, quelques exploitants de centrales nucléaires en France, en Allemagne et en Belgique sont autorisés à utiliser du combustible nucléaire de retraitement, associé à du combustible UNE. En dehors de l'EEE, seuls la Suisse et le Japon ont autorisé certains de leurs exploitants de centrales nucléaires à faire usage de combustible nucléaire de retraitement. L'utilisation de combustible MOX est interdite aux États-Unis. Aux fins de définition du marché géographique, la question de savoir si le marché géographique des AC à MOX s'étend à l'EEE ou à une région plus étendue peut rester ouverte, car le projet de concentration aurait un impact important, quelle que soit la définition retenue.

3. APPRÉCIATION SOUS L'ANGLE DE LA CONCURRENCE

3.1. Activités des parties

(34) Framatome ne conçoit que des AC pour les REP, mais produit des AC à la fois pour les REP et les REB dans ses installations de fabrication européennes. Elle a commencé ses activités dans le secteur des AC pour les REP dans le cadre d'un contrat de licence conclu avec Westinghouse, qui a duré jusqu'en 1981. Framatome fabrique tous les composants à l'intérieur, sauf pour ce qui concerne les crayons de combustible MOX et les AC à MOX [fournis par Cogéma et Melox SA (Melox), une entreprise commune détenue à parts égales par Cogéma et Framatome] et, pour sa filiale américaine FCF, l'achat de pastilles d'UO2 au près de Siemens Power Coopération ("SPC") (16). Framatome possède de nombreuses filiales pour la production et la commercialisation d'AC et de composants d'AC, qui seront toutes transférées dans la nouvelle entreprise commune.

(35) Les activités de Siemens dans le secteur des AC sont regroupées dans sa filiale Kraftwerksunion ("WTU"), qui fut créée en 1969 lorsque Siemens a ajouté la technologie des AC pour les REB de AEG à ses activités déjà existantes dans le domaine des AC pour les REP. Tout comme Framatome, Siemens a débuté dans le secteur des AC pour les REP en les produisant sous licence de Westinghouse (le contrat de licence a expiré en 1970), mais conçoit, produit et vend maintenant des AC pour les REP occidentaux avec toutes les géométries standard. Dans le domaine des AC pour les REB, Siemens a acquis une première expérience dans le cadre d'un contrat de licence avec GE (qui est arrivé à expiration en 1990), mais a développé entre-temps ses propres conceptions pour les faisceaux standard d'AC pour les REB. Les activités de Siemens dans le domaine de la fabrication et de la commercialisation d'AC sont exercées par l'intermédiaire de nombreuses filiales, qui seront toutes transférées à la nouvelle entreprise commune.

(36) Les activités de Cogéma dans le secteur des AC se limitent à la fabrication d'AC à MOX ou de composants individuels de ces AC. Cogéma exploite une usine de production de combustible MOX. De plus, Cogéma et Framatome, par l'intermédiaire de Melox, exploitent une usine de fabrication commune. Alors que les deux usines ne produisent actuellement des AC à MOX (ou certains de leurs composants) que pour les REP, Melox commencera prochainement à produire des crayons de combustible MOX pour les REB. Les produits fabriqués dans les deux usines sont commercialisés soit directement par Cogéma, soit par l'intermédiaire de Commox SA ("Commox"), une entreprise commune à 60/40 entre Cogéma et Belgonucléaire, qui vend également des crayons de combustible. MOX fabriqués dans l'usine de Belgonucléaire. D'après un rapport établi par l'Agence d'approvisionnement d'Euratom ("AAE") (17), une seconde usine de production de combustible MOX sera bientôt opérationnelle chez Melox. L'activité de vente de combustible MOX de Cogéma ne sera pas apportée à la nouvelle entreprise commune.

3.2. Parts de marché

(37) Les parts de marché des activités des parties notifiantes et de leurs concurrents sont résumées dans les tableaux repris aux considérants 38, 39, 40 et 41. À titre de comparaison avec la situation du marché dans I'EEE, les données relatives aux parts de marché dans d'autres régions du monde sont également indiquées. La période couvre les années 1998 à 2000. Des tableaux séparés présentent les données relatives aux parts de marché dans le secteur des AC pour les REP et les AC pour les REB, agencées sous la même forme de tableau. En 1999, le chiffre d'affaires total de Framatome et de Siemens dans le secteur des AC pour les REO représentait plus de [...] millions d'euros dans l'EEE.

(38) Tableau 2 : Parts de marché dans le secteur des AC pour les REO (AC pour les REP + AC pour les REB) .

EMPLACEMENT TABLEAU

(39) Tableau 3: Parts de marché dans le secteur des AC pour les REP.

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(40) Tableau 4: Parts de marché dans le secteur des AC pour les REB.

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(41) Tableau 5: Parts de marché dans le secteur des AC à MOX pour les REO; chiffres approximatifs

EMPLACEMENT TABLEAU

3.3. Appréciation

3.3.1. Interprétation de la répartition des marchés - Situation actuelle dans l'EEE

(42) Le tableau 3 présente les parts de marché des parties notifiantes et celles de leurs concurrents présents sur le marché des AC pour les REP. À titre de comparaison, les chiffres concernant d'autres régions du monde ont été ajoutés à ceux de l'EEE dans le tableau.

(43) La part importante de Framatome résulte du fait que le marché français, qui représente [60-70 %] de la demande totale d'AC pour les REP dans I'EEE (18), est quasi exclusivement approvisionné par Framatome. En d'autres termes, la part de marché de [60-70 %] de Framatome dans l'EEE est la somme d'environ [55-65 %] de parts dues aux ventes en France et à peu près [5-15 %] réalisés par l'intermédiaire de ventes en Allemagne et, dans une moindre mesure, dans d'autres pays de l'EEE.

(44) En France, Framatome a construit toutes les centrales nucléaires, dont deux types de REP de base, c'est-à-dire d'une puissance de 900 MW et de 1 300 MW, ont été livrés à Electricité de France (EDF). Framatome bénéficie ainsi d'une forte demande d'AC pour les REP, comme le souligne le considérant précédent. Ainsi, la France peut être considérée comme le "marché national" de Framatome. Aucun autre concurrent n'a été capable d'accéder à ce "marché national", à l'exception de très rares contrats de fourniture d'AC limités à quelques centrales nucléaires.

(45) EDF est le seul exploitant de centrales nucléaires en France. Normalement, les exploitants de centrales nucléaires ont au moins deux sources différentes de fourniture d'AC pour l'ensemble de leurs centrales (19). Toutefois, EDF a Framatome comme fournisseur qualifié principal d'AC pour les REP et Siemens uniquement pour quelques centrales nucléaires. EDF n'a accordé que de très rares contrats de fourniture à d'autres vendeurs d'AC. En fait, EDF a rarement demandé à d'autres fournisseurs d'AC de lui soumettre des offres. Dans ce contexte, il convient de mentionner qu'EDF a une participation de 9,3 % dans Framatome. Les deux sociétés sont contrôlées par l'État français.

(46) En Allemagne, la situation est, dans une certaine mesure, semblable à celle de la France. Siemens, un constructeur de centrales nucléaires à REP et à REB, a livré la plupart des centrales nucléaires en Allemagne (20) et a également construit de nombreuses centrales nucléaires dans d'autres pays de I'EEE. Comme le montre le tableau repris ci-dessus, la part de marché dans l'EEE de Siemens dans le secteur des AC pour les REP est de [15-25 %]. Elle correspond à la somme d'environ [5-15 %] résultant des ventes en Allemagne et approximativement [5-15 %] réalisés grâce à des ventes dans d'autres pays de l'EEE. Pour avoir une image complète de la position de Siemens, il convient d'ajouter une part de [35-45 %] du marché des AC pour les REB au niveau de l'EEE, dont au moins la moitié des ventes a été réalisée en Allemagne. L'Allemagne peut donc être considérée comme le "marché national" de Siemens. Toutefois, la position de Siemens n'est pas inattaquable, du fait que des concurrents ont réussi à accéder au marché allemand et en raison de l'arrêt progressif de la production d'électricité par les centrales nucléaires en Allemagne.

(47) En ce qui concerne la politique d'approvisionnement des exploitants de centrales nucléaires en Allemagne, la majorité des exploitants de centrales nucléaires équipées de REP ont choisi Siemens comme principal fournisseur qualifié et Framatome comme second fournisseur. D'autres vendeurs d'AC arrivent en troisième et quatrième position. En outre, les services publics allemands invitent en général plusieurs fournisseurs d'AC à faire des offres.

(48) Dans l'EEE, les parts de marché de Framatome et de Siemens ont toujours été importantes. Framatome et Siemens ont été les constructeurs de la très grande majorité des centrales nucléaires dans l'EEE, notamment de 74 REP sur les 89 actuellement installés dans I'EEE. Traditionnellement, le constructeur de la centrale nucléaire se voyait proposer, après son achèvement, les premiers contrats de chargement en combustible nucléaire. La répartition du marché a également été très stable. Cela semble être lié au fait que chaque fournisseur d'AC doit obtenir le statut de fournisseur qualifié des exploitants des centrales nucléaires, ce qui implique une autorisation de l'État, avant qu'un contrat de chargement quelconque puisse être accordé. Il s'agit d'une procédure longue et coûteuse, qui peut prendre jusqu'à cinq ans d'essai et de procédures et peut coûter jusqu'à [...] millions d'euros (21). En tant que fournisseur du premier chargement en AC, Siemens a obtenu le statut de fournisseur qualifié pour l'ensemble de ses conceptions de centrales nucléaires et se trouve ainsi bien placée dans la concurrence pour les rechargements. Par ailleurs, Framatome et Siemens ont également obtenu le statut de fournisseur qualifié d'AC d'exploitants de centrales nucléaires pour des conceptions d'autres constructeurs de centrales nucléaires, principalement pour leurs compétences élevées dans ce domaine. Leurs concurrents ont moins bien réussi à obtenir le statut de fournisseur qualifié. D'après les informations fournies par les parties notifiantes, Framatome a obtenu le statut de fournisseur qualifié pour [75-85 %] et Siemens pour [55-65 %] des 89 centrales nucléaires à REP en exploitation dans I'EEE, alors que BNFL/Westinghouse/ABB n'a obtenu ce statut que pour [35-45 %] de ces centrales nucléaires. Par conséquent, BNFL/Westinghouse/ABB (et ENUSA) n'ont en fait jamais réussi à fournir des AC pour un nombre important de réacteurs.

(49) En outre, même lorsque des concurrents ont obtenu le statut de fournisseur qualifié des exploitants de centrale nucléaires, Framatome et Siemens se sont souvent vu accorder de nouveaux contrats de chargement en AC pour de nombreux sites de centrales nucléaires dans l'EEE. Mis à part le niveau élevé des conceptions de Framatome et de Siemens, il apparaît que le fait d'être le fournisseur en AC du "marché national" présente un certain avantage.

(50) Pour compléter leur position dans l'EEE, Framatome et Siemens sont en concurrence avec BNFL/ Westinghouse/ABB et Siemens également avec General Electric (dans le secteur des AC pour les REB) dans d'autres pays de l'EEE, dans lesquels aucun fournisseur "national" de centrales nucléaires n'est établi, sauf pour ce qui concerne le Royaume-Uni, où BNFL a livré un type de centrale nucléaire totalement différent (réacteurs refroidis au gaz), qui ne relève ni de la technologie nucléaire de Framatome ni de celle de Siemens. Dans ces autres pays de l'EEE, les exploitants de centrales nucléaires ont inscrit Framatome et Siemens sur leur liste de fournisseurs en différentes positions.

3.3.2.Changements dans la répartition des marchés dus à la concentration - La nouvelle entité obtiendrait des parts de marché importantes dans l'EEE

(51) Le tableau 3 repris ci-dessus laisse entrevoir que la nouvelle entité détiendrait une part de marché cumulée dans le secteur des AC pour les REP de [80-90 %] dans l'EEE. Son concurrent direct, BNFL/Westinghouse/ABB (en combinaison avec ENUSA), aurait une part de marché de [10-20 %]. Au cours des dernières années, aucun autre concurrent n'a réalisé un chiffres d'affaires significatif dans l'EEE.

(52) Lorsque l'on considère la totalité du marché des AC pour les REC, on peut constater, d'après le tableau 2 repris ci-dessus, que la nouvelle entité détiendrait également une importante part de marché cumulée dans I'EEE. Au cours des dernières années, aucun concurrent n'a réalisé de chiffre d'affaires significatif dans I'EEE, à l'exception de BNFL/Westinghouse/ABB. Lorsque l'on considère l'opération prévue à l'échelle planétaire, la nouvelle entité deviendrait également le plus grand acteur du marché mondial des AC pour les REO. Les concepteurs et les fabricants d'AC établis dans d'autres régions du monde ont réalisé la majorité de leurs ventes dans leurs propres régions.

(53) En ce qui concerne les REB, il n'y a pas de chevauchement des activités, puisque seule Siemens conçoit et produit des AC pour les REB. Framatome fabrique bien des AC pour les REB, mais ces activités sont exercées en sous-traitance pour Siemens et pour Toshiba (faisant partie de GNF).

(54) En France, la concentration conduirait à une situation dans laquelle EDF serait confrontée à un monopole pour toutes ses fournitures d'AC, c'est-à-dire qu'elle perdrait sa seconde source d'approvisionnement, représentée actuellement en partie par Siemens. Cela pourrait avoir une incidence sur les consommateurs finals d'électricité en forçant les électriciens à augmenter leurs prix en raison de coûts d'approvisionnement en AC plus élevés. Vu la longueur de la procédure de qualification, en général entre cinq et sept ans, EDF dépendrait de la fourniture monopoliste d'AC pendant très longtemps. Un passage rapide visant à d'autres sources d'approvisionnement en AC paraît donc impossible.

(55) En Allemagne, le résultat de la concentration serait dans une certaine mesure le même qu'en France. Toutefois, les exploitants de centrales nucléaires allemands ont d'autres fournisseurs qualifiés d'AC, ce qui leur permet d'éviter d'être totalement dépendants de la nouvelle entreprise commune.

(56) En ce qui concerne la situation dans l'EEE, la nouvelle entreprise commune impliquerait la combinaison des deux "marchés nationaux" des parties, entraînant un renforcement de leur position globale dans I'EEE. La nouvelle entreprise commune disposerait d'une source de revenus substantiels et fiables et d'une très forte puissance de rétorsion, grâce à son importante surcapacité.

(57) À titre de comparaison, lorsque l'on considère l'opération prévue à l'échelle planétaire, la nouvelle entité deviendrait un important acteur mondial, avec une part de marché de [35-45 %]. Cependant, comme mentionné dans le considérant relatif à la définition géographique du marché, la presque totalité des fabricants d'AC établis dans d'autres régions du monde ont réalisé la majeure partie de leurs chiffres d'affaires dans leurs propres régions.

(58) En ce qui concerne les AC à MOX, Cogéma et Belgonucléaire détiennent ensemble une part de marché d'environ [80-90 %] dans l'EEE et une part similaire à l'échelle mondiale. Le résultat de l'opération prévue sera apprécié ci-dessous, dans la section relative à l'intégration verticale.

3.3.3. Autres aspects

3.3.3.1. L'intégration verticale par l'intermédiaire de la participation de Cogéma permettrait à la nouvelle entité de couvrir la totalité du cycle du combustible nucléaire

(59) Les activités de Cogéma couvrent ensemble ce que l'on appelle le cycle du combustible nucléaire ("CN"), activités qui sont reliées verticalement à la conception et à la fabrication d'AC pour les REO. Ces activités incluent celles qui sont liées au traitement de l'uranium avant et après son utilisation en tant que combustible nucléaire. La partie initiale du CCN comprend l'extraction et le broyage de l'uranium naturel, la conversion des concentrés d'uranium, l'enrichissement de l'uranium naturel et enfin la fabrication des AC. La partie terminale du CCN comprend le retraitement ou le stockage du combustible épuisé produisant du combustible recyclé et/ou des déchets ultimes.

Extraction et broyage de l'uranium naturel

(60) Selon les parties, Cogéma opère dans le secteur de l'extraction et du broyage de l'uranium naturel dans le monde entier par l'intermédiaire d'un certain nombre de filiales et entreprises communes d'extraction (à participation minoritaire ou majoritaire). Par conséquent, Cogéma a obtenu l'accès à de nombreux gisements d'uranium situés dans la plupart des régions du monde, notamment au Canada, en Australie, au Kazakhstan. Ces pays sont connus pour l'importance de leurs gisements d'uranium, qui représentent environ 54 % des ressources mondiales en uranium, selon les estimations de 1997.

(61) La part de marché de Cogéma dans le secteur de l'extraction et du broyage était d'environ [15-20 %] en 1998 à l'échelle mondiale. Son grand concurrent Cameco, ainsi que UEM (Canada/États-Unis), réalisent une part de marché de [30-35 %]. D'autres concurrents détiennent des parts de marché allant jusqu'à 10 % chacun, par exemple ERA (Australie) avec à peu près [5-10 %], ou Rössing (Namibie de l'Ouest), une filiale de Rio Tinto, avec [5-10 %] (22).

Conversion des concentrés d'uranium

(62) Seules quelques grandes entreprises dans le monde exploitent des installations de conversion. Cogéma possède deux usines de conversion, toutes deux situées dans l'EEE. La part de marché de Cogéma était de [20-25 %] à l'échelle mondiale. Ses concurrents sont moins importants, par exemple ConverDyn (États-Unis), avec une part de marché de [15-20 %], Cameco (Canada) avec [10-15 %], BNFL/Westinghouse/ABB avec [5-10 %]. Minatom (Russie) réalise une part de marché de [15-20 %]; cependant, son activité de conversion reste intégrée dans le complexe militaro-industriel hérité de l'ex-URSS. L'accès à la capacité paraît donc limité et largement dépendant de la situation politique.

Enrichissement de l'uranium naturel

(63) Tout comme pour la conversion de l'uranium, il n'y a que quelques grandes entreprises qui procèdent à l'enrichissement de l'uranium naturel. Cogéma exerce ses activités d'enrichissement par l'intermédiaire de sa filiale Eurodif, créée initialement sous la forme d'un consortium avec d'autres participations, entre autres avec ENEA (Italie), ENUSA (Espagne) et Synatom (Belgique). La part de marché de Cogéma était de [20-25 %] à l'échelle mondiale en 1999. Deux concurrents détiennent des parts plus élevées: USEC (États-Unis) avec [35-40 %] et TENEX (Russie) avec [25-30 %]. D'autres concurrents réalisent des parts de marché plus faibles, par exemple Urenco avec [10-15 %] (23).

Retraitement ou stockage du combustible épuisé

(64) Dans le secteur du retraitement du combustible épuisé, seules deux entreprises se partagent le marché, à savoir Cogéma et BNFL/Westinghouse/ABB. Pour 1999, le chiffre d'affaires mondial réalisé en services de retraitement par Cogéma était d'environ [65-75 %] et celui de BNFL/Westinghouse/ABB de [25-35 %]. Il y a quelques autres fournisseurs de services de retraitement, mais avec des capacités très faibles comparées à celles des deux chefs de file. Minatom (Russie), bien qu'exploitant des usines de retraitement de combustible épuisé, est spécialisée dans le combustible épuisé issu des réacteurs de type VVER. Selon les parties notifiantes, un accroissement de la capacité de retraitement est prévu, dont l'arrivée sur le marché est toutefois attendue dans une perspective à long terme. Il convient de mentionner à cet égard le retraitement de certains types de combustible épuisé peut présenter un intérêt militaire pour la production de plutonium de qualité militaire.

(65) Le retraitement est lié à la production de combustible MOX. En France, en Allemagne et en Belgique, environ 50 % des centrales nucléaires en exploitation ont été autorisées à charger du combustible MOX. Toutefois, ce combustible est toujours utilisé en mélange avec d'autres types de combustible nucléaire, essentiellement du combustible UNE. À titre de comparaison, l'utilisation de combustible MOX est interdite aux Etats-Unis, alors qu'elle est autorisée dans certaines centrales nucléaires situées dans d'autres régions du monde.

(66) Le retraitement est un service fourni aux exploitants de centrales nucléaires, qui restent propriétaires de tous les composants de leurs combustibles. Après le retraitement, le combustible retraité est utilisé pour produire de nouveaux AC et les déchets conditionnés, après un stockage temporaire sur le site de retraitement, sont retournés à l'exploitant de la centrale nucléaire.

(67) Par l'intermédiaire de la concentration, Cogéma renforcerait son influence sur la nouvelle entreprise commune. D'un côté, Framatome est un fournisseur de technologie nucléaire, tandis que de l'autre côté, Cogéma couvre la totalité du cycle du combustible nucléaire, qui est indispensable pour assurer le fonctionnement continu des centrales nucléaires. Cogéma détiendrait dans la nouvelle entreprise commune une action à laquelle seraient attachés des droits particuliers et qui garantirait à Cogéma, entre autres, que le combustible MOX et les AC appropriés, dont la production ne serait pas transférée à la nouvelle entreprise commune, seraient toujours compatibles avec les AC conçus et fabriqués par la nouvelle entreprise commune. En outre, elle permettrait à la nouvelle entreprise commune et à Cogéma de promouvoir activement des foffaits incluant combustibles et services auprès des exploitants de centrales nucléaires, ce que d'autres fournisseurs d'AC ne peuvent proposer du fait qu'ils n'exercent pas d'activités dans certains des secteurs couverts par Cogéma. Ce partage croisé de technologie conduirait à un renforcement de la position de Cogéma sur le marché du combustible MOX, où elle est déjà dominante avec une part de marché de [65-75 %] dans le monde et d'environ [85-95 %] dans l'EEE.

3.3.3.2. Les concurrents dépendent de certaines activités liées intégrées verticalement

(68) Comme le montrent les analyses décrites ci-dessus, Cogéma opère dans tous les secteurs du nucléaire verticalement liés au marché des AC. Au niveau mondial, seuls Cogéma et le complexe nucléaire russe sous l'autorité de l'État couvrent la totalité du cycle du combustible nucléaire, c'est-à-dire à la fois l'extraction, la conversion, l'enrichissement et le retraitement. Tous les autres concurrents sont présents dans certains, mais pas dans tous les secteurs d'activités. Par exemple, BNFL/Westinghouse/ABB, le principal concurrent européen des parties notifiantes, exerce une activité limitée de conversion et de retraitement dans l'EEE et aux Etats-Unis et participe à l'enrichissement par l'intermédiaire de sa participation de un tiers dans Urenco. Bien que le groupe BNFL/Westinghouse/ABB ne soit pas actif dans le secteur de l'extraction, il peut avoir accès à l'uranium grâce à des contrats d'achat de sa filiale UAM. Cameco, une société canadienne, n'opère que dans l'extraction et la conversion.

(69) Le pacte d'actionnaires prévoit des contrats de licence croisés entre Framatome, Siemens, Cogéma et la nouvelle entreprise commune [Informations relatives au pacte d'actionnaires]. Cela conférerait à la nouvelle entreprise commune un avantage technologique vis-à-vis des centrales nucléaires fonctionnant avec une combinaison d'AC à URE et à MOX, puisque Cogéma est le premier fournisseur mondial de combustible MOX.

3.3.3.3. L'arrivée sur le marché d'éventuels concurrents semble très improbable dans l'EEE

3.3.3.3.1. Des barrières importantes empêchent l'accès au marché de l'EEE

(70) Comme exposé ci-dessus, la conception et la fabrication d'AC requièrent d'importantes ressources et de gros investissements en R & D, des compétences techniques en matière de technologie nucléaire et des installations de production. En raison de la part élevée des frais fixes, les économies d'échelle jouent un rôle important dans le domaine de la fabrication d'AC. Les parties notifiantes estiment qu'il faudrait une capacité de production d'au moins [...] tU pour réussir à accéder (de façon économiquement viable) au marché mondial. En outre, les exploitants de centrales nucléaires attendent des services de haute qualité pour les fournitures d'AC, ce qui implique une relative proximité entre le fournisseur de services et la centrale nucléaire.

(71) De plus, la plupart des réacteurs installés dans I'EEE ont en principe été fournis par quatre grandes entreprises, en l'occurrence Framatome, Siemens, Westinghouse et GE. Pour chacune de leurs conceptions de réacteurs, d'autres vendeurs d'AC doivent obtenir une licence de fabrication d'AC compatibles avant de pouvoir potentiellement accéder au marché. En particulier, un tout nouveau vendeur d'AC devrait également obtenir des exploitants de centrales nucléaires le statut de fournisseur d'AC qualifié, qui nécessite de longues périodes d'essai, de cinq à sept ans.

(72) Au vu des différents aspects repris ci-dessus, il apparaît que l'accès au marché ne serait possible que pour des vendeurs d'AC d'autres parties du monde financièrement puissants. Ils peuvent se permettre des lourdes dépenses pendant de longues périodes, sans attendre une rentabilité rapide de leurs investissements. Toutefois, vu la structure contractuelle de la fourniture d'AC décrite plus loin, combinée avec le lent retour sur les investissements, même des sociétés financièrement puissantes hésiteraient à pénétrer sur le marché de l'EEE. Ce sera d'autant plus le cas, si, à la suite de l'opération proposée, les deux acteurs puissants et fortement implantés sur le marché que sont Framatome et Siemens, peuvent unir leurs forces.

3.3.3.3.2. De rares fournisseurs d'AC opèrent dans l'EEE

(73) Au cours des deux dernières décennies, une forte consolidation a eu lieu dans l'industrie nucléaire. Par exemple, en 1992, le groupe européen des combustibles (GEC) a été fondé par BNFL, Westinghouse et ENUSA; il est centré sur la production d'AC pour les REP. BNFL a acquis le secteur nucléaire de Westinghouse en 1999 et ABB Atom en 2000. En 1999, Cogéma a pris une participation de [...] dans Framatome et a apporté son activité dans le secteur des AC à Framatome, à l'exclusion de la production de combustible MOX. En outre, GE possède une entreprise commune avec ENUSA, appelée GE-ENUSA, opérant dans le secteur de la fabrication d'AC pour les REB. Il ne reste donc plus que quelques acteurs dans l'EEE, notamment Framatome, Siemens, BNFL/Westinghouse/ABB et GE par l'intermédiaire d'ENUSA. L'opération proposée réduirait encore davantage le nombre des acteurs, qui ne seraient plus que trois.

3.3.3.3.3. L'arrivée sur le marché de concurrents d'autres régions du monde paraît improbable. De nombreux accords de coopération et contrats de licence renforcent la position de la nouvelle entité grâce au partage de compétences technologiques

(74) Les parties notifiantes prétendent que l'on peut s'attendre à une arrivée de concurrents sur le marché dans l'EEE au cours des prochaines années, principalement de Russie ou de la région asiatique. Cela paraît toutefois très improbable.

(75) Premièrement, les exploitants de centrales nucléaires exigent que tout fournisseur d'AC se soumette à une longue procédure de qualification en vue d'obtenir le statut de fournisseur d'AC qualifié. Deuxièmement, il apparaît que même lorsqu'il a obtenu le statut de fournisseur qualifié, le nouveau vendeur doit encore prouver que sa conception particulière d'AC est applicable au type de centrale nucléaire concerné. Actuellement, aucun des fournisseurs établis dans la région susmentionnée n'a obtenu le statut de fournisseur qualifié d'AC. Selon les exploitants de centrales nucléaires, la plupart d'entre eux hésiteraient à accorder le statut de fournisseur qualifié à des vendeurs établis en dehors de l'EEE. De plus, la fourniture d'AC en provenance de pays d'Europe de l'Est rencontrerait d'énormes difficultés politiques dans les pays de l'Union européenne, où les activités dans le domaine du nucléaire soulèvent déjà de vifs débats politiques, par exemple en Allemagne. Comme déjà exposé plus haut, au moins un vendeur d'AC japonais est interdit d'exportation d'AC vers d'autres régions du monde.

(76) L'arrivée sur le marché de vendeurs d'AC russes ou asiatiques pourrait être possible par l'intermédiaire d'une coopération ou d'un partenariat avec un concepteur et fabricant d'AC possédant des usines de production dans l'EEE. Toutefois, il ne resterait que trois grands acteurs sur le marché de l'EEE, en l'occurrence Framatome/Siemens, BNFL/Westinghouse/ABB et GE par l'intermédiaire d'ENUSA, qui commercialisent déjà chacun leur propre gamme de produits. De plus, pour ce qui concerne les vendeurs d'AC russes, leur rôle sur le marché international du nucléaire sera largement dépendant de l'évolution de la politique interne, de la situation économique interne, du développement du marché, de la politique des prix et des accords internationaux. En particulier, les deux premiers éléments sont difficiles à juger et à prédire.

(77) Il est également important de noter qu'un processus de consolidation s'est également déroulé dans d'autres parties du monde, dans lesquelles les parties notifiantes sont des acteurs très importants. Aux États-Unis, par exemple, Siemens a racheté le secteur du combustible d'envergure mondiale de Exxon Nuclear (1987). Framatome, Cogéma et Péchiney ont pris une participation dans l'activité de production de combustible de B & W (1987). Framatome a créé la société de services BWNS, en association avec B & W (1989). Framatome a acquis 100% de B\VNS (1995). GE, Hitachi et Toshiba ont créé Global Nuclear Fuel (2000). BNFL/Westinghouse a racheté le secteur nucléaire de ABB (2000). En ce qui concerne la production d'AC sous licence, [...].

(78) Eu égard au processus de consolidation largement répandu et à la conclusion de vastes accords de coopération, il est très improbable que l'une quelconque des entités établies dans d'autres régions du monde accède au marché de l'EEE.

3.3.3.3.4. De fortes surcapacités empêchent l'accès au marché dans l'EEE

(79) Dans le tableau ci-dessous sont indiquées les capacités de production installées dans l'EEE, ainsi que les taux actuels d'utilisation et les capacités libres.

(80) Tableau 6: Capacités de production et utilisation pour les AC pour les REO dans l'EEE

EMPLACEMENT TABLEAU

(81) Comme le montre le tableau 6, il y a des surcapacités (24) dans l'EEE pour la fabrication d'AC pour les REO d'environ [25-35 %] en moyenne chez les deux plus grands vendeurs d'AC. Selon les parties notifiantes, leurs concurrents peuvent augmenter leurs capacités en acquérant des équipements plus modernes. En comparaison avec l'EEE, les vendeurs d'AC situés dans d'autres parties du monde sont confrontés à une situation de surcapacité encore plus grande, de l'ordre de 30 à 45 %.

(82) Au regard des éléments ci-dessus, il paraît improbable que d'éventuels nouveaux arrivants établis dans d'autres régions du monde trouvent l'accès au marché de l'EEE intéressant. En raison de l'existence de surcapacités, toute tentative d'accéder au marché avec des AC à un prix inférieur, pour autant que l'exploitant de la centrale nucléaire ait accordé un statut de fournisseur d'AC qualifié, pourrait être facilement contrée par les vendeurs d'AC existants s'ils utilisaient davantage de leur capacité.

(83) En outre, il semble que la surcapacité existante persistera encore longtemps. Selon les parties notifiantes, la fermeture d'usines de production d'AC coûte très cher à l'exploitant, en raison du processus obligatoire de déclassement, qui est une opération particulièrement longue. Par ailleurs, le matériel décontaminé doit être stocké en toute sécurité conformément à la loi sur la protection de l'environnement. Les fabricants d'AC réagiraient donc plutôt à une pression sur les prix en allégeant les dépenses non essentielles.

(84) La réduction de la capacité apparaissant comme extrêmement coûteuse, la surcapacité restera probablement inchangée pendant une longue période et elle représenterait par conséquent une menace permanente pour les nouveaux arrivants sur le marché qui n'ont pas une capacité de production substantielle dans l'EEE.

3.3.4. Evolution de la situation

(85) On peut constater, au vu de ce qui précède, que les problèmes de concurrence que soulève l'opération prévue découlent du fait que Framatome et Siemens sont fortement présentes sur leurs "marchés nationaux" respectifs. Pour Framatome, l'ensemble du chiffre d'affaires sur son "marché national" est réalisé par ses ventes à EDF. Alors que le marché allemand peut être considéré comme ouvert, l'accès au marché que représente EDF est particulièrement difficile. Après la concentration, la position antérieurement occupée par Framatome par rapport à EDF sera reprise par la nouvelle entité.

(86) Dans ce contexte, il convient de prendre en compte le fait qu'EDF, client de loin le plus important de Framatome, est actionnaire de Framatome et est représentée au conseil d'administration de Framatome.

(87) La période de qualification pour de nouveaux AC est en général de cinq à sept ans. L'autorité de sûreté et de sécurité accompagne la période d'essai et donne l'autorisation à l'exploitant de la centrale nucléaire de qualifier le nouveau fournisseur d'AC après que l'essai a été jugé satisfaisant. Vu la longueur et la complexité de la procédure, le processus de qualification peut donc constituer une autre barrière à l'accès rapide aux marchés.

(88) Un autre problème de concurrence est lié au fait que par l'intermédiaire de la participation de contrôle que Cogéma détiendrait dans la nouvelle entreprise commune, les liens verticaux existants entre Cogéma et les activités du secteur nucléaire de Framatome se trouveraient considérablement renforcés et étendus aux activités nucléaires de Siemens qui seraient intégrées à la nouvelle entreprise commune.

3.3.4.1. Ouverture du marché français

(89) Au cours de la procédure, de nouveaux éléments ont été portés à l'attention de la Commission, qui conduisent à la conclusion que le marché français devrait s'ouvrir dans une large mesure dans le futur.

3.3.4.1.1. Politique d'approvisionnement d'EDF

(90) Dans le passé, EDF a qualifié Framatome comme fournisseur principal d'AC pour toutes ses centrales nucléaires et Siemens comme second fournisseur pour seulement quelques centrales nucléaires. De rares autres vendeurs d'AC ont été qualifiés pour deux réacteurs seulement.

(91) Il convient de noter qu'après la libéralisation des marchés européens de la production d'électricité, les exploitants de centrales nucléaires sont soumis à une pression croissante sur les prix et les coûts. De ce fait, EDF a tout intérêt à maintenir les coûts sur ses AC le plus bas possible et donc de poursuivre sa politique de "double approvisionnement". L'État français soutient pleinement cette politique d'EDF. EDF ne pouvant intervenir dans le processus de qualification, il apparaît nécessaire que l'Etat français soutienne toute mesure auprès de l'autorité de sûreté et de sécurité, afin d'aider à améliorer les conditions du processus de qualification.

(92) À la lumière de ces nouvelles circonstances, EDF a pris des mesures concrètes en vue de faire qualifier au moins un autre vendeur d'AC comme seconde source pour ses centrales de 900 MW et 1 300 MW. L'objectif est d'accélérer sensiblement l'obtention de l'autorisation d'introduire les AC de ce nouveau fournisseur après un processus de qualification abrégé. De plus, il est envisagé de rendre la qualification accordée pour un réacteur applicable à tous les réacteurs du même type.

(93) Il s'ensuit qu'EDF a d'ores et déjà accompli certaines étapes concrètes pour qualifier un autre vendeur d'AC, en l'occurrence le groupe BNFL/Westinghouse/ABB, comme seconde source d'approvisionnement.

(94) Toutefois, pour réaliser ses projets, EDF a besoin du soutien de l'État français. À cet égard, le gouvernement français a signé une déclaration [...].

(95) L'État français soutient pleinement la stratégie d'EDF concernant l'ouverture de son approvisionnement à un autre fournisseur d'AC pour les REP, notamment au groupe BNFL/Westinghouse/ABB. Il est de l'intérêt de l'État français que la politique d'approvisionnement vise à garantir tout à la fois la réduction des coûts et la concurrence. Plus précisément, l'Etat français demande à EDF de lancer un appel d'offres pour l'ensemble de ses fournitures. En outre, l'État français fournit toute l'aide possible pour abréger le processus de qualification pour les nouveaux AC. Il demande à EDF d'aider pleinement le groupe BNFL/Westinghouse/ABB en fournissant toute la documentation nécessaire, ce qui peut contribuer à raccourcir le processus de qualification. En outre, il est favorable à ce que la qualification d'AC obtenue pour un réacteur donné soit étendue aux réacteurs du même type.

3.3.4.1.2. Retrait d'EDF de Framatome

(96) Un autre élément visant à rompre le lien existant entre EDF et Framatome, est la sortie d'EDF du capital de Framatome. Ce retrait contribue à assurer que dans ses projets, EDF mettra en œuvre sa nouvelle politique d'approvisionnement indépendamment des décisions commerciales de Framatome concernant les fournitures d'AC pour les REP. L'État français soutient le retrait d'EDF de Framatome par une déclaration (voir annexe Il).

3.3.4.2. Conclusion préliminaire

(97) Compte tenu de ce qui précède, la Commission conclut que la situation du marché français devrait s'améliorer, c'est-à-dire que le marché français s'ouvrira à d'éventuels nouveaux vendeurs d'AC dans le futur.

3.3.4.3. Retrait de Cogéma de la nouvelle entreprise commune

(98) Comme mentionné ci-dessus à propos de l'incidence de la relation verticale entre Cogéma et la nouvelle entreprise commune, l'opération notifiée sur formulaire CC le 10 juillet 2000 est modifiée par des propositions présentées par les parties le 17 novembre 2000 [...], de façon à ce que seules Framatome et Siemens détiennent le contrôle conjoint de la nouvelle entreprise commune. En outre, tous les accords de coopération entre Cogéma et la nouvelle entreprise commune sont modifiés de façon à supprimer toute influence directe de Cogéma sur les affaires de la nouvelle entreprise commune. En résumé, Cogéma abandonne sa participation dans l'entreprise commune, ainsi que tous les droits lui conférant une influence sur les décisions de l'entreprise commune ou toute forme de contrôle conjoint sur celle-ci au sens du règlement sur les concentrations. Cogéma abandonnera notamment les droits liés à l'action spécifique qu'elle prévoyait de détenir dans l'entreprise commune, c'est-à-dire des droits de vote. En outre, toutes les dispositions de la convention sur la société nucléaire entre Framatome et Cogéma sont abrogées. Cela vaut également pour les dispositions de tous les accords en vigueur ou autres arrangements. C'est pourquoi, les parties modifieront en conséquence les dispositions concernées des accords relatifs à la répartition des actions et à la gouvernance de l'entreprise commune. De ce fait, l'entreprise commune et Cogéma ne signeront pas l'accord de coopération pour les activités dans le domaine des combustibles nucléaires.

(99) La modification de l'opération notifiée a reçu le soutien inconditionnel de l'État français, qui a adopté une déclaration en ce sens (voir considérant 94).

3.3.4.5. Conclusion

(100) À la lumière des éléments mentionnés ci-dessus, on peut conclure que l'opération telle que modifiée n'entraînerait pas la création ni le renforcement d'une position dominante.

(101) Le changement de la politique d'approvisionnement d'EDF, tel que décrit ci-dessus, et le soutien déclaré de l'État français pour la mise en œuvre de ce changement, ainsi que la suppression du lien structurel entre EDF et Framatome, permettent d'envisager une ouverture significative du marché français dans le futur.

(102) Cela supprime l'un des principaux problèmes de concurrence que pose l'opération proposée.

(103) La modification de l'opération proposée, qui se limite désormais à l'acquisition du contrôle conjoint uniquement par Framatome et Siemens, supprime le second problème de concurrence, car après le retrait de Cogéma de l'entreprise commune, il n'y a plus de renforcement ni d'extension de l'intégration verticale.

B. SYSTÈMES D'INSTRUMENTATION ET DE COMMANDE

(104) Framatome et Siemens exercent toutes deux des activités dans le secteur des systèmes d'instrumentation et de commande (" I & C "), qui comprennent toute une gamme de systèmes de matériels et de logiciels complexes et de produits, principalement liés à la sécurité, au fonctionnement et aux systèmes de commande d'une centrale nucléaire, y compris les contrôles des niveaux de radioactivité, de température et de pression [Informations relatives au pacte d'actionnaires].

1. MARCHE DE PRODUITS EN CAUSE

(105) Une centrale nucléaire contient une grande variété d'équipements d'I & C complexes qui contrôlent le processus nucléaire, la génération de vapeur, la circulation de l'eau et la génération d'électricité, assurent que ces processus fonctionnent en toute sécurité et efficacement et fournissent des mécanismes de commande d'urgence. À cette fin, les systèmes d'I & C remplissent différentes fonctions au sein de la centrale nucléaire, telles que la collecte de données des capteurs in situ, l'affichage des tendances et de l'évolution des données systèmes, le déclenchement d'alarmes lorsque les capteurs indiquent l'existence de conditions anormales, l'enregistrement des données mesurées par les capteurs in situ et le calcul du niveau effectif de puissance nucléaire en continu ainsi que le traçage de l'état de fonctionnement (par exemple, tests et maintenance). Les systèmes d'I & C permettent également de contrôler des systèmes autres que ceux qui assurent la sécurité et certaines applications limitées liées à la sécurité dans la centrale.

(106) Ces équipements sont fournis en tant que partie intégrante des nouvelles centrales nucléaires pour des travaux de modernisation dans les centrales existantes et pour le remplacement de certaines pièces détachées dl & C. Les parties notifiantes ont indiqué qu'il y avait un marché pour les systèmes d'I & C comprenant au minimum les systèmes fournis pour tous les REO, car les équipements d'I & C de base à tous les niveaux sont essentiellement les mêmes pour les REB et pour les REP. Cela a été confirmé par les résultats de l'étude du marché.

(107) Une distinction considérée comme importante pour la définition du marché doit être faite entre les systèmes d'I & C liés à la sécurité et les systèmes d'I & C opérationnels: les systèmes d'I & C liés à la sécurité concernent l'îlot nucléaire ou la chaudière nucléaire et sont principalement destinés à effectuer des tâches d'automation exigeant une fiabilité extrêmement élevée et une qualification nucléaire spéciale. Ces applications comprennent, en particulier, des fonctions automatiques pour la prévention et le contrôle des accidents. Des applications types sont la protection des réacteurs et l'activation des dispositifs de sauvegarde (par exemple, refroidissement d'urgence du cour et dissipation de la chaleur résiduelle ainsi que le prétraitement et le traitement des signaux de surveillance du flux de neutrons). Les systèmes d'I & C opérationnels concernent principalement l'IC (îlot conventionnel) et les opérations qui s'y rapportent, qui ne nécessitent pas de qualification nucléaire spéciale. Ils englobent tous les équipements nécessaires au fonctionnement, à la surveillance, à l'automation, au contrôle et à l'archivage de l'IC. Les processus se déroulant dans l'installation sont surveillés et contrôlés sur des écrans dans la salle de contrôle.

(108) Les parties notifiantes indiquent que aux fins de la définition des marchés, aucune distinction ne devrait être faite entre les systèmes d'I & C liés à la sécurité et les systèmes d'I & C opérationnels. Selon elles, alors qu'il peut y avoir matière à distinguer les systèmes d'I & C opérationnels des systèmes d'I & C liés à la sécurité du point de vue de l'offre, du côté de la demande ils ne sont pas considérés comme des systèmes séparés par les clients, dans la mesure où ces derniers n'ont pas tendance à les acheter séparément ou auprès de fournisseurs différents.

(109) Les parties notifiantes notent que, en ce qui concerne les nouvelles centrales nucléaires, les clients ont invariablement acheté les systèmes d'I & C liés à la sécurité et les systèmes d'I & C opérationnels ensemble. En ce qui concerne la modernisation et l'amélioration, les parties notifiantes reconnaissent qu'il existe de nombreux cas où les clients ont remplacé seulement certaines pièces spécifiques de leurs systèmes d'I & C liés à la sécurité ou de leurs systèmes d'I & C opérationnels. Toutefois, elles estiment que la proportion d'achats à la fois de systèmes d'I & C liés à la sécurité et de systèmes d'I & C opérationnels à des fins de modernisation représente plus de la moitié des ventes totales pour ce segment, dans la mesure où il est indispensable d'assurer que la pièce spécifique d'I & C remplacée convient pour le système pris dans son ensemble et peut y être adaptée.

(110) La Commission considère que ces arguments ne sont pas suffisants pour soutenir que les systèmes d'I & C liés à la sécurité et les systèmes d'I & C opérationnels font partie du même marché. Le fait que, pour les nouvelles centrales, les clients aient invariablement acheté les deux systèmes ensemble, n'implique pas l'absence d'un marché séparé pour les systèmes d'I & C liés à la sécurité. A cet égard, on peut se référer au raisonnement qui sous-tend la question test suivante: un fournisseur monopoliste hypothétique de systèmes d'I & C liés à la sécurité aurait-il intérêt à augmenter durablement ses prix de 5 à 10 % ? La réponse est très probablement oui, car les clients ne peuvent pas se passer de systèmes d'I & C liés à la sécurité et les solutions de remplacement côté offre sont très limitées. A ce propos, il convient de noter que pour les systèmes d'I & C liés à la sécurité, des exigences spéciales en matière de qualification et d'autorisation d'exploiter doivent être remplies, en raison de la haute fiabilité et de la qualification nucléaire spéciale qu'ils requièrent. Aux systèmes d'I & C non liés à la sécurité s'applique un processus de qualification et d'autorisation d'exploiter moins strict. Il en résulte que pour les centrales nucléaires, le marché des systèmes de sécurité est plus limité et un moins grand nombre de vendeurs sont prêts à investir en temps et en moyens nécessaires pour qualifier de nouveaux systèmes pour le marché restreint des systèmes de remplacement. Par contre, pour les systèmes d'I & C conventionnels, le domaine de concurrence est plus vaste et cette partie des équipements tend à être la même pour tous les types de centrales électriques (nucléaires, à combustible fossile, etc.). Aucune qualification nucléaire ou compétence de fabrication spéciales ne sont requises et beaucoup plus de vendeurs de systèmes d'I & C participent à ce secteur de produits.

(111) Les éléments repris ci-dessus permettent de conclure qu'une distinction doit être faite entre le marché des systèmes d'I & C liés à la sécurité et le marché des systèmes d'I & C opérationnels.

(112) Il conviendrait également de noter que les parties notifiantes ont argué que la maintenance devrait être exclue de l'ensemble du marché, car cette activité ne requiert pas de savoir-faire précis spécifique aux systèmes d'I & C et fait habituellement l'objet de contrats de maintenance séparés. Toutefois, la question de savoir si la maintenance des systèmes d'I & C liés à la sécurité doit être distinguée du marché dans son ensemble peut rester ouverte, dans la mesure où l'opération ne soulève pas de problèmes de concurrence quelle que soit la définition du marché de produits que l'on adopte. Quoi qu'il en soit, le fait que la maintenance soit fournie en même temps que les équipements ou de façon individuelle dépendra des besoins des clients. La question de savoir si la maintenance des systèmes d'I & C liés à la sécurité doit être distinguée du marché global peut rester en suspens, dans la mesure où l'opération ne posera pas de problème de concurrence, quelle que soit la définition du marché retenue.

2. MARCHÉS GÉOGRAPHIQUES EN CAUSE

(113) Les parties notifiantes estiment que le marché géographique en cause pour les systèmes d'I & C est plus grand que l'EEE et pourrait s'étendre au monde entier. Cette présentation est fondée sur le fait que, pour ce qui concerne les nouvelles centrales nucléaires, les équipements d'I & C sont généralement livrés avec la fourniture de l'IN (îlot nucléaire) et de l'IC (îlot conventionnel), que les parties notifiantes considèrent comme constituant un marché mondial alimenté de façon quasi-exclusive par des vendeurs de centrales nucléaires multinationaux présents dans toutes les parties du monde. En outre, les parties notifiantes indiquent que les contrats pour les systèmes d'I & C, tant pour les nouvelles centrales nucléaires que pour la modernisation, sont soumis à une concurrence internationale et souvent à une procédure d'adjudication. En outre, les parties notifiantes indiquent que: i) les fournisseurs de systèmes d'I & C offrent généralement des ensembles d'équipements d'I & C relativement homogènes, techniquement équivalents, vendus à un prix global unique dans le monde entier; ii) à l'échelle mondiale, les spécifications techniques des systèmes d'I & C sont basées principalement sur les normes américaines (et dans une moindre mesure sur les normes européennes); iii) les frais de transport pour les systèmes d'I & C ou pour les pièces qui les composent ne dépassent pas [5-15 %] dans les différentes parties du monde, et enfin iv) que les interdictions d'exportation ne s'appliquent pas à la fourniture de matériels et de logiciels d'I & C, à l'exception de certains équipements américains frappés d'embargo.

(114) Il convient de noter que le simple fait qu'un fournisseur soit capable de vendre certains produits dans le monde entier n'est pas suffisant en soi pour démontrer que le marché est de dimension mondiale. Sur un marché où de gros contrats sont souvent soumis à adjudication, l'évaluation devrait également se concentrer que la question de savoir si les fournisseurs sont vraiment en concurrence pour de tels contrats dans une même région géographique et s'ils sont mis en concurrence dans des conditions homogènes dans cette région.

(115) L'enquête de la Commission a indiqué qu'un groupe distinct de fournisseurs de systèmes d'I & C, qui sont établis dans l'EEE (25), sont régulièrement en concurrence pour des contrats au sein de l'EEE, notamment Siemens, Framatome, BNFL/Westinghouse/ABB et General Electric, et, de façon plus limitée, des sociétés plus petites du secteur nucléaire, telles que Schneider, Sema ou Syseca. Il apparaît que de nombreuses sociétés établies dans d'autres parties du monde ne sont pas très actives dans l'EEE. Par exemple, Mitsubishi n'est pas en concurrence pour des contrats dans l'EEE, bien que l'on puisse arguer que les barrières technologiques et réglementaires n'empêcheraient pas, en théorie, des sociétés non européennes de développer des activités en Europe.

(116) L'enquête a montré que les sociétés de systèmes d'I & C sont en général en concurrence pour des contrats du fait de leur présence établie dans l'EEE et plusieurs fournisseurs ont indiqué qu'ils ne soumissionnaient pour des contrats dans une région donnée que s'ils avaient établi une présence locale dans cette région. En particulier, la maintenance et la réparation sont en général effectuées par des infrastructures européennes.

(117) Toutefois, la question de la définition précise du marché géographique peut rester ouverte, car l'opération ne conduit à aucun problème de concurrence, quelle que soit la définition retenue (dimension mondiale ou limitée à l'EEE).

3. APPRÉCIATION SOUS L'ANGLE DE LA CONCURRENCE

(118) Les activités des parties notifiantes se chevauchent uniquement pour les systèmes d'I & C liés à la sécurité. L'appréciation va donc porter sur ce marché.

(119) Comme remarque générale, les parties notifiantes ont souligné que face à la baisse de la demande de construction de nouvelles centrales nucléaires et à l'actuelle surcapacité dans le secteur du nucléaire en général, les futures opportunités de contrats pour les systèmes d'l & C seront rares et soumises à de fortes pressions concurrentielles, en particulier dans l'EEE. Les concurrents et les clients prévoient également une relative morosité de l'activité industrielle dans ce secteur au cours des prochaines années.

(120) Les tableaux ci-dessous résument les parts de marché des parties (en valeur) à l'échelle mondiale et dans l'EEE pour les systèmes d'I & C liés à la sécurité:

(121) Tableau 7: chiffres d'affaires mondiaux (en millions d'euros) réalisés en 1997, 1998 et 1999

EMPLACEMENT TABLEAU

(122) Tableau 8: chiffres d'affaires réalisés dans l'EEE (en millions d'euros) en 1997, 1998 et 1999

EMPLACEMENT TABLEAU

(123) Sur le marché des systèmes d' I & C liés à la sécurité, on peut distinguer deux grandes catégories de fournisseurs: d'une part, un groupe (composé des parties notifiantes, BNFL/Westinghouse/ABB, General Electric ou Mitsubishi) qui dispose des grandes capacités nécessaires pour soumissionner pour de gros marchés (tels que la fourniture d'un système d'I & C complet ou un programme de modernisation important), et, d'autre part, un second groupe qui comprend des fournisseurs qui n'alimentent qu'un segment de marché spécifique. Parmi ces sociétés se trouvent par exemple des fournisseurs de produits matériels ou logiciels spécifiques (par exemple, la société américaine Eaton ou les sociétés françaises Schneider et le groupe Sema).

(124) Les tableaux repris ci-dessus montrent que la nouvelle entité aurait une part de marché cumulée de moins de [20-30 %] du marché mondial des systèmes d'I & C liés à la sécurité (1999) et d'environ [35-45 %] dans l'EEE.

(125) Siemens est l'un des plus grands fournisseurs de systèmes d'I & C dans le monde et en Europe, occupant des positions fortes dans presque tous les secteurs concernés. Framatome n'a pas d'activités directement dans la production de produits d'I & C, mais est plutôt une société leader dans le domaine de la conception et de l'intégration des systèmes d'I & C. Des contrats sont ensuite conclus avec des sociétés comme Schneider et Sema pour la fourniture de matériels et de logiciels d'I & C nécessaires pour répondre aux demandes des clients dans le cadre des contrats généraux. Il convient également de noter que le rôle de Framatome dans le secteur des systèmes d'I & C liés à la sécurité se limite principalement à des activités d'ingénierie effectuées sur ses propres conceptions de REP: elle n'a pas d'offre de projets impliquant la fourniture de systèmes d'I & C séparés pour les centrales nucléaires installées par des concurrents.

(126) Compte tenu des parts de marché cumulées réalisées par les parties notifiantes à l'échelle mondiale, l'opération ne pose aucun problème de concurrence, dans la mesure où au moins deux concurrents particulièrement puissants (BNFL et GE) resteront présents sur le marché.

(127) Sur le marché de I'EEE, il est vrai que, en tant que fournisseur de nombreux systèmes d'I & C en France et en Allemagne, la nouvelle entité bénéficierait d'une clientèle potentielle représentant environ les deux tiers du parc total de centrales nucléaires de l'EEE. Cependant, la nouvelle entité devra toujours faire face à la concurrence de puissants fournisseurs établis dans ce secteur, tels que BNFL et GE.

(128) En particulier, BNFL/Westinghouse/ABB, premier fournisseur mondial de systèmes d'I & C liés à la sécurité avec une part de marché de près de 40 %, détient sur le marché de l'EEE une part de plus de 30 %. On peut également mentionner que dans ce secteur, BNFL a récemment remporté d'importants contrats pour le remplacement de systèmes d'I & C complets.

(129) Il est vrai que pour certains travaux de modernisation, les grands fournisseurs semblent pratiquement incontournables. Toutefois, ces programmes de modernisation ne concernent qu'une partie limitée du marché total des systèmes d'I & C liés à la sécurité, c'est-à-dire des systèmes "IE" qui présentent de très hautes exigences de sécurité et qui sont en général fournis par le vendeur de la chaudière nucléaire lui-même. Pour d'autres programmes de modernisation (par exemple, le remplacement de composants ou de sous-systèmes), des concurrents plus petits, comme Schneider, sont capables d'obtenir des contrats directement auprès des clients.

(130) Enfin, il a également été souligné que les services publics ont un pouvoir d'achat important.Ces clients, qui sont en général des services publics puissants et disposant d'importantes ressources, peuvent user de leur position par l'intermédiaire de la procédure d'adjudication ou d'un processus de négociation parallèle pour de nouveaux contrats, afin d'obtenir les conditions les plus favorables. Avec le processus actuellement en cours de libéralisation des marchés de l'énergie, la majorité des exploitants de centrales nucléaires doivent réduire leurs coûts. En outre, la demande dans l'EEE semble se concentrer progressivement (voir, par exemple, les récentes opérations entre Veba et Viag ou entre RWE et VEW).

(131) Enfin, il convient de noter que si l'on enlève du marché la partie "maintenance" des activités, la part de marché cumulée des parties tombera à environ [10-20 %] et [25-35 %] respectivement à l'échelle mondiale et dans l'EEE (1999). En ce qui concerne la maintenance seule, il convient de noter que certains clients ont indiqué, au cours de l'audition, qu'ils étaient en mesure d'assurer eux-mêmes la maintenance nécessaire pour les systèmes d'lI & C liés à la sécurité: les pressions exercées par la concurrence ont contraint les producteurs d'électricité à rechercher des solutions autres que les fabricants d'équipements d'origine pour réduire leurs coûts d'exploitation. Les exploitants de centrales nucléaires ont ainsi acquis l'expérience et les connaissances nécessaires aux activités de maintenance. L'un des concurrents a même souligné, au cours de l'enquête, que "le personnel technique de l'usine était parfaitement capable d'entretenir les équipements avec un minimum d'efforts".

Conclusion

(132) Compte tenu de ce qui précède, la Commission conclut que la concentration prévue n'est pas susceptible d'entraîner la création d'une position dominante sur le marché des systèmes d'I & C liés à la sécurité.

C. RATELIERS DE STOCKAGE DU COMBUSTIBLE ÉPUISÉ

1. MARCHÉS DE PRODUITS EN CAUSE

(133) Toutes les centrales nucléaires disposent d'installations de stockage pour les assemblages combustibles qui ont servi dans les réacteurs nucléaires. Les assemblages combustibles épuisés, après avoir séjourné pendant trois à six ans dans le réacteur nucléaire, sont stockés et immergés dans l'eau dans des râteliers de stockage au fond d'une piscine. L'eau remplit deux fonctions. Premièrement, elle refroidit les assemblages combustibles qui continuent de produire de la chaleur pendant un certain temps après leur sortie du réacteur. Deuxièmement, elle absorbe les neutrons libres, de sorte que le combustible nucléaire irradié reste dans une configuration subcritique. Une fois le combustible refroidi (après un, trois ou dix ans, en fonction de sa combustion massique), il y a différentes options: le combustible épuisé peut être retiré de la piscine de stockage pour être retraité ou il peut rester stocké ("stockage intermédiaire"). À ce stade, le stockage sous eau n'est plus obligatoire: le combustible peut être placé soit dans des installations de stockage sous eau (dans des râteliers de stockage de combustible épuisé), soit dans des installations de stockage à sec (telles que des châteaux de plomb).

(134) Les parties notifiantes ont indiqué dans leur notification qu'il existait un marché de produits en cause pour la fourniture de râteliers pour combustible épuisé. Par la suite, elles ont cependant précisé que le marché de produits en cause pouvait en fait être plus large que celui des râteliers pour combustible épuisé, compte tenu de la pression concurrentielle exercée par les châteaux de stockage à sec. S'il est vrai que des installations de stockage sous eau et à sec peuvent être utilisées pour le stockage intermédiaire du combustible épuisé, il n'en reste pas moins que la fourniture de râteliers de stockage (stockage sous eau) constitue un marché de produits en cause distinct, étant donné que les râteliers pour combustible épuisé sont indispensables pour le stockage immédiat des assemblages combustibles épuisés. La substituabilité du côté de l'offre (entre des installations de stockage sous eau et de stockage à sec) ou des considérations d'arbitrage (entre le segment des râteliers pour combustible épuisé pour le stockage immédiat et le segment des râteliers pour le stockage intermédiaire) ne sont pas susceptibles de modifier cette caractérisation du marché de produits en cause. Du point de vue de la substituabilité du côté de l'offre, il n'y a pas lieu de faire une distinction entre les râteliers de stockage du combustible épuisé des AC pour les REP et ceux destinés aux AC pour les REB.

(135) Différentes étapes peuvent être identifiées dans les projets de fourniture de râteliers pour combustible épuisé: la conception des râteliers pour combustible épuisé, l'obtention d'une autorisation pour les râteliers délivrée par les autorités de réglementation, la phase de production et l'installation sur les sites de stockage. Dans leur notification, les parties ont indiqué que les différentes étapes de la fourniture de râteliers pour combustible épuisé (conception, autorisation, fabrication et installation des râteliers) peuvent être considérées comme constituant un seul marché de produits en cause. Ce point de vue paraît approprié. Alors que les différents éléments peuvent être externalisés (et c'est le cas dans une certaine mesure), la fourniture de râteliers pour combustible épuisé implique généralement un contrat unique incluant l'ensemble des quatre éléments. Cela se pratique parce que les centrales nucléaires veulent que la responsabilité pour l'ensemble du projet soit entre les mains d'une seule et même entité, qui est en général la "société principale" d'un consortium.

(136) Il résulte des éléments qui précèdent que la conception, l'obtention de l'autorisation, la production et l'installation de râteliers pour combustible épuisé (stockage sous eau) doivent être considérées comme un seul marché de produits en cause. Dans le reste de la présente partie C, ce marché sera désigné par marché de la fourniture de râteliers pour combustible épuisé.

2. MARCHÉS GÉOGRAPHIQUES EN CAUSE

(137) Selon les parties notifiantes, le marché de la fourniture de râteliers pour combustible épuisé est de dimension mondiale pour les raisons suivantes. Premièrement, les parties notent que, pour la fourniture de composants de centrales nucléaires en général, il existe des flux substantiels d'échanges commerciaux entre les différentes parties du monde. Les produits sont uniformes dans le monde entier: les composants ne sont pas différenciés en fonction de la région du monde, mais seulement adaptés aux exigences de chaque centrale nucléaire. De plus, les nouveaux contrats de fourniture sont généralement soumis à des appels d'offres mondiaux à un niveau de prix mondial unique. Enfin, les droits d'importation dans le monde entier n'entravent pas les flux des échanges commerciaux.

(138) Toutefois, l'étude du marché fait apparaître que le marché géographique en cause ne dépasse pas l'EEE. Comme pour les autres marchés de produits, chaque fournisseur de râteliers pour combustible épuisé doit obtenir des exploitants de centrales nucléaires un statut de fournisseur qualifié et des autorisations des autorités nationales. Du fait que la conception des centrales nucléaires, les procédures nationales applicables et les langages utilisés leur sont familiers, les grands acteurs comme Siemens, Framatome, CCI/Sulzer, ont un certain avantage. De plus, comme l'indiquent Holtec (États-Unis) et Skoda (République tchèque), il existe une forte préférence parmi les centrales nucléaires d'Europe de l'Ouest pour les produits européens. À titre d'illustration, on peut noter que sur 22 projets pour des râteliers pour combustible épuisé commandés dans l'EEE au cours de la dernière décennie, un seul a été remporté par une société non européenne (Holtec, en 1995); les 21 autres ont été attribués à des acteurs européens. De même, Holtec et les sociétés japonaises (Mitsubishi, Hitachi/Toshiba) ont concentré leurs opérations sur leurs marchés intérieurs.

(139) Tout aussi important, l'étude de marché montre que les caractéristiques des produits dans les différentes parties du monde (en particulier dans l'EEE et aux Etats-Unis) diffèrent, elles aussi, selon les régions. Holtec, le principal (en fait le seul) fournisseur de râteliers pour combustible épuisé aux États-Unis, a standardisé sa conception de râteliers pour combustible épuisé en employant de l'aluminium boraté (Boral). Dans l'EEE, cependant, les matériaux qui prédominent sont l'acier inoxydable boraté et le Cadminox. De nombreuses centrales nucléaires européennes (en France, en Belgique, aux Pays-Bas) ne souhaitent pas acheter des râteliers pour combustible épuisé en aluminium, en raison d'incidents techniques qui se sont produits avec ce type de râteliers dans le passé (26). Bien que Holtec soit capable d'adapter sa conception à l'acier inoxydable boraté, elle ne peut faire le même genre d'offres concurrentielles qu'elle peut faire aux États-Unis et ailleurs pour les râteliers en aluminium (les râteliers en acier inoxydable boraté reviennent plus chers que ceux en aluminium boraté). En raison à la fois de la difficulté générale qu'il y a à accéder au marché européen et de la différence dans les matériaux pouvant être utilisés, Holtec a décidé de renoncer au marché de l'EEE. Il en résulte que, bien que le champ des activités de Holtec s'étende au-delà des États-Unis, sa pression concurrentielle n'est pas ressentie dans l'EEE.

(140) Compte tenu des éléments repris ci-dessus, il apparaît que le marché géographique en cause doit être considéré comme limité à l'EEE.

3. APPRÉCIATION SOUS L'ANGLE DE LA CONCURRENCE

3.1. Position des parties sur le marché

(141) Siemens prépare en détail des conceptions de base de râteliers pour combustible épuisé, puis coopère étroitement avec des sous-traitants, notamment ENSA (Espagne), pour leur fabrication. Framatome conçoit, fabrique et vend des râteliers pour combustible épuisé à base de Cadminox. Cogéma ne conçoit, ne fabrique et ne vend pas de râteliers pour combustible épuisé.

(142) Les créneaux pour la fourniture de râteliers pour combustible épuisé sont relativement rares. Il n'y a eu au total que 22 remplacements de râteliers pour combustible épuisé effectués dans l'EEE au cours de la dernière décennie, pour une valeur totale d'environ [...]. Sur la base de cette période (une période plus courte ne refléterait pas le véritable état du marché, vu le faible nombre de contrats annuels, qui n'est que de deux ou trois), les parties obtiendraient une part de marché cumulée de [60-70%] en valeur (Framatome [15-25 %], Siemens [40-50 %]). Parmi les concurrents, Holtec a une part de marché de [10-20 %], MPE (Mécanique de Précision pour Equipements) [5-15 %], CCI Sulzer [5-15 %] et NIS/Skoda [< 5 %]. Pour ce qui concerne le calcul des parts de marché, les parties ont indiqué au cours de l'audition que la valeur ajoutée par les sous-traitants de chaque consortium ne devrait pas être attribuée à la "société principale" du consortium (27). Par conséquent, les parties détiendraient une part de marché de seulement 30-40 %. De l'avis de la Commission, toutefois, les parts attribuées sont appropriées, car elles reflètent mieux le rôle et la position de la "société principale" sur le marché de la fourniture de râteliers pour combustible épuisé.

(143) En tout état de cause, sur le marché considéré, la répartition historique devrait être traitée avec prudence, dans la mesure où il s'agit d'un marché d'appels d'offres concernant très rarement des contrats de commande. En tant que telle, une part de marché cumulée élevée n'est pas forcément une bonne indication de la puissance de marché qu'aura la nouvelle entité après la concentration. En particulier, il faudrait rappeler que les services publics ont une puissance d'achat importante.En outre, alors que les parts de marché de CCI Sulzer (Suisse) et de MPE (Belgique) sont limitées, il convient de noter que ces sociétés ont récemment réussi à décrocher des contrats: MPE s'est vu attribuer l'un de ses deux contrats en 1998 (pour une extension de la centrale belge de Tihange), CCI/Sulzer a obtenu son second contrat seulement cette année (pour une extension de la capacité de la centrale de Borssele aux Pays-Bas).

(144) En termes de capacité de production, la nouvelle entité devrait être capable de traiter environ [...] projets de râteliers pour combustible épuisé de "taille moyenne" au cours d'une année donnée (la plupart des tiers interrogés considèrent qu'un projet de "taille moyenne" concerne environ 1 400-1 500 cellules de stockage). Cependant, compte tenu du faible nombre de contrats accordés annuellement (deux à trois), elle ne devrait pas en tirer beaucoup de puissance de marché. CCI Sulzer, par exemple, serait déjà capable de traiter tout seul ce nombre de projets. NIS/Skoda et MPE peuvent tous deux assumer de un à deux projets par an.

(145) Enfin, comme l'indique la grande majorité des personnes interrogées, la demande pour des râteliers pour combustible épuisé n'est plus très forte dans l'EEE. Comme il n'y a pas de projets de construction de nouvelles centrales nucléaires dans l'EEE, la demande future pour des râteliers pour combustible épuisé ne peut que dépendre de projets d'augmentation de capacité des piscines de stockage existantes ou de la construction de capacité supplémentaire de stockage intermédiaire. La plupart des centrales nucléaires ont déjà finalisé leurs programmes d'extension de la capacité de leurs piscines de stockage. Pour ce qui concerne le stockage intermédiaire en particulier, l'un des rares pays qui aura besoin d'augmenter sa capacité dans le futur est l'Allemagne. Jusqu'à présent, l'Allemagne dépendait d'installations centrales de stockage intermédiaire pour stocker les assemblages combustibles épuisés qui n'étaient pas retraités à Sellafield ou à La Hague. Compte tenu des problèmes que pose le transport de ces assemblages combustibles épuisés des réacteurs jusqu'aux installations de stockage, le gouvernement allemand et les services publics ont conclu un accord en juin 2000 prévoyant un stockage intermédiaire décentralisé sur les sites mêmes des centrales nucléaires. Il est cependant peu probable que cela conduise à une relance de la demande pour les râteliers pour combustible épuisé, car les services publics allemands utiliseront certainement le même concept de stockage que celui qu'utilisent actuellement les installations centrales, à savoir les châteaux de stockage à sec Castor fabriqués par GNB (une filiale de Nukem et des services publics allemands). Treize centrales nucléaires allemandes ont fait une demande d'autorisation d'utiliser des châteaux de stockage à sec pour le stockage intermédiaire. Il apparaît donc que la demande future pour les râteliers pour combustible épuisé dans l'EEE est à la fois limitée et en baisse. Dans ces circonstances, il semble difficile pour tout acteur du marché de proposer des râteliers pour combustible épuisé à des conditions compétitives.

(146) Compte tenu des éléments mentionnés ci-dessus, il est peu probable que l'opération prévue conduise à la création d'une position dominante sur le marché des râteliers pour combustible épuisé dans l'EEE.

D. RESTRICTIONS ACCESSOIRES

(147) À la suite de la modification apportée à la notification, aucune clause accessoire n'est à examiner, à l'exception d'une clause spécifique de non-concurrence. Cette clause sera examinée ci-après. Conformément au pacte d'actionnaires, Framatome et Siemens ne seront pas autorisées à entrer en concurrence pour ce qui est du champ d'activité exclusif de l'entreprise commune (28). La clause de non-concurrence ne durera pas plus longtemps que l'entreprise commune, dont la durée a été fixée à [...].

(148) Pour que la nouvelle entreprise commune puisse fonctionner correctement, il est nécessaire qu'elle assimile le savoir-faire apporté par les deux sociétés mères. Or, cela lui serait très difficile en l'absence d'une clause interdisant aux sociétés mères d'entrer en concurrence avec elle sur les marchés concernés. De ce fait, la clause de non-concurrence constitue également une défense pour les sociétés mères, dans la mesure où les investissements considérables effectués dans l'entreprise commune ne seront pas exposés à des initiatives individuelles de la part de l'autre société mère sur le savoir-faire et la clientèle de l'entreprise commune. Toutefois, la clause de non-concurrence ne doit pas être considérée comme une restriction accessoire pour l'ensemble de sa durée. Néanmoins, étant donné que l'industrie nucléaire est caractérisée par des cycles de vie économique inhabituellement longs, une durée de trente ans apparaît à la fois nécessaire et appropriée. Enfin, la clause est strictement limitée aux produits et services relevant du secteur d'activités de l'entreprise commune. La clause de non-concurrence doit donc être considérée comme une restriction accessoire à la concentration pour une durée de trente ans.

V. CONCLUSION

(149) À la lumière de ce qui précède, on peut conclure que la concentration proposée, sous sa forme modifiée, ne conduira pas à la création ou au renforcement d'une position dominante sur les marchés, ainsi qu'il est dit ci-dessus.

VI. RÉSUMÉ

(150) Les éléments exposés précédemment permettent de conclure que la concentration prévue, sous sa forme modifiée, n'entraînera pas la création ou le renforcement de positions dominantes qui auraient pour effet d'entraver une concurrence effective dans une partie substantielle de la Communauté, et que, par conséquent, la concentration est compatible avec le marché commun et le fonctionnement de l'accord EEE, conformément à l'article 8, paragraphe 2, du règlement sur les concentrations,

A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION:

Article premier

Le projet de concentration entre Framatome et Siemens est déclaré compatible avec le Marché commun et le fonctionnement de l'accord EEE.

Article 2

Les parties notifiantes sont destinataires de la présente décision.

(1) JO L 395 du 30.12A989, p. 1. JO L 257 du 21.9.1990, p. 13 (rectificatif).

(2) JO L 180 du 9.7. 1997, p. 1.

(3) JO C 308 du 1.11.2001. [selon rectificatif au JOCE L 300 du 16-11-2001]

(4) Le combustible MOX est un mélange d'uranium naturel ou "d'uranium de rejet" (un sous-produit du processus d'enrichissement) et d'une petite quantité de plutonium recueilli lors du retraitement.

(5) Chiffre d'affaires calculé conformément à l'article 5, paragraphe 1, du règlement sur les concentrations et à la communication de la Commission relative au calcul du chiffre d'affaires 90 C 66 du 2.3.1998, p. 25). Dans la mesure où ces chiffres incluent des chiffres d'affaires pour une période antérieure au 1er janvier 1999, ils sont calculés sur la base des taux de change moyens de l'ECU et convertis en euros sur la base de un euro pour un ECU.

(6) Le combustible UNE est produit à partir d'uranium naturel soumis à plusieurs processus chimiques visant à le rendre utilisable comme combustible nucléaire. Les principales étapes sont "la conversion" (consistant à mélanger les concentrés d'uranium purifiés avec de l'acide fluorhydrique et du fluor, afin d'obtenir des composés chimiques appropriés) et "l'enrichissement" (l'augmentation de la teneur en uranium 235, dont les noyaux se divisent facilement lors du processus de fission). Une fois enrichi, l'uranium est transformé par voie chimique d'abord en poudre, puis en granulés d'UO2 et finalement comprimé en pastilles d'UNE.

(7) Le combustible URE est produit à partir d'uranium issu du retraitement de combustible épuisé, puis enrichi ou mélangé avec de l'uranium de qualité militaire. Le combustible URE est de ce fait produit en quantités beaucoup moins importantes que le combustible UNE.

(8) Un seul type de combustible est chargé dans un AC donné.

(9) Les exploitants de centrales nucléaires utilisent environ 1 % d'AC à URE dans leurs REO.

(*) Certaines parties de ce texte ont été rédigées de façon qu'aucune information confidentielle ne soit divulguée: ces parties se trouvent entre crochets.

(10) Eu égard aux faits exposés ci-dessus, il apparaît que, aux fins de la présente affaire, aucune distinction ne doit être faite entre le combustible MOX pour les REP et celui pour les REB.

(11) Par exemple, les parties notifiantes notent qu'une conception d'AC développée aux États-Unis peut être utilisée dans les centrales nucléaires européennes et vice versa. La même chose vaut pour les procédés de production.

(12) Accord de coopération entre la Communauté européenne de l'énergie atomique et les États-Unis d'Amérique dans le domaine des utilisations pacifiques de l'énergie nucléaire du 7 novembre 1995 (JO L 120 du 20.5.1 996, p. 1).

(13) Les droits de douane sont plus élevés pour certains des composants, par exemple, pour les tubes de gainage, les tubes guides, les tubes d'instrumentation: 9 %.

(14) Un fournisseur d'AC note que la principale raison pour laquelle une livraison des États-Unis à un client en Allemagne a eu lieu était que ce client avait un besoin urgent de combustible.

(15) Cela est également confirmé par des documents établis par le NAC, organisateur du séminaire sur la gestion du combustible nucléaire.

(16) SPC est une filiale américaine à 100 % de Siemens.

(17) Rapport annuel de I'AAE, édition 1999, p. 27.

(18) Dans l'EEE, 89 centrales nucléaires équipées de REP ont été construites, dont 58 en France.

(19) Il convient de mentionner que le constructeur d'une centrale nucléaire reçoit le premier contrat de chargement en AC.

(20) Dans l'EEE, 18 REB ont été construits, dont 6 sont installés en Allemagne.

(21) Néanmoins, lorsque les vendeurs d'AC ont obtenu le statut de fournisseur qualifié pour des réacteurs de même conception qu'un réacteur pour lequel ils n'ont pas encore obtenu le statut de fournisseur qualifié, il devient en général plus facile d'obtenir ce statut.

(22) Le 1er août 2000, la Commission a autorisé la concentration entre Rio Tinto (propriétaire de Rössing) et North (actionnaire majoritaire de ERA); affaire M.2062. Lorsque la concentration sera réalisée, la part de marché cumulée de la nouvelle entité devrait atteindre les 15-20 % à l'échelle mondiale.

(23) BNFL possède un tiers de Urenco. Les autres actionnaires hollandais et allemands de Urenco projettent de vendre leur participation. Seules quelques entreprises du secteur de l'enrichissement de l'uranium naturel pourraient être intéressées par l'acquisition de ces parts, entre autres Cogéma, BNFL et USEC.

(24) Séminaire sur la gestion du combustible nucléaire, auquel a participé Siemens en juin 2000; le séminaire était organisé par le NAC.

(25) Y compris la Suisse.

(26) Il convient de noter sur ce point que Holtec estime que ce n'est pas l'utilisation du Boral en tant que tel qui doit être mise en cause dans les défaillances survenues, mais plutôt la mauvaise qualité du Boral livré par les fournisseurs en question. De plus, l'acier inoxydable boraté aurait également été source de problèmes: c'est pourquoi les autorités de réglementation américaines ne recommandent pas son utilisation.

(27) Les parties maintiennent que la valeur des contrats de SKB, l'installation centrale de stockage pour les centrales nucléaires suédoises, doit également être incluse dans le calcul des parts de marché. La position de SKB est toutefois plutôt spéciale, car elle a sa propre conception de râteliers pour le stockage sous eau (utilisant des cartouches dans des râteliers plus grands) et ne sous-traite que la construction de ces râteliers. De plus, les cartouches compactes de SKB ne sont utilisées que pour le stockage temporaire.

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