CCE, 14 mars 2000, n° M.1672
COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES
Décision
Volvo/Scania
LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,
Vu le traité instituant la Communauté européenne, vu l'accord sur l'Espace économique européen, et notamment son article 57, vu le règlement (CEE) n° 4064-89 du Conseil du 21 décembre 1989 relatif au contrôle des opérations de concentration entre entreprises (1), modifié en dernier lieu par le règlement (CE) n° 1310-97 (2), et notamment son article 8, paragraphe 3,vu la décision de la Commission du 25 octobre 1999 d'ouvrir la procédure dans la présente affaire, après avoir mis les entreprises intéressées en mesure de répondre aux griefs formulés par la Commission, après consultation du comité consultatif en matière de concentrations entre entreprises (3), considérant ce qui suit :
(1) Le 22 septembre 1999, la Commission a reçu, conformément à l'article 4 du règlement (CEE) n° 4064-89 (ci-après dénommé "règlement sur les concentrations"), notification d'un projet de concentration dans le cadre duquel AB Volvo (ci-après dénommée "Volvo") se propose d'acquérir le contrôle exclusif de Scania AB (ci-après dénommée "Scania") par achat d'actions, au sens de l'article 3, paragraphe 1, point b), du règlement sur les concentrations.
(2) Après avoir examiné la notification, la Commission est parvenue à la conclusion que l'opération notifiée relevait du règlement sur les concentrations et qu'elle soulevait des doutes sérieux quant à sa compatibilité avec le Marché commun, car elle est susceptible de créer ou de renforcer une position dominante qui pourrait entraver de manière significative une concurrence effective dans le Marché commun ou dans une partie substantielle de celui-ci, ainsi que sur le territoire couvert par l'accord EEE. Par conséquent, la Commission a décidé, le 25 octobre 1999, d'ouvrir la procédure conformément à l'article 6, paragraphe 1, point c), du règlement sur les concentrations.
(3) Le 9 décembre 1999, la Commission a adopté des décisions en application de l'article 11, paragraphe 5, du règlement sur les concentrations, car Volvo et Scania n'avaient pas répondu dans le délai imparti à une demande de renseignements relative à leur situation concurrentielle sur les marchés des poids lourds et des autobus. Les renseignements en question leur avaient été demandés pour le 7 décembre 1999. Les parties les ont communiqués le 20 décembre 1999. C'est pourquoi, conformément à l'article 9 du règlement (CE) n° 447-98 de la Commission du 1er mars 1998 relatif aux notifications, aux délais et aux auditions prévus par le règlement (CEE) n° 4064-89 du Conseil relatif au contrôle des opérations de concentration entre entreprises (4), les délais visés à l'article 10, paragraphes 1 et 3, du règlement sur les concentrations, ont été suspendus pendant une durée totale de treize jours.
I. PARTIES
(4) Volvo est immatriculée en Suède, où elle exerce essentiellement, par les participations qu'elle détient dans le groupe Volvo, des activités dans la construction et la vente de camions, d'autobus, d'engins de chantier, de moteurs marins et industriels, ainsi que de composants pour l'industrie aérospatiale. Les principales divisions commerciales de Volvo sont les suivantes: a) camions (construction de poids lourds de plus de 16 tonnes et d'utilitaires moyens de 7 à 16 tonnes, prestation d'une série de services connexes, notamment financiers); b) autobus (construction d'autobus et de châssis d'autobus pour le transport urbain et interurbain, ainsi que pour le tourisme); c) moteurs marins et industriels (par l'intermédiaire de la société Volvo Penta, filiale détenue à 100 %, Volvo conçoit, construit et commercialise des groupes propulseurs à usage marin et industriel); d) engins de chantier (construction et vente de divers engins de chantier); e) aero (conception, production et entretien d'avions militaires, essentiellement pour le compte de l'armée de l'air suédoise, et production de composants).
(5) Scania est une société de droit suédois qui, par l'intermédiaire de ses participations dans les entreprises du groupe Scania, exerce des activités essentiellement dans la construction et la vente de poids lourds, d'autobus et de moteurs marins et industriels. Scania détient également 50 % de Svenska Volkswagen AB, qui importe, commercialise et distribue des voitures particulières et des véhicules utilitaires légers en Suède. Scania possède encore l'entreprise de distribution automobile suédoise Din Bil, qui assure 40 % des livraisons de Svenska Volkswagen.
(6) Le 1er mars 1999, Ford Motor Co. a conclu avec Volvo un accord en vertu duquel elle acquérait les activités de Volvo dans l'automobile, qui ont représenté en 1997 52 % du chiffre d'affaires total de l'entreprise. La décision de Volvo de céder sa division automobile reflète sa détermination à se concentrer sur ses activités dans les secteurs des camions, des autobus et des moteurs. Selon Volvo, l'opération envisagée revêt une grande importance en ce qui concerne ses efforts pour être présente sur les grands marchés émergents des poids lourds et des autobus en Asie, en Europe centrale, dans les anciennes Républiques soviétiques et en Amérique du Sud. À la suite de la vente de sa division automobile, la division camions de Volvo représente 57 % de son chiffre d'affaires, la division autobus environ 13 % et le secteur des moteurs marins et industriels environ 4 %. Chez Scania, les camions ont représenté 60 % du total du produit de ses ventes en 1998, les autobus 8 % et les moteurs marins et industriels 1 %.
(7) Volvo a déclaré que l'opération envisagée visait à soutenir ses efforts pour être présente sur les grands marchés émergents des poids lourds et des autobus en Asie, en Europe centrale, dans les anciennes Républiques soviétiques et en Amérique du Sud. Selon elle, des investissements considérables devront être effectués pour saisir les occasions qui se présentent dans ces régions. Elle estime que de son aptitude à étendre ses activités sur ces marchés émergents dépend sa capacité d'agir avec efficacité et de rester compétitive vis-à-vis des principaux constructeurs mondiaux de camions et d'autobus, en particulier DaimlerChrysler et les grands fabricants de moteurs d'Amérique du Nord.
II. OPÉRATION ET CONCENTRATION
(8) La concentration envisagée prévoit l'acquisition, par Volvo, d'une participation de contrôle dans Scania. Le 6 août 1999, Volvo a conclu un accord en vertu duquel elle acquérait la totalité des actions de Scania détenues par Investor AB. Le même jour, le conseil d'administration de Volvo a décidé de lancer une offre publique d'achat portant sur toutes les actions restantes de Scania.
(9) L'accord conclu entre Volvo et Investor AB prévoit que cette dernière sera rémunérée soit uniquement en espèces, soit en espèces et en actions Volvo nouvellement émises. Investor AB détient actuellement 54061380 actions A et 1508693 actions B de Scania. Elle recevra 315 couronnes suédoises (SEK) en espèces par action, pour 60 % de sa participation. Pour le solde de 40 %, Investor AB recevra, à sa convenance, soit 315 SEK en espèces par action, soit des actions Volvo nouvellement émises, dans la proportion de six actions Volvo pour cinq actions Scania. Investor AB a fait part de son intention, si elle choisit d'être réglée uniquement en espèces, d'acquérir des actions Volvo sur le marché pour un montant correspondant à 40 % du montant qu'elle recevra en règlement. Volvo détient actuellement 25 290 660 actions A et 60 993 759 actions B de Scania. Après l'acquisition des actions de Scania détenues par Investor AB, Volvo possédera 79 352 040 actions A et 65 502 452 actions B, soit 77,8 % des droits de vote et 70,9 % du capital social.
(10) Sur la base des éléments qui précèdent, la Commission conclut que l'opération envisagée, par laquelle Volvo acquerrait le contrôle exclusif de Scania, constitue une concentration au sens de l'article 3, paragraphe 1, point b), du règlement sur les concentrations.
III. DIMENSION COMMUNAUTAIRE
(11) Volvo et Scania ont réalisé en 1998 un chiffre d'affaires total sur le plan mondial d'un montant supérieur à 5 milliards d'euros (Volvo: 12,9 milliards d'euros; Scania: 5,1 milliards d'euros). Chacune des parties a réalisé en 1998 un chiffre d'affaires dans la Communauté d'un montant supérieur à 250 millions d'euros (Volvo: 6,4 milliards d'euros, Scania: 3,1 milliards d'euros), mais elles ne réalisent pas plus des deux tiers de leur chiffre d'affaires total dans la Communauté à l'intérieur d'un seul et même État membre. L'opération constitue un cas de coopération avec l'Autorité de surveillance AELE conformément à l'article 57 de l'accord EEE en liaison avec l'article 2, paragraphe 1, point c), du protocole 24 de l'accord.
IV. COMPATIBILITÉ AVEC LE MARCHÉ COMMUN
(12) L'opération envisagée exercerait ses effets sur deux grands secteurs: les camions (en particulier les poids lourds) et les autobus (autobus urbains et interurbains, autocars de tourisme). L'enquête a confirmé que l'opération envisagée n'aboutirait pas à la création ou au renforcement d'une position dominante dans le domaine des moteurs au gazole (industriels et marins). Les marchés de ces produits ne seront donc pas examinés plus avant dans la présente décision.
i) CAMIONS
A. MARCHÉ DE PRODUITS EN CAUSE
(13) L'opération envisagée donnerait le jour au plus gros constructeur européen de camions poids lourd (plus de 16 tonnes).
(14) La partie notifiante se fonde sur une décision antérieure de la Commission (affaire IV/M.004 - Renault/Volvo) pour identifier trois segments selon le poids brut du véhicule: le segment des utilitaires légers (moins de 5 tonnes), celui des utilitaires moyens (de 5 à 16 tonnes) et celui des poids lourds (plus de 16 tonnes).
Poids lourds par rapport aux utilitaires moyens et légers
(15) D'une manière générale, l'étude de marché réalisée par la Commission confirme, à cet égard, le point de vue de la partie notifiante. En effet, les concurrents et les clients ont indiqué que la distinction mentionnée au considérant 14 était fondée et correspondait aux normes du secteur. Plusieurs autres éléments incitent également à considérer que cette distinction est appropriée.
(16) Les caractéristiques techniques des camions de moins de 16 tonnes et des véhicules de plus de 16 tonnes (segment supérieur) sont très différentes en ce qui concerne les élément clés, comme, en particulier, le type de moteur et le nombre d'essieux. Les éléments techniques du segment supérieur sont plus complexes, car les exigences de durabilité (durée de vie) et les coûts d'exploitation sont plus élevés que dans les autres segments. Les camions de plus de 16 tonnes sont des véhicules utilisés pour le transport de poids considérables. Le transport peut être régional ou de longue distance.
(17) En outre, ces différences techniques, qui revêtent une grande importance pour l'acheteur, influent sur le marketing des camions. La délimitation technique entre les deux groupes de produits correspond ainsi à une distinction commerciale, ce qui permet de différencier deux catégories de clients. En général, les clients ne considèrent pas que les camions du segment supérieur sont interchangeables avec des camions des segments intermédiaire ou inférieur, ou qu'ils leur sont substituables. Les trois catégories de camions constituent donc chacune un marché de produits distinct.
(18) De plus, il apparaît que cette distinction reflète le fait que des chaînes de production différentes sont utilisées pour les diverses catégories de camions, et que les constructeurs peuvent concentrer leur production sur un segment sans être présents, ou en étant relativement moins représentés, dans un autre segment. (Ainsi, en ce qui concerne les parties, Volvo est présente dans le segment des camions de 7 à 16 tonnes, mais pas Scania. Aucune des deux entreprises ne produit des camions de moins de 7 tonnes. Les deux produisent des camions de plus de 16 tonnes.)
Poids lourds (plus de 16 tonnes)
Informations communiquées par Volvo dans la notification
(19) L'opération envisagée portant plus spécifiquement sur le segment des camions de plus de 16 tonnes, ou "poids lourds", l'accent sera davantage mis sur ce segment dans la présente appréciation.
(20) Dans la notification, Volvo a indiqué qu'il existait, d'une façon générale, deux catégories de modèles de poids lourds: les camions destinés aux longues distances et ceux destinés au transport régional ou local. L'entreprise précise cependant que les châssis des camions de plus de 16 tonnes sont intrinsèquement les mêmes pour tous les modèles. La seule différence réside dans le type de cabine et de carrosserie, ou dans la configuration en vue d'utilisations spécifiques (par exemple, malaxeur à béton, livraison en ville, transport longue distance).
(21) Volvo signale que, en plus de ces catégories, des camions plus longs (25,25 mètres) à capacité de chargement plus élevée (60 tonnes) sont communément utilisés en Suède et en Finlande. Ce modèle spécial n'est normalement pas autorisé dans les autres États membres.
(22) La partie notifiante affirme que tout grand constructeur de camions peut aisément modifier l'un de ses modèles standard en vue d'une utilisation particulière (à l'image des camions plus longs utilisés en Suède et en Finlande, par exemple).
(23) Sur la base des éléments qui précèdent, Volvo considère par conséquent que tous les camions de plus de 16 tonnes appartiennent au marché de produits en cause.
Les résultats de l'étude de marché
(24) L'étude approfondie du marché réalisée en l'espèce a montré que, du point de vue du client, la réalité était très complexe. L'enquête a notamment révélé que, pour le client, de nombreux critères interviennent dans le choix d'un type donné de poids lourd.
(25) On peut établir, dans la catégorie des "poids lourds", une distinction générale entre les "porteurs" et les "tracteurs". Les premiers sont des camions intégrés, en ce sens qu'ils possèdent une structure d'un seul tenant de laquelle aucune semi-remorque ne peut être détachée. Les "tracteurs", quant à eux, sont "détachables", en ce sens qu'une semi-remorque est ajoutée à l'arrière de la cabine. Les clients opteront pour un tracteur ou un porteur selon leurs besoins de transport et leurs préférences personnelles. Il apparaît que la situation géographique du client influence fortement son choix entre ces deux types de camion. Comme il sera expliqué au considérant 52, les clients de l'Europe du Nord achètent habituellement des poids lourds porteurs. Il existe certains indices selon lesquels, du point de vue de la demande, les porteurs et les tracteurs ne sont pas totalement substituables les uns aux autres. Cette question peut toutefois être laissée en suspens, car elle ne modifie pas sur le fond l'appréciation de l'opération notifiée.
(26) Au-delà de cette distinction fondamentale, l'enquête a fait apparaître qu'il existe essentiellement trois critères de base, applicables aux porteurs et aux tracteurs, qui déterminent le choix des clients. Le premier critère concerne le moteur, et en particulier sa puissance (exprimée en chevaux-vapeur). Cet élément est important en ce qui concerne le poids à transporter et la topographie de la région d'utilisation. Le deuxième critère est le nombre d'essieux du camion: d'après les résultats de l'enquête, il existe une "combinaison type" (4X2), la plus fréquente en Europe. D'autres combinaisons, comprenant un nombre d'essieux plus important (par exemple, 6X2 et 6X4), sont davantage une personnalisation du produit, pour répondre aux préférences du client, qui dépendent, en partie du moins, de la topographie et des conditions climatiques. Le troisième critère concerne la cabine du véhicule, qui peut être basse, haute ou très haute en fonction du niveau de confort demandé.
(27) Le client peut ensuite choisir un très grand nombre d'options, qu'il sélectionnera en fonction de ses besoins spécifiques et du type de transport qu'il effectue. En général, cependant, tous les constructeurs de poids lourds sont en mesure de proposer un véhicule équipé de chacun des éléments qui sont déterminants pour le client et pour le constructeur lui-même (par exemple lorsqu'il s'agit de proposer un prix pour un camion comparable à celui proposé par un concurrent).
(28) En outre, en Suède et en Finlande, le client peut, compte tenu des besoins spécifiques et de la réglementation nationale en vigueur, acheter des camions plus longs (25,25 mètres) et d'une capacité de chargement maximale plus élevée (60 tonnes).
(29) Du point de vue de l'offre, il apparaît que tous les grands constructeurs européens sont en mesure de proposer une gamme complète de divers types de poids lourds. Le fait d'offrir des camions spéciaux dans certaines régions d'Europe représenterait assurément un coût supplémentaire pour ces constructeurs. Ce coût devrait alors être mis en balance avec l'intérêt du marché en question. Cependant, en ce qui concerne plus précisément la définition du marché de produits, il semble que les coûts liés au basculement de la production d'un type de poids lourds vers un autre ne soient pas considérés, en soi, comme très élevés. La Commission considère, par conséquent, que les divers types de poids lourds ne constituent pas des marchés de produits distincts.
(30) Sur la base des éléments qui précèdent, la Commission parvient ainsi à la conclusion que la catégorie des poids lourds (plus de 16 tonnes) peut être considérée, aux fins de la présente appréciation, comme un seul marché de produits en cause.
B. MARCHÉ GÉOGRAPHIQUE EN CAUSE
(31) Dans une affaire antérieure (5), la Commission a indiqué qu'"il n'est pas nécessaire de vérifier si le marché géographique des camions est communautaire ou se compose toujours de plusieurs marchés nationaux", car cet aspect n'était pas déterminant aux fins de l'affaire en question. En l'espèce, l'enquête a essentiellement porté sur l'Europe du Nord, en particulier les quatre pays nordiques - Danemark, Finlande, Norvège et Suède - et l'Irlande. Comme l'opération, même sur un marché défini nationalement, ne crée pas une position dominante dans d'autres parties de la Communauté, il n'est pas nécessaire, en l'espèce non plus de déterminer avec exactitude l'étendue du marché géographique au-delà des pays nordiques et de l'Irlande.
(32) L'enquête a néanmoins montré que, pour ces cinq pays, les marchés géographiques en cause, dans le cas des poids lourds, étaient toujours nationaux. Les raisons qui ont amené à cette conclusion sont exposées ci-après, en commençant par les arguments avancés par Volvo dans la notification.
Arguments présentés par la partie notifiante
(33) Dans la notification, Volvo s'est fondée sur les conclusions de la Commission dans l'affaire Renault/Iveco (6). Dans cette décision, la Commission avait considéré que le marché en cause, pour les autocars de tourisme, était l'EEE, essentiellement en raison du niveau élevé des importations et des exportations. Elle avait également constaté que les acheteurs d'autocars de tourisme sont des opérateurs privés sensibles au prix, qui s'embarrassent peu de considérations telles que la fidélité à la marque d'un constructeur national (7).
(34) Dans la notification, Volvo affirme que l'analyse qui s'applique aux autocars de tourisme vaut également pour les poids lourds. Les parties ont également invoqué les éléments suivants, qui seraient, d'après elles, déterminants dans la définition du marché géographique en cause:
a) les niveaux de prix: selon Volvo, "les écarts de prix entre États membres ne sont pas importants. Ainsi, sauf en France, les écarts entre les niveaux de prix des poids lourds de Volvo, par exemple, se situent dans une fourchette d'environ 10 %" (voir la notification, page 39);
b) les constructeurs sont déjà présents dans tout l'EEE et les importations dans l'EEE augmentent: Volvo affirme que "les sept plus gros constructeurs de poids lourds (DaimlerChrysler, Volvo, Scania, MAN, RVI, Iveco et Daf/Paccar), qui représentent environ 97 % du marché européen, sont présents dans pratiquement tous les États membres et réalisent tous de nombreuses ventes à l'exportation. Dans le cas de Volvo et Scania, les ventes hors de Suède ont représenté respectivement 90 % et 80 % de leur chiffre d'affaires total en 1998. Les importations ont constitué environ 30 % des ventes de poids lourds dans les pays nordiques. Bien que certains constructeurs continuent de détenir des parts de marché relativement élevées dans leur pays d'origine, il s'agit là d'un phénomène largement historique. Les importations continuent de croître" (voir la notification, pages 39 et 40);
c) l'apparition de gros acheteurs privés transfrontaliers: Volvo estime que la déréglementation dans le secteur du transport routier a provoqué une "importante modification du profil du client et des habitudes d'achat. Elle a notamment conduit à l'apparition de gros propriétaires de flottes multinationaux, comme GPE Lyonnaise et Geodis/B Montreuil en France et aux Pays-Bas, avec des flottes comprises entre 5 000 et 10 000 camions. Alors que dans le passé, la plupart des clients de Volvo étaient propriétaires de flottes petites ou moyennes, la majorité de ses clients actuels possèdent au moins 20 à 25 véhicules. Ces gros opérateurs sont présents dans plusieurs États membres, et un grand nombre d'entre eux recourent soit à des appels d'offres et achètent leurs camions à un seul endroit, soit tirent profit de leur connaissance des prix et des conditions de concurrence dans d'autres États membres lorsqu'ils négocient avec les distributeurs" (voir la notification, page 46);
d) l'apparition de l'approvisionnement auprès de deux constructeurs: Volvo fait valoir que la tendance à la croissance et à l'internationalisation des clients a également contribué à renforcer l'approvisionnement auprès de deux marques, voire davantage. "Pour ne pas se lier à un constructeur particulier lors des négociations d'achat, les transporteurs routiers possédant plus de 20 à 25 véhicules comptent habituellement au moins deux marques dans leur flotte" (voir la notification, page 47);
e) la standardisation des produits: selon Volvo, "alors que dans le passé, les restrictions en matière de poids et de longueur constituaient des obstacles à la conception de modèles de camions utilisables dans toute la Communauté, le processus d'harmonisation qui a débuté en 1985 avec la directive 85-3-CEE du Conseil, et dont la dernière étape en date est la directive 96-53-CE du Conseil, a créé une situation dans laquelle le même camion de base en termes de poids et de dimensions peut être vendu et utilisé partout en Europe" (voir la notification, page 47);
f) l'absence d'obstacles à l'accès au marché pour les producteurs étrangers: Volvo affirme que "si, antérieurement, la nécessité de créer un réseau de concessionnaires et de service après-vente pouvait être considérée comme un obstacle à l'accès au marché, elle n'empêche plus les constructeurs étrangers de participer à la concurrence dans un État membre donné" (voir la notification, page 48).
(35) Dans sa réponse à la communication des griefs qui lui a été adressée par la Commission en application de l'article 18 du règlement sur les concentrations (ci-après dénommée la "réponse"), Volvo fait valoir que la Commission ne doit pas fonder son appréciation du marché géographique en cause sur les facteurs étrangers au prix relevés dans la notification, car ces facteurs ne sont pas utiles pour définir ledit marché. Volvo estime au contraire que le facteur déterminant en la matière est de savoir si les constructeurs se livrent effectivement à une discrimination par les prix entre les différents marchés. Volvo a présenté deux rapports (Lexecon et Neven) qui, estime-t-elle, montrent que les prix de poids lourds comparables varient à l'intérieur d'une fourchette de 5 à 15 % dans toute la Communauté sauf en Suède, et qu'il n'existe donc pas d'écarts de prix significatifs entre les autres États membres.
(36) Dans la réponse, Volvo fait également état de nouveaux éléments d'information concernant le commerce parallèle de poids lourds et de facteurs liés à la déréglementation du secteur du transport en aval qui, selon elle, étayent davantage encore son affirmation selon laquelle le marché des poids lourds correspond à l'EEE (moins la Suède). Tous ces arguments sont analysés ci-après.
Appréciation du marché géographique en cause par la Commission
(37) Dans sa réponse, Volvo présente plusieurs arguments nouveaux à l'appui de ses affirmations concernant l'étendue du marché géographique en cause. Bien que la réponse semble indiquer que l'entreprise ne considère plus les facteurs étrangers au prix qu'elle a relevés dans sa notification comme utiles à la définition du marché géographique, la Commission les analyse malgré tout car ils constituent des éléments utiles pour l'appréciation globale de la définition du marché. Le principal revirement consiste en ce que Volvo estime aujourd'hui que l'appréciation doit essentiellement porter sur la capacité des fournisseurs de se livrer à une discrimination par les prix entre les différents marchés. Contrairement à ce qui est dit dans la réponse, les éléments de preuve dont dispose la Commission montrent que Volvo et les autres fournisseurs de poids lourds ont appliqué des prix et des marges bénéficiaires sensiblement différents pour des produits comparables d'un État membre à l'autre. Cet élément, ainsi que les éléments étrangers au prix, qui montrent que les conditions de concurrence sur le marché des poids lourds varient d'un État membre à l'autre, sont examinés dans les considérants suivants.
Les niveaux des prix diffèrent sensiblement d'un État membre à l'autre
(38) L'achat de poids lourds s'effectue toujours de façon prépondérante au niveau national, pour plusieurs raisons. Ce phénomène est reflété par les écarts de prix significatifs qui peuvent être observés, même entre pays voisins. Comme indiqué précédemment, Volvo a affirmé, dans sa notification et dans sa réponse, que les écarts de prix entre États membres ne sont pas importants et en a conclu à l'existence d'un marché des poids lourds à l'échelle de l'EEE.
(39) Dans la notification, Volvo considère que la faiblesse des écarts de prix ressort d'informations (page 122) selon lesquelles, sauf en France, les variations des niveaux de prix de ses poids lourds dans les divers États membres se situent dans une fourchette de plus ou moins 10 %. Lesdites informations (relatives au [modèle courant de Volvo] (8) font cependant apparaître des écarts de prix nationaux pouvant atteindre 20 %. Selon la notification, le prix fixé par Volvo pour ce modèle est plus élevé d'environ [10-20 %] en Finlande qu'au Danemark, d'environ [10-20 %] en Suède qu'en France, de [0-10 %] en Allemagne qu'aux Pays-Bas, de [0-10 %] en Allemagne qu'au Danemark et de [0-10 %] au Royaume-Uni qu'en France. Si la comparaison porte sur [un modèle plus courant dans les pays nordiques], le prix de Volvo est moins élevé d'environ [10-20 %] au Danemark qu'en Suède, de [10-20 %] au Danemark qu'en Allemagne et de [20-30 %] au Danemark qu'en Finlande. Aucune indication de prix concernant la Norvège et l'Irlande ne figurait dans la notification. Au cours de la procédure, la Commission a également recueilli des listes de prix pour les modèles de poids lourds les plus vendus de chaque constructeur dans chaque État membre. Ces données confirment largement les écarts de prix indiqués ci-dessus. En outre, elles montrent que les prix de Volvo sont sensiblement moins élevés en Irlande qu'au Royaume-Uni. Ainsi, les prix indiqués en 1998 pour les camions porteurs et tracteurs les plus vendus ([...]) étaient donc plus élevés de 40 % au Royaume-Uni qu'en Irlande. Bien que les prix effectivement appliqués puissent différer des prix de catalogue, ces différences ne corroborent pas l'argument de Volvo selon lequel ces marchés ne sont pas de dimension nationale. Le simple fait que les tarifs diffèrent sensiblement d'un pays à l'autre suffit à indiquer que les conditions de concurrence sont différentes et rend les comparaisons de prix plus difficiles pour les acheteurs. D'une manière générale, les données sur les prix fournies par les concurrents confirment l'existence d'écarts de prix substantiels d'un pays à l'autre, et les différences relevées vont dans le même sens que celles indiquées pour Volvo. Par exemple, aucun des concurrents ne signale de prix plus élevé au Danemark qu'en Allemagne. Au contraire, il apparaît que les prix indiqués sont normalement supérieurs d'au moins 5 à 10 % en Allemagne. Cela concorde avec un tableau contenu dans la notification de Volvo, qui avait été élaboré à des fins internes préalablement à l'opération et indique les prix réels nets aux concessionnaires ajustés en fonction des spécifications des véhicules. Le prix moyen indiqué est moins élevé de 8 % au Danemark qu'en Allemagne.
(40) Volvo a fait valoir qu'une comparaison des prix sur la base des chiffres contenus dans la notification n'était pas utile pour la définition des marchés géographiques en l'espèce. En effet, estime l'entreprise, les écarts de prix indiqués sont dus aux différences d'équipement du poids lourd et/ou à la structure de la clientèle (et, partant, de la puissance d'achat) dans les divers pays. Volvo a ainsi indiqué dans sa réponse que par "discrimination par les prix", il convenait d'entendre la réalisation de marges bénéficiaires différentes sur la vente du même bien à divers consommateurs.
(41) À l'appui de cet argument, Volvo a présenté dans sa réponse des rapports établis par Lexecon et Neven qui tendent à indiquer que les écarts de prix entre les États membres sont limités, sauf dans le cas de la Suède. La méthodologie utilisée dans ces études a consisté à comparer les ventes de deux modèles de poids lourd Volvo (le tracteur [modèle courant] et le porteur [modèle courant]) dans douze États membres de l'Union et en Norvège (9). La comparaison se fonde, au départ, sur les prix nets moyens facturés aux concessionnaires dans chaque pays. Dans les rapports, ces prix nets moyens sont ensuite ajustés selon les spécifications des véhicules. Après ajustement, les rapports constatent que les prix fixés par Volvo pour le tracteur dans chaque pays évoluent dans une fourchette de plus ou moins 5 %, sauf en Suède ([+ 0-10 %]), en France ([- 0-10 %]) et en Norvège ([- 0-10 %]). Dans le cas du porteur, les prix ajustés évoluent dans une fourchette de plus ou moins 6 %, sauf en Suède ([+ 10-20 %]) et au Danemark ([- 0-10 %]). Les rapports tentent également de procéder à un ajustement par type de clientèle, ce qui réduirait encore l'écart à une fourchette de 2 à 4,2 %.
(42) Après un examen approfondi, la Commission n'est pas en mesure de considérer les rapports Lexecon et Neven comme source d'information fiable pour confirmer l'existence d'un marché des poids lourds s'étendant à l'EEE. Les rapports se fondent sur les prix nets moyens facturés aux concessionnaires. Pendant toute la durée de l'enquête, Volvo a remis en question le bien-fondé de l'utilisation de ce type de données. De plus, les ajustements reposent sur des données relatives à une seule année (1998). On peut donc s'interroger sur l'importance qu'il convient d'accorder aux conclusions desdits rapports, en particulier lorsque plusieurs autres facteurs indiquent l'existence de marchés nationaux.
(43) La Commission a examiné les données utilisées dans les rapports, ainsi que certaines données qui n'y sont pas reprises. Sur la base de ces données, fournies par Volvo, la Commission a effectué ses propres calculs pour certains types de camions qui ne sont pas pris en considération dans les rapports Lexecon et Neven. Cependant, plutôt que de se fonder sur des moyennes pour divers types de moteurs, comme c'est le cas dans les rapports, la Commission a comparé directement les prix d'un type de moteur identique dans divers pays, tout en recourant à la méthode employée dans les rapports pour tenir compte des différences de spécifications. Ces comparaisons figurent ci-dessous pour le [modèle courant] qui, parmi les modèles pour lesquels des données ont été communiquées, est le moteur le plus vendu dans plusieurs pays (Belgique, Finlande, France, Pays-Bas, Portugal, Suède et Royaume-Uni). Le prix (ajusté) est alors plus élevé de [10-20 %] au Royaume-Uni qu'en France, et de [10-20 %] en Belgique qu'en France. En Suède, il coûte [10-20 %] de plus qu'au Danemark, [10-20 %] de plus qu'en Norvège et [0-10 %] de plus qu'en Finlande. En Finlande, il coûte [10-20 %] de plus qu'en Norvège et [0-10 %] de plus qu'au Danemark. Ces grandes différences entre prix ajustés - obtenues en utilisant la méthode proposée dans les rapports - écartent sans ambiguïté l'hypothèse d'un marché géographique à l'échelle de l'EEE ou d'un marché géographique régional s'étendant aux pays nordiques.
(44) La Commission a également examiné les corrections par type de clientèle effectuées dans les rapports. Elle note que les calculs se fondent sur des données très limitées, particulièrement hors de France, et que certains pays dans lesquels, selon Volvo, les flottes de véhicules sont grandes mais les prix toujours relativement élevés (aux Pays-Bas, par exemple) ne sont pas pris en compte dans les calculs, ce qui pourrait fausser les résultats et aboutir à un écart plus étroit. Il semble également que les rapports favorisent l'hypothèse selon laquelle les ristournes de flotte sont particulièrement élevées en France. Cette hypothèse est cependant contredite dans un rapport rédigé en janvier 1999 par [une société d'études de marché réputée] pour Volvo. On y lit que "l'analyse d'échantillons au Royaume-Uni montre que le prix moyen d'un type de camion donné est inférieur de [10-20] pour les gros clients (flottes de plus de 30 véhicules) par rapport aux petits transporteurs (moins de 5 camions). En Allemagne et en France, les chiffres correspondants pour la vente de véhicules neufs sont respectivement de [10-20] et de [10-20]". La Commission considère par conséquent que la correction par type de clientèle appliquée dans les rapports présente plusieurs défauts. De plus, en tout état de cause, elle n'offrirait des informations utiles que pour un nombre limité de pays. La Norvège, l'Irlande et le Royaume-Uni, par exemple, ne sont pas pris en considération.
(45) Quant aux conclusions des rapports Lexecon et Neven, la Commission ne saurait admettre que l'existence d'un écart de prix compris dans une fourchette de plus ou moins 5 % (ou 6 %) (10) soit négligée pour définir le marché, car cela signifierait qu'un éventuel monopoliste dans une zone pourrait imposer des augmentations de prix pouvant aller dans certains cas jusqu'à 10 % (ou 12 %) sans être gêné en cela par les conditions de concurrence des zones voisines.
(46) Ensuite, et cet élément revêt une importance plus grande encore, la conclusion desdits rapports ne concorde pas avec d'autres sources d'information disponibles. Cela vaut non seulement pour la comparaison de prix présentée par Volvo dans la notification, mais également pour les informations relatives aux prix communiquées ultérieurement au cours de l'enquête menée par la Commission (qui comprennent des tarifs nationaux et des prix de transaction pour le même modèle de camion et montrent que les écarts de prix sont aussi importants que ceux indiqués dans la notification) et pour les comparaisons de prix contenues dans des documents internes de Volvo communiqués à la demande de la Commission [notamment un tableau intitulé "transaction price comparisons, Q1 l999" ("comparaison des prix de transaction, premier trimestre de 1999"), qui donne les prix de transactions portant sur un à trois véhicules dans des modèles précis pour Volvo, Scania et DaimlerChrysler]. Il apparaît clairement, à la lecture des documents internes de Volvo, que ces comparaisons ont été effectuées en tenant compte de toutes les spécifications. Pour Volvo, ce tableau portait sur le tracteur [modèle courant], et il en ressort que ce modèle était vendu au Royaume-Uni à un prix supérieur de [10-20 %] au prix français. L'écart de prix le plus important relevé pour ce modèle Volvo montre que son prix est plus élevé de [20-30 %] en Belgique qu'en France. Le tableau montre que les modèles Scania et DaimlerChrysler retenus pour la comparaison présentent la même structure de prix que le modèle Volvo dans les pays considérés. Ces deux types d'information donnent donc des différences de prix au niveau national du même ordre que celles indiquées dans la notification. Pour admettre le bien-fondé des conclusions des rapports Lexecon et Neven, il faudrait donc non seulement ignorer les déficiences relevées ci-dessus, mais aussi considérer qu'aussi bien les comparaisons de prix fournies par Volvo à la Commission que les comparaisons de prix utilisées par Volvo pour ses propres besoins sont inexactes.
(47) Volvo estime, dans sa réponse, que la définition des marchés géographiques en cause doit se fonder sur l'existence ou non d'une discrimination par les prix, c'est-à-dire la question de savoir si les constructeurs de poids lourds réalisent des marges différentes sur la vente du même produit aux consommateurs de divers pays. C'est pourquoi il est intéressant de constater que les chiffres relatifs à l'évolution des marges que Volvo a communiqués pendant la procédure indiquent clairement qu'une telle discrimination par les prix a eu lieu (11). À titre d'exemple, la marge bénéficiaire nette de Volvo sur son porteur [modèle courant] a été, en 1998, de [10-20 %] en Suède et de [0-10 %] au Danemark (la marge bénéficiaire brute dans ces deux pays a été, respectivement, de [20-30 %] et de [10-20 %]0). Pour le porteur [modèle courant], la marge a été de [10-20 %] en Finlande et de [ 0-10 %] en Norvège (marge brute: respectivement [20-30 %] et [10-20 %]). Les informations transmises par Volvo font également apparaître des différences de marge analogues entre d'autres pays, par exemple entre le Danemark, l'Irlande et la Belgique pour le tracteur [modèle courant].
(48) En conclusion, Volvo estime dans sa réponse que le critère essentiel pour définir le marché géographique en cause est la possibilité d'exercer une discrimination par les prix ou les marges entre diverses zones. Volvo a fourni de nombreux exemples qui montrent que l'entreprise a effectivement été en mesure non seulement de maintenir des écarts de prix importants entre pays voisins, mais également d'appliquer des marges bénéficiaires très variables (12). Il y a lieu de considérer, par conséquent, que les données disponibles en matière de prix et de marges bénéficiaires sont incompatibles avec l'affirmation de Volvo selon laquelle les pays nordiques (Suède, Danemark, Finlande et Norvège), le Royaume-Uni et l'Irlande ne doivent pas être considérés comme des marchés géographiques distincts.
(49) En effet, si les marchés s'étendaient au-delà d'un territoire national, il est raisonnable de considérer que les acheteurs de poids lourds tireraient profit des écarts de prix existants et achèteraient leurs véhicules dans un pays voisin, et/ou que des revendeurs indépendants exploiteraient les occasions que constituent ces écarts pour acheter des véhicules chez Volvo dans les pays où ses marges sont les plus faibles et les revendre aux clients des pays où les marges sont élevées. Certaines des raisons expliquant l'absence de tels comportements sont indiquées dans les considérants suivants, dans le contexte des informations étrangères au prix contenues dans la notification, malgré l'affirmation de Volvo dans sa réponse selon laquelle ces informations ne sont pas utiles pour définir les marchés en cause.
Préférences des clients
(50) L'étude de marché montre clairement que, bien que les constructeurs puissent livrer une gamme de divers modèles de poids lourds (bien que l'adaptation aux réglementations spécifiques de certains États membres représente indiscutablement un coût supplémentaire et dissuade de s'implanter sur certains marchés), les exigences des clients sont telles que les modèles et les caractéristiques techniques des poids lourds vendus dans les divers États membres présentent des différences considérables.
(51) Cette constatation se vérifie si l'on examine les modèles les plus vendus des grands constructeurs dans différents États membres. Alors que l'on constate des différences importantes même dans les caractéristiques de base des poids lourds vendus dans les États membres (y compris si l'on compare les modèles d'un même constructeur), ces différences s'amenuisent singulièrement si l'on compare les modèles les plus vendus des divers constructeurs dans un même État membre.
(52) Comme élément de référence, le tableau suivant résume les caractéristiques des trois modèles les plus vendus de Volvo dans chaque pays en indiquant le pourcentage du volume total des ventes représenté par ces trois modèles. La situation ne serait guère différente en ce qui concerne les autres constructeurs de camions.
EMPLACEMENT TABLEAU
(53) Comme le montre le tableau figurant au considérant 52, les caractéristiques fondamentales des poids lourds, considérées comme des éléments clés, ont tendance à varier selon l'État membre où le véhicule est vendu. Ainsi, en Finlande, en Grèce, en Norvège et en Suède, les clients ont une préférence plus marquée pour les porteurs que dans les autres pays. En Autriche, en Finlande, en Grèce et en Norvège, les clients veulent des moteurs plus grands et plus puissants, alors qu'au Royaume-Uni ils préfèrent généralement des moteurs plus petits. On constate des différences similaires dans les préférences en ce qui concerne la configuration des essieux. Enfin, les clients tendent à accorder moins d'importance au niveau de confort de la cabine en Finlande, en France, au Royaume-Uni, en Italie, en Norvège, au Portugal et en Suède. En outre, il est manifeste que les caractéristiques fondamentales demandées dans les pays nordiques diffèrent sensiblement, non seulement de celles demandées dans d'autres États membres, mais également d'un pays nordique à l'autre. Ainsi, les clients danois préfèrent les véhicules de type tracteur, alors que ceux des trois autres pays choisissent généralement des porteurs et ils sont moins exigeants en ce qui concerne le confort de la cabine. De plus, les clients norvégiens, et davantage encore les Finlandais, demandent des moteurs plus puissants que les clients suédois et danois.
(54) Outre ces différences dans les caractéristiques fondamentales, il apparaît que les préférences des clients varient pour plusieurs options disponibles sur les modèles de poids lourds (par exemple, la boîte de vitesses ou le nombre de cylindres du moteur).
(55) Il apparaît que les clients de trois pays nordiques (Norvège, Finlande et Suède) achètent généralement des poids lourds de type porteur (intégrés) équipés d'un moteur d'une puissance supérieure à ceux vendus dans d'autres États membres, et d'un plus grand nombre d'essieux. Ces habitudes d'achat sont liées à la topographie et aux conditions climatiques de ces pays, ainsi qu'aux réglementations spéciales qui y sont en vigueur en ce qui concerne le poids autorisé. Vu ces conditions, les utilisateurs doivent recourir à des véhicules réellement capables de répondre à leurs besoins.
Les exigences techniques varient selon les États membres
(56) L'étude de marché a montré que, malgré un certain degré d'harmonisation au niveau européen (notamment par la directive 85-3-CEE du Conseil, qui harmonise les règles en matière de poids et de dimensions pour le trafic international dans l'Union européenne), certaines exigences techniques relatives aux poids lourds varient toujours d'un pays à l'autre. Cette constatation vaut en particulier pour le Royaume-Uni, l'Irlande et certains des pays nordiques. En ce qui concerne le Royaume-Uni et l'Irlande, le fait que tous les véhicules doivent être adaptés à la conduite à gauche restreint singulièrement les possibilités d'importer des véhicules destinés à l'Europe continentale. En outre, l'attention de la Commission a été attirée sur le fait que les spécifications des véhicules d'un même modèle ne seraient pas les mêmes pour l'Irlande et le Royaume-Uni. En effet, Scania, Volvo et Iveco livrent sur le marché irlandais des modèles plus robustes (en termes de train de roulement, de transmission, de suspension, de pneus et de ressorts) en raison du mauvais état des routes dans ce pays. Dans certains des pays nordiques, la réception complète des véhicules (c'est-à-dire l'harmonisation complète des réglementations techniques) dans le secteur des poids lourds ne devrait pas voir le jour avant deux ou trois ans. Des réglementations différentes sont ainsi toujours applicables en Suède et en Finlande en ce qui concerne la charge maximale autorisée et la longueur maximale des véhicules. Des poids et des dimensions plus importants que dans le reste de l'Europe sont autorisés dans ces deux pays (60 tonnes et 25,25 mètres). Cela avantage, d'une manière générale, Volvo et Scania, dont les camions ont toujours été conçus pour répondre aux spécifications (par exemple en termes de moteur et de configuration des essieux) qui caractérisent les véhicules plus longs et plus lourds.
(57) En Suède, il existe aussi un obstacle réglementaire particulier à l'accès au marché. La législation suédoise prévoit une homologation spéciale appelée "test de résistance des cabines". Un concurrent des parties a donné à la Commission la description suivante de l'incidence de ce test: "Comme indiqué précédemment, le test de résistance des cabines suédois constitue un obstacle technique à l'accès au marché suédois. Ce test a notamment empêché, de fait, [nom du concurrent] de vendre ses [nom des modèles] haut de gamme et d'importants modèles de camions plus légers. Ces modèles sont homologués pour la vente en Europe, et sont d'ailleurs vendus en grand nombre ailleurs. Le coût du test est supérieur aux revenus que produiraient les ventes supplémentaires par l'intermédiaire du réseau existant". Lors de l'audition, Volvo a admis que ce test constituait un obstacle à l'accès au marché pour les constructeurs de poids lourds autres que suédois. Volvo a avancé que DaimlerChrysler, Allemagne, demandait un supplément de 7850 marks allemands (DEM) aux clients souhaitant une cabine répondant aux normes de sécurité suédoises.
Les achats se font sur une base nationale
(58) Compte tenu de la spécificité du marché des camions décrite ci-dessus en termes de préférences des clients, de spécifications techniques et d'écarts de prix, et de la nécessité du service offert par le concessionnaire, il n'est pas surprenant que l'étude de marché ait révélé que les acheteurs de poids lourds ne s'adressent qu'exceptionnellement aux concessionnaires établis hors de leur pays d'activité. Il ressort de l'étude de marché que, même lorsque l'acheteur est un client possédant une flotte de véhicules et exerçant des activités de transport international avec des établissements dans plusieurs pays, les camions sont achetés sur chaque marché national et les décisions d'achat sont prises sur la base du service et des prix offerts par les concessionnaires dans le pays en question. Cela vaut d'autant plus lorsque le client est une entreprise de transport petite ou moyenne. De fait, la majorité des acheteurs de poids lourds des pays nordiques sont des petites et moyennes entreprises qui achètent sur leur marché national et qui ne prennent pas en considération la possibilité de profiter de différences de prix, étant donné la nécessité de disposer d'un service après-vente et d'entretien, le risque de voir diminuer la valeur de revente de camions importés par des particuliers et les caractéristiques techniques différentes en vigueur dans d'autres États membres.
(59) En outre, l'attention de la Commission a été attirée sur le fait que les concessionnaires voient dans la vente d'un camion neuf une source future de recettes générées par le service et la vente de pièces de rechange, activités sur lesquelles le concessionnaire réalise normalement des marges sensiblement plus élevées que sur la vente du véhicule neuf. Les données communiquées par Volvo confirment que la majeure partie des recettes d'un concessionnaire proviennent du service et de la vente de pièces de rechange. C'est pourquoi, s'il sait que la vente d'un camion à un client donné ne se traduira pas par des recettes après-vente, le concessionnaire sera moins enclin à offrir un prix attractif à ce client. Ainsi, les clients qui tentent d'importer eux-mêmes des camions d'autres États membres (par exemple des clients danois souhaitant acheter des camions en Allemagne) pourraient bien se voir imposer des prix plus élevés que les clients établis sur place. L'attention de la Commission a également été attirée sur le fait que, en raison des différents problèmes (service, garanties, etc.) rencontrés par un client important lui-même des camions à partir d'un pays voisin, un écart de prix atteignant 10 % serait nécessaire pour que l'achat des camions dans ce pays devienne une opération rentable, et cela uniquement pour les clients achetant un certain nombre de véhicules.
(60) Un autre aspect qui influence le degré d'intérêt qu'un client peut avoir à importer lui-même les camions ou à les acheter à un importateur parallèle tient à la possibilité d'obtenir un remboursement total ou partiel en cas de problème sur le véhicule après l'expiration de la garantie. Or, la décision d'accorder ou non un tel remboursement est normalement prise par l'importateur, qui serait évidemment peu enclin à l'accorder pour un camion qui n'aurait pas été importé par l'intermédiaire de l'importateur officiel.
Réseau de distribution et de service après-vente
(61) L'étude de marché a également révélé un autre élément qu'il convient de prendre en considération pour définir la dimension géographique du marché en cause. Bien que certains opérateurs considèrent que le marché des poids lourds est un "marché européen", ils précisent toujours que l'un des éléments déterminants dans la décision d'achat est le réseau après-vente (entretien, dépannage, fourniture de pièces détachées) qu'offre chaque constructeur. Les clients déclarent toujours que pour un propriétaire de camion, l'existence d'un service après-vente et d'entretien efficace et bien réparti sur le territoire est essentielle. L'étude de marché a effectivement fait apparaître que la décision d'un opérateur d'acheter un certain type de camion dépend de plusieurs variables dont chacune est déterminante: les éléments les plus importants sont le prix, le service après-vente, la valeur de revente et les conditions de garantie (tous ces éléments se reflétant dans une marque, comme on le verra ci-après). Par conséquent, le choix d'une marque dépendra fortement de la capacité du constructeur d'offrir une assistance après-vente efficace. Ce lien entre l'attrait d'un fournisseur de poids lourds et son réseau de service après-vente pourrait expliquer pourquoi la plupart des clients (même les "acheteurs professionnels", pour reprendre l'expression utilisée par Volvo) ne tirent pas profit des différences de prix existantes. Pour la même raison, il est probable que les revendeurs indépendants auraient des difficultés à convaincre les acheteurs de camions d'un pays donné d'acquérir des véhicules importés par un circuit parallèle (13). Il convient de noter que, bien que les garanties offertes par les fabricants soient en principe valables dans toute l'Europe, elles ne couvrent que les défauts de fabrication. L'entretien de routine du véhicule n'est pas couvert par la garantie mais il s'effectue normalement sur place, souvent sur la base d'un contrat d'entretien passé avec le concessionnaire qui a vendu le véhicule.
(62) Comme on le verra dans l'appréciation, les autres constructeurs européens disposent, en particulier dans tous les pays nordiques, de réseaux après-vente nettement moins étendus et moins bien répartis sur le territoire, et les autres réseaux existants sont surtout destinés à répondre soit aux besoins des sociétés de transports internationaux (qui ont besoin d'un service de réparation d'urgence dans toute l'Europe) soit à ceux des voitures particulières et des camionnettes. L'étude de marché a montré que l'adaptation des réseaux des concurrents des parties au niveau de ceux de Volvo et de Scania, pour leur permettre de répondre aux besoins des clients opérant à grande échelle dans les pays nordiques, nécessiterait des investissements importants (qui devraient bien sûr être mis en balance avec l'intérêt économique du marché).
(63) Lors de l'enquête, des concurrents des parties ont indiqué que la décision de créer ou de développer un réseau après-vente était liée à une "masse critique" de véhicules vendus dans un pays donné. Le chiffre d'environ 10 %, a été avancé. Il peut varier en fonction de plusieurs facteurs liés au coût de l'opération et aux possibilités offertes par le marché en question. Dans les pays nordiques, vu la taille relativement réduite des marchés et les coûts supplémentaires liés aux exigences techniques, une part de marché comprise entre 10 et 15 % est considérée comme le minimum nécessaire pour justifier ces frais supplémentaires. Il a également été indiqué à la Commission que la taille relativement modeste des pays nordiques pourrait dissuader de s'y implanter, même si les prix devaient augmenter de 5 à 10 %.
(64) Il suffit de noter, aux fins de la définition du marché géographique en cause, que l'importance des réseaux de distribution et de service après-vente est susceptible de constituer l'un des éléments qui retiennent les clients d'acheter hors de leur pays d'établissement, et qu'elle limite également la possibilité pour les revendeurs indépendants de tirer profit de la discrimination par les prix existant entre les États membres.
Écarts de parts de marché
(65) En outre, l'affirmation de Volvo selon laquelle le marché des poids lourds s'étendrait à l'ensemble de l'EEE n'est pas corroborée par les chiffres relatifs à ses ventes dans cette zone, tels qu'ils figurent dans la notification. La part de marché de Volvo dans l'EEE s'élève à 15,2 %. Elle est cependant beaucoup plus élevée dans plusieurs États membres pris isolément (45 % en Suède, 34 % en Finlande, 29 % au Danemark, 38 % en Norvège, entre 22 et 25 % en Irlande, en Belgique, aux Pays-Bas, au Portugal et en Grèce). Dans le même temps, les parts qu'elle détient dans un certain nombre de pays sont sensiblement inférieures à cette moyenne EEE (12 % en Autriche, 8 % en Allemagne, 13 % en Espagne, 12 % en Italie et 11 % au Luxembourg). Comme le montre le tableau suivant, des écarts nationaux similaires par rapport à la part de marché moyenne dans l'EEE peuvent être observés chez Scania et chez tous les autres constructeurs de poids lourds. Même entre États membres voisins présentant une topographie assez similaire, tels que le Danemark et l'Allemagne, on observe des variations importantes des parts de marché des principaux constructeurs. Mis à part quelques vagues références à des raisons historiques, Volvo n'a fourni aucune raison expliquant comment, à son avis, de telles différences dans les parts de marché d'un État membre à l'autre pouvaient être compatibles avec son affirmation selon laquelle le marché des poids lourds s'étend à l'ensemble de l'EEE.
EMPLACEMENT TABLEAU
Source:
Notification (sur la base des chiffres officiels d'immatriculation).
Conclusion concernant les marchés géographiques en cause pour les poids lourds
Suède
(66) La Commission considère que la Suède constitue un marché géographique en cause distinct pour les poids lourds. Premièrement, l'étude de marché a montré que les poids lourds étaient achetés sur le marché national et que les réseaux de distribution et de service après-vente constituaient une barrière à la pénétration des importations pour les constructeurs qui ne disposent pas d'un réseau local suffisamment développé. Cela vaut particulièrement pour MAN et Iveco, qui ne détiennent aucune part du marché suédois des poids lourds. Le caractère national des achats a été confirmé par l'enquête réalisée par l'autorité de concurrence suédoise, qui montre que les clients tendent, dans leur grande majorité, à acheter les poids lourds au niveau national, voire local. Deuxièmement, comme il est expliqué plus haut, les prix appliqués en Suède sont différents de ceux des pays voisins. Par exemple, le prix (ajusté) du [modèle courant] est plus élevé de [10-20 %] en Suède qu'au Danemark, de [10-20] qu'en Norvège et de [0-10 %] qu'en Finlande. Troisièmement, Volvo ne réalise pas les mêmes marges bénéficiaires en Suède que dans les autres pays nordiques. Ainsi, la marge bénéficiaire de Volvo en 1998 sur son [modèle courant] était de [... (14)] en Suède, contre [...] au Danemark, [...] en Finlande et [...] en Norvège. Quatrièmement, les spécifications techniques en vigueur en Suède ne sont pas les mêmes que dans le reste de l'Europe, des camions plus longs et d'un poids plus élevé étant autorisés en Suède. En outre, le test suédois de résistance des cabines apparaît comme une barrière réglementaire spécifique à l'entrée, qui explique l'absence de certains modèles de camion sur le marché suédois. Enfin, la part de marché de RVI n'est que de 1 % en Suède, alors qu'en Finlande, la marque "nationale" RVI/Sisu détient 18 %. Pour les raisons indiquées ci-dessus, les conditions de concurrence sur le marché des poids lourds en Suède sont différentes de ce qu'elles sont dans les pays voisins et la Suède constitue par conséquent un marché géographique en cause distinct.
Danemark
(67) La Commission considère que plusieurs indices tendent fortement à indiquer que le Danemark constitue un marché géographique en cause distinct pour les poids lourds. Premièrement, l'étude de marché a montré que les poids lourds étaient achetés sur le marché national et que les réseaux de distribution et de service après-vente constituaient un obstacle à la pénétration des importations pour les constructeurs qui ne disposent pas d'un réseau local suffisamment développé. Deuxièmement, comme il est expliqué plus haut, les prix appliqués au Danemark sont différents de ceux des pays voisins. Par exemple, le prix (ajusté) du [modèle courant] est plus élevé de [10-20 %] en Suède qu'au Danemark. En outre, d'après les indications fournies dans la notification, les prix nets facturés aux concessionnaires, après ajustement en fonction des spécifications, pour le [modèle courant] sont en moyenne inférieurs de [0-10 %] au Danemark par rapport à l'Allemagne. Troisièmement, Volvo ne réalise pas les mêmes marges bénéficiaires au Danemark que dans les pays voisins. Par exemple, la marge bénéficiaire nette de Volvo en 1998 sur son [modèle courant] était de [...] au Danemark contre [...] Suède, [...] en Finlande et [...] en Norvège. Quatrièmement, les trois modèles de poids lourd de Volvo les plus vendus au Danemark présentent des caractéristiques différentes de celles des modèles préférés dans les autres pays nordiques. Enfin, le fait que Volvo détient une part de marché de 29 % au Danemark mais de seulement 8 % en Allemagne, Scania une part de 30 % au Danemark mais de seulement 9 % en Allemagne, DaimlerChrysler une part de 42 % en Allemagne mais de seulement 18 % au Danemark, et MAN une part de 26 % en Allemagne mais de seulement 10 % au Danemark tend à confirmer que le Danemark et l'Allemagne n'appartiennent pas au même marché géographique en cause. Ces différentes constatations tendent fortement à indiquer que les conditions de concurrence du marché des poids lourds au Danemark sont différentes de celles que connaissent les pays voisins et que le Danemark constitue par conséquent un marché géographique en cause distinct. Comme on le verra plus loin, si le Danemark devait être considéré comme un marché géographique séparé, l'opération conduirait à la création d'une position dominante sur ce marché. Toutefois, étant donné que, comme il est expliqué ci-dessous, l'opération notifiée serait, en tout état de cause, incompatible avec le Marché commun, même si elle n'avait pas pour effet la création d'une position dominante sur le marché danois des poids lourds, il n'est pas nécessaire de régler cette question dans le cadre de la présente procédure.
Norvège
(68) La Commission considère que la Norvège constitue un marché géographique en cause distinct pour les poids lourds. Premièrement, l'étude de marché a montré que les poids lourds étaient achetés sur le marché national et que les réseaux de distribution et de service après-vente constituaient un obstacle à la pénétration des importations pour les constructeurs qui ne disposent pas d'un réseau local suffisamment développé. Deuxièmement, comme il est expliqué plus haut, les prix appliqués en Norvège sont différents de ceux des pays voisins. Par exemple, le prix (ajusté) du [modèle courant] est plus élevé de [10-20 %] en Suède qu'en Norvège et plus élevé de [10-20 %] en Finlande qu'en Norvège. Troisièmement, Volvo ne réalise pas les mêmes marges bénéficiaires en Norvège que dans les autres pays nordiques. Par exemple, la marge bénéficiaire nette de Volvo en 1998 sur son [modèle courant] était de [...] en Norvège, contre [...] en Suède, [...] au Danemark et [...] en Finlande. Quatrièmement, les trois modèles de poids lourd de Volvo les plus vendus en Norvège présentent des caractéristiques différentes de celles des modèles préférés au Danemark. Enfin, les parts de marché diffèrent entre la Norvège et la Suède en ce que MAN détient 12 % en Norvège et n'est pas présent en Suède, tandis que Volvo et Scania détiennent respectivement 38 et 32 % en Norvège, et 45 et 46 % en Suède. En outre, RVI ne détient qu'une part de marché de 1 % en Norvège, alors qu'en Finlande la marque "nationale" RVI/Sisu détient 18 %; DaimlerChrysler détient 18 % au Danemark et seulement 9 % en Norvège. Pour les raisons indiquées ci-dessus, les conditions de concurrence sur le marché des poids lourds en Norvège sont différentes de ce qu'elles sont dans les pays voisins et la Norvège constitue par conséquent un marché géographique en cause distinct.
Finlande
(69) La Commission considère que la Finlande constitue un marché géographique en cause distinct pour les poids lourds. Premièrement, l'étude de marché a montré que les poids lourds étaient achetés sur le marché national et que les réseaux de distribution et de service après-vente constituaient une barrière à la pénétration des importations pour les constructeurs qui ne disposent pas d'un réseau local suffisamment développé. Deuxièmement, comme il est expliqué plus haut, les prix appliqués en Finlande sont différents de ceux des pays voisins. Par exemple, le prix (ajusté) du [modèle courant] est plus élevé de [10-20 %] en Finlande qu'en Norvège et de [0-10 %] en Suède qu'en Finlande. Troisièmement, Volvo ne réalise pas les mêmes marges bénéficiaires en Finlande que dans les autres pays nordiques. Par exemple, la marge bénéficiaire nette de Volvo en 1998 sur son [modèle courant] était de [...] en Finlande, contre [...] en Suède, [...] au Danemark et [...] en Norvège. Quatrièmement, des camions plus longs et d'un poids plus élevé que dans le reste de l'Europe, à l'exception de la Suède, sont autorisés en Finlande. Enfin, la marque "nationale" RVI/Sisu détient une part de marché de 18 % en Finlande alors que sa part n'est que de 1 % en Suède et en Norvège et de 3 % au Danemark. Pour les raisons indiquées ci-dessus, les conditions de concurrence sur le marché des poids lourds en Finlande sont différentes de ce qu'elles sont dans les pays voisins et la Finlande constitue par conséquent un marché géographique en cause distinct.
Irlande
(70) La Commission considère que l'Irlande constitue un marché géographique en cause distinct pour les poids lourds. Premièrement, l'étude de marché a montré que les poids lourds étaient achetés sur le marché national et que les réseaux de distribution et de service après-vente constituaient une barrière à la pénétration des importations pour les constructeurs qui ne disposent pas d'un réseau local suffisamment développé. Deuxièmement, les prix de catalogue communiqués par Volvo pour les camions porteurs et tracteurs les plus vendus sont sensiblement moins élevés ([40-50 %]) au Royaume-Uni qu'en Irlande. Troisièmement, les exigences techniques ne sont pas les mêmes en Irlande que dans les autres États membres. La conduite à gauche restreint fortement les possibilités d'importation de véhicules destinés à l'Europe continentale. En outre, pour un même modèle, les véhicules livrés en Irlande doivent être plus robustes qu'au Royaume-Uni en raison du mauvais état du réseau routier irlandais. Enfin, les parts de marché des principaux fabricants sont très différentes en Irlande de ce qu'elles sont dans la plupart des autres pays d'Europe. Bien que la différence soit moins marquée par rapport au Royaume-Uni, la part de marché cumulée de Volvo et Scania est de 49 % en Irlande contre seulement 37 % au Royaume-Uni. Pour les raisons indiquées ci-dessus, les conditions de concurrence sur le marché des poids lourds en Irlande sont différentes de ce qu'elles sont dans les pays voisins et l'Irlande constitue par conséquent un marché géographique en cause distinct.
C. APPRÉCIATION
(71) L'article 2 du règlement sur les concentrations prévoit que les opérations de concentration envisagées sont appréciées en vue d'établir si elles sont ou non compatibles avec le Marché commun. Cette appréciation vise essentiellement à établir si l'opération envisagée crée ou renforce une position dominante. L'un des paramètres les plus importants à prendre en considération à cet égard est la position sur le marché des entreprises concernées et leur puissance économique et financière. D'un point de vue économique, les effets d'une concentration sur les conditions de concurrence peuvent être mesurés de diverses manières. Le pouvoir de marché des parties à une concentration a traditionnellement été mesuré par approximation, au moyen de critères comme les parts du marché en cause détenues par les parties et celles des autres concurrents. Cette analyse se complète normalement d'une appréciation de la puissance d'achat éventuelle des clients, de la probabilité de voir de nouveaux concurrents s'implanter, etc. La Commission a réalisé une analyse de ce type en l'espèce, et elle est parvenue à la conclusion que l'opération envisagée était incompatible avec le Marché commun.
(72) La Commission a également chargé les professeurs Ivaldi et Verboven de réaliser une étude économétrique pour tenter de mesurer directement l'incidence que pourrait avoir l'opération sur les prix pratiqués par les constructeurs de poids lourds sur les divers marchés nationaux. Les résultats d'études économétriques de cette nature peuvent utilement compléter l'analyse que réalise habituellement la Commission pour mesurer le pouvoir de marché, en particulier lorsque la clientèle d'un produit est très fragmentée, ce qui ne permet pas d'obtenir aisément, par des méthodes d'enquête, un ensemble de clients représentatif. Une étude a été considérée comme utile en l'espèce, car chaque pays compte plusieurs milliers de propriétaires de camions, dont un grand nombre ne possèdent qu'un véhicule.
(73) L'étude est fondée sur un modèle "logit imbriqué" dans lequel certains paramètres relatifs aux décisions des entreprises en matière de prix et aux décisions d'achat des clients ont fait l'objet d'estimations sur la base des prix, des parts de marché et d'autres variables. En l'espèce, le modèle a été appliqué au moyen de données portant sur deux ans et sur deux types de camion de chacun des sept plus gros constructeurs, dans les différents États membres et en Norvège. Les résultats de ces estimations ont ensuite été utilisés pour simuler l'incidence de la concentration sur les prix de l'entité issue de l'opération (ci-après dénommée "New Volvo") et de ses concurrents.
(74) Les résultats de cette étude font apparaître de graves problèmes de concurrence principalement dans les pays nordiques et en Irlande, où la présente décision constate que l'opération conduira à la création d'une position dominante.
(75) La Commission admet que le recours à ce type d'étude est une démarche relativement nouvelle dans le contrôle communautaire des concentrations. En outre, Volvo a contesté la validité de l'étude dans sa réponse, arguant que l'analyse était affectée de défauts graves et que ses résultats n'étaient pas fiables. Bien que les professeurs Ivaldi et Verboven aient répondu à ces critiques, Volvo conteste toujours certains des éléments fondamentaux de l'étude. Eu égard au caractère innovateur de la méthode et à l'ampleur du désaccord, la Commission ne fondera pas son appréciation sur les résultats de l'étude.
Structure actuelle du marché européen des poids lourds
(76) Selon des tableaux présentant l'ordre d'importance des constructeurs de poids lourds en Europe en 1998, communiqués par Volvo dans sa notification, DaimlerChrysler est leader en Europe avec une part de 20,6 % du marché de l'EEE, suivi par Scania (15,6 %), Volvo (15,2 %) et quatre autres constructeurs (MAN, Paccar/DAF, RVI et Iveco) possédant des parts de marché comprises entre 10,4 et 12,6 % (15).
(77) Avant l'opération envisagée, le marché européen des poids lourds se caractérisait donc par la présence de sept constructeurs.Dans l'ordre, les plus gros constructeurs en Europe sont, compte tenu également de leur présence sur le marché mondial, DaimlerChrysler, Volvo et Scania.
(78) En outre, si l'on prend en considération la position de chacun de ces constructeurs sur le marché de l'EEE, il apparaît que seuls les trois constructeurs précités sont bien implantés sur tout le continent. Les autres constructeurs sont davantage présents dans certaines régions. Bien que DaimlerChrysler, Volvo et Scania soient aussi plus forts sur leur marché "domestique" ou "nature", ils sont les seuls à être bien représentés dans toute l'Europe. La part de marché de DaimlerChrysler est comprise entre 6,2 et 17,7 % en Europe du Nord (pays nordiques et Irlande), et entre 12 et 42 % dans le reste de l'Europe. Les positions respectives de Volvo et Scania sont très similaires, puisque leur présence est très forte dans l'ensemble de l'Europe du Nord (pays nordiques et Irlande) et répartie de manière assez égale dans le reste de l'Europe, avec des parts de marché allant de 8 à 9 % en Allemagne à 16 à 23 % aux Pays-Bas.
(79) Les autres constructeurs européens jouissent d'une position relativement forte sur leur marché "domestique" ou "naturel" (RVI: 38 % en France, Iveco: 41 % en Italie, Paccar/DAF: 33 % aux Pays-Bas, MAN: 26 % en Allemagne et 34 % en Autriche), mais ils sont assez faibles, voire pratiquement absents dans certaines régions d'Europe.
(80) De plus, avant l'opération envisagée, Volvo et Scania étaient chacune le principal concurrent de l'autre et mettaient en œuvre des stratégies commerciales analogues.Volvo et Scania sont toutes deux des marques suédoises, généralement perçues comme des produits de qualité offrant dans le monde entier un service fiable. Un examen des parts de marché respectives de Volvo et de Scania fait clairement apparaître leurs positions intrinsèquement parallèles dans toute l'Europe (chiffres de 1998).
EMPLACEMENT TABLEAU
(81) Ces chiffres ne se rapportent qu'à l'année 1998. Cependant, même en tenant compte des écarts de parts de marché observables les années précédentes, l'impression d'ensemble est qu'il existe, dans une large mesure, une symétrie entre les positions des deux entreprises. Cela concorde avec les observations des tiers selon lesquelles Scania est le concurrent le plus direct de Volvo.
(82) En outre, un examen de la situation dans les pays nordiques fait clairement apparaître, d'une part, que pendant une longue période (1989 à 1998), la position moyenne de Volvo et de Scania sur le marché est restée relativement stable, et, d'autre part, que les fluctuations de la part de marché de l'une des parties correspondent, pour la plupart, à une fluctuation en sens inverse de celle de l'autre.
Suède
EMPLACEMENT TABLEAU
Danemark
EMPLACEMENT TABLEAU
Finlande
EMPLACEMENT TABLEAU
Norvège
EMPLACEMENT TABLEAU
Ces graphiques montrent que Volvo et Scania occupent des positions similaires sur le marché et que les produits de chacune d'entre elles constituent les substituts les plus proches de ceux de l'autre.
(83) Outre les ventes, on peut aussi utiliser, pour mesurer la présence d'un constructeur de camions dans une région donnée, le nombre de points de vente et de service après-vente qu'il y exploite. Selon les chiffres fournis par Volvo, près de [70-80 %] du chiffre d'affaires total des concessionnaires de poids lourds proviennent du service après-vente et des ventes de pièces de rechange, les [20-30 %] restants provenant de la vente de véhicules neufs. Le tableau suivant indique le nombre total de points de vente/de service après-vente sur les marchés en cause, sur la base des chiffres fournis par les principaux fournisseurs de poids lourds. Il est à noter qu'un concessionnaire peut avoir un ou plusieurs points de vente. Pour tenter de donner une idée de la densité du réseau de chaque constructeur, le tableau indique le nombre total de points de vente. Le tableau montre que l'entité issue de l'opération serait avantagée par rapport à ses concurrents sur les marchés en cause, d'autant plus que tous les points de vente et de service après-vente de Volvo et de Scania sont largement spécialisés dans les poids lourds, alors que plusieurs des points de vente et de service après-vente de leurs concurrents sont utilisés pour les utilitaires légers et moyens, les voitures et les camionnettes, mais non pour les poids lourds. S'il est possible que certains centres de service destinés à l'entretien des utilitaires moyens soient aussi en mesure d'assurer l'entretien des poids lourds, il convient de noter que, d'après l'enquête, la plupart des utilitaires légers ne sont utilisés que dans les zones urbaines (16). Les concurrents ont indiqué que les poids lourds doivent, en revanche, pouvoir disposer de centres de service après-vente sur tout le territoire d'un pays donné et que les acheteurs de poids lourds ne seront pas tentés d'acheter les véhicules de concurrents qui ne sont présents que dans les grandes villes. Pour le marché des poids lourds, le tableau suivant tend, par conséquent, à surestimer l'étendue et la qualité des réseaux des concurrents de New Volvo.
EMPLACEMENT TABLEAU
Structure du marché au niveau des États membres - Structure actuelle et effets de l'opération envisagée
(84) Dans sa réponse, Volvo formule deux remarques générales relatives à l'analyse des effets de l'opération sur la concurrence dans les différents États membres. Premièrement, elle affirme que les clients ne se montrent pas excessivement préoccupés par l'opération de concentration envisagée. Deuxièmement, elle déclare qu'une discrimination par les prix entre gros et petits clients est impossible sur les marchés des poids lourds. Après un examen attentif de ces observations générales, la Commission est arrivée à la conclusion que les éléments factuels disponibles n'en confirmaient pas formellement le bien-fondé. Elle expose ci-dessous les raisons qui motivent cette conclusion, avant de procéder à l'analyse des résultats de l'opération dans les différents États membres.
Préoccupations des clients
(85) Pour apprécier l'argument de Volvo selon lequel les clients ne sont pas préoccupés, il est indispensable de ne pas perdre de vue que la structure de la clientèle est extrêmement fragmentée dans le secteur des poids lourds. D'après les chiffres de Volvo, la Suède compte ainsi, à elle seule, plus de 23000 propriétaires de poids lourds, dont moins de 5 % exploitent un parc comportant plus de 10 véhicules. La situation est en grande partie similaire dans d'autres États membres (de même que pour les marchés des autobus, en particulier les autocars de tourisme).
(86) Dans un marché où la structure de la demande est si morcelée, on ne peut pas s'attendre à ce que la majorité des clients soient en mesure de fournir une analyse juridique poussée du projet de concentration. Autrement dit, il n'est pas possible de considérer, comme Volvo le suggère, que tous les clients qui, pour des raisons indéterminées, n'ont pas participé activement à la procédure, ne se sentent pas concernés. En revanche, les autorités de la concurrence ont, elles, toutes les raisons d'examiner soigneusement les effets d'une opération de concentration sur un marché de ce type.
(87) Ainsi, la Commission ne peut accepter le point de vue de Volvo, qui estime que les réponses données par un échantillon limité, composé par exemple des 20 plus gros acheteurs d'un pays, suffisent pour déterminer si d'importantes préoccupations existent sur un marché donné. Cette manière de procéder ne manquerait pas de soulever la question de savoir dans quelle mesure l'opinion de ces acheteurs est représentative des effets de l'opération sur les petits clients. Les propres documents de Volvo montrent qu'une discrimination par les prix s'exerce sur ces marchés.
(88) Or, même en se fondant sur un échantillon limité, la Commission estime que dans les pays cités ci-dessous, les clients ont toutes les raisons d'être préoccupés. À cet égard, il convient de souligner que ce qu'il importe de connaître, ce n'est pas, comme le soutient Volvo, le nombre des "plaintes" qui ont été déposées. En revanche, il faut procéder à une analyse qualitative des réponses fournies. Dans ce contexte, il va sans dire qu'une autorité de la concurrence a toutes les raisons d'être préoccupée lorsque, comme c'est le cas dans la présente affaire, une proportion qui n'est pas insignifiante des plus gros clients indique, entre autres, que les parties domineront le marché, que Scania constitue la seule solution de remplacement à Volvo, que les autres marques ne sont pas en mesure de répondre à leurs exigences techniques et disposent de réseaux de service après-vente insuffisants, et qu'ils devront donc accepter une hausse de prix de 5 à 10 % (17). Même en admettant qu'un certain nombre de clients n'ont pas exprimé d'inquiétudes sur l'opération de concentration envisagée, la Commission ne saurait par conséquent accepter l'argument de Volvo sur l'absence de préoccupations.
(89) Cet argument s'applique également aux 12 enquêtes menées par GfK pour le compte de Volvo aux fins de sa réponse (ci-après dénommées "les enquêtes GfK"). Ces enquêtes ont été réalisées par téléphone auprès d'un échantillon de "gros" clients dans les quatre pays nordiques, au Royaume-Uni, en Irlande, en Belgique et au Portugal. Dans chaque pays nordique, une enquête complémentaire a été effectuée auprès des "petits" clients. La Commission ne peut pas accepter, pour deux raisons, l'affirmation de Volvo selon laquelle ces enquêtes mettraient en évidence l'absence de préoccupations. Premièrement, d'un point de vue méthodologique, la manière dont les questions ont été formulées soulève un certain nombre d'interrogations (ainsi, il n'a pas été demandé aux clients quelle serait leur réaction si Volvo comme Scania décidaient d'augmenter leurs prix a l'issue de l'opération de concentration). Ces points d'interrogation méthodologiques réduisent forcément la force probante de l'enquête de GfK.
(90) Deuxièmement, même en supposant qu'une réponse satisfaisante puisse être trouvée aux interrogations susmentionnées, il est difficile d'admettre l'argument de Volvo selon lequel les enquêtes de GfK feraient apparaître que l'opération de concentration envisagée ne suscite pas de préoccupations du point de vue de la concurrence. Dans le cadre de ces enquêtes, on a notamment demandé au client s'il changerait de fournisseur au cas où Volvo ou Scania relèveraient leurs prix de 5 %. Alors que le résultat indiqué pour chaque enquête montre que certains clients passeraient à un autre fournisseur (moins de la moitié dans chaque cas), il est peu vraisemblable que la nouvelle entité ("New Volvo") décide d'imposer une hausse de prix générale. De fait, les renseignements fournis par Volvo montrent que sa stratégie consiste à fixer des prix différents selon les transactions et que d'importants écarts de prix existent d'un client à l'autre. Tout porte à croire également que Volvo est en mesure d'opérer une discrimination par les prix entre petits et gros clients. De même, il est frappant de constater que, d'après les enquêtes, lorsqu'ils sont interrogés sur l'identité du nouveau fournisseur auquel ils s'adresseraient, les clients répondent le plus souvent Volvo et Scania. Il apparaît donc que, en indiquant qu'elles changeraient probablement de fournisseur en réaction à une augmentation de prix de 5 %, les personnes interrogées ont eu toutes les raisons de supposer qu'une fois réalisée, l'opération de concentration ne modifierait en rien la possibilité qu'elles avaient, avant ladite opération, de passer de Volvo à Scania (ou inversement). Il semble par conséquent probable que la proportion, déjà peu importante, de clients ayant indiqué qu'ils changeraient probablement de fournisseur en cas d'augmentation de prix de 5 %, aurait été encore plus faible s'ils avaient reçu comme instruction de partir de l'hypothèse que leur capacité de passer de Volvo à Scania (ou inversement), une fois l' opération de concentration réalisée, dépendrait de la décision prise par Volvo en matière de marketing pour les deux marques.
Discrimination par les prix
(91) Volvo affirme dans sa réponse qu'une politique de différenciation par les prix n'aurait quasiment aucune chance d'aboutir sur le marché des poids lourds et que les risques de perdre des commandes de clients qui ne sont pas disposés à payer un prix plus élevé l'emporteraient sur les avantages potentiels d'un tel comportement. En outre, Volvo a présenté, lors de l'audition, les résultats d'une analyse de ses ventes aux acheteurs suédois et danois en 1998. Après divers ajustements en fonction des spécifications du véhicule et de la taille du parc, l'analyse conclut que l'écart de prix en faveur des gros clients (ceux qui achètent au moins 30 camions) est faible [0-10 %] et ne constitue pas une discrimination par les prix significative. Il convient cependant de signaler que cette analyse des ventes de Volvo à ses clients suédois et danois en 1998 ne contient aucune référence aux marges qu'elle pratique envers les différents groupes de clients. Comme elle l'a déjà mentionné dans la section ci-dessus relative aux marchés géographiques en cause, Volvo estime qu'il y a discrimination par les prix lorsque le fournisseur perçoit des marges différentes pour la vente d'un même produit à des clients différents.
(92) On constate, par ailleurs, que l'affirmation de Volvo sur l'absence de discrimination par les prix contredit fortement ses propres documents internes transmis à la Commission au cours de la procédure. Elle a communiqué, à la demande de cette dernière, des renseignements sur ses prix, ses bénéfices et ses marges concernant les ventes du camion [modèle courant], dans trois motorisations différentes, à des petits, moyens et gros acheteurs (18). En ce qui concerne le type de moteur le plus couramment vendu ([...]), ces données montrent que le client de petite taille le paiera [20-30 %] de plus que le gros client ou [0-10 %] de plus que le client de taille moyenne. Il apparaît, ce qui est encore plus significatif, que la marge bénéficiaire de Volvo sur les ventes de ce modèle au petit client est de [10-20 %] tandis qu'elle s'élève à [0-10 %] et [10-20 %] respectivement pour les clients de taille moyenne et de grande taille. On voit donc qu'un écart de prix relativement modeste tel que celui de [0-10 %] entre un petit client et un client moyen, se traduit par une différence de [30-40nbsp; %] au niveau de la marge bénéficiaire réalisée. Parallèlement, la marge bénéficiaire perçue sur le petit client est [0-10] fois plus élevée que celle obtenue pour les gros clients (le rapport est de [0-10] en ce qui concerne la différence de marge entre les clients de taille moyenne et les gros clients).
(93) La conclusion s'impose, au vu de ce qui précède, que ce document interne préexistant de Volvo laisse fortement supposer que la société a pu, effectivement, pratiquer une discrimination par les prix selon les groupes de clients, et que cet élément de preuve doit prendre le pas sur les arguments susmentionnés développés aux fins de la réponse et de l'audition.
Appréciation au niveau des États membres
(94) La position prépondérante occupée par Volvo et Scania sur les marchés dans les pays nordiques et en Irlande est analysée ci-dessous pays par pays.
Suède
Structure actuelle du marché
Parts de marché
(95) Le tableau suivant présente, sous une forme résumée, la structure actuelle du marché suédois des poids lourds:
EMPLACEMENT TABLEAU
(96) Le tableau figurant au considérant 95 montre que les seuls concurrents importants sur le marché suédois sont pour le moment Volvo et Scania. Les deux entreprises occupent une position sept fois plus importante que leur concurrent le plus proche, DaimlerChrysler. Aucun des autres constructeurs n'est actif sur le marché suédois, ou alors dans une proportion tout à fait négligeable.
(97) En outre, comme le prouvent également les graphiques présentés au considérant 82, Volvo et Scania sont en concurrence directe l'une avec l'autre. Ceci est attesté par le fait que toute fluctuation de la part de marché de l'une des deux entreprises correspond immédiatement chez l'autre à une fluctuation en sens inverse.
Marque
(98) Volvo et Scania sont toutes deux des marques suédoises bien cotées. Leur force réside dans l'image de produits de grande qualité, disposant de réseaux de service après-vente efficaces et très étendus. D'après les documents de référence transmis par Volvo, les deux parties présentent la valeur de revente de leurs véhicules comme une composante de la réputation de leur marque. L'ensemble de ces éléments font d'elles "les marques" de référence dans tous les pays nordiques, notamment en Suède. Selon l'étude de marché réalisée par la Commission, la demande dans le secteur des poids lourds est très inélastique, au sens où le prix d'achat ne constitue qu'un des facteurs qui déterminent le choix d'un certain type de poids lourd. En effet, les acheteurs de poids lourds prennent généralement en considération le coût global du véhicule, c'est-à-dire le prix d'achat initial, le financement, le réseau de service après-vente, les garanties et la valeur de revente (y compris la "reprise" des poids lourds d'occasion). Comme le montrent sans ambiguïté les chiffres de parts de marché, seules Volvo et Scania ont jusqu'à présent été capables d'offrir un ensemble suffisamment performant, où tous ces éléments sont bien équilibrés.
(99) Les renseignements dont dispose la Commission en matière de prix confirment également cette analyse; en Suède en effet, les parties vendent leurs poids lourds à des prix systématiquement plus élevés que ceux pratiqués, pour des modèles équivalents, par leurs concurrents potentiels. Ceci prouve que, d'une manière générale, le prix initialement payé pour le véhicule ne sera pas le seul critère pris en compte par l'acheteur de poids lourds en Suède; celui-ci examinera plusieurs autres éléments, à savoir la qualité du produit, le réseau de service après-vente et la valeur de revente, ce qui compensera la différence de prix initiale.
(100) Au fil des années, Volvo et Scania ont ainsi fait naître une fidélité par rapport à leurs marques respectives dans tous les pays nordiques, notamment en Suède. Sur ce marché, la fidélité à la marque signifie que les participants au marché considèrent que Volvo et Scania fournissent depuis longtemps des produits d'un niveau de qualité élevé, un bon service à la clientèle et une valeur de revente élevée et que cette réputation incite les clients à continuer d'acheter ces marques. Cette fidélité se manifeste à deux niveaux au moins, celui de l'acheteur final, l'opérateur de poids lourds, et celui du concessionnaire.
Fidélité à la marque - Réseau de service après-vente
(101) À en juger par l'étude de marché, il est essentiel, pour tout constructeur de poids lourds désireux de prendre pied sur un marché, de disposer d'un réseau de service après-vente étendu et efficace. Volvo et Scania disposent toutes deux d'un réseau de concessionnaires et de centres de service après-vente étendu en Suède, celui-ci fonctionne pour l'essentiel sur la base de contrats d'exclusivité. La puissance d'un réseau dépend de sa densité, de la capacité technique d'un concessionnaire/centre de service après-vente donné à répondre aux besoins d'un opérateur de poids lourds, et des contacts existants entre ces deux parties. Ce dernier élément se traduit lui-même, après plusieurs années, par l'établissement d'une relation de confiance entre le concessionnaire/centre de service après-vente et le transporteur. Ce rapport de confiance contribue à la réputation de la marque, et sa valeur cumulée est importante (le fait qu'une part non négligeable du prix que Volvo a offert de payer pour Scania est liée à la notoriété en est la preuve).
(102) L'enquête indique que les concessionnaires/centres de service après-vente en Suède sont en général fidèles à Volvo et à Scania, et hésiteront donc à changer de fournisseur. Eu égard, en particulier, à l'importance du parc de véhicules Volvo et Scania, ces deux constructeurs sont capables d'assurer aux concessionnaires/centres de service après-vente un retour sur investissement plus intéressant et mieux garanti.
Fidélité à la marque - Client final
(103) L'étude de marché fait aussi apparaître que les acheteurs finals de poids lourds sont souvent fidèles aux marques nationales, Volvo et Scania, pour les mêmes raisons, essentiellement, que celles déjà mentionnées ci-dessus: ces deux constructeurs peuvent proposer aux clients la meilleure solution au niveau du coût sur toute la durée de vie d'un véhicule. De plus, en Europe du Nord et dans les pays nordiques en particulier, Volvo et Scania sont perçues comme étant les mieux placées pour fournir un produit répondant aux besoins de transport spécifiques des clients. À cet égard, des facteurs tels que la bonne adaptation aux conditions climatiques et routières et la satisfaction de toutes les exigences techniques, y compris de celles imposées par la législation nationale, ont été mentionnés. Il convient de souligner, et cet élément sera précisé ci-dessous, que contrairement à ce qu'affirme Volvo, les acheteurs suédois de poids lourds ne sont pas, dans leur grande majorité, des clients dont le parc comporte un grand nombre de camions, mais des exploitants qui en possèdent un ou deux. Cette catégorie de clients sera généralement plus sensible à des considérations de fidélité à la marque que ceux qui disposent d'une flotte importante.
(104) Dans sa réponse, Volvo conteste la conclusion selon laquelle les conditions routières et climatiques des pays nordiques constituent une barrière à l'entrée substantielle. Volvo se réfère, à cet égard, à un magazine britannique spécialisé qui a désigné un camion MAN comme le meilleur véhicule (devant Volvo et Scania) lors d'un essai de camions de différents constructeurs dans des conditions arctiques. Il est à noter que cet essai était organisé par des magazines scandinaves et que Volvo n'a pas communiqué l'évaluation faite par les autres magazines qui ont participé au test. Il convient, en outre, de noter que le comportement et les préférences des acheteurs peuvent se fonder sur la qualité perçue d'un produit.
Effets de l'opération envisagée sur le marché suédois des poids lourds
Parts de marché - Structure du marché
(105) Le projet d'acquisition de Scania par Volvo donnerait naissance à une nouvelle société Volvo ("New Volvo"), dont la part de marché cumulée s'élèverait à 90,8 % en Suède, suivant les chiffres de 1998. Le concurrent le plus direct de New Volvo serait DaimlerChrysler, avec une part de marché de 6,2 %. Les autres constructeurs européens de poids lourds sont quasiment absents de ce marché (Paccar/DAF: 1,9 %, RVI: 0,8 %, Iveco: 0,2 %, MAN: ne réalise aucune vente).
(106) L'opération envisagée entraîne par conséquent un chevauchement d'activités important entre les parties. De surcroît, elle aurait pour effet d'accroître sensiblement l'écart de part de marché entre New Volvo et son concurrent immédiat dans chacun des pays nordiques, et en particulier en Suède. Dans ce pays, la part de marché du concurrent restant le plus proche (DaimlerChrysler) était, avant l'opération de concentration, sept fois et demie moins importante environ que celle du leader du marché. Une fois l'opération de concentration réalisée, elle serait de quatorze fois et demie inférieure à celle de la nouvelle entité.
(107) Par ailleurs, les données transmises par Volvo (corroborées de surcroît par les graphiques présentés au considèrant 82), ainsi que l'enquête de la Commission, montrent que Volvo et Scania étaient, avant l'opération de concentration envisagée, les principaux concurrents l'un de l'autre. Cette concurrence disparaîtrait si cette opération était réalisée et l'avance de New Volvo sur ses autres concurrents s'accentuerait sensiblement.
(108) Le fait que la position très puissante de chacune des parties à l'opération de concentration n'est pas un phénomène récent et ne découle pas de fortes fluctuations de parts de marché aggrave encore cette situation. Il est, par conséquent, peu probable que les autres constructeurs de poids lourds exerceront une pression concurrentielle importante sur les parties. En effet, l'évaluation des parts de marché respectives des parties en Suède, illustrée par les graphiques figurant au considérant 82, montre que les positions de Volvo et de Scania sont restées relativement stables sur l'ensemble d'une très longue période (dix ans), ce qui, d'ailleurs, a été confirmé par l'étude de marché.
Fidélité du concessionnaire et du client
(109) New Volvo sera en mesure d'intervenir sur un marché, celui des poids lourds en Suède, où elle bénéficiera d'avantages spécifiques. Elle tirera parti, en premier lieu, d'une fidélité de longue date des concessionnaires et des clients. L'étude de marché a révélé que les concurrents de Volvo et de Scania trouvaient très difficilement des concessionnaires/centres de service après-vente efficaces et fiables dans cette région. Ces problèmes sont surtout dus au fait que ces concessionnaires/centres de service après-vente sont en règle générale liés à leurs fournisseurs nationaux, qui peuvent offrir le volume d'affaires le plus élevé et, partant, le meilleur retour sur investissement pour le concessionnaire.
Structure de la clientèle
(110) Par ailleurs, les acheteurs de poids lourds en Suède composent une clientèle structurée de manière telle que la nouvelle entité sera en mesure de tirer parti de leur fidélité et, par conséquent, de relever ses prix. En outre, en ce qui concerne Volvo, ses cinq principaux acheteurs en Suède n'absorbent que [0-10 %] de ses ventes totales dans ce pays. Chez Scania, la situation est similaire. Si l'on considère l'entité issue de l'opération de concentration, la part que représenteraient les ventes à ses cinq plus gros clients serait même plus faible.
(111) Cette conclusion se trouve confirmée par les propres estimations de Volvo (voir page 5 du document du 25 novembre 1999) concernant ses ventes d'un modèle donné de poids lourd ([...]) couramment vendu en Suède - voir ci-dessus. Ces données montrent que, en Suède, [80-90 %] des ventes de poids lourds de ce type portent sur un seul véhicule. Volvo a signalé que ce chiffre donnait une indication utile sur la taille des flottes en question.
(112) De plus, selon un tableau fourni par Volvo dans une télécopie du 13 décembre 1999, sur un parc suédois totalisant plus de 61 000 poids lourds, [20-30 %] sont détenus par une personne ou une entreprise qui ne possède qu'un seul camion, et [40-50 %] par des personnes ou des entreprises qui ont entre 2 et 10 véhicules. La flotte suédoise de poids lourds est donc en grande majorité [60-70 %] détenue par de très petits exploitants. D'après cette même source, sur un total supérieur à 23 000 propriétaires suédois de poids lourds, seuls [10-20], ont des parcs de plus de 100 véhicules, et [50-60] seulement possèdent entre 51 et 100 camions.
Structure de la clientèle et diversification des sources d'approvisionnement
(113) Volvo affirme que dans les pays nordiques (et ailleurs), sa clientèle poids lourds est composée, pour une part importante, d'acheteurs professionnels avertis qui poursuivent une politique de diversification des marques. Selon elle, ces clients mettent en œuvre une stratégie de diversification de leurs sources d'approvisionnement (achat de véhicules de deux marques différentes, ou davantage), de manière à ne pas dépendre d'un seul constructeur de poids lourds.
(114) D'après les informations fournies par Volvo dans le tableau mentionné au considérant 112, on dénombre en Suède [ >30 000] poids lourds appartenant à des flottes mixtes, dont [ >14 000] sont des camions Volvo. En d'autres termes, 50 % de tous les poids lourds suédois font partie de flottes mixtes et près de la moitié d'entre eux sont des Volvo. Il convient cependant de noter que, pour Volvo, une flotte est mixte, quel que soit le degré de diversification et que, selon cette définition, un parc comprenant, par exemple, 50 Volvo et 1 Scania, est une flotte mixte. De surcroît, il n'est pas garanti que, sur la base de cette définition, et considérant que les poids lourds sont des biens durables, la prédominance des flottes mixtes permette de prévoir valablement l'évolution future du marché ou la réaction de clients qui poursuivent en permanence une stratégie d'approvisionnement diversifiée. D'autre part, le nombre de propriétaires de poids lourds en Suède dépasse au total 23 000, dont seulement [< 5 000], soit moins de 18 %, exploitent une flotte mixte. Autrement dit, plus de 80 % de tous les propriétaires suédois de poids lourds exploitent une flotte qui ne comporte pas plus d'une marque. Dans ces conditions, le poids des arguments liés à la diversification de l'approvisionnement ne doit pas être surestimé.
(115) En outre, l'étude de marché a montré que les exploitants de poids lourds, notamment les petits opérateurs, ont fortement intérêt, d'un point de vue économique, à limiter leur parc à une seule marque. En effet, ce type de stratégie permet alors de diminuer les coûts d'entretien et de formation du personnel (des chauffeurs essentiellement).
Structure de la clientèle et érosion des parts de marché
(116) Dans le cas d'opérations de concentration qui donnent lieu à des chevauchements horizontaux sur des marchés industriels où l'approvisionnement est quelque peu diversifié, les parties présentent souvent des calculs qui font apparaître que le départ de certains clients chez un autre fournisseur entraînera pour elles une certaine perte de parts de marché. Il n'est pas rare que ces calculs soient en partie motivés par le fait que la direction veut se montrer prudente par rapport à ses actionnaires. Ces calculs ressemblent donc fréquemment davantage à des scénarios envisageant le pire qu'à de véritables prévisions. La Commission doit par conséquent examiner attentivement les hypothèses qui les sous-tendent ainsi que la probabilité que les pertes se produisent réellement. Ces pertes ne seront prises en compte dans l'appréciation sous l'angle de la concurrence que si cet examen montre que l'on peut prédire avec certitude qu'une opération de concentration donnée entraînera des pertes de parts de marché qui modifieront sensiblement la situation de la concurrence. En l'espèce, Volvo n'a pas, pour les raisons exposées ci-dessous, été en mesure d'étayer suffisamment ses affirmations selon lesquelles l'entité issue de l'opération de concentration subirait des pertes telles, au niveau de ses ventes, que la situation concurrentielle s'en trouverait modifiée sur les marchés en cause.
(117) D'après Volvo, l'opération envisagée aura inévitablement un effet d'érosion de ses parts de marché, c'est-à-dire que les clients actuels de Volvo et de Scania se tourneront vers d'autres marques de poids lourds. À l'appui de cette thèse, Volvo a présenté à la Commission les résultats définitifs d'une étude menée pour son propre compte par JP Morgan. Celle-ci montre que l'opération envisagée entraînerait une perte de clients correspondant, en pourcentages de parts de marché, à [10-20 %] en Suède et en Finlande, et à [10-20 %] au Danemark et en Norvège. Cette affirmation appelle les remarques suivantes.
(118) Volvo estime que les rapports financiers susmentionnés préparés par des analystes boursiers aux fins de l'appréciation de l'opération envisagée constituent la meilleure source permettant d'évaluer la vraisemblance d'une diminution de parts de marché, une fois l'opération de concentration réalisée. Toutefois, il faudrait peut-être aborder ces rapports avec une certaine prudence. Premièrement, ils n'ont manifestement pas été rédigés dans le but d'apprécier les effets de l'opération envisagée sur la concurrence, mais d'évaluer la valeur des actions au sein des entreprises concernées, au cas où l'opération de concentration serait autorisée. Il n'est donc pas exclu que les analystes se montrent trop prudents ou trop optimistes dans leur présentation, afin de cadrer avec la recommandation à long ou à court terme qu'ils souhaitent formuler. De fait, Volvo indique, dans un document du 21 octobre 1999, que "si la détermination de la valeur de l'acquisition se révélait trop optimiste en raison d'une exagération des gains ou d'une sous-estimation des pertes, ceci pourrait avoir de graves conséquences négatives pour Volvo, car les marchés des capitaux vendraient les actions de Volvo et diminueraient ainsi la valeur totale de la société". Deuxièmement, lorsqu'ils présentent leurs recommandations, les analystes ne sont pas tenus d'adopter systématiquement une méthode donnée, telle que celle imposée par le règlement sur les concentrations, qui requiert pour chaque marché en cause une appréciation distincte. Troisièmement, Volvo a signalé que les rapports financiers dont il est fait mention n'étaient fondés que sur des informations qu'elle a elle-même fournies.
(119) Volvo a indiqué qu'un certain nombre d'analystes autres que JP Morgan avaient pris position sur la question d'une perte de parts de marché cumulée, et plusieurs d'entre eux auraient confirmé le point de vue de JP Morgan. On constate cependant que ces prévisions ont toutes été faites au moment de l'annonce de l'opération et, en tout état de cause, avant la date de notification à la Commission. Il n'est pas impossible que la plupart de ces rapports initiaux se soient basés sur les mêmes documents que ceux transmis par Volvo à JP Morgan. En outre, les pertes de parts de marché mentionnées dans ces rapports ne sont souvent pas des estimations au sens propre, mais des scénarios utilisés pour quantifier le risque de diminution du prix de l'action de New Volvo après l'acquisition.
(120) Dans sa réponse, Volvo se fonde sur certaines de ces estimations de pertes de parts de marché. Plusieurs d'entre elles sont si élevées qu'elles ne sauraient, de toute évidence, viser ce que Volvo qualifie d'érosion des parts de marché. Par exemple, Volvo indique que Handelsbanken Markets prévoit qu'à long terme Volvo/Scania détiendra une part de marché de 46 % en Suède, ce qui sous-entend une perte de part de marché de 45 %, égale à l'augmentation totale de cette part de marché. D'après Volvo, Den Danske Bank (8 août 1999) et Enskilda Securities (9 août 1999) chiffrent toutes deux cette perte à long terme à 31,5 %. Dans ce cas également, ce pourcentage est si important qu'il ne peut manifestement correspondre à ce que Volvo nomme une érosion des parts de marché.
(121) Néanmoins, il est utile d'examiner les deux dernières projections réalisées par d'autres analystes (Salomon Smith Barney, Londres, 4 octobre 1999, et Alfred Berg ABN Amro, 6 octobre 1999) sur l'éventuelle érosion de parts de marché. La plus récente, en particulier, a manifestement été réalisée après un examen attentif des prévisions contenues dans tous les rapports antérieurs. Ces derniers rapports sont beaucoup plus prudents en ce qui concerne la perte de parts de marché que ceux remis précédemment par d'autres analystes.
(122) Alfred Berg Research (ABN Amro), par exemple, signale dans son rapport du 6 octobre 1999: "À court terme, des incertitudes sur l'autorisation, par l'Union européenne, de la transaction avec Scania, et les synergies qui en découleront, pourraient contenir la valeur de l'action, mais nous sommes convaincus que Volvo a de bonnes chances de mettre en œuvre des synergies et de défendre ses parts de marché". Cet analyste ajoute: "D'après nos recherches et les discussions que nous avons eues avec les clients, nous pensons que, globalement, le risque lié à la part de marché en Europe occidentale pourrait être plus limité que beaucoup ne semblent le craindre". D'après Alfred Berg, globalement, ces pertes se situeraient, dans cette région, entre 0 et 3 %, selon les scénarios.
(123) Étant donné ces lacunes, et afin d'apprécier la vraisemblance de "l'érosion" prévue des parts de marché, la Commission a pris contact avec plusieurs gros clients pour évaluer l'incidence que devrait avoir à l'avenir l'opération de concentration envisagée sur leurs décisions d'achat. En outre, l'autorité suédoise de la concurrence a procédé, pour le compte de la Commission, à une enquête analogue auprès des clients de petite taille en Suède. Ces enquêtes montrent que la stratégie de Volvo, qui a toujours annoncé publiquement qu'elle avait l'intention de conserver des structures et des marques distinctes pour Volvo et Scania, semble avoir été relativement payante. Un grand nombre de clients ont signalé le fait que les deux unités resteraient séparées et que l'opération de concentration envisagée n'influerait pas obligatoirement de manière importante sur leurs décisions d'achat futures.
(124) En vue d'apprécier les effets de la décision prise par Volvo de conserver des marques et des services de marketing séparés, le rapport d'Alfred Berg établit également des comparaisons avec des opérations de concentration précédentes, où une décision similaire avait été prise. Les deux opérations examinées sont les suivantes: 1. Iveco-Pegaso, et 2. Freightliner-Ford (Sterling). La référence à ces affaires antérieures est justifiée, car Volvo se fonde aussi sur l'expérience de Frightliner pour évaluer la probabilité d'une perte de parts de marché.
Iveco - Pegaso
(125) Au moment où Iveco a acheté Pegaso en 1990, leur part de marché cumulée s'élevait à 14 %; l'an dernier elle était tombée à 10 %. Selon le rapport: "Une différence fondamentale (avec l'opération actuelle) réside, à notre avis, dans la puissance de ces marques par rapport à Volvo et à Scania. La fusion de deux marques peu connues comme Pegaso et Iveco ne donne pas forcément naissance à un acteur de premier plan". Cette comparaison ne semble donc pas judicieuse.
Freightliner - Ford (Sterling)
(126) Le rapport Alfred Berg indique: "Lorsque Freightliner a annoncé son acquisition de l'activité poids lourds de Ford en janvier 1997, Ford perdait déjà des parts de marché depuis de nombreuses années. Les parts de marché ont diminué entre le moment où le nom et les produits Ford ont disparu et celui où les nouveaux produits Sterling ont été commercialisés, c'est-à-dire un an plus tard, mais elles ont recommencé à s'accroître moins d'un an après l'arrivée des produits Sterling sur le marché. Nous estimons que cette affaire est très peu comparable à celle de Volvo/Scania, car il s'agit, en l'espèce, de deux marques solides et aucune d'elles ne sera abandonnée".
(127) Enfin, il est intéressant de signaler que les recherches réalisées dans le cadre de l'étude économétrique viennent encore confirmer les conclusions auxquelles la Commission est parvenue à la suite, entre autres, de l'enquête menée auprès des clients. Alfred Berg précise: "Il est évident que ce sont les déclarations des clients qui seront déterminantes pour le succès d'une stratégie de marque parallèle. Nous avons interrogé plusieurs des principaux transporteurs routiers européens pour connaître leurs premières réactions à l'opération de concentration envisagée. À en juger par les entretiens avec les directeurs des achats chez les petits, moyens et gros transporteurs, il semble peu probable que les parts de marché chutent de manière spectaculaire à court et à moyen termes, étant donné que les entreprises conserveront des circuits distincts et que rien ne changera au niveau de la direction". Cette conclusion se base pour l'essentiel sur les éléments suivants: a) offrir des circuits de distribution séparés est une solution crédible ("Les transporteurs semblent pour la plupart penser que, tant que les réseaux de concessionnaires seront distincts, ils continueront à considérer, dans tout appel d'offres, les offres de Volvo et de Scania comme distinctes"); b) la présence de réseaux de service après-vente diminue le risque à court terme ("L'importance des réseaux de service après-vente réduit le risque d'une chute spectaculaire des parts de marché cumulées à court terme, puisque ceux des concurrents, notamment dans les pays nordiques, sont relativement faibles"); c) les concurrents ne se livrent pas à une réelle offensive ("L'objectif des concurrents est naturellement de faire progresser leur position aux dépens de Volvo et de Scania. Parmi les transporteurs auxquels nous avons parlé, aucun n'a pour l'instant remarqué d'intensification de la stratégie de marketing de la part de l'un quelconque des concurrents").
(128) Dans sa réponse, Volvo affirme que les résultats des enquêtes de GfK confirment sa propre analyse sur l'érosion des parts de marché. On y lit, par exemple, que, en Suède 15 % des 20 plus gros clients de Volvo et de Scania indiquent qu'une opération de concentration les fera "de toute façon" passer à un concurrent. Ce pourcentage s'élève à 9 % dans le cas des petits clients. Néanmoins, il n'y a pas lieu de croire que ces clients supprimeraient totalement Volvo et Scania de leurs parcs. Ainsi, même dans le cas où 15 % des gros clients feraient appel à un nouveau fournisseur, la perte de part de marché consécutive ne serait pas de 15 % dans cette catégorie de clients. Si, par exemple, les clients s'adressaient à des fournisseurs concurrents pour remplacer la moitié des poids lourds Volvo et Scania qui composaient précédemment leur flotte, la perte de parts de marché ne serait que de 7,5 % parmi les gros clients. De même, cette perte ne s'élèverait qu'à 4,5 % en ce qui concerne les petits clients. Ceci montre à l'évidence que, selon les enquêtes de GfK, l'hypothèse d'une érosion de parts de marché de 15 % en Suède n'est pas réaliste, notamment si l'on tient compte du nombre respectif des petits et des gros clients. Des calculs similaires peuvent être effectués pour les autres pays nordiques et le Royaume-Uni, où des enquêtes de ce type ont été menées. La conclusion qui s'impose est donc que l'enquête de GfK ne corrobore pas l'affirmation de Volvo concernant une érosion des parts de marché de [10-20 %] en Suède et en Norvège, et de [10-20 %] au Danemark et en Finlande.
(129) Volvo prétend également que les observations faites dans le cadre de l'opération de concentration Mercedes-Benz/Kässbohrer (19) confirment le résultat de ses calculs sur l'importance de l'érosion des parts de marché dans les pays nordiques. Après l'audition, Volvo a présenté des données attestant que, à l'issue de l'opération de concentration Mercedes-Benz/Kässbohrer, celle-ci avait enregistré, en l'espace de quatre ans, une érosion de ses parts de marché de 3 % pour les autobus interurbains et de 5 % pour les autocars de tourisme. Premièrement, ces chiffres ne sauraient prouver en eux-mêmes l'exactitude des affirmations de Volvo sur l'ampleur de l'éventuelle érosion des parts de marché en ce qui concerne les poids lourds dans les pays nordiques. Deuxièmement, contrairement à ce que prétend en l'espèce Volvo, il n'est pas certain que des effets qui ne se matérialisent qu'après quatre ans puissent être qualifiés d'"immédiats". En outre, il va de soi que l'érosion éventuelle des parts de marché doit être analysée au regard de la situation propre des marchés en question: dans ce contexte, il est bon de relever que l'opération de concentration Mercedes-Benz/Kässbohrer concernait les marchés allemands, beaucoup plus étendus et, partant, potentiellement plus intéressants pour de nouveaux venus qu'aucun des marchés nordiques et que, même après la réalisation de cette opération, il restait sur le marché deux fournisseurs allemands indépendants d'autobus et d'autocars (MAN et Neoplan), alors que ce ne serait pas le cas dans les pays nordiques.
(130) Enfin, Volvo présente dans sa réponse un chiffre intitulé "Effect of Merger Activities, Daf & Leyland, UK - impact on heavy duty market shares in home markets" (Conséquences d'une opération de concentration, Daf & Leyland, Royaume-Uni - incidence sur les parts de marché, au niveau national, dans le secteur des poids lourds) et fait valoir que celui-ci démontre qu'une érosion de ces parts s'est produite après l'acquisition de Leyland par DAF en 1985, c'est-à-dire une fois l'opération de concentration réalisée. En réalité, on ne voit pas bien comment interpréter l'évolution des parts de marché, sur une période aussi longue, par rapport à l'effet d'érosion. Avant de tirer des conclusions, quelles qu'elles soient, il faudrait en particulier analyser en détail la situation du marché au moment de l'opération de concentration, y compris le niveau de diversification de l'approvisionnement, l'évolution antérieure des parts de marché, etc. Volvo n'a transmis aucune information de ce type dans sa réponse. Enfin, il est surprenant que Volvo ait décidé de ne pas communiquer de précisions sur l'évolution de ses propres parts de marché dans le secteur des autobus au Royaume-Uni et en Irlande, après qu'elle eut acquis les bus Leyland (opération qui a eu lieu à peu près au même moment que l'acquisition, par DAF, de la division "camions" de Leyland). Volvo dispose probablement de renseignements détaillés sur une éventuelle érosion importante de ses parts de marché consécutive à cette opération.
(131) En conclusion, Volvo n'a pas été en mesure de prouver le bien-fondé de ses affirmations selon lesquelles cette opération de concentration aurait pour effet immédiat une importante perte de parts de marché. Bien qu'elle admette qu'une certaine érosion de parts de marché puisse se produire, la Commission considère que celle-ci pourrait être beaucoup plus faible que Volvo ne le prétend et, en tout état de cause, que le constructeur suédois n'a pas démontré que ses effets seraient de nature à modifier l'appréciation sous l'angle de la concurrence.
Barrières à l'entrée et absence de concurrence potentielle
(132) Ainsi qu'il ressort de ce qui précède, Volvo et Scania n'ont quasiment aucun concurrent en Suède, à l'exception de DaimlerChrysler, dont la position sur le marché est très faible (6 % environ). Cette structure de marché est peu ou prou identique depuis de très nombreuses années. La Commission estime, pour les raisons suivantes, que les autres constructeurs de camions n'exerceront pas de pression concurrentielle sur New Volvo en Suède.
(133) En particulier, si l'on admet l'hypothèse selon laquelle New Volvo augmenterait les prix de ses camions d'un montant modique mais significatif, cette hausse ne serait pas suffisante, étant donné les éléments d'appréciation ci-dessous, pour que les entreprises absentes du marché suédois, ou y étant très peu actives, pénètrent d'une manière significative sur ce marché ou renforcent leur implantation.
(134) Les résultats de l'étude de marché montrent que le test "de résistance des cabines" (décrit à la section relative au marché géographique) constitue un obstacle important à l'accès au marché suédois des poids lourds. En outre, cette étude permet de penser que, pour devenir véritablement compétitif, il est essentiel que tout constructeur de camions soit solidement implanté au niveau du service après-vente et que le fait de disposer d'un réseau de service après-vente étendu en Suède confère à Volvo et Scania un avantage supplémentaire. L'existence d'un tel réseau est un critère essentiel pour les transporteurs lorsqu'ils choisissent une marque de camions. Au cours de l'enquête, les difficultés rencontrées pour créer un réseau de service après-vente géographiquement bien réparti ont été citées comme une des raisons principales de l'accès au marché très limité pour les producteurs étrangers. Une panne, si elle ne peut être réparée immédiatement, risque fort d'entraîner directement une perte de recette pour les petits et moyens transporteurs, en particulier, qui n'auront peut-être pas de véhicule de remplacement à leur disposition.
(135) En outre, l'étude de marché fait apparaître que l'investissement lié à la mise en place ou à l'adaptation d'un réseau de service après-vente ne peut être financièrement rentable qu'à partir du moment où le nouveau venu possède un nombre de camions dépassant un certain seuil. Pendant la période initiale, jusqu'à la constitution d'un parc suffisant, le nouveau venu pourra donc être amené à exploiter le réseau de service après-vente à perte. L'établissement d'un parc suffisant constitue par conséquent un coût d'entrée important. De ce fait, un nouvel entrant considérera comme un paramètre fondamental l'intérêt absolu du marché, c'est-à-dire le nombre de camions qu'il peut espérer vendre dans un pays donné dans un délai raisonnable.
(136) D'après les informations dont dispose la Commission, du point de vue de la durée, un nouveau venu aura besoin d'au moins cinq ans pour créer un réseau suffisamment dense. Le coût de mise en place d'un tel réseau en Suède a été évalué à environ 20 millions d'euros. Ce montant se fonde sur l'hypothèse d'un réseau comprenant au total 5 concessionnaires, 14 succursales et 92 centres de service après-vente, ce qui semble constituer pour la Suède le minimum absolument indispensable (20).
(137) La création d'un réseau de service après-vente ferait supporter d'autres coûts au nouvel arrivant qui veut pénétrer efficacement sur le marché (sans perdre de vue la nécessité d'obtenir une part minimale du marché, qui serait d'au moins 10 % dans les pays nordiques). Les principaux investissements comprendraient la formation des vendeurs et des techniciens d'atelier (1 500 000 d'euros), les véhicules de démonstration et les chauffeurs affectés à cette tâche (1 500 000 d'euros), les "véhicules prêtés" (seed vehicles) aux gros clients pour qu'ils les essaient (1 000 000 d'euros) et la publicité locale (1 000 000 d'euros).
(138) Bien que les coûts susmentionnés puissent ne pas paraître extrêmement élevés en termes absolus, les concurrents ont déclaré qu'ils n'étaient pas prêts à les consentir, à moins qu'ils puissent être avantageusement amortis. Compte tenu de la dimension économique du marché en question, il est très peu probable qu'un constructeur de camions, quel qu'il soit, décide de pénétrer sur le marché des poids lourds dans les pays nordiques, et en particulier sur le marché suédois, en faisant en sorte de pouvoir menacer sérieusement la position de New Volvo.
(139) Volvo soutient que DaimlerChrysler représenterait une source de concurrence potentielle, car cette société, quoique pratiquement absente du marché des poids lourds, est en bonne position sur celui des utilitaires moyens, en Suède en particulier, où elle détient environ 31 % de parts de marché. D'après Volvo, DaimlerChrysler pourrait facilement adapter son réseau, actuellement spécialisé dans les utilitaires moyens, aux poids lourds.
(140) Cette affirmation appelle les remarques suivantes. Premièrement, le fait que DaimlerChrysler ne soit pas parvenue, sur une très longue période, à conquérir une part de marché importante, donne en soi fortement à penser qu'il n'est pas facile de pénétrer avec succès sur ce marché, même pour une entreprise qui jouit d'une position relativement solide dans le secteur des utilitaires moyens. Les marges élevées obtenues par Volvo sur ses ventes de poids lourds en Suède viennent confirmer cette observation.
(141) En outre, l'étude de marché a révélé que, tout en étant peut-être plus facile pour un constructeur de camions présent dans une certaine mesure sur le segment des utilitaires moyens de pénétrer sur le marché des poids lourds, cette pénétration entraîne, en tout état de cause, des coûts si importants qu'ils ont un effet dissuasif suffisant sur les constructeurs désireux d'étendre leurs activités. D'après les informations recueillies sur le marché, il faudrait au minimum deux ans pour accroître les capacités d'un réseau d'utilitaires légers/moyens. La société en question devrait de surcroît supporter des coûts équivalant à 50 % des coûts susmentionnés, soit au moins 2 500 000 euros.
(142) Ces coûts doivent être confrontés à la taille totale du marché, relativement réduite pour tous les pays nordiques. En conséquence, étant donné que la création indispensable d'un réseau de concessionnaires et de centres de service après-vente étendu dans chacun des pays nordiques nécessitera beaucoup de temps et d'argent, il est peu probable qu'un des petits concurrents présents dans ces pays soit capable, à court ou à moyen terme, d'égaler les établissements actuels de Scania et, partant, de compenser la perte de concurrence réelle découlant de l'opération de concentration envisagée.
(143) L'étendue des pays nordiques conjuguée à une population clairsemée conforte la conclusion selon laquelle il existe dans ces pays des barrières non négligeables à l'entrée et/ou à l'expansion sur les marchés des poids lourds. DaimlerChrysler et les autres fournisseurs qui, à ce jour, n'ont fait que des incursions limitées sur les marchés nordiques, en se concentrant principalement sur les régions les plus densément peuplées, pourraient donc ne pas retenir ces pays parmi leurs priorités pour de futurs investissements. En effet, il semble plus vraisemblable que ces concurrents concentrent leurs efforts dans ce domaine en Europe de l'Est et sur d'autres marchés où les perspectives de croissance sont meilleures (comme, en fait, Volvo elle-même envisage de le faire). En conséquence, on ne saurait prétendre que même les clients les plus avertis, qui souhaiteraient augmenter leurs achats auprès d'autres fournisseurs, seront forcément capables de trouver celui qui pourra assurer le type de services que Scania dispensait en concurrence avec Volvo avant l'opération de concentration.
Conclusion
(144) Sur la base des éléments qui précèdent, la Commission conclut qu'il est très peu probable que la concurrence réelle ou potentielle, ou encore la puissance d'achat des clients, soit suffisante pour imposer des limites à New Volvo dans l'exercice du pouvoir de marché renforcé qui résulterait de l'acquisition de son seul concurrent important et de l'augmentation de sa part de marché (qui dépasserait 90 %).En outre, les marges de Volvo en Suède, telles qu'elles ont été communiquées par le constructeur lui-même pour trois modèles de véhicules donnés, sont élevées en valeur absolue et en valeur relative (en comparaison de celles obtenues dans certains autres États membres, notamment en dehors de la région nordique).
(145) La Commission considère, par conséquent, que l'opération envisagée entraînerait la création d'une position dominante en Suède.
Danemark
Structure actuelle du marché
Parts de marché
(146) Le tableau suivant présente, sous une forme résumée, la structure actuelle du marché danois des poids lourds:
EMPLACEMENT TABLEAU
(147) Le tableau figurant au considérant 146 montre que Volvo et Scania sont pour le moment les seuls constructeurs à occuper d'importantes positions sur le marché danois. Bien que leurs concurrents soient mieux représentés au Danemark que dans les autres pays nordiques, leur présence demeure relativement limitée. En outre, l'analyse de l'évolution, sur plusieurs années, des parts de marché des différents constructeurs de poids lourds montre que leur position respective est restée très stable.
(148) De plus, comme il a déjà été indiqué pour la Suède (la remarque vaut d'ailleurs pour tous les pays nordiques), les graphiques présentés par Volvo concernant l'évolution des parts de marché de Volvo et de Scania sur l'ensemble d'une longue période (dix ans) font apparaître une corrélation directe entre la position respective des deux sociétés sur le marché. Cette constatation laisse fortement supposer que Volvo et Scania sont actuellement, et depuis très longtemps, les principaux concurrents l'un de l'autre.
(149) La plupart des éléments factuels sur l'importance de la marque et de la fidélité à la marque, qui ont été analysés dans le cas de la Suède, s'appliquent également au Danemark.
(150) Le marché danois se distingue par les ressemblances qu'il présente avec d'autres pays d'Europe continentale, sa situation géographique, la préférence des clients pour les poids lourds de type tracteur et la proportion légèrement plus élevée des clients possédant une flotte (ce qui, dans une certaine mesure, découle du premier élément, puisque le trafic international semble relativement plus important au Danemark que dans les autres pays nordiques). Néanmoins, d'après les indications communiquées par la société Volvo elle-même, les prix sont nettement plus bas au Danemark que chez son voisin allemand (de [0-10 %] environ). Autrement dit, les possibilités offertes aux clients danois de recourir à des importations en provenance d'Allemagne seraient limitées si l'opération de concentration devait être suivie d'une hausse de prix. Il convient de souligner, par ailleurs, que le nombre de clients danois possédant une flotte reste assez restreint en comparaison des autres États membres, notamment les Pays-Bas, la France et, dans une moindre mesure, le Royaume-Uni et que l'étude de marché montre que cette catégorie de clients semble également sensible à l'annonce, par Volvo, de son intention de conserver des marques et des services de marketing séparés, ce qui donne à penser que même pour un acheteur de poids lourds relativement important, en particulier dans les pays nordiques, Volvo et Scania sont "les marques" de référence, et aussi les principaux concurrents l'un de l'autre. Beaucoup de ces clients pensent que la réunion des marques serait préjudiciable à la concurrence.
(151) La Commission constate par ailleurs que parmi ces clients danois possédant une flotte, certains ne sont pas eux-mêmes des transporteurs, mais des sociétés de location, qui louent un ou plusieurs camions, le plus souvent à de petits transporteurs. Ce type d'acheteur sera de fait tributaire, pour ce qui concerne la demande de poids lourds, des exigences des clients finals, qui sont généralement de très petits opérateurs, sensibles d'ordinaire à des considérations de marques. Au cours de l'étude de marché, il a du reste été indiqué que la commercialisation de camions Mercedes s'était révélée difficile, même moyennant des réductions de prix (5 à 15 %).
(152) En outre, Volvo a présenté des chiffres sur le pourcentage d'un modèle donné de poids lourd ([modèle courant]) vendu à l'unité dans différents États membres. Il ressort que plus de la moitié des ventes de ces camions ([50-60 %]) portaient sur un seul véhicule, ce qui montre qu'une part non négligeable du marché danois est constituée de ventes à de petits opérateurs.
Effets de l'opération envisagée sur le marché danois des poids lourds
Parts de marché - Structure du marché
(153) Le projet d'acquisition de Scania par Volvo donnerait naissance à une nouvelle société Volvo (New Volvo) qui détiendrait conjointement 60 % environ (Volvo: 28,7 %; Scania: 30,2 %) du marché danois des camions. Son concurrent direct serait DaimlerChrysler, avec une part de marché de 17,7 %, suivi de MAN (9,7 %), RVI (4,2 %), Iveco (6,8 %) et Paccar/DAF (3,8 %).
(154) À l'issue de l'opération envisagée, l'écart avec le principal concurrent restant se creuserait, passant d'un rapport de 2 pour 1 à plus de 3 pour 1. Ce projet entraînerait le regroupement des forces des deux premiers acteurs du marché danois. En outre, comme dans le cas de la Suède, l'opération envisagée déboucherait sur la disparition du concurrent immédiat de Volvo du marché danois des camions.
Fidélité à la marque
(155) Au Danemark également, Volvo et Scania ont toutes deux la réputation d'être des marques très puissantes, garantissant aux clients la meilleure solution au niveau du coût sur toute la durée de vie du véhicule et aux concessionnaires la présence de flottes existantes importantes, qui offrent à ces derniers de meilleures chances de bien rentabiliser leur investissement. L'ensemble des arguments avancés dans la présente décision concernant les effets de l'opération en Suède sont en grande partie applicables au Danemark. De même qu'en Suède, New Volvo bénéficiera, dans ce pays, d'atouts particuliers tenant à la réputation des marques, à l'adéquation des camions aux besoins des clients, à la valeur de revente et au service après-vente. Par ailleurs, les arguments développés ci-dessus concernant l'érosion supposée des parts de marché, qui résulterait de la mise en place de l'opération envisagée, valent également pour le marché danois.
Discrimination par les prix
(156) Comme il a été indiqué précédemment, en Suède, la demande de poids lourds émane très largement de petits ou de très petits transporteurs. Volvo a indiqué que le marché danois était composé, pour une part comparativement plus importante, de clients possédant une flotte, que ceux-ci sont moins réceptifs à des considérations liées uniquement à la fidélité à la marque et mieux placés pour négocier des conditions favorables avec un certain nombre de constructeurs de camions. Pourtant, la notification montre qu'au Danemark les cinq principaux acheteurs de poids lourds Volvo ne représentent pas plus de [0-10 %] des camions vendus au total par ce constructeur dans ce pays. Le poids de ces gros clients dans les ventes de l'entité issue de l'opération serait proportionnellement encore plus faible. En conséquence, très peu d'acheteurs danois de camions seront en position de force face à New Volvo, et il faut se garder de surestimer l'influence potentielle des propriétaires de flottes de poids lourds sur le comportement de la nouvelle entité. De plus, certains éléments indiquent que, même pour cette catégorie de clients (qui comprend les sociétés de location), New Volvo pourrait augmenter ses prix, sans être gênée dans sa démarche par d'autres constructeurs de camions, en raison de sa solidité au niveau, entre autres, de l'adéquation du produit, de sa valeur de revente et des services après-vente. Comme indiqué ci-dessus, la décision de Volvo de continuer une politique de double marque semble avoir eu l'effet désiré sur les clients.
(157) Toutefois, même en supposant que New Volvo ne puisse pas relever ses prix envers les plus gros clients, il est établi qu'elle serait capable d'opérer une discrimination par les prix entre les petits et les gros clients, c'est-à-dire d'augmenter les prix pour les premiers, qui risquent moins de changer de fournisseur, et d'offrir des conditions plus avantageuses aux seconds. De fait, l'étude de marché a permis d'établir que le niveau des rabais consentis par le constructeur de camions aux clients varie considérablement, en fonction, précisément, de la taille du client et de la commande qui est en jeu.
Barrières à l'entrée et concurrence potentielle
(158) Les arguments exposés ci-dessus concernant les obstacles à l'accès au marché et l'arrivée ou l'expansion peu probable d'autres constructeurs de camions valent également pour le Danemark qui, certes, constitue un marché plus étendu que chacun des autres pays nordiques, mais n'en demeure pas moins, dans l'absolu, un très petit marché en comparaison des grands États membres.
(159) S'agissant des coûts spécifiques que devrait supporter un constructeur pour pénétrer sur le marché, l'enquête révèle qu'ils s'élèveraient à 21 millions d'euros pour la création du réseau, auxquels s'ajouteraient 1 500 000 euros pour les dépenses qui s'y rattachent (formation, véhicules de démonstration, camions prêtés, publicité locale). L'adaptation d'un réseau existant pourrait coûter jusqu'à 50 % de ce montant. Bien que ces coûts puissent ne pas sembler extrêmement élevés en termes absolus, des concurrents ont déclaré ne pas être prêts à les consentir, à moins qu'ils puissent être avantageusement amortis. Les coûts doivent être considérés à la lumière de la dimension économique du marché en question.
Conclusion
(160) Sur la base des éléments qui précèdent, la Commission conclut qu'il est très peu probable que la concurrence réelle ou potentielle, ou encore la puissance d'achat des clients, soit suffisante pour imposer des limites à New Volvo dans l'exercice de son pouvoir de marché renforcé qui résulterait de l'acquisition de son seul concurrent important et de l'augmentation de sa part de marché (qui atteindrait 60 %).La Commission considère, par conséquent, que si le marché danois des poids lourds devait être considéré comme un marché géographique séparé, l'opération envisagée entraînerait la création d'une position dominante au Danemark.
Norvège
Structure actuelle du marché
Parts de marchés
(161) Le tableau suivant présente, sous une forme résumée, la structure actuelle du marché norvégien des poids lourds:
EMPLACEMENT TABLEAU
(162) Le tableau figurant au considérant 161 montre que Volvo et Scania sont pour le moment les seuls constructeurs à occuper des positions très solides sur le marché norvégien. Leur concurrent immédiat dans ce pays est MAN, dont la part de marché atteint environ un tiers de celle détenue individuellement par Volvo et Scania. En dehors de MAN, tous les autres constructeurs de poids lourds ont une part de marché nettement inférieure à 10 % et, le plus souvent, inférieure à 5 %. En outre, l'analyse, sur plusieurs années, de l'évolution des parts de marché des différents constructeurs de poids lourds, montre que leur position respective est restée, pour la totalité d'entre eux, remarquablement stable.
(163) De plus, comme il a déjà été indiqué pour la Suède et le Danemark (la remarque vaut d'ailleurs pour tous les pays nordiques), les graphiques présentés par Volvo concernant l'évolution des parts de marché de Volvo et de Scania sur une longue période (dix ans) font apparaître une corrélation directe entre la position respective des deux sociétés sur le marché. Ce constat tend fortement à indiquer que Volvo et Scania sont actuellement, et depuis très longtemps, les principaux concurrents l'un de l'autre.
(164) La plupart des éléments factuels sur l'importance primordiale de la marque et de la fidélité à la marque, qui ont été analysés dans le cas de la Suède et du Danemark, s'appliquent également à la Norvège.
Effets de l'opération envisagée sur le marché norvégien des poids lourds
Parts de marché - Structure du marché
(165) Le projet d'acquisition de Scania par Volvo donnerait naissance à une nouvelle société Volvo (New Volvo), qui détiendrait conjointement 70 % environ (Volvo: 38 %, Scania: 32,2 %) du marché norvégien des camions. Son concurrent immédiat serait MAN, avec une part de marché de 12,5 %, suivi de DaimlerChrysler (9,3 %), RVI (0,8 %), Iveco (2,0 %) et Paccar/DAF (4,1 %).
(166) À l'issue de l'opération envisagée, l'écart avec le principal concurrent restant se creuserait, passant d'un rapport de 3 pour 1 à plus de 5 pour 1. Ce projet entraînerait le regroupement des forces des deux premiers acteurs du marché norvégien. En dehors de MAN, tous les autres concurrents auraient une part de marché inférieure à 10 % et, le plus souvent, inférieure à 5 %. En outre, comme cela a été indiqué pour la Suède et le Danemark, l'opération envisagée déboucherait sur la disparition des deux concurrents les plus directs du marché norvégien des camions.
Fidélité à la marque
(167) En Norvège également, Volvo et Scania ont toutes deux la réputation d'être des marques très puissantes, garantissant aux clients la meilleure solution au niveau du coût sur toute la durée de vie du véhicule et aux concessionnaires la présence de flottes existantes importantes, qui offrent à ces derniers de meilleures chances de bien rentabiliser leur investissement. L'ensemble des arguments avancés dans la présente décision concernant les effets de l'opération en Suède sont également applicables à la Norvège. De même qu'en Suède, New Volvo bénéficiera, dans ce pays, d'atouts particuliers par rapport à tous les autres constructeurs de camions, notamment en ce qui concerne la réputation de la marque, l'adéquation des camions aux besoins des clients, la valeur de revente et le réseau de service après-vente. Par ailleurs, les arguments concernant l'érosion supposée des parts de marché qui résulterait de l'exécution de l'opération envisagée valent également pour le marché norvégien.
(168) Il a été porté à l'attention de la Commission que les camions vendus en Norvège doivent satisfaire à des normes techniques spécifiques dictées par les conditions particulières que connaît ce pays, en raison notamment de la température, du gel, de la neige et de la topographie. À cet égard, il est important de noter que Volvo et Scania sont les mieux placées, en termes d'expérience et de réputation, pour commercialiser des camions capables de répondre de manière fiable aux besoins du client final dans ces conditions.
(169) Enfin, d'après la notification, les prix des modèles Volvo les plus couramment vendus en Norvège sont sensiblement plus élevés que dans d'autres pays (en effet, ces chiffres montrent que l'entreprise a même réussi à écouler ses produits en Norvège à des prix supérieurs à ceux qu'elle pratique en Suède et au Danemark).
Discrimination par les prix
(170) Volvo indique également que le marché norvégien est composé, dans une proportion comparativement plus importante, de clients possédant une flotte. Pourtant, leur proportion est encore plus faible dans ce pays qu'au Danemark. L'effet potentiel du comportement de ces gros clients en Norvège doit donc être tenu pour relativement peu significatif. En tout état de cause, même en supposant que New Volvo ne puisse relever ses prix pour le nombre limité de clients norvégiens possédant une flotte, il est probable qu'elle sera capable d'opérer une discrimination par les prix entre les petits et les gros clients, c'est-à-dire d'augmenter les prix appliqués aux premiers, qui ne changeront pas de fournisseur, et d'offrir des conditions plus avantageuses aux seconds. De fait, l'étude de marché a permis d'établir que le niveau des rabais consentis par le constructeur de camions aux clients varie considérablement en fonction, précisément, de la taille du client et de la commande qui est en jeu.
Barrières à l'entrée et concurrence potentielle
(171) Les arguments exposés ci-dessus concernant les obstacles à l'accès au marché et l'arrivée ou l'expansion peu probable d'autres constructeurs de camions valent également pour la Norvège, qui constitue un marché encore moins important que la Suède et qui, en comparaison des grands États membres, représente un très petit marché.
(172) S'agissant des coûts spécifiques que devrait supporter un constructeur pour pénétrer sur le marché, l'étude de marché a révélé qu'ils s'élèveraient à 15,5 millions d'euros pour la création du réseau, auxquels s'ajouteraient 1 200 000 euros pour les dépenses qui s'y rattachent (formation, véhicules de démonstration, camions prêtés, publicité locale). L'adaptation d'un réseau existant pourrait coûter jusqu'à 50 % de ce montant. Bien que ces coûts puissent ne pas sembler extrêmement élevés en termes absolus, des concurrents ont déclaré ne pas être prêts à les consentir, à moins qu'ils puissent être avantageusement amortis. Les coûts doivent être considérés dans le contexte de la dimension économique du marché en question.
Conclusion
(173) Sur la base des éléments qui précèdent, la Commission conclut qu'il est très peu probable que la concurrence réelle ou potentielle, ou encore la puissance d'achat des clients, soit suffisante pour imposer des limites à New Volvo dans l'exercice de son pouvoir de marché renforcé qui résulterait de l'acquisition de son seul concurrent important et de l'augmentation de sa part de marché (portée à 70 %).La Commission considère, par conséquent, que l'opération envisagée entraînerait la création d'une position dominante en Norvège.
Finlande
Structure actuelle du marché
Parts de marché
(174) Le tableau suivant présente, sous une forme résumée, la structure actuelle du marché finlandais des poids lourds:
EMPLACEMENT TABLEAU
(175) Le tableau figurant au considérant 174 montre que les sociétés Volvo et Scania sont actuellement, de loin, les leaders du marché finlandais des poids lourds. Elles détiennent toutes deux une part de marché deux fois plus élevée environ que celle de Renault, leur concurrent immédiat, qui coopère étroitement avec la société finlandaise Sisu (il semble que les camions Sisu, vendus en Finlande uniquement, soient composés principalement de pièces fabriquées par Renault). Il conviendrait donc, pour les besoins de cette appréciation, de regrouper les activités de Renault et de Sisu. La part de marché de DaimlerChrysler, numéro un incontesté du marché des poids lourds dans l'EEE, n'atteint pas le tiers de celle de Volvo ou de Scania en Finlande. Iveco, MAN et Paccard/DAF n'y sont présentes que dans une mesure limitée.
(176) Ainsi que l'ont montré les graphiques figurant au considérant 82, Volvo et Scania ont toutes deux conservé des parts de marché élevées et relativement stables sur l'ensemble des dix dernières années. Le graphique révèle également que les deux constructeurs sont en concurrence directe l'un avec l'autre. Cela vaut particulièrement pour les cinq dernières années de la période considérée, où la courbe fait apparaître une forte corrélation négative entre les deux marques, au sens où un gain de parts de marché pour l'une des deux sociétés correspond pour l'autre à une perte. Il faut observer que la corrélation négative entre Volvo et Scania s'est manifestée plus nettement au moment où, comme il sera précisé ci-dessous, Sisu a perdu d'importantes parts de marché.
Marque
(177) Tant Volvo que Scania sont considérées comme des marques très cotées, particulièrement bien adaptées aux conditions climatiques et routières des pays nordiques. Leur point fort réside dans la grande qualité de leurs camions, leurs réseaux de service après-vente efficaces et très bien répartis sur le territoire finlandais ainsi que dans la valeur de revente élevée des véhicules. Tous ces éléments en font les deux marques les plus prisées en Finlande.
(178) L'étude de marché a confirmé l'absence d'élasticité de la demande sur le marché des poids lourds. D'une manière générale, les acheteurs de camions considèrent le coût du véhicule sur toute sa durée de vie, y compris le prix d'achat initial, le réseau de service après-vente, les garanties et la valeur de revente. Le prix n'est donc qu'un des éléments qui déterminent le choix d'un certain type de poids lourd. En Finlande, seules Volvo et Scania ainsi que, dans une certaine mesure, Renault/Sisu sont capables d'offrir un ensemble performant où tous ces éléments sont bien équilibrés. Toutefois Volvo a indiqué, dans sa réponse, que, en 1993 encore, Sisu détenait 30 % de parts de marché, dont elle a perdu près de la moitié au cours des cinq années qui ont suivi.
(179) Les renseignements dont dispose la Commission en matière de prix révèlent également que, en Finlande, les parties vendent leurs poids lourds à des prix systématiquement plus élevés que ceux pratiqués, pour des modèles comparables, par leurs concurrents potentiels. On peut donc en conclure que le prix initial du véhicule ne sera pas le seul critère pris en compte dans la décision d'achat, mais que la présence d'un certain nombre d'autres éléments, le réseau de service après-vente et la valeur de revente, qui compensent la différence de prix au départ, jouera également à cet égard un rôle important.
(180) Volvo et Scania ont réussi, au fil du temps, à fidéliser leur clientèle par rapport à leurs marques respectives en Finlande. Comme il a été expliqué précédemment, cette fidélité se manifeste à deux niveaux au moins, celui du concessionnaire et celui de l'acheteur final, le transporteur.
Fidélité à la marque - Réseau de service après-vente
(181) À en juger par l'étude de marché, il est essentiel, pour tout constructeur de poids lourds désireux de prendre pied sur un marché, de disposer d'un réseau de service après-vente étendu et efficace. Volvo et Scania disposent toutes deux d'un tel réseau en Finlande. Sa puissance dépend de sa densité, de la capacité technique d'un concessionnaire/centre de service après-vente donné à répondre à la demande d'un opérateur de poids lourds, et des contacts existants entre ces deux parties.
(182) L'étude de marché montre que le parc de poids lourds doit atteindre une certaine taille pour garantir au concessionnaire/centre de service après-vente un rendement correct de l'investissement. Sur la base de leur parc de véhicules en Finlande, Volvo et Scania sont manifestement les mieux placées pour attirer les concessionnaires et les centres de service après-vente, ce qui leur confère un avantage sous la forme d'un réseau de service après-vente étendu et efficace dans ce pays. Après un certain nombre d'années, de bons contacts entre les concessionnaires/centres de service après-vente et l'exploitant de poids lourds se transforment en une relation de confiance entre les deux partenaires. Cette relation de confiance fait partie de la réputation de la marque.
Fidélité à la marque - Client final
(183) L'étude de marché fait apparaître que, en Finlande les acheteurs finals de poids lourds sont en règle générale également fidèles aux marques Volvo et Scania. Les deux constructeurs suédois sont les seuls (avec, éventuellement, Renault/Sisu, dont la part de marché, beaucoup moins importante, est en baisse) à pouvoir proposer aux clients, en Finlande, la meilleure solution au niveau du coût global d'un camion. D'après les clients interrogés à ce sujet, Volvo et Scania sont en général considérées comme les mieux placées pour fournir aux clients des poids lourds adaptés aux conditions climatiques et routières de ce pays et pour répondre aux exigences techniques, notamment celles imposées par la législation nationale.
(184) Selon les informations obtenues auprès de l'Association finlandaise des poids lourds (21) concernant ses adhérents en 1999, la répartition du total des poids lourds entre les sociétés de transport qui les possèdent est la suivante:
EMPLACEMENT TABLEAU
(185) Les chiffres indiqués au considérant 184 comprennent les utilitaires légers et moyens ainsi que les poids lourds. Ils montrent que, dans leur très grande majorité (plus de 80 %), les sociétés de transport finlandaises exploitent un ou deux camions. Rien n'indique que ces données, comparées aux résultats de l'étude de marché, feraient apparaître une répartition sensiblement différente pour les poids lourds. Les petits clients seront généralement plus sensibles aux considérations de fidélité à la marque examinées ci-dessus que les acheteurs qui disposent d'une flotte comprenant un grand nombre de véhicules.
Effets de l'opération envisagée sur le marché finlandais des poids lourds
Parts de marché
(186) Le projet d'acquisition de Scania par Volvo donnerait naissance à une nouvelle société Volvo dont la part de marché cumulée s'élèverait à 65 % en Finlande (chiffres de 1998). Le concurrent immédiat de la nouvelle entité est Renault/Sisu, qui détient actuellement 18 % de parts de marché. Il convient de noter que la participation de Renault dans Sisu semble n'avoir aucune incidence notable sur la position de cette entreprise sur le marché (en effet, d'après les propres données de Volvo, Sisu a vu ses ventes reculer sensiblement depuis 1993). Le concurrent suivant serait DaimlerChrysler, avec 10 % de parts de marché. Les autres constructeurs européens de poids lourds conserveraient des parts de marché beaucoup plus modestes: Iveco: 4 %; MAN: 3 %; Paccar/DAF: moins de 1 %.
(187) En conséquence, l'opération envisagée entraîne tout d'abord un chevauchement d'activités important entre les parties en Finlande. Ce projet aurait également pour effet d'accroître sensiblement l'écart de part de marché entre New Volvo et ses plus concurrents les plus proches. Avant l'opération de concentration, Renault/Sisu, son concurrent immédiat, détenait une part de marché correspondant environ à la moitié de celle du leader du marché. Si l'opération de concentration était réalisée, celle-ci serait près de quatre fois moindre que celle de la nouvelle entité. De même, avant l'opération de concentration, DaimlerChrysler, numéro un du marché européen des poids lourds, détenait une part de marché égale à un tiers de celle du leader du marché en Finlande. Après l'opération, elle serait plus de six fois inférieure à celle de New Volvo.
(188) Deuxièmement, les données transmises par Volvo (corroborées de surcroît par les graphiques présentés au considérant 82), ainsi que l'enquête de la Commission, montrent que Volvo et Scania étaient, avant l'opération de concentration envisagée, les principaux concurrents l'un de l'autre. Cette concurrence disparaîtrait si cette opération était réalisée et l'avance de New Volvo sur ses autres concurrents s'accentuerait sensiblement, en Finlande également.
(189) Enfin, le fait que, comme en Suède, la position très puissante respective de Volvo et de Scania sur le marché finlandais n'est pas un phénomène récent et ne découle pas de fortes variations des parts de marché aggrave encore la situation. Il est par conséquent peu probable que d'autres constructeurs de camions puissent exercer une pression concurrentielle considérable sur les parties. L'évaluation des parts de marché respectives des parties en Finlande, illustrée par les graphiques présentés au considérant 82, donne à penser que les positions de Volvo et de Scania sont restées relativement stables sur une longue période, ce que l'étude de marché a d'ailleurs confirmé.
Fidélité du concessionnaire et du client
(190) New Volvo sera en mesure d'intervenir sur le marché des poids lourds en Finlande, en exploitant les atouts cumulés propres à Volvo et à Scania. Elle continuera à bénéficier de la fidélité de longue date des concessionnaires et des clients aux deux marques. L'étude de marché montre que les concurrents de Volvo et de Scania pourraient se heurter à d'importantes difficultés pour créer dans ce pays un réseau de concessionnaires/centres de service après-vente suffisamment dense, en comparaison des deux constructeurs suédois. Ces difficultés sont surtout liées au fait qu'un investissement dans un tel réseau doit nécessairement être suffisamment rentable, ce qui suppose que le parc de poids lourds en Finlande soit suffisamment important.
Structure de la clientèle
(191) Du côté de la demande, la structure du marché étant caractérisée par le grand nombre de petites sociétés de transport en Finlande, la nouvelle entité sera en mesure de tirer parti de la fidélité des clients aux deux marques et donc, également, de relever ses prix. D'après les renseignements communiqués par Volvo dans sa notification, aucun des plus gros clients de Volvo par la taille de leur flotte, au sein de l'EEE, n'est présent en Finlande. En outre, ses cinq principaux clients en Finlande ne représentent que [0-10 %] des ventes totales de poids lourds Volvo dans ce pays, tandis que, pour Scania, le chiffre correspondant est de [0-10 %].
(192) Selon les informations complémentaires communiquées par Volvo à la demande de la Commission, cette conclusion se trouve confirmée par les éléments suivants. D'après les propres estimations du constructeur (voir document du 25 novembre 1999, p. 5), l'analyse de ses ventes d'un modèle donné de poids lourd ([...]), couramment vendu en Finlande (22) montre que [70-80 %] du nombre total de ces camions vendus dans le pays le sont à l'unité et [20-30 %] dans le cadre de commandes portant sur plusieurs véhicules.
Structure de la clientèle et diversification des sources d'approvisionnement
(193) Volvo affirme que, dans les pays nordiques également, sa clientèle poids lourds est composée de nombreux acheteurs professionnels avertis, qui s'approvisionnent auprès de plusieurs fournisseurs. Selon elle, ces clients mettent en œuvre une stratégie de diversification de leurs sources d'approvisionnement (achat de véhicules de deux marques différentes, ou davantage), de manière à ne pas dépendre d'un seul constructeur de poids lourds. Alors que certains acheteurs finlandais déclarent conserver deux marques (le plus souvent Volvo et Scania) dans leur flotte de poids lourds, afin d'exercer une pression concurrentielle sur l'autre marque, les petits transporteurs en particulier, qui, comme il a été indiqué au considérant 184, constituent la grande majorité des sociétés de transport finlandaises, ont fortement intérêt à limiter leur flotte à une seule marque. Les avantages de cette stratégie (coûts d'entretien et de formation du personnel moins élevés), décrits précédemment à propos de la Suède, s'appliquent également à la Finlande.
Structure de la clientèle et érosion des parts de marché en Finlande
(194) D'après Volvo, l'opération envisagée aura inévitablement un effet d'érosion de ses parts de marché, c'est-à-dire que les clients actuels de Volvo et de Scania se tourneront vers d'autres marques de poids lourds. L'opération envisagée entraînerait, selon Volvo, une perte de clients qui, exprimée en pourcentage de part de marché, atteindrait 15 % en Finlande. La Commission a expliqué dans la section relative à la Suède les raisons pour lesquelles elle n'accorde pas autant de crédit à cette théorie que Volvo.
Barrières à l'entrée et absence de concurrence potentielle
(195) Les développements décrits ci-dessus font apparaître que Volvo et Scania sont les deux principaux concurrents sur le marché finlandais des poids lourds, où Renault/Sisu et DaimlerChrysler occupent une position beaucoup plus faible (environ 18 % et 10 % du marché, respectivement). La structure du marché est à cet égard relativement constante depuis au moins dix ans. La Commission conclut, pour les raisons exposées ci-dessous, que les autres constructeurs de camions ne pourront pas exercer de pression concurrentielle importante sur New Volvo en Suède.
(196) En particulier, si l'on admet l'hypothèse selon laquelle New Volvo augmenterait les prix de ses poids lourds d'un montant modique mais significatif, cette hausse ne serait pas suffisante pour permettre aux entreprises absentes du marché finlandais, ou qui y sont très peu présentes, de prendre suffisamment pied sur ce marché ou d'y renforcer leur implantation.
(197) Comme cela a déjà été indiqué, l'étude de marché fait apparaître que l'investissement lié à la mise en place ou à l'adaptation d'un réseau de service après-vente ne sera financièrement rentable qu'à partir du moment où le nouveau venu possède un parc de camions dépassant un certain seuil. La création d'un tel réseau prendra plusieurs années et nécessitera de la part du constructeur un investissement considérable. Dans son calcul, un nouvel arrivant considérera l'intérêt absolu du marché, c'est-à-dire le nombre de camions qu'il peut vendre dans un pays donné, comme un paramètre fondamental. L'adaptation d'un réseau de service après-vente comprend également la formation des vendeurs et des techniciens d'atelier, les véhicules de démonstration et les chauffeurs affectés à cette tâche, les véhicules prêtés pour des essais et la publicité locale.
(198) Les résultats de l'étude de marché montrent que, pour devenir véritablement compétitif, il est essentiel que tout constructeur de camions soit solidement implanté au niveau du service après-vente. Volvo et Scania ont tous deux été capables de créer un réseau étendu en Finlande. L'importance de ce réseau est un élément essentiel du choix des transporteurs en faveur d'une marque donnée de camions. D'après l'enquête, la difficulté que rencontre, par exemple, DaimlerChrysler pour établir un réseau de service après-vente géographiquement aussi étendu que celui de Volvo ou de Scania pour les poids lourds en Finlande peut aider à comprendre les raisons de la présence à ce jour relativement limitée de ce constructeur ou d'autres producteurs européens de camions dans ce pays. Si les constructeurs ne sont pas en mesure de réparer immédiatement un camion, cela peut directement entraîner une perte de recette, notamment pour les petits opérateurs.
(199) La taille limitée du marché finlandais, l'investissement en temps et en argent lié à la création indispensable d'un réseau de concessionnaires et de service après-vente étendu et la position déjà beaucoup plus faible des concurrents de Volvo et de Scania en Finlande sont autant d'éléments qui expliquent que, à l'issue de l'opération de concentration réalisée, il est peu probable que l'un de ces constructeurs, y compris DaimlerChrysler, soit capable d'élargir sensiblement son réseau de service après-vente ou, dans le cas d'un nouveau venu, que celui-ci pénètre efficacement sur le marché finlandais des poids lourds. En conséquence, il n'y a guère de chance pour que l'un des petits concurrents puisse, à court ou moyen terme, égaler la position actuelle de Scania sur le marché finlandais et, partant, compenser la perte de concurrence réelle découlant de l'opération de concentration envisagée. Les clients, également, considèrent que cette perte entraînera une détérioration sensible de la concurrence sur le marché des poids lourds en Finlande.
(200) Comme cela a déjà été expliqué à la section concernant le marché suédois des poids lourds, DaimlerChrysler et les autres constructeurs européens moins présents en Finlande pourraient, à l'avenir, ne pas retenir les marchés nordiques, y compris la Finlande, parmi leurs priorités pour les investissements futurs, étant donné l'existence préalable d'obstacles non négligeables à l'accès au marché et la taille relativement réduite de ce dernier. Les marchés d'Europe de l'Est offriront sans doute de meilleures perspectives de croissance à des constructeurs tels que DaimlerChrysler. De ce fait, même les clients les plus avertis pourraient rencontrer des difficultés. Pour trouver un autre constructeur capable de leur fournir le type de véhicules et de services que Volvo et Scania fournissaient avant l'opération de concentration en Finlande.
Conclusion
(201) Sur la base des éléments qui précèdent, la Commission conclut qu'il est très peu probable que la concurrence réelle ou potentielle, ou encore la puissance d'achat des clients, soit suffisante pour imposer des limites à New Volvo dans l'exercice du pouvoir de marché renforcé qui résulterait de l'acquisition de son seul concurrent important et de l'augmentation de sa part de marché (qui atteindrait 65 %).
(202) La Commission considère donc, pour toutes ces raisons, que l'opération envisagée entraînerait la création d'une position dominante en Finlande.
Irlande
Structure actuelle du marché
Parts de marché
(203) Le tableau suivant présente, sous une forme résumée, la structure actuelle du marché irlandais des poids lourds:
EMPLACEMENT TABLEAU
(204) Le tableau figurant au considérant 203 montre que Scania est numéro un en Irlande, avec 27 % de part de marché, suivie de Volvo, son concurrent le plus important, qui représente 22 % du marché. Tous les autres constructeurs de camions occupent des positions sensiblement moindres et, à l'exception de Paccar/DAF, qui absorbe quelque 13 % du marché, ils détiennent, sans exception, des parts de marché très faibles, inférieures - ou très inférieures - à 10 %.
(205) Il ressort des chiffres fournis au considérant 203 que, avant l'opération envisagée, Volvo et Scania représentent ensemble près de 50 % du marché irlandais des poids lourds et qu'elles sont donc les principaux concurrents en présence dans ce pays.
Effets de l'opération envisagée sur le marché irlandais des poids lourds
Parts de marché - Structure du marché
(206) Le projet d'acquisition de Scania par Volvo donnerait naissance à une nouvelle société Volvo (New Volvo) qui détiendrait au total 50 % environ du marché irlandais des camions. Son concurrent immédiat serait Paccar/DAF, avec une part de marché de 13,2 %, suivi de DaimlerChrysler (8,6 %), MAN (6,2 %), RVI (2,7 %) et Iveco (8 %).
(207) Si l'opération envisagée était réalisée, New Volvo obtiendrait près de 50 % de part de marché en Irlande, ce qui laisse présumer l'existence d'une position dominante.
(208) À cela s'ajoute le fait que les deux parties bénéficient, depuis au moins ces trois dernières années, de parts de marché élevées et relativement stables. D'après la notification, la part de marché de Volvo atteignait 23 % en 1996 et 27 % en 1997, cependant que celle de Scania était de 29 % en 1996 et de 27 % en 1997. Sur la même période, Paccar/DAF, DaimlerChrysler et MAN ont vu leurs parts de marché respectives quelque peu progresser, tout en demeurant inférieures à 10 %, à l'exception de Paccar/DAF. RVI et, en particulier, Iveco ont perdu des parts de marché au cours des trois dernières années. Il apparaît que les gains réalisés par Paccar/DAF, DaimlerChrysler et MAN correspondent à la perte de parts de marché subie par RVI et Iveco.
(209) Ce projet entraînerait le regroupement des deux premiers fournisseurs du marché. Le concurrent le plus proche serait beaucoup moins important, avec une part de marché de 13 % seulement, soit environ un quart de celle de New Volvo. En outre, l'évolution des parts de marché au cours des trois dernières années montre que les variations se produisant à l'intérieur du groupe des concurrents moins importants affectent peu la part de marché cumulée, élevée et relativement stable, de Volvo et Scania.
Fidélité à la marque
(210) Dans ce cas également, les faits donnent à penser que l'opération de concentration envisagée se traduirait par l'union des forces des deux marques les plus puissantes. Au cours des années, Volvo comme Scania ont encouragé leurs clients à être fidèles à leurs marques en Irlande, en proposant des solutions compétitives aux transporteurs, non seulement au niveau du prix du camion, mais aussi des conditions, excellentes, en matière de garantie et de service après-vente. Leur position respective sur le marché serait à présent renforcée. Les parts de marché de Volvo et Scania considérées conjointement n'ont pas sensiblement varié au cours des trois dernières années.
Barrières à l'entrée et concurrence potentielle
(211) Les arguments exposés ci-dessus concernant les obstacles à l'accès au marché et l'arrivée ou l'expansion peu probable d'autres constructeurs de camions dans les pays nordiques valent également pour l'Irlande. Celle-ci présente de nombreuses ressemblances avec les marchés nordiques, la clientèle y est dispersée (les cinq plus gros clients de Volvo et de Scania ne représentent respectivement que [10-20 %] et [0-10 %] des ventes totales de ces constructeurs) et le marché est de petite taille et relativement peu attrayant pour les investisseurs. En fait, le marché irlandais des poids lourds est extrêmement modeste. En volume annuel, il représente, par exemple, environ la moitié du marché danois des poids lourds. Il est de ce fait peu vraisemblable, même dans l'éventualité d'une hausse des prix, que d'autres constructeurs de camions considèrent ce pays comme une cible intéressante et souhaitent y prendre pied et/ou renforcer leur position.
Conclusion
(212) La Commission considère, par conséquent, que l'opération envisagée entraînerait la création d'une position dominante en Irlande.
Conclusion générale concernant les marchés des poids lourds
(213) On peut conclure de ce qui précède que le projet de concentration aboutirait à la création d'une position dominante sur les marchés des poids lourds en Suède, en Norvège, en Finlande et en Irlande. Tout porte à croire qu'il en irait de même au Danemark.Il n'est cependant pas nécessaire d'apporter une réponse définitive à cette question dans le cadre de la présente procédure.
ii) AUTOBUS ET AUTOCARS
A. MARCHÉ DE PRODUITS EN CAUSE
(214) Le projet de concentration aura également un impact majeur sur le marché des autobus, puisque l'opération donnera naissance au deuxième constructeur européen d'autobus, après DaimlerChrysler.
(215) La Commission a déjà étudié le marché des autobus et des autocars à plusieurs reprises (23). Dans ses plus récentes décisions, elle est parvenue à la conclusion que, bien que les frontières entre les principaux segments du marché des autobus et des autocars ne soient pas rigides, on distinguait normalement trois catégories d'autobus, constituant chacune un marché de produits distinct: les autobus urbains, les autobus interurbains et les autocars de tourisme.
(216) Les autobus sont en général spécialement conçus pour un type particulier de services de transport. C'est ainsi que les autobus urbains sont conçus pour des voyageurs qui ne passent généralement que quelques minutes ou, en tout état de cause, qu'un bref moment dans le bus. L'accès doit donc en être aisé. Les autocars de tourisme, en revanche, sont conçus pour transporter sur de longues distances des voyageurs qui passent plusieurs heures, voire plusieurs jours, dans le véhicule. La conception des autocars de tourisme met l'accent sur le confort et l'espace de rangement plutôt que sur la facilité d'accès.
(217) Du fait des besoins différents de ces divers modes de transport, les autobus sont des produits hétérogènes. D'une manière générale, on peut dire que l'on trouve aux deux extrémités de ce marché, d'une part, des autobus urbains à plancher surbaissé avec des portes plus nombreuses et/ou plus larges pour les services de transport public en zone urbaine et, d'autre part, des autocars de tourisme de luxe à deux étages pour les voyages touristiques longue distance. Entre ces deux extrêmes, on peut trouver de nombreux types différents de véhicules. En outre, les divers types sont disponibles en plusieurs tailles. La demande est donc très variée, dans la mesure où l'exploitant exigera un véhicule spécialement conçu pour les services de transport qu'il entend fournir.
(218) Dans la notification, le marché en cause est défini comme comprenant l'ensemble du marché des autobus. Volvo fait notamment observer que: i) les facteurs liés à l'offre qui permettraient de considérer que ces trois segments constituent un seul marché de produits seraient particulièrement applicables tant à Volvo qu'à Scania, dans la mesure où ces deux sociétés réalisent, selon les chiffres les plus récents, [50-60 %] et [20-30 %] de leurs ventes respectives dans l'EEE uniquement avec des châssis, et où un même châssis peut être utilisé pour différents types d'autobus; ii) les principaux producteurs européens d'autobus sont présents sur tous les segments, et occupent la même position relative en termes de ventes; iii) le développement d'un marché à l'échelle de l'EEE pour les autobus urbains et interurbains réduit considérablement l'une des distinctions antérieures entre bus urbains et interurbains, d'une part, et autocars, d'autre part; iv) enfin, les limites entre les autobus urbains et interurbains, d'une part, et les autobus interurbains et les autocars de tourisme, d'autre part, sont floues. Dans la notification, la partie notifiante estime que cela vaut tout particulièrement pour les pays nordiques, où il y a très peu de grandes villes avec un trafic exclusivement urbain.
(219) Volvo a confirmé cette position lors de l'audition, réaffirmant qu'il n'y avait pas de séparation nette entre les trois segments que constituent les autobus urbains, les autobus interurbains et les autocars de tourisme. Selon Volvo, des autobus urbains à plancher surbaissé sont utilisés pour des transports interurbains, et des autobus interurbains à plancher surbaissé ou à hauteur de plancher standard sont utilisés pour des transports urbains. De même, des autocars sont utilisés pour des transports interurbains et des autobus interurbains pour des services d'autocars. La partie notifiante soutient, en outre, que, en Finlande et au Royaume-Uni notamment, des midibus, véhicules d'une taille et d'un poids inférieurs, sont utilisés pour le même type de services que les grands autobus. Volvo soutient que les trois segments du marché des autobus se chevauchent également dans une large mesure en ce qui concerne les éléments montés sur le châssis, par exemple le moteur et la boîte de vitesses. Comme on le verra dans la section suivante, si les limites entre ces trois segments sont relativement fluides, cela ne peut être considéré comme l'élément déterminant pour établir l'existence d'un marché de produits unique.
Les autobus sont des produits hétérogènes avec une faible substituabilité du côté de la demande
(220) Le raisonnement développé par Volvo, tant dans la notification qu'à l'audition, selon lequel il y aurait ainsi un seul marché en cause pour l'ensemble des autobus ne peut pas être accepté. Il est manifeste qu'il n'y a aucune substituabilité sur le plan de la demande entre un autobus urbain à plancher surbaissé pouvant accueillir un grand nombre de passagers debout et un autocar de tourisme à deux étages avec toilettes, vidéo et cuisine. Entre ces deux extrêmes, on trouve toute une série de types différents d'autobus adaptés, en fonction de leur conception et de leur équipement, à un grand nombre d'usages différents. D'une manière générale, on peut dire que les besoins en termes de spécifications techniques et d'équipements, qui déterminent le confort du conducteur et celui des voyageurs, augmentent avec la durée des trajets pour lesquels le véhicule est principalement conçu. Ainsi, les exigences augmentent en fonction de la mesure dans laquelle un type donné d'autobus est destiné à des activités touristiques plutôt qu'à des services de ligne. Toutefois, contrairement à l'opinion exprimée par la partie notifiante dans la notification et lors de l'audition, il n'est pas possible de déduire de cette transition graduelle vers un confort plus grand et des équipements plus luxueux, et de l'hétérogénéité des autobus qui en résulte, que ceux-ci ne constituent qu'un seul marché en cause. La difficulté qu'il y a à circonscrire de façon précise un marché lorsque la gamme des produits concernés est large et hautement différenciée ne peut pas constituer une raison suffisante pour renoncer à toute définition du marché, en dépit de l'absence manifeste de substituabilité entre les différents produits.
(221) En 1990 et en 1991, la Commission a estimé, dans deux décisions concernant le marché français (24), qu'il convenait d'opérer une distinction entre deux marchés: les autobus utilisés pour les transports publics et les autocars de tourisme. En 1995, la Commission a adopté une décision concernant le marché allemand (25) et, en 1998, une décision concernant les marchés italien, français et espagnol (26). Si Volvo et Scania opèrent toutes deux dans l'ensemble de l'EEE, leur position est nettement plus forte dans le Nord de l'Europe. Par conséquent, l'enquête menée par la Commission dans la présente affaire sera particulièrement axée sur la région nordique (c'est-à-dire le Danemark, la Finlande, la Norvège et la Suède) ainsi que sur le Royaume-Uni et l'Irlande.
Différences dans les caractéristiques techniques
(222) L'étude de marché à laquelle la Commission a procédé dans la présente affaire montre qu'il convient d'opérer une distinction nette en particulier entre, d'une part, les autobus urbains et interurbains et, d'autre part, les autocars de tourisme, et ce tant sur le plan de l'offre que sur celui de la demande.
(223) Les données relatives à l'offre fournies par Volvo et Scania ainsi que des informations provenant d'autres fournisseurs confirment qu'il existe des différences importantes, en termes de caractéristiques des châssis, entre les différents types de bus. Ainsi, le modèle de châssis pour autobus urbains le plus vendu par les parties dans la plupart des pays est un modèle à plancher ou entrée surbaissés, à deux essieux, avec un moteur d'une puissance relativement faible (en général 250 CV environ). En revanche, le châssis le plus vendu pour les autocars est un modèle à plancher surélevé, avec un moteur d'environ 400 CV. En outre, dans certains pays, l'autocar le plus vendu est un véhicule à trois essieux. Un autobus interurbain aura en général un plancher surélevé, mais un moteur moins puissant qu'un autocar de tourisme. Les autobus interurbains peuvent également être plus longs que les autobus urbains et que les autocars. Les autobus articulés sont essentiellement utilisés pour les transports interurbains.
(224) Du point de vue de la demande, ces différences dans les caractéristiques techniques ne nécessitent pas seulement une décision quant au principal usage auquel le véhicule sera affecté, mais elles se traduisent également par des différences de prix importantes selon que les châssis sont destinés à des autobus urbains ou interurbains ou à des autocars de tourisme.
(225) Rappelons ici les principales caractéristiques de ces trois types d'autobus.
a) Autobus urbains
Les autobus urbains sont utilisés pour les transports publics en agglomérations. Ils ont le plus souvent un plancher surbaissé (ou une entrée surbaissée), sans marches, ainsi que des portes plus nombreuses et plus larges que les autres types d'autobus. Ce sont les seuls types d'autobus conçus pour avoir des places debout. La principale caractéristique des autobus urbains est qu'ils ont été conçus essentiellement pour faciliter la montée et la descente. Les principaux clients sont les municipalités et les collectivités locales et, dans les pays où les transports publics ont été privatisés, les opérateurs privés qui se sont vu attribuer le marché de services de transport par autobus par les municipalités et les collectivités locales.
b) Autobus interurbains
Les autobus interurbains sont utilisés pour les transports publics en zone rurale et les transports publics interurbains. Tout comme les autobus urbains, ils ne sont normalement pas particulièrement luxueux. D'un point de vue technique, ils n'ont en général pas de plancher surbaissé et sont équipés de moteurs plus puissants que les autobus urbains (mais moins puissants que les autocars de tourisme). En raison de la nature de ce service, les caractéristiques facilitant la montée et la descente sont moins importantes que sur les autobus urbains. Les principaux acheteurs sont les sociétés publiques régionales de transport par autobus ainsi que les sociétés privées assurant des services de ligne. Les acheteurs d'autobus interurbains achètent également souvent des autobus urbains.
c) Autocars de tourisme
Les autocars de tourisme sont essentiellement conçus pour le marché des loisirs, en l'occurrence des voyages touristiques longue distance. Tout comme pour les autobus interurbains, les caractéristiques facilitant la montée et la descente ne constituent pas une priorité sur ce type de véhicule. Un autocar de tourisme sera normalement équipé d'une boîte de vitesses manuelle, alors que les deux autres types d'autobus ont des boîtes automatiques. Les autocars de tourisme sont généralement plus hauts que les autobus interurbains et possèdent des aménagements plus luxueux. Ils comportent souvent plus d'espace pour les bagages ainsi que la climatisation, des toilettes et la télévision, ce qui les rend plus adaptés à de longs trajets. Les principaux clients sont des opérateurs privés de voyages touristiques et affrétés. L'étude de marché a montré que certains opérateurs peuvent utiliser leurs autocars de tourisme à d'autres fins, par exemple pour des services interurbains pendant la morte-saison. Toutefois, le fait qu'un autocar de tourisme puisse avoir un deuxième usage ne signifie pas qu'il y a substituabilité entre ces produits et, par exemple, les autobus interurbains.
(226) La Commission note également que cette division du marché des autobus en trois segments se retrouve généralement dans les brochures publicitaires de l'ensemble des fournisseurs et qu'elle est acceptée tant par les fournisseurs que par les clients sur ce marché.
Groupes d'acheteurs distincts
(227) Il convient également d'opérer une distinction en fonction du type de clients. Les autobus urbains et interurbains sont généralement achetés par des opérateurs publics ou privés chargés de services de transports publics de ligne. À cet égard, l'attention de la Commission a été attirée sur le fait que les pouvoirs publics chargés des transports publics continuaient à influer sur les conditions de la demande, même dans les pays où ces services avaient été privatisés, par exemple en imposant des exigences précises quant aux spécifications des véhicules de transport de ligne dans les appels d'offres. Il convient de noter qu'à partir du moment où ce secteur a été privatisé dans un pays les véhicules ne seront généralement plus achetés sur la base d'appels d'offres, puisque ce ne sont plus les pouvoirs publics qui effectuent l'acquisition. En revanche, les pouvoirs publics n'influent généralement pas sur la vente d'autocars de tourisme, puisque ceux-ci sont achetés par des opérateurs privés et utilisés pour des transports de loisirs. C'est ainsi que si l'offre d'un véhicule aménagé de façon luxueuse peut constituer un paramètre concurrentiel important pour un opérateur offrant des voyages touristiques, cela n'est généralement pas le cas pour les sociétés exploitant des services de transports publics urbains et interurbains, dans la mesure où, pour ce type de services, les spécifications des véhicules sont la plupart du temps définies par l'autorité organisant ce service (et la procédure d'appel d'offres).
(228) L'étude de marché a montré qu'il convenait d'opérer une seconde distinction importante en ce qui concerne les clients. Avant la privatisation et la libéralisation du secteur des transports par autobus, la plupart des sociétés d'autobus n'opéraient que sur une base locale ou régionale. Or, au cours de la décennie écoulée, la libéralisation des services d'autobus publics de ligne urbains et interurbains a entraîné la création de plusieurs grandes sociétés exploitant d'importantes flottes d'autobus, en général nationales et parfois même internationales. La partie notifiante a également souligné, tout au long de la procédure, le rythme rapide du processus d'intégration qui s'est opéré du côté des opérateurs d'autobus dans la dernière décennie et qui a eu pour effet un accroissement considérable de la taille du parc d'autobus des clients et, partant, de leur pouvoir de marché vis-à-vis des constructeurs d'autobus. Néanmoins, l'étude de marché a montré que les constructeurs d'autobus ont la possibilité, qu'ils ne manquent pas d'utiliser, d'accorder des prix et autres conditions différentes selon la taille de leurs clients et que les préférences d'achat entre les petits et les gros clients peuvent varier de façon sensible. Il conviendra donc de tenir compte, dans l'appréciation ci-dessous, du fait que les constructeurs d'autobus peuvent opérer une discrimination par les prix entre les petits et les gros clients.
La substituabilité sur le plan de l'offre n'est pas effective
(229) En ce qui concerne la substituabilité sur le plan de l'offre, l'étude de marché a confirmé l'affirmation de Volvo selon laquelle tous les grands constructeurs d'autobus européens sont présents sur les trois segments. Toutefois, contrairement à ce qu'affirme Volvo, la position relative de ces constructeurs en termes de ventes est sensiblement différente si l'on compare, d'une part, leurs ventes de ces trois types d'autobus et, d'autre part, la part de marché des différents fournisseurs dans chaque État membre ou groupe d'États membres et dans l'ensemble de l'Europe. Cet élément sera examiné plus en détail dans le cadre de l'appréciation de la dimension géographique des marchés.
Conclusion sur les marchés de produits en cause
(230) Ainsi qu'il a été indiqué précédemment, il y a des différences importantes entre un autobus urbain normal, un autobus interurbain et un autocar de tourisme. Étant donné que tout acheteur d'un bus, quelle que soit sa situation, a une idée bien précise du type de services auxquels le véhicule sera essentiellement affecté, la substituabilité entre les différents types d'autobus sera nécessairement faible.Il est donc probable que l'entité issue de la fusion serait en mesure de profiter de cette caractéristique à l'avenir, si elle devait acquérir un pouvoir de marché accru sur un ou plusieurs de ces trois segments du fait de l'opération notifiée. De ce fait, la Commission juge opportun d'apprécier l'impact de l'opération notifiée sur la concurrence sur la base de marchés séparés pour les autobus urbains, les autobus interurbains et les autocars de tourisme.
B. MARCHÉS GÉOGRAPHIQUES EN CAUSE
(231) Dans la notification, Volvo estime que le marché géographique en cause pour les autocars de tourisme, les autobus urbains et les autobus interurbains s'étend au moins à l'EEE, affirmant que cette conclusion est corroborée par les niveaux de prix relevés, qui se situent généralement dans une même gamme, avec, à quelques exceptions près, des écarts de plus ou moins 10 %, dans l'ensemble des pays de l'EEE. En outre, Volvo considère qu'il n'y a pas de barrières nationales à l'entrée, ce qui est confirmé par la présence de tous les grands producteurs dans l'ensemble des pays de l'EEE.
(232) Dans sa réponse ainsi que lors de l'audition, Volvo a soutenu que la définition du marché géographique devait, en général, être centrée sur les critères de discrimination par les prix et de taux de pénétration des importations et non sur des facteurs étrangers aux prix tels que les préférences du consommateur, les exigences techniques, les habitudes de consommation et les parts de marché. Se référant à la décision de la Commission dans l'affaire Mercedes-Benz/Kässbohrer, Volvo soutient que les comparaisons de prix pour les autobus et les autocars sont rendues difficiles par la diversité des types de véhicules, des équipements et des modes de détermination des prix de transaction. Dans sa réponse, elle n'a par conséquent pas présenté d'autres éléments pour étayer ses affirmations selon lesquelles les prix se situaient dans une même gamme, avec des écarts de plus ou moins 10 %, dans l'ensemble de l'EEE. Elle a, en revanche, fourni des éléments d'information concernant les taux de pénétration des marchés pour les autobus urbains, les autobus interurbains et les autocars de tourisme. En conséquence, la partie notifiante base sa définition du marché géographique en cause sur l'approche adoptée par la Commission dans sa décision dans l'affaire Renault/Iveco et sur les facteurs étrangers au prix.
(233) La Commission reconnaît que la capacité des constructeurs à exercer une discrimination par les prix entre différentes zones géographiques est un élément central de la définition du marché géographique en cause. Il apparaît que Volvo a été en mesure de facturer des prix sensiblement différents d'un État membre à l'autre. D'autres éléments, tels que les préférences du consommateur, les exigences techniques, les habitudes d'achat, les parts de marché et le taux de pénétration des importations entrent également en ligne de compte pour la définition des marchés en cause dans la mesure où ils donnent des indications sur la capacité des constructeurs à exercer une discrimination par les prix. L'enquête menée par la Commission a montré que ces éléments confirment l'existence de marchés géographiques nationaux dans les régions de l'Europe du Nord où l'incidence de l'opération de concentration serait la plus forte.
(234) Dans sa notification et sa réponse, la partie notifiante a notamment fait observer que, dans sa décision dans l'affaire Renault/Iveco, la Commission avait retenu comme principal critère les taux existants de pénétration des importations pour définir le marché géographique en cause à l'échelle de l'EEE. Dans cette affaire, où l'opération de concentration a été autorisée au terme de la première phase de la procédure, la Commission a tenu compte du fait que le taux de pénétration des constructeurs étrangers sur le marché des autocars de tourisme en France et en Italie était relativement élevé (entre 65 et 70 %). Or, selon les informations communiquées par Volvo, le taux de pénétration des importations au Royaume-Uni (40 %) et en Finlande (10 %), qui sont les États membres en cause dans la présente affaire, est sensiblement moins élevé. Compte tenu des autres éléments analysés plus en détail dans les considérants suivants, ces chiffres ne peuvent être considérés comme un indice probant de l'existence d'un marché à l'échelle de l'EEE.
(235) Pour les raisons exposées en détail ci-dessous, il ressort de l'étude de marché que, pour ce qui concerne la région nordique (Suède, Finlande, Norvège et Danemark) ainsi que le Royaume-Uni et l'Irlande, la thèse de Volvo concernant le marché géographique des autobus urbains, des autobus interurbains et des autocars de tourisme ne saurait être retenue. En fait, l'étude de marché a indiqué que les marchés en question étaient encore essentiellement de dimension nationale. En ce qui concerne le marché finlandais, c'est également le point de vue qui a été exposé lors de l'audition par l'Association finlandaise des autobus et autocars, notamment en raison de facteurs linguistiques, culturels et historiques.
(236) Pour les autres États membres, la question de l'étendue géographique du marché peut être laissée en suspens étant donné que, quelle que soit la définition retenue, la concentration envisagée ne conduirait pas à la création ou au renforcement d'une position dominante. Cette conclusion sera développée dans la section consacrée à l'analyse concurrentielle.
Autocars de tourisme
Les parts de marché varient sensiblement d'un État membre à l'autre
(237) L'affirmation de Volvo selon laquelle le marché des autocars de tourisme s'étendrait à l'ensemble de l'EEE n'est pas corroborée par les chiffres relatifs à ses ventes dans cette zone, tels qu'ils figurent dans la notification. Selon les indications fournies, Volvo détient une part de marché de [10-20 %] dans l'EEE. Sa part de marché est sensiblement plus élevée dans les pays nordiques, au Royaume-Uni et en Irlande, mais elle est nettement inférieure à la moyenne pour l'EEE dans un certain nombre de pays ([0-10 %] en Autriche, [0-10 %] en Belgique, [0-10 %] en France, [0-10 %] en Allemagne et [0-10 %] en Espagne). On observe des écarts similaires des parts de marché nationales par rapport à la moyenne pour l'EEE pour Scania et tous les autres constructeurs d'autocars de tourisme. Mis à part quelques vagues références à des motifs historiques, Volvo n'a fourni aucune raison expliquant comment, à son avis, de telles différences dans les parts de marché d'un État membre à l'autre pouvaient être compatibles avec sa thèse selon laquelle le marché des autocars de tourisme est à l'échelle de l'EEE.
(238) Les parts de marché cumulées de Volvo et de Scania en 1998 sont indiquées dans le tableau ci-dessous:
EMPLACEMENT TABLEAU
Les habitudes d'achat ne sont pas identiques dans tous les États membres
(239) En outre, le comportement en matière d'achat des exploitants d'autocars de tourisme peut être très différent d'un État membre à l'autre. L'utilisateur final qui souhaite acheter un autocar de tourisme a essentiellement deux possibilités: il peut soit acheter un autocar de tourisme complet ou il peut acheter un châssis, par exemple chez Volvo, et la carrosserie, c'est-à-dire l'habitacle complet, auprès d'un carrossier. Dans ce dernier cas, il peut ou non y avoir accord contractuel entre Volvo et le carrossier. À l'échelle de l'EEE, Volvo réalise [40-50 %] de ses ventes totales avec des véhicules complets. Chez Scania, cette proportion est de [70-80 %]. Toutefois, ces chiffres peuvent varier fortement d'un État membre à l'autre. C'est ainsi que l'ensemble des autocars de tourisme vendus par Volvo en Suède, en Norvège et en Finlande en 1998 étaient des véhicules complets, de même que la majorité de ceux vendus par Scania. Cela s'explique en grande partie par le fait que Volvo et Scania sont toutes deux intégrées verticalement avec les principaux carrossiers de la zone nordique. En Irlande et en Grèce, 100 % des ventes étaient limitées à des châssis, contre environ [80-90 %] au Royaume-Uni.
(240) De plus, comme il est indiqué dans la notification, l'une des caractéristiques de la structure de la demande au Royaume-Uni et en Irlande, si on la compare à celle des autres États membres, est l'absence de ventes d'autobus interurbains dans ces pays.
Les achats se font à l'échelon national
(241) Les caractéristiques nationales décrites ci-dessus concordent avec la conclusion de la Commission selon laquelle les acheteurs d'autocars de tourisme s'adressent très rarement à des concessionnaires établis hors de leur pays. De ce fait, un constructeur allemand, par exemple, doit posséder un réseau de vente et de distribution bien implanté dans chacun des pays nordiques ainsi qu'au Royaume-Uni et en Irlande s'il veut réaliser des ventes importantes dans ces pays. Or, comme les autocars de tourisme sont essentiellement importés dans les pays par les réseaux nationaux des constructeurs respectifs, les conditions dans lesquelles s'exerce la concurrence, même dans les pays voisins, semblent n'avoir que peu ou pas d'impact sur les conditions de vente dans un pays donné.
(242) L'une des raisons indiquées par les acheteurs d'autocars de tourisme pour justifier le fait qu'ils préfèrent acheter les produits dans le pays où ils sont implantés est que cela leur permettra d'avoir plus facilement accès au service d'entretien du véhicule, dans la mesure où celui-ci ne peut être assuré en interne par la société d'autocars. À cet égard, il convient de souligner qu'une partie importante des exploitants d'autocars de tourisme sont des petites et moyennes entreprises. Même l'existence de différences de prix sensibles n'inciterait pas nécessairement ces clients à transporter les véhicules chez un concessionnaire étranger pour faire effectuer les travaux d'entretien et de réparation nécessaires. Une autre raison pour laquelle les clients n'achètent pas de véhicules en dehors de leur pays est que la modification de l'immatriculation des véhicules nécessite beaucoup de temps, d'efforts et d'argent. En outre, la valeur de revente d'un véhicule importé par un opérateur autre qu'un concessionnaire risque d'être plus faible et il peut s'avérer plus difficile de faire reprendre ces véhicules par des concessionnaires nationaux. Contrairement à ce que Volvo a déclaré dans sa réponse et lors de l'audition, un certain nombre de clients ont également mentionné la qualité perçue du véhicule et la disponibilité des pièces de rechange et du service après-vente comme critères essentiels dans une décision d'achat. Ces critères sont fortement associés aux marques Volvo et Scania dans les États membres examinés ci-dessous.
Les exigences et les préférences techniques varient selon les États membres
(243) En outre, l'étude de marché a montré que, malgré un certain degré d'harmonisation à l'échelon européen, une partie des exigences et des préférences techniques relatives aux autocars de tourisme et à d'autres types d'autobus diffèrent toujours selon les États membres (27). Mentionnons, à titre d'exemple, le fait que la longueur maximale autorisée pour un véhicule est de 12 mètres en France, aux Pays-Bas, en Italie et en Autriche, de 13,7 mètres au Danemark et de 14,5 mètres en Finlande, alors que la Belgique, la Suède, la Norvège et l'Allemagne autorisent des longueurs allant jusqu'à 15 mètres. En outre, en ce qui concerne le Royaume-Uni et l'Irlande, le fait que tous les véhicules doivent être adaptés à la conduite à droite et que toutes les portes doivent se trouver sur la partie gauche du véhicule limite strictement les possibilités d'importation de véhicules conçus pour l'Europe continentale. En 1998, l'Office of Fair Trading (Office britannique de la concurrence) est parvenu à la conclusion, pour des raisons identiques, que le Royaume-Uni constituait un marché géographique en cause distinct de celui du reste de l'Europe (28).
(244) Enfin, en ce qui concerne certains pays, essentiellement la Suède, la Finlande et la Norvège, plusieurs clients ont indiqué que des aménagements spéciaux devaient être apportés aux véhicules pour qu'ils soient adaptés aux conditions climatiques et routières, et aussi qu'ils puissent répondre à des exigences particulières en matière de protection contre les collisions, qui concernent la partie avant des véhicules. C'est pourquoi, d'après plusieurs clients, les modèles utilisés en Europe continentale sont moins bien adaptés aux pays nordiques. Dans la réponse, la partie notifiante conteste la conclusion selon laquelle les conditions routières et climatiques en Finlande représentent une barrière à l'entrée substantielle. Pour étayer son point de vue, Volvo fait référence à un magazine allemand spécialisé qui a classé les marques Mercedes et Setra de DaimlerChrysler devant Volvo et Scania lors d'un essai portant sur des autobus de différents constructeurs dans des conditions arctiques. Il convient de noter que cet article a été publié dans un magazine allemand en 1993. Volvo n'a pas cherché à démontrer que l'article en question faisait autorité et elle n'a même pas donné à penser qu'il s'agissait du seul article pour lequel ce type d'essai a été réalisé au cours des sept dernières années. La Commission ne peut par conséquent attacher aucun crédit à cette information.
(245) Dans la réponse, la partie notifiante conteste l'avis de la Commission selon lequel les exigences techniques varient sensiblement d'un État membre à l'autre et affirme que les constructeurs sont actuellement en mesure d'adapter leur production à ces différences. Indépendamment de la capacité technique des constructeurs à adapter leurs processus de production, les coûts liés à une telle opération, qui atteindraient, selon une estimation portée à l'attention de la Commission, au moins 5 millions d'euros, devraient être appréciés au regard de l'attrait et de la taille du marché en question.
Les niveaux de prix diffèrent sensiblement d'un État membre à l'autre
(246) Le fait que les achats d'autocars de tourisme se font au niveau national se traduit également par les importantes variations de prix (hors taxes) que l'on peut observer, même entre pays voisins. C'est ainsi que, d'après les informations contenues dans la notification, pour un même modèle d'autocar de tourisme ([modèle courant]), Volvo demande [10-20 %] de plus en Norvège qu'au Danemark, [10-20 %] de plus en Finlande qu'en Suède et [20-30 %] de plus au Royaume-Uni qu'aux Pays-Bas. Des différences similaires ont pu être observées dans les informations sur les prix communiquées par Scania et par d'autres constructeurs d'autocars de tourisme au cours de l'étude de marché. Volvo a reconnu que, d'une manière générale, la possibilité qu'a un constructeur d'exercer une discrimination par les prix entre des clients établis dans des États membres différents est une indication essentielle pour conclure à la dimension nationale du marché.
(247) Des différences de prix entre pays voisins telles que celles indiquées ci-dessus sont, de manière générale, incompatibles avec l'affirmation de Volvo selon laquelle les pays nordiques (Suède, Finlande, Norvège et Danemark), le Royaume-Uni et l'Irlande ne devraient pas être considérés comme des marchés géographiques distincts. En effet, si les marchés dépassaient le cadre national, il serait logique de penser que les acheteurs d'autocars de tourisme profiteraient des différences de prix qui existent et achèteraient leurs véhicules dans un pays voisins.
Conclusion sur le marché géographique en cause pour les autocars de tourisme
(248) Compte tenu des éléments qui précèdent, la Commission estime que, pour le marché des autocars de tourisme, il convient d'apprécier l'impact de l'opération notifiée sur la concurrence séparément pour la Finlande et le Royaume-Uni. Pour les autres États membres, la question de la délimitation précise des marchés géographiques en cause peut être laissée en suspens étant donné que l'opération ne conduirait pas à la création ou au renforcement d'une position dominante.
Autobus urbains et autobus interurbains
(249) L'étude de marché a montré que, dans les pays nordiques (Suède, Finlande, Norvège et Danemark), au Royaume-Uni et en Irlande, la plupart des caractéristiques décrites ci-dessus à propos des autocars de tourisme valaient également pour les autobus urbains et interurbains.
Les parts de marché varient sensiblement d'un État membre à l'autre
(250) Comme dans le cas des autocars de tourisme, l'affirmation de Volvo selon laquelle le marché des autobus urbains et interurbains s'étendrait à l'ensemble de l'EEE n'est pas corroborée par les chiffres relatifs à ses ventes dans cette zone, tels qu'ils figurent dans la notification. Selon les indications fournies, la part de marché de Volvo à l'échelle de l'EEE s'élève à [20-30 %] pour les autobus urbains et à [10-20 %] pour les autobus interurbains. Toutefois, sa part est sensiblement plus élevée dans les pays nordiques (autobus urbains et interurbains), ainsi qu'au Royaume-Uni et en Irlande (autobus urbains). Dans le même temps, les parts qu'elle détient dans un certain nombre de pays sont sensiblement inférieures à ces moyennes pour l'EEE. Pour les autobus urbains, Volvo détient une part de marché de [0-10 %] en Autriche, en Belgique, en Allemagne, en Italie et au Luxembourg. Pour les autobus interurbains, la part de marché de la société se situe entre [0-10 %] en Allemagne, en Grèce, au Luxembourg et aux Pays-Bas. On peut ainsi observer que la part du marché des autobus urbains détenue par Volvo atteint [50-60 %] au Danemark, alors qu'elle est inférieure à [0-10 %] en Allemagne et se chiffre à [30-40 %] en Suède. En Irlande, Volvo détient [60-70 %] du marché des autobus urbains et Scania [30-40 %]. Les chiffres correspondants pour le Royaume-Uni sont [50-60 %] et [10-20 %]. On observe, au niveau national, des écarts similaires, voire encore plus importants, par rapport à la moyenne pour l'EEE pour Scania et tous les autres constructeurs. Ici non plus, Volvo n'a pas fourni de raisons suffisantes expliquant comment, à son avis, de tels écarts dans les parts de marché entre États membres pouvaient être compatibles avec son affirmation selon laquelle les marchés des autobus urbains et interurbains s'étendent à l'ensemble de l'EEE.
Les achats s'effectuent à l'échelon national et les habitudes d'achat diffèrent d'un État membre à l'autre
(251) La structure de la demande pour les autobus urbains et interurbains présente les mêmes variations, d'un État membre à l'autre, que celles décrites ci-dessus pour les autocars de tourisme, dans la mesure où, dans certains pays, les clients préfèrent acheter un véhicule complet, alors que dans d'autres ils achètent le châssis et la carrosserie séparément.
(252) En outre, tout comme les acquéreurs d'autocars de tourisme, les acheteurs d'autobus urbains et interurbains, s'adressent rarement à des concessionnaires implantés en dehors de leur pays. Toutefois, à cet égard, il importe de prendre en compte une différence importante entre, d'une part, le marché des autocars de tourisme et, d'autre part, les marchés des autobus urbains et interurbains. Alors que les autocars de tourisme sont souvent vendus par l'intermédiaire des concessionnaires du constructeur établis dans le pays concerné, les autobus urbains et interurbains sont, dans une large mesure, vendus directement au client final par l'importateur national du constructeur.
(253) Cela signifie que, en théorie, le fait de disposer d'un réseau national de concessionnaires bien établis devrait être comparativement moins important pour un fournisseur "étrangers" d'autobus urbains et interurbains. On pourrait donc s'attendre à ce que le taux de pénétration des fournisseurs "étrangers" soit plus important pour les autobus urbains et interurbains. Or, ainsi qu'il ressort du tableau figurant au considérant 238 ci-dessus, les constructeurs "étrangers" ont comparativement moins bien réussi à pénétrer sur les marchés des pays nordiques, du Royaume-Uni et de l'Irlande avec leurs autobus urbains et interurbains (la part de marché cumulée de Volvo et de Scania se situe entre [60-70 %] et [90-100 %] dans ces pays). On peut donc en conclure que rien ne permet de penser que la possibilité théorique qu'ont les constructeurs "étranger" de vendre des autobus urbains et interurbains directement au client final ait eu un impact sensible sur la concurrence dans ces pays.
(254) L'étude de marché réalisée par la Commission permet d'entrevoir quelles en sont les raisons. Tout d'abord, les pouvoirs publics jouent un rôle comparativement plus important sur les marchés des autobus urbains et interurbains, en tant qu'acheteurs et/ou organes responsables des appels d'offres. L'étude a également montré que ces ventes continuent à faire l'objet de spécifications techniques détaillées, qui vont souvent au-delà de ce qui est exigé par les réglementations nationales. Outre les explications immatérielles, telles que la fidélité aux marques nationales et les difficultés linguistiques, des raisons purement économiques peuvent également jouer un rôle. Parmi celles-ci, on peut citer le fait que le coût des transactions peut être plus élevé s'il faut établir des contacts avec des fournisseurs implantés dans d'autres pays. Certains clients ont souligné que ces véhicules étaient généralement vendus avec certaines garanties et/ou contrats de service après-vente. Or, ils craignent de ne pas pouvoir bénéficier du même niveau de service après-vente dans le pays où ils sont établis, même s'ils ont acheté des véhicules auprès du même constructeur mais dans un autre pays. En outre, lorsque l'acheteur possède son propre atelier pour les entretiens et les réparations de routine, les coûts liés au maintien d'un stock de pièces détachées et d'outils spécifiques à une marque ne les inciteront guère à opter pour plusieurs marques. En outre, pour les mêmes raisons que celles indiquées ci-dessus pour les autocars de tourisme, l'achat d'autobus urbains et interurbains dans un autre pays est susceptible d'augmenter les risques et les coûts liés au changement d'immatriculation des véhicules et à leur valeur de revente.
Les exigences techniques varient selon les États membres
(255) Les différences dans les longueurs maximales autorisées qui ont été évoquées ci-dessus pour les autocars de tourisme s'appliquent également aux autobus urbains et interurbains. Il en va de même pour les spécifications liées à la conduite à gauche au Royaume-Uni et en Irlande (29). En outre, il convient de rappeler qu'il n'existe pas de marché pour les bus interurbains dans ces deux pays. Au cours de l'étude de marché, des tiers ont fait savoir que, sur les marchés nordiques, un accès surbaissé (plutôt qu'un plancher surbaissé) est généralement exigé pour les autobus urbains. Il existe également une demande pour des autobus fonctionnant à l'éthanol, qui est propre aux pays nordiques. Les constructeurs qui ne ciblent pas traditionnellement leurs ventes sur la région nordique sont donc confrontés à des coûts d'aménagement supplémentaires, tout comme pour les autocars de tourisme.
(256) Comme il a été indiqué précédemment, ces véhicules sont généralement achetés par des opérateurs publics ou privés assurant des services de transports publics. L'attention de la Commission a été attirée sur le fait que les pouvoirs publics responsables des transports publics continuent à influer sur les conditions de la demande, même lorsque ces services ont été privatisés, dans la mesure où ce sont eux qui fixent, dans les appels d'offres, le détail des conditions auxquelles doivent répondre les spécifications des véhicules. On peut citer, à titre d'exemple, les demandes d'autobus fonctionnant à l'éthanol. De ce fait, ces exigences techniques supplémentaires non réglementaires seront d'une importance capitale pour tout opérateur de services souhaitant participer à un appel d'offres.
Les niveaux de prix diffèrent sensiblement d'un État membre à l'autre
(257) Tout comme pour les autocars de tourisme, le fait que l'achat des autobus urbains et interurbains soit effectué au niveau national se traduit par des écarts de prix (hors taxes) importants, y compris entre pays voisins. C'est ainsi que, selon les informations transmises par Volvo, les prix de cette dernière pour un même modèle d'autobus urbain et interurbain sont plus élevés de [10-20 %] et [10-20 %] respectivement en Suède qu'en Norvège. De même, les prix facturés en Finlande sont plus élevés de [0-10 %] et [20-30 %] que les prix correspondants au Danemark. Un bus urbain acheté au Royaume-Uni coûte [20-30 %] de plus que le même modèle acheté en Norvège. Des écarts de prix similaires se retrouvent également dans les informations transmises par Scania ainsi que par d'autres constructeurs d'autobus urbains ou interurbains. Enfin, des documents internes de Volvo communiqués à la Commission font aussi état de différences de prix entre d'autres États membres voisins. D'après ces informations, un autobus urbain à deux essieux et à plancher surbaissé coûte [20-30 %] de plus aux Pays-Bas qu'en Belgique et un autobus urbain articulé à plancher surbaissé coûte [10-20 %] de plus en Italie qu'en Autriche (prix de 1999).
(258) Des différences de prix entre pays voisins telles que celles indiquées ci-dessus sont généralement incompatibles avec l'affirmation de Volvo selon laquelle les pays nordiques (Suède, Finlande, Norvège et Danemark), le Royaume-Uni et l'Irlande ne devraient pas être considérés comme des marchés géographiques distincts. En effet, si les marchés dépassaient le cadre national, on pourrait penser que les acquéreurs d'autobus urbains et interurbains profiteraient des différences de prix qui existent et achèteraient leurs véhicules dans un pays voisin.
Conclusion sur le marché géographique en cause pour les autobus urbains et interurbains
(259) Compte tenu des éléments qui précèdent, la Commission estime que, pour le marché des autobus urbains et interurbains, il convient d'apprécier l'impact de l'opération notifiée sur la concurrence de façon individuelle pour chacun des pays nordiques (Suède, Finlande, Norvège et Danemark) et pour l'Irlande.
C. APPRÉCIATION
(260) Avant d'examiner individuellement les marchés des autobus urbains, des autobus interurbains et des autocars de tourisme dans les États membres susmentionnés, il convient de traiter deux questions particulières soulevées par Volvo dans sa réponse et lors de l'audition, à savoir les résultats de l'enquête menée par la Commission sur le marché et le problème de l'érosion des parts de marché.
Réaction des clients
(261) En ce qui concerne les résultats de l'enquête menée par la Commission sur le marché des autobus et des autocars, Volvo a fait valoir, dans sa réponse et lors de l'audition, que les clients ne manifestaient pas de préoccupations excessives à propos du projet de concentration. La Commission a soigneusement examiné cette remarque et elle est parvenue à la conclusion qu'elle n'était pas corroborée par les faits connus. Ainsi qu'il a été dit précédemment à propos du marché des poids lourds, pour examiner l'argument de Volvo selon lequel les clients ne sont pas préoccupés, il convient d'abord d'avoir à l'esprit qu'en dépit d'une certaine tendance au regroupement observée au cours des dix dernières années, comme la partie notifiante l'a également indiqué dans sa notification et sa réponse, l'industrie des autobus se caractérise elle aussi par la structure fragmentée de sa clientèle, en particulier en ce qui concerne les autocars de tourisme.
(262) En outre, pour les raisons déjà évoquées au sujet des poids lourds, l'élément à prendre en considération n'est pas, comme l'estime Volvo, le nombre de "plaintes" qui ont été formulées. Il convient au contraire de procéder à une analyse qualitative de toutes les informations disponibles, y compris des observations présentées par les tiers. Lorsque, comme c'est le cas en l'espèce, la concentration envisagée conduirait à des parts de marché extrêmement élevées pour l'entité issue de l'opération, le fait que même certains des plus gros clients indiquent, entre autres, que les parties domineront le marché, doit être considéré comme significatif. La Commission ne saurait par conséquent retenir l'argument de Volvo selon lequel l'opération ne suscite guère de préoccupations.
(263) En ce qui concerne l'enquête réalisée par GfK pour le compte de Volvo aux fins de la réponse, il convient de noter qu'elle a été menée par téléphone sur un échantillon des acheteurs d'autobus et d'autocars Volvo et Scania, dans chacun des quatre pays nordiques, au Royaume-Uni et en Irlande. La liste des clients a été fournie par Volvo. Si elle fournit certaines indications sur les caractéristiques et les réactions des clients, l'enquête n'identifie pas les acheteurs d'autocars, d'autobus interurbains et d'autobus urbains. Elle ne permet donc pas de tirer les conclusions détaillées nécessaires concernant le comportement de chacun de ces groupes de clients.
Érosion des parts de marché
(264) Volvo a invoqué l'effet d'érosion des parts de marché lié à la politique de diversification des sources d'approvisionnement pratiquée par les clients. Toutefois, en ce qui concerne les autobus urbains et interurbains et les autocars de tourisme, Volvo n'a pas été en mesure d'établir que des pertes de parts de marché modifiant sensiblement la situation concurrentielle sur ces marchés se produiront effectivement. Volvo n'a fourni aucune donnée à l'appui de ses affirmations selon lesquelles un important effet d'érosion des parts de marché se produirait. Elle renvoie simplement à la décision de la Commission dans l'affaire Mercedes-Benz/Kässbohrer, qui concernait principalement les marchés allemands des autobus urbains et interurbains et des autocars de tourisme.
(265) Dans cette affaire, la Commission avait estimé que les marchés étaient de dimension nationale. Elle avait tenu compte, dans son appréciation, d'éléments structurels susceptibles de modifier les conditions de concurrence et qui justifiaient une interprétation plus dynamique de l'importance des parts de marché des parties à la concentration. La Commission avait estimé que ces facteurs structurels pouvaient notamment englober la capacité de concurrents réels à faire obstacle à l'action de la nouvelle entité, la perspective d'un accroissement sensible de la concurrence potentielle émanant des concurrents les plus puissants, la possibilité d'une entrée rapide sur le marché ou la puissance d'achat des clients importants. La Commission a notamment tenu compte du fait qu'il y aurait probablement une concurrence réelle et potentielle importante, ainsi que des conséquences qu'auraient les appels d'offres publics. Dans cette affaire, la Commission avait constaté que la quantité réduite des importations sur le marché allemand dans le passé n'était pas due uniquement à des barrières à l'entrée de nature immatérielle, telles que les relations clients/fournisseurs et la fidélité aux marques, mais aussi au fait que les produits des fournisseurs étrangers n'étaient pas adaptés au marché allemand. La Commission en avait conclu que la concurrence potentielle, alliée à la concurrence réelle existante, était suffisante pour limiter la liberté de manœuvre de la nouvelle entité sur le marché allemand, du fait que les barrières matérielles à l'entrée pouvaient être surmontées et que l'on pouvait s'attendre à ce que les barrières immatérielles perdent de l'importance.
(266) Toutefois, la Commission note qu'il existe, entre les circonstances entourant ces deux affaires, des différences importantes, qui font que l'on ne peut les mettre directement en parallèle. Premièrement, en termes de taille du marché, l'Allemagne est de loin le plus important marché pour les autobus en Europe, et les constructeurs ont stratégiquement intérêt à s'y implanter. Deuxièmement, à la suite de la concentration, deux autres constructeurs nationaux importants d'autobus et d'autocars, MAN et Neoplan, sont restés sur le marché, en plus de constructeurs étrangers tels que Bova. Tel n'est pas le cas dans la présente affaire.
(267) Toutefois, même si l'on devait admettre la possibilité qu'un certain effet d'érosion des parts de marché se produise après la concentration envisagée entre Volvo et Scania, dans l'affaire Mercedes-Benz/Kässbohrer, les faits montrent que la perte de parts de marché n'a été que de 3 à 5 % sur quatre ans, selon les informations communiquées par Volvo elle-même, et que cette perte a mis plus longtemps à se produire qu'on ne l'avait prévu au moment de la concentration.
(268) Dans sa réponse, Volvo affirme que l'expérience qu'elle a faite sur le marché suédois des autocars, où sa part est tombée de façon nette en 1998, devrait être considérée comme une preuve du fait que tous les marchés des autobus sont ouverts à la concurrence et que les parts de marché cumulées de Volvo et de Scania, qui sont élevées, ne devraient pas constituer un motif de préoccupation. Toutefois, Volvo n'a pas été en mesure d'expliquer avec précision pourquoi sa part du marché suédois des autocars avait diminué ni pourquoi cette expérience devrait pouvoir être transposée sur d'autres marchés des autocars en cause. C'est pourquoi, tout en reconnaissant que ces marchés ne sont pas entièrement fermés à la concurrence et qu'ils sont donc susceptibles d'évoluer, la Commission estime que les informations dont elle dispose ne lui permettent pas d'ignorer les parts de marché extrêmement élevées et stables détenues sur les autres marchés en cause. La Commission considère, en particulier, que la perte de parts de marché sur le marché suédois des autocars peut être due à des facteurs particuliers, tels que les changements survenus au niveau de la propriété de certains des principaux acteurs suédois de ce marché. En effet, certains des principaux acteurs du marché suédois des autocars de tourisme ont été rachetés récemment par des sociétés, telles que Vivendi, dont la présence au niveau international fait qu'elles sont davantage susceptibles d'acheter des marques étrangères.
Autocars de tourisme
(269) Volvo et Scania sont toutes deux très présentes dans la plupart des États membres. Toutefois, en Autriche, en Belgique, en France, en Allemagne et au Luxembourg, leurs parts de marché cumulées ont été inférieures à 15 % en 1998. Par conséquent, il n'est pas nécessaire d'examiner ces marchés aux fins de l'appréciation de l'opération notifiée. Les parts de marché de Volvo et de Scania dans les autres États membres (et en Norvège) sont indiquées dans le tableau ci-dessous.
EMPLACEMENT TABLEAU
(270) Ainsi qu'il ressort du tableau figurant au considérant 269, l'entité issue de l'opération restera soumise à la concurrence d'au moins un autre fournisseur possédant une part de marché similaire, voire supérieure, en Italie, aux Pays-Bas, en Espagne et en Suède. Par conséquent, la concentration prévue ne risque pas de créer ou de renforcer une position dominante sur ces marchés. Au Danemark, en Norvège et au Portugal, la part de marché cumulée des parties se situe entre [30-40 %]. Toutefois, dans chacun de ces pays, la nouvelle entité resterait soumise à la concurrence d'au moins un autre fournisseur possédant une part de marché supérieure à 25 %. En outre, les parts de marché cumulées des parties dans ces trois pays ont connu des fluctuations importantes au cours des trois dernières années. Dans ce contexte, les informations dont dispose la Commission n'indiquent pas que la concentration prévue pourrait aboutir à la création ou au renforcement d'une position dominante au Danemark, en Norvège ou au Portugal.
(271) D'après les chiffres communiqués par Volvo, les parties obtiendraient des parts de marché très importantes en Grèce et en Irlande. Toutefois, il convient de noter que, dans ces deux pays, le marché des autocars de tourisme est très limité (on y a enregistré au total 16 et 15 immatriculations respectivement en 1998). Il convient de préciser que le calcul des parts de marché dans ces pays est rendu difficile par le fait que, dans la plupart des États membres, les immatriculations officielles ne font pas la distinction entre les autobus urbains, les autobus interurbains et les autocars (30). Au cours de son enquête, la Commission a dû revoir, sur la base d'informations communiquées par des tiers, les chiffres sur les parts de marché que Volvo avait transmis pour la Grèce et l'Irlande. Si l'on tient compte de ces informations communiquées par des tiers, la part de marché cumulée de Volvo et de Scania s'avère nettement inférieure à celle indiquée dans le tableau figurant au considérant 269. De fait, dans ces deux États membres, les ventes cumulées de Volvo et de Scania en 1998 ont été inférieures à celles d'au moins un autre constructeur. Cela permet de conclure que, d'après les informations dont dispose la Commission, le projet de concentration n'aboutira pas à la création ou au renforcement d'une position dominante en Grèce et en Irlande.
(272) Il y a toutefois deux pays dans lesquels le projet de concentration aurait un impact sensible sur la concurrence: la Finlande et le Royaume-Uni. Chacun de ces deux marchés sera analysé en détail ci-dessous.
Il y aurait création d'une position dominante sur le marché finlandais des autocars de tourisme
Taille du marché et parts de marché
(273) Le marché finlandais des autocars est relativement peu important en volume, puisque les ventes annuelles se situent entre 80 et 100 unités. Ainsi qu'il ressort du tableau ci-dessus, la part de marché cumulée des parties sur ce marché s'élevait à [80-90 %] en 1998. Elle est restée très stable à ce niveau élevé ([80-90 %] en 1996, [80-90 %] en 1997). Même calculée sur une période de dix ans (1989-1998), elle se maintient à [80-90 %]. Bien que la répartition des parts de marché entre Volvo et Scania soit également demeurée relativement stable au cours de cette période, Volvo détenant généralement [50-60 %] du marché et Scania [30-40 %], cette tendance s'est modifiée en 1998, année au cours de laquelle la part de Volvo est passée à [60-70 %] alors que celle de Scania tombait à [20-30 %]. L'évolution des parts de marché des parties montre que tout gain de Scania s'est traduit par une perte pour Volvo, et inversement. Ces chiffres confirment donc les déclarations de tiers selon lesquelles Scania était en concurrence avec Volvo pour les mêmes clients.
(274) Aucun autre fournisseur n'a enregistré de ventes importantes d'autocars de tourisme en Finlande au cours des dix dernières années. Dans la notification, Volvo a néanmoins affirmé que DaimlerChrysler constituait un concurrent sérieux. Toutefois, cette affirmation ne peut être acceptée, dans la mesure où les ventes de DaimlerChrysler se sont stabilisées à un niveau inférieur à 5 % du marché. Cela vaut également pour tous les autres constructeurs.
Caractéristiques de la demande
(275) Le marché finlandais (des autocars de tourisme et autres autobus) est caractérisé par le fait que, depuis toujours, les clients ont souvent acheté le châssis et la carrosserie du véhicule séparément. À cet égard, des tiers ont affirmé que cela présentait deux grands avantages: premièrement, les carrossiers opèrent généralement à l'échelon national et sont donc bien placés pour produire une carrosserie adaptée aux besoins locaux, qui concernent généralement plus la carrosserie que le châssis. Deuxièmement, ce type d'achat a été traditionnellement utilisé pour réduire le poids du constructeur de châssis au cours des négociations. À cet égard, des tiers ont fait savoir que la position de Volvo avait été renforcée par l'acquisition, en 1998, du plus gros carrossier finlandais, Carrus. Ainsi, l'Association finlandaise des autobus et autocars, qui est intervenue lors de l'audition en tant que tiers, a indiqué que Volvo détenait une part de 75 % en volume de la production de carrosseries par l'intermédiaire des usines de Carrus dont elle est propriétaire en Finlande. Cela semble concorder avec l'observation selon laquelle la part de marché de Volvo a sensiblement augmenté entre 1997 et 1998. Cette capacité à renforcer sensiblement ses parts de marché dont Volvo a fait preuve à la suite de l'acquisition de Carrus diminue également beaucoup la crédibilité de l'argument de Volvo selon lequel, malgré une importante modification structurelle du marché, les clients finlandais qui achètent des autocars de tourisme "soutiendraient" un deuxième constructeur afin de pouvoir garder une deuxième source d'approvisionnement. En fait, l'augmentation de la part de marché de Volvo laisse à penser que ces clients favoriseront le constructeur qui possède la position stratégiquement la plus forte.
(276) En ce qui concerne les clients, il convient de noter que 83 % de l'ensemble des sociétés d'autobus finlandaises possèdent 20 véhicules au moins (27 % possèdent une flotte de 1 à 5 bus, 28 % une flotte de 6 à 10 bus et 18 % une flotte de 11 à 20 bus). Le nombre de petits clients est particulièrement élevé chez les acheteurs d'autocars de tourisme. L'étude de marché a confirmé que, pour ces petites sociétés de transport, il était très avantageux de concentrer les achats chez un seul fournisseur, car cela réduit à la fois les coûts et la complexité liés au maintien de contacts multiples avec plusieurs fournisseurs, à la gestion des pièces de rechange et des stocks, à la formation des chauffeurs et des mécaniciens, etc. L'étude a également confirmé que ces clients ne pouvaient acheter des autocars de tourisme à des fournisseurs situés hors de Finlande que dans une mesure limitée. C'est également la position défendue lors de l'audition par l'Association finlandaise des autobus et autocars. Ainsi qu'il a été indiqué précédemment, cela a permis à Volvo et à Scania d'imposer des prix beaucoup plus élevés en Finlande que, par exemple, en Suède, un pays voisin.
Barrières à l'entrée et concurrence potentielle
(277) Comme il y a un certain nombre de caractéristiques communes entre les centres de service après-vente pour autocars de tourisme, pour autres types d'autobus et pour poids lourds, il est important de noter que Volvo et Scania possèdent également des parts de marché tout aussi élevées dans le secteur des autobus urbains et interurbains (voir considérant 291) et dans celui des poids lourds en Finlande. Le fait que la plupart des opérateurs d'autocars de tourisme sont de petites sociétés privées signifie qu'elles peuvent s'appuyer sur leur fournisseur lorsque leurs véhicules ont besoin de travaux de réparation et d'entretien plus complexes. Cela explique pourquoi les acheteurs d'autocars de tourisme en Finlande s'approvisionneraient généralement moins volontiers auprès de DaimlerChrysler ou de l'un des autres constructeurs, qui ne possèdent pas un réseau de centres de service après-vente comparable à celui des parties. Un certain nombre de clients ont également indiqué que les prix facturés par les autres constructeurs pour le service après-vente et les pièces détachées pouvaient être nettement plus élevés que ceux de Volvo et de Scania, et que les autres constructeurs possèdent des systèmes logistiques moins bien développés, qui entraînent des délais de livraison plus long pour les pièces détachées. Ces avis montrent que pour les autocars de tourisme également, il est important de disposer d'un réseau de centres de service après-vente bien implanté.
(278) Volvo et Scania possèdent actuellement respectivement 31 et 34 centres de service après-vente en Finlande qui sont tous, d'après Volvo, adaptés tant aux poids lourds qu'à tous les types d'autobus. Dans sa réponse, la partie notifiante a communiqué des informations complémentaires sur les centres de service après-vente de ses concurrents. Selon ces informations, le nombre de centres de service après-vente des concurrents serait sensiblement moins élevé que celui de l'entité issue de l'opération. Renault possède 45 centres, DaimlerChrysler 34 et MAN 25. On peut donc en conclure que les concurrents de l'entité issue de l'opération disposeraient de réseaux de service moins denses en Finlande. Dans sa réponse, Volvo conteste l'importance d'un réseau de service dense pour les acheteurs d'autobus urbains, d'autobus interurbains et d'autocars, en invoquant la forte proportion des activités d'entretien accomplies par les clients eux-mêmes; elle mentionne, à titre d'exemple, la société d'autobus de Göteborg. Volvo soutient également que les clients peuvent recourir aux réseaux de service après-vente des concurrents ainsi qu'à des centres de service indépendants pour les entretiens et les réparations. S'il est vrai qu'un certain nombre de clients disposent des moyens nécessaires pour entretenir et réparer eux-mêmes les véhicules, on ne peut, compte tenu de la taille relativement petite des sociétés d'autocars en général et du fait que des réparations plus complexes sont parfois nécessaires, sous-estimer la valeur d'un service après-vente efficace, en particulier en ce qui concerne les petites sociétés. Comme il a été indiqué précédemment, le service offert par le constructeur est également un élément perçu par la clientèle comme étroitement associé à l'image de marque. Or, indépendamment du montant des investissements nécessaires pour mettre en place un réseau dense, il a été porté à la connaissance de la Commission que l'implantation d'un réseau de centres de service après-vente concurrentiel coûte relativement plus cher en Finlande (et dans les autres pays nordiques) que dans d'autres pays de l'EEE, en raison de plusieurs facteurs, parmi lesquels des salaires élevés, les distances à parcourir, le parc total des véhicules, qui est relativement faible et enfin la position détenue par Volvo et Scania.
(279) Il ressort de ce qui précède que, avant la concentration, Scania constituait la seule source réelle de pression concurrentielle à laquelle Volvo était confrontée sur le marché finlandais. Or, la concentration prévue éliminerait cette source de concurrence. L'étude de marché a montré qu'une fois la concentration réalisée, Volvo aurait la possibilité d'augmenter sensiblement ses prix et que les petites sociétés d'autobus, qui constituent le principal groupe de clients pour les autobus de tourisme, ne seraient pas en mesure de s'opposer à l'action de la nouvelle entité sur le marché. L'opération notifiée aboutirait donc à la création d'une position dominante sur le marché finlandais des autocars de tourisme.
(280) Volvo estime qu'il n'y a pas de barrières à l'entrée et qu'elle serait donc soumise à la concurrence potentielle effective de tous les autres constructeurs européens, qui auraient de meilleures possibilités d'accroître leur présence sur le marché à la suite de la concentration. Toutefois, ainsi qu'il a été indiqué précédemment, il existe un certain nombre de caractéristiques techniques qui rendent les autocars de tourisme destinés à l'Europe continentale moins adaptés au marché finlandais, et il est donc nécessaire d'y apporter un certain nombre d'aménagements en fonction des conditions climatiques et routières, des longueurs de véhicule autorisées, etc. Des tiers ont indiqué que le coût de l'adaptation de leurs modèles actuels au marché finlandais serait important. En outre, afin de devenir des concurrents importants sur le marché, les autres constructeurs devraient investir dans la mise à niveau de leur réseau ou dans l'établissement d'un réseau de centres de service après-vente comparable à celui de Volvo et de Scania. L'étude de marché a également montré que d'autres fournisseurs considéraient la taille limitée du marché finlandais comme une barrière à une implantation effective, dans la mesure où il pourrait s'avérer difficile d'amortir les investissements nécessaires dans un laps de temps raisonnable. Il faut donc en conclure que Volvo n'a pas prouvé de façon suffisante que, une fois le projet de concentration réalisé, elle serait soumise à une concurrence potentielle suffisante pour l'empêcher d'exercer le pouvoir de marché accru que lui aurait conféré l'acquisition de Scania.
Conclusion relative au marché finlandais des autocars de tourisme
(281) Pour les raisons indiquées ci-dessus, l'opération notifiée entraînerait la création d'une position dominante sur le marché finlandais des autocars de tourisme.
Il y aurait création d'une position dominante sur le marché des autocars de tourisme au Royaume-Uni
Taille du marché et parts de marché
(282) En termes de volume, le marché des autocars au Royaume-Uni est le deuxième en Europe (après l'Allemagne). En 1998, 1320 autocars de tourisme ont été vendus dans ce pays. La part de marché cumulée des parties sur ce marché en 1998 s'est élevée à 52 % dont 42 % pour Volvo et 10 % pour Scania. En 1996, leur part cumulée s'est élevée à 57 %, et en 1997, à 59 %. Si on la mesure sur une période de 10 ans (1989-1998), elle était de 57 %. Tout comme en Finlande, c'est Volvo qui a détenu la position la plus forte tout au long de cette période, puisque sa part de marché s'est située entre 42 % et 50 %, alors que celle de Scania s'est stabilisée autour de 10 %. Il semble que l'une des principales raisons à l'origine de la forte position que Volvo a réussi à conserver au Royaume-Uni soit l'acquisition de la société britannique Leyland Buses. Toutefois, l'étude de marché montre que, malgré sa part de marché moins élevée, Scania a été l'un des principaux concurrents de Volvo, que les deux sociétés ont généralement été en concurrence pour les mêmes clients et que les véhicules de Scania sont considérés par un certain nombre d'entre eux comme les plus à même de remplacer ceux de Volvo. Des données internes de Volvo confirment que Volvo et Scania sont considérées par leurs clients sur le marché des autocars au Royaume-Uni comme les marques les plus interchangeables en termes de qualité, de sécurité et d'impact environnemental.
(283) En dehors de Volvo et Scania, l'offre sur le marché des autocars de tourisme au Royaume-Uni est très fragmentée, tous les autres constructeurs (DaimlerChrysler, MAN, DAF Bus, Van Hool et Dennis) ayant des parts de marché de l'ordre de 10 %.
Caractéristiques de la demande
(284) Tout comme en Finlande, les clients du secteur des autocars de tourisme au Royaume-Uni achètent souvent le châssis et la carrosserie séparément (Volvo a déclaré que 80 % de ses ventes concernaient des châssis uniquement). À cet égard, des tiers ont affirmé que la position de Volvo se trouvait renforcée par la participation indirecte qu'elle détient dans l'un des plus importants carrossiers du Royaume-Uni, Plaxton. En outre, certains tiers pensent que ce type d'intégration verticale prendra de plus en plus d'importance au cours des années à venir et citent Scania, qui ne vend que des autocars de tourisme complets au Royaume-Uni, en exemple de cette tendance.
(285) Pour ce qui est des clients, Volvo considère le Royaume-Uni comme un bon exemple de marché entièrement privatisé, avec des exploitants d'autobus privés puissants et avertis. D'après elle, les cinq plus gros exploitants représentent environ [60-70 %] de la demande. Le degré de dispersion des clients est cependant plus élevé sur le marché des autocars que sur celui des autobus urbains, ce qui est logique si l'on considère qu'il est plus facile de réaliser des économies d'échelle lorsque l'on exploite un nombre important de services de transports publics de ligne que dans le secteur des excursions et du tourisme, qui est le principal domaine d'activité pour les autocars de tourisme. Le nombre des petits clients est plus élevé parmi les utilisateurs d'autocars de tourisme, et pour les petites sociétés d'autobus, il est plus intéressant de concentrer les achats auprès d'un seul fournisseur, ainsi qu'il a été exposé ci-dessus pour la Finlande (réduction du coût et de la complexité que supposent des contacts avec plusieurs fournisseurs, la gestion des pièces détachées et des stocks, la formation des chauffeurs et des mécaniciens, etc.). Ici aussi, l'étude de marché a confirmé qu'il n'était pas rentable, pour ces clients, d'acheter des autocars de tourisme auprès de fournisseurs implantés hors du Royaume-Uni. Cela a permis a Volvo et à Scania d'imposer des prix sensiblement plus élevés au Royaume-Uni que, par exemple, aux Pays-Bas, un pays voisin.
Concurrence réelle et potentielle
(286) Volvo et Scania possèdent des parts de marché élevées dans le secteur des autobus urbains (voir considérant 291) et deviendraient le numéro un sur le marché des poids lourds au Royaume-Uni. Ainsi qu'il a été dit ci-dessus à propos de la Finlande, les caractéristiques communes qui existent entre les réseaux de centres de service après-vente pour tous ces véhicules et le fait que de nombreux acheteurs d'autocars de tourisme dépendent de leur fournisseur pour les réparations et l'entretien créent un effet de verrouillage. Cela concorde avec la conclusion selon laquelle les clients du secteur des autocars de tourisme se caractérisent généralement par une fidélité élevée aux marques. Volvo possède 94 centres de service après-vente et Scania 80 au Royaume-Uni. Actuellement, les principaux concurrents disposent d'un réseau similaire de centres de service après-vente: Iveco a 119 centres et DaimlerChrysler 82.
(287) Une fois la concentration prévue réalisée, Volvo serait beaucoup plus en mesure de profiter de cette fidélité à la marque. Par exemple, si elle avait tenté d'augmenter ses prix avant la concentration, elle aurait dû peser les avantages potentiels d'une telle augmentation par rapport au risque qu'un certain nombre de clients se tournent vers d'autres constructeurs. Compte tenu du fait que les opérateurs du marché estiment que les véhicules de Scania sont particulièrement à même de remplacer ceux de Volvo, celle-ci aurait dû, en procédant à une telle augmentation, tenir compte de l'existence d'un risque élevé que des clients se tournent vers Scania. Or, si la concentration est réalisée, une telle réaction de la part des clients n'aurait plus aucune conséquence, en termes de recettes, pour Volvo. De ce fait, l'opération qui est prévue réduirait les risques qu'il y aurait, pour Volvo, à exercer son pouvoir de marché.
(288) Outre l'effet de neutralisation des réactions potentielles des clients (en ce qui concerne Scania) à une augmentation des prix, la concentration aurait également pour effet de renforcer le leadership exercé par Volvo sur le marché. Étant donné que l'opération prévue ferait passer la part détenue par Volvo sur le marché des autocars de tourisme au Royaume-Uni à plus de 50 %, il est probable que les autres fournisseurs (dont aucun ne détient plus de 10 % du marché) seraient alors de plus en plus disposés à accepter ce leadership de Volvo sur les prix. De ce fait, l'opération réduirait également le risque d'une réaction agressive de la part des petits fournisseurs au cas où Volvo, par exemple, augmenterait les prix de ses autocars de tourisme.
(289) Il ressort de ce qui précède que, avant la concentration, Scania constituait l'une des principales sources de pression concurrentielle pour Volvo sur le marché britannique. Or, si le projet de concentration se réalisait, il aboutirait à l'élimination de cette source de concurrence, ce qui renforcerait considérablement la capacité de Volvo à faire usage de son pouvoir de marché. En outre, il est peu probable que les petites sociétés d'autobus, qui sont les principaux acheteurs d'autocars de tourisme, aient la possibilité de s'opposer à l'action de la nouvelle entité sur le marché.
Conclusion relative au marché des autocars de tourisme au Royaume-Uni
(290) Pour les raisons indiquées ci-dessus, la Commission est arrivée à la conclusion que l'opération notifiée aboutirait à la création d'une position dominante sur le marché des autocars de tourisme au Royaume-Uni.
Autobus urbains et interurbains
(291) Tant Volvo que Scania ont des activités importantes sur ces marchés dans la plupart des États membres. Toutefois, pour les autobus urbains, leurs parts de marché cumulées en Autriche, en Belgique, en France, en Allemagne, en Italie, au Luxembourg et en Espagne ont été inférieures à [10-20 %] en 1998. Pour les autobus interurbains, elles ont aussi été inférieures à [l0-20 %] dans tous ces États membres, ainsi qu'aux Pays-Bas. Il n'est donc pas nécessaire d'apprécier ces marchés aux fins de l'appréciation de l'opération notifiée. Les parts de marché de Volvo et de Scania dans les autres États membres (et en Norvège) sont indiquées dans le tableau suivant.
EMPLACEMENT TABLEAU
(292) Le tableau figurant au considérant 291 montre que, sur les deux marchés de produits, l'entité issue de la concentration resterait exposée à la concurrence d'au moins un autre fournisseur disposant de parts de marchés similaires, voire supérieures, aux Pays-Bas et au Portugal. Il n'y aurait donc aucun risque que la concentration prévue aboutisse à la création ou au renforcement d'une position dominante sur ces marchés.
(293) La situation présente, ici aussi, des caractéristiques particulières au Royaume-Uni et en Grèce, deux États membres où, selon les chiffres fournis par Volvo, les parties atteindraient des parts de marché cumulées importantes. Volvo a fait remarquer que la part de marché cumulée des parties dans le secteur des autobus urbains au Royaume-Uni avait connu une chute brutale en 1999, la part de marché de Volvo tombant à 18 %. D'après les informations dont dispose la Commission, il ne semble donc pas que le projet de concentration puisse aboutir à la création ou au renforcement d'une position dominante au Royaume-Uni.
(294) La situation en Grèce doit également être examinée de près. La taille totale du marché grec des autobus urbains et interurbains est très petite (environ 100 et 20 véhicules respectivement en 1998). Les opérateurs de transports publics d'Athènes et de Thessalonique sont les principaux acheteurs de ce type de véhicules en Grèce. Ils achètent tous les autobus urbains et interurbains par le biais d'appels d'offres publics, ce qui a pour effet de rendre les parts de marché en Grèce extrêmement fluctuantes. Au cours de la période 1996-1998, la part de Volvo sur le marché grec des autobus urbains a été de [20-30 %], [60-70 %]et [10-20 %] contre [10-20 %], [30-40 %] et [30-40 %] pour Scania, et [60-70 %], [0-10 %] et [40-50 %] pour le principal concurrent, DaimlerChrysler. Compte tenu de ces circonstances, la Commission estime que le projet de concentration n'aboutirait pas à la création ni au renforcement d'une position dominante sur le marché grec des autobus urbains et interurbains.
(295) Il y a toutefois cinq pays dans lesquels la concentration prévue pourrait avoir des effets importants sur la concurrence: la Suède, la Finlande, la Norvège, le Danemark et l'Irlande. Comme le marché des autobus urbains et interurbains des quatre premiers pays mentionnés ci-dessus présente un certain nombre de caractéristiques communes, l'appréciation ne contiendra une description détaillée des marchés que pour un seul de ces pays (la Suède). L'appréciation des marchés des trois autres pays nordiques se fera ensuite largement par référence à cette première appréciation, une attention particulière étant accordée aux différences nationales. Enfin, le marché irlandais fera l'objet d'une appréciation distincte.
(296) L'une des caractéristiques communes des quatre pays nordiques est que tant Volvo que Scania sont des fournisseurs traditionnels dans toute cette zone et ont toujours bénéficié de positions très fortes, que ce soit pour les autobus urbains ou interurbains. L'étude de marché montre également que Volvo et Scania sont, depuis de nombreuses années, les principaux concurrents l'un de l'autre dans les pays nordiques. De ce fait, l'opération prévue entraînerait l'élimination du principal concurrent de Volvo sur ces marchés.
Il y aurait création d'une position dominante sur les marchés suédois des autobus urbains et interurbains
Taille du marché et parts de marché
(297) En 1998, le volume du marché suédois a été de 289 autobus urbains et 411 autobus interurbains. Pour les premiers, la part de marché cumulée des parties s'est élevée à [80-90 %] en 1998, dont [30-40 %] pour Volvo et [40-50 %] pour Scania. Pour les seconds, ces chiffres étaient de [80-90 %] (part cumulée), [60-70 %] (Volvo) et [20-30 %] (Scania). Pour les autobus urbains, la part de marché de Volvo a été de [40-50 %] en 1997 et [40-50 %] en 1996, les chiffres correspondants pour Scania étant de [30-40 %] en 1997 et [30-40 %] en 1996. Pour les autobus interurbains, la part de marché de Volvo a été de [70-80 %] en 1997 et [60-70 %] en 1996, les chiffres correspondants pour Scania s'élevant à [20-30 %] en 1997 et [30-40 %] en 1996. Bien que les parts de marché des parties aient légèrement varié au cours des trois dernières années, les chiffres fournis par Volvo montrent clairement que ces fluctuations se sont essentiellement opérées entre les deux parties. De même, si on mesure la part de marché cumulée sur une période de 10 ans (1989-1998), elle s'élève à [80-90 %] pour les autobus urbains et à [90-100 %] pour les autobus interurbains. Les chiffres montrent donc bien que tant Volvo que Scania ont été en mesure de conserver en permanence des parts de marché élevées et qu'elles ont constitué l'une pour l'autre la principale source de concurrence sur les deux marchés. L'étude de marché montre également que les clients suédois considèrent généralement Volvo et Scania comme offrant les substituts les plus proches sur les marchés des autobus urbains et interurbains, ce que confirment des données internes communiquées par Volvo.
(298) Du fait même que Volvo et Scania détiennent des parts de marché très élevées, tous les autres fournisseurs (DaimlerChrysler, Neoplan et Bova) possèdent, quant à eux, des parts peu importantes, de l'ordre de 2 à 10 %. De ce fait, l'entité issue de la fusion détiendrait une part de marché qui serait au moins huit fois plus élevée que celle de son concurrent le plus proche. Cette situation serait ainsi sensiblement différente de celle qui prévalait avant la concentration, où Volvo était confrontée à la concurrence d'une société, Scania, qui détenait une part de marché comparable pour les autobus urbains et enregistrait des ventes importantes dans le secteur des autobus interurbains. En outre, alors que la Suède a toujours été un des principaux marchés de Scania, rien ne prouve que ce soit le cas pour aucun des autres constructeurs. Or, cet élément présente de l'importance, dans la mesure où les clients sont très attachés à l'expérience et à l'engagement de chaque constructeur sur "leur" marché. Il en résulte que l'entité issue de la fusion deviendrait sans aucun doute le numéro un en Suède. Cela lui permettrait de beaucoup mieux répartir les coûts liés à n'importe quelle mesure nationale spécifique (par exemple la mise en place de réseaux de services, le maintien de contacts avec la clientèle et les pouvoirs publics, les campagnes de publicité, etc.) que tous ses autres concurrents, plus faibles.
Caractéristiques de la demande
(299) Les opérateurs suédois d'autobus urbains et interurbains ont été presque tous privatisés. D'après Volvo, trois opérateurs, Swebus, Linjebuss et Busslink, représentent [60-70 %] de la demande totale dans le secteur des autobus urbains et interurbains en Suède; ces sociétés disposent d'une puissance d'achat importante. Volvo a également donné plusieurs exemples de ce qu'elle considère être des "pertes de contrats importantes" vis-à-vis de ces gros acheteurs au cours des trois dernières années. La Commission admet que la privatisation et le regroupement des opérateurs d'autobus suédois a sans doute donné à ces grosses sociétés des possibilités de négociation comparativement meilleures que celles détenues autrefois par les opérateurs locaux plus petits, qui étaient généralement des entreprises publiques. Toutefois, on ne peut y voir la preuve que la concentration prévue n'entraînerait pas, en dépit des chevauchements importants qui se produiraient, un renforcement du pouvoir de marché de Volvo. La question à laquelle il convient en revanche de répondre consiste à savoir si les clients suédois auraient la possibilité de s'opposer avec suffisamment d'efficacité au comportement sur le marché de l'entité issue de la concentration. Tous les clients qui achèteraient les autobus de New Volvo ont pour caractéristique commune qu'ils achètent une proportion très élevée des véhicules dont ils ont besoin à Volvo et Scania (jusqu'à 100 %). Chaque client dépendrait par conséquent beaucoup plus de New Volvo que celle-ci ne dépendrait de lui. C'est pourquoi, sur la base de leurs achats, il n'est pas suffisamment établi que les clients suédois disposeraient d'une puissance d'achat suffisante pour peser sur le comportement de New Volvo sur le marché.
(300) Tout d'abord, il convient de noter que la plupart des opérateurs d'autobus urbains et interurbains suédois sont déjà privatisés depuis très longtemps (jusqu'à dix ans). Or, ainsi que le montrent les parts de marché mentionnées ci-dessus, Volvo et Scania ont en fait pu conserver des parts de marché très élevées et relativement stables au cours des dix dernières années. Dans un tel contexte, les légères augmentations de parts de marché qu'ont connues DaimlerChrysler, Neoplan et Bova au cours de la période qui a suivi la libéralisation du marché des autobus suédois ne peuvent pas être considérées comme une preuve corroborant l'affirmation de Volvo concernant d'"importantes pertes de contrat". En outre, il a été expliqué précédemment que les fluctuations de parts de marché sont essentiellement intervenues entre les parties. Il apparaît donc que même les gros acheteurs d'autobus urbains et interurbains en Suède ont une préférence marquée pour les produits Volvo et Scania. L'étude de marché laisse apparaître que la plupart des clients ne sont pas très sensibles aux prix, ce que confirme une enquête sur les autobus urbains menée auprès des clients par Volvo en 1996/1997, qui montrait que le prix d'achat constituait un facteur moins important que le réseau local de centres de service après-vente, la fiabilité et le coût des produits tout au long de leur durée de vie. L'affirmation de Volvo selon laquelle les clients de New Volvo réduiraient probablement leurs achats à celle-ci en réaction à la concentration a déjà été analysée lorsqu'a été abordée la question de l'effet d'érosion des parts de marché.
(301) Ensuite, il convient de noter que même si le marché des opérateurs de bus suédois est relativement concentré, il existe toujours un nombre important de petits opérateurs. Ces petits clients sont, à bien des égards, dans une position similaire à celle des clients qui achètent des autocars de tourisme, en ce sens qu'ils préféreront généralement concentrer leurs achats chez un seul fournisseur (pour des raisons telles que la réduction du coût et de la complexité qu'impliquent de multiples contacts avec plusieurs fournisseurs, la gestion des pièces détachées et des stocks, la formation des chauffeurs et des mécaniciens, etc.). En outre, les petits opérateurs d'autobus urbains et interurbains dépendent généralement plus de leurs fournisseurs pour le service après-vente. Pour toutes ces raisons, les petits clients n'auront que peu, voire pas du tout, de possibilités de s'opposer à des tentatives d'utilisation, par la nouvelle entité, de son pouvoir de marché accru après la concentration.
(302) En conclusion, Volvo n'a pas été en mesure de prouver que le niveau actuel de puissance d'achat des opérateurs d'autobus urbains et interurbains en Suède serait suffisant pour empêcher la nouvelle entité de profiter du pouvoir de marché accru que lui conférerait la concentration prévue.
Barrières à l'entrée et concurrence potentielle
(303) En Suède, Volvo et Scania détiennent également des parts de marché élevées dans le secteur des poids lourds et, dans une moindre mesure, des autocars de tourisme (voir le tableau figurant au considérant 269). De ce fait, étant donné que les clients qui achètent les autobus urbains et interurbains exigent du constructeur qu'il assure un service après-vente et que les centres chargés de ce service peuvent être utilisés pour tous ces types de véhicules, la clientèle se trouve fortement incitée à rester chez le même fournisseur et à faire preuve d'une grande fidélité à la marque concernée. Le fait que le réseau de centres de service après-vente de Volvo et Scania en Suède soit très étendu constitue donc une barrière supplémentaire à l'entrée pour les autres constructeurs d'autobus urbains et interurbains. Pour des raisons identiques à celles évoquées à propos du marché finlandais des autocars de tourisme, l'étude de marché montre également que les coûts d'implantation relativement élevés, notamment en ce qui concerne l'organisation des ventes et du service après-vente, combinés à la taille limitée, et donc au manque d'attrait, des marchés suédois, constituent une autre barrière importante à l'entrée.
(304) Volvo et Scania possèdent actuellement respectivement 116 et 105 centres de service après-vente en Suède. Tous leurs concurrents en ont beaucoup moins, le principal réseau concurrent disposant de moins d'un tiers du total des centres que posséderait la nouvelle entité. Par conséquent, les concurrents de la nouvelle entité seraient également défavorisés en ce qui concerne l'offre d'un réseau de centres de service après-vente pour toutes les catégories de véhicules. Enfin, les contraintes financières qui limitent les possibilités d'extension du réseau de centres de service après-vente décrites à propos de la Finlande valent aussi pour la Suède.
(305) Volvo a fait valoir que ses clients pratiquaient généralement une politique de double source d'approvisionnement et que ceux qui se sont jusqu'à présent fournis auprès de Volvo et de Scania étaient susceptibles de rechercher d'autres fournisseurs à la suite de la concentration. À son avis, cela pourrait conduire à une réduction des parts de marché de la nouvelle entité en Suède, au bénéfice d'autres constructeurs. Volvo a également déclaré qu'elle serait défavorisée, sur le plan de la concurrence, par rapport à d'autres constructeurs qui, selon elle, sont en avance sur elle en ce qui concerne les autobus [de certains types]. Or, cet argument n'ayant pas été confirmé par l'étude de marché, il ne peut être pris en considération. En ce qui concerne l'argument de Volvo relatif à l'érosion des parts de marché, il a déjà été analysé plus haut. Toutefois, il convient de noter que les documents internes et autres rapports sur lesquels s'appuie Volvo pour démontrer cet effet d'"érosion" concernent essentiellement les poids lourds et que la plupart d'entre eux ne contiennent aucune analyse spécifique de l'évolution des marchés des autobus urbains et interurbains. C'est pourquoi, outre les arguments avancés par la Commission en ce qui concerne les poids lourds, il convient de conclure de ce qui précède que l'affirmation de Volvo quant à une probable "érosion" importante des ventes d'autobus urbains et interurbains ne constitue qu'une estimation sans fondement solide, à laquelle on ne peut accorder un crédit suffisant pour lever les préoccupations suscitées par le regroupement des deux principaux concurrents sur le marché.
(306) La conclusion qui s'impose est au contraire que, si le projet de concentration devait être réalisé, Volvo se trouverait dans une position beaucoup plus forte pour faire usage de son pouvoir de marché. Si elle avait par exemple tenté, avant la concentration, d'augmenter ses prix, elle aurait dû évaluer les avantages potentiels d'une telle mesure par rapport au risque qu'une partie de sa clientèle se tourne vers d'autres constructeurs. Compte tenu de la position bien établie de Scania et du fait que celle-ci est perçue sur le marché comme étant le fournisseur le plus à même de se substituer à Volvo, comme le confirment des données internes de Volvo, celle-ci aurait dû prendre en compte le risque, particulièrement élevé en l'occurrence, que certains clients s'adressent désormais à Scania. Or, si la concentration se réalisait, une telle réaction de la clientèle n'aurait plus aucune conséquence pour Volvo en termes de recettes. De ce fait, l'opération prévue réduirait directement les risques que présente pour Volvo l'exercice de son pouvoir de marché.
(307) Outre l'effet de neutralisation des réactions potentielles des clients (en ce qui concerne Scania) à une augmentation des prix, la concentration aurait aussi pour effet de placer fermement Volvo en position de leader sur le marché. Compte tenu du fait que l'opération prévue ferait monter la part détenue par Volvo sur le marché suédois des autocars urbains d'environ [40-50 %] à quelque [80-90 %], elle aurait sans doute aussi pour effet d'inciter les autres fournisseurs (dont tous ont une part de marché inférieure à 10 %) à accepter de plus en plus le leadership exercé par Volvo sur les prix. Cela vaut également pour le marché des autobus interurbains, où la part de Volvo passerait de [50-60 %] à [80-90 %] et où le seul autre gros concurrent serait éliminé. De ce fait, l'opération réduirait également le risque d'une réaction agressive des plus petits fournisseurs au cas où, par exemple, Volvo déciderait d'augmenter ses prix.
(308) Ce qui vient d'être dit montre que, avant la concentration, Scania était la seule source importante de pression concurrentielle à laquelle Volvo était confrontée sur le marché suédois. Or, cette source de concurrence serait éliminée si la concentration prévue était réalisée, ce qui renforcerait considérablement la capacité de Volvo à exercer son pouvoir de marché. L'étude de marché ne montre pas que la puissance d'achat des clients de la nouvelle entité serait suffisamment importante pour restreindre sensiblement sa liberté d'action sur le marché.
Conclusion relative aux marchés suédois des autobus urbains et interurbains
(309) Pour toutes ces raisons, l'opération notifiée entraînerait la création d'une position dominante sur les marchés suédois des autocars urbains et interurbains.
Il y aurait création de position dominante sur les marchés finlandais, norvégiens et danois des autobus urbains et interurbains
(310) La structure des marchés finlandais, norvégiens et danois des autobus urbains et interurbains est largement similaire à celle décrite pour la Suède. La présente section s'attachera donc à mettre en relief les différences qui existent, tout en se référant à la section précédente lorsque cela s'avérera nécessaire.
Taille du marché et parts de marché
(311) D'après la notification, le nombre des autobus urbains immatriculés en 1998 a été de [< 140] en Finlande, [< l80] en Norvège et [< 250] au Danemark. Les chiffres correspondants pour les autobus interurbains sont respectivement [< 130], [< 180] et [< 270].
(312) Pour les autobus urbains, la part de marché cumulée des parties a été de [90-100 %] en Finlande ([70-80 %] pour Volvo et [20-30 %] pour Scania, de [60-70 %] en Norvège ([40-50 %] pour Volvo et [10-20 %] pour Scania) et de [80-90 %] au Danemark ([50-60 %] pour Volvo et [30-40 %] pour Scania).
(313) Dans le secteur des autobus interurbains, la part de marché cumulée des parties s'élevait à [80-90 %] en Finlande ([60-70 %] pour Volvo et [20-30 %] pour Scania), à [80-90 %] en Norvège ([60-70 %] pour Volvo et [10-20 %] pour Scania) et à [70-80 %] au Danemark ([50-60 %] pour Volvo et [20-30 %] pour Scania).
(314) Ainsi que le montrent ces chiffres, la relation qui unit les deux sociétés en Suède, où Volvo a toujours été la plus forte des deux parties, existe également en Finlande, en Norvège et au Danemark. La principale raison de la part relativement plus élevée détenue par Scania dans la part de marché cumulée au Danemark semble être liée à sa récente acquisition de DAB, le plus important carrossier du pays.
(315) D'après les informations fournies par Volvo, la part de marché du principal concurrent, sur chacun de ces marchés, va d'environ 5 % à un peu moins de 20 % (31). De ce fait, la nouvelle entité détiendrait des parts de marché beaucoup plus élevées que celles de son plus proche concurrent sur chacun des marchés en cause, tout comme nous l'avions dit plus haut à propos de la Suède. L'étude de marché a également montré que Volvo et Scania avaient été le principal concurrent l'une de l'autre en Finlande, en Norvège et au Danemark, et que les clients considéraient généralement leurs produits respectifs comme les plus proches substituts.
(316) Il convient de noter que si les parts de marché étaient calculées au niveau de la région nordique dans son ensemble, les ventes cumulées d'autobus urbains de Volvo et de Scania seraient de [80-90 %] ([50-60 %] pour Volvo et [30-40 %] pour Scania). Pour les autobus interurbains, la part cumulée serait également de [80-90 %] ([50-60 %] pour Volvo et [20-30 %] pour Scania). Par conséquent, toutes les conclusions établies individuellement pour les quatre pays demeureraient valables si l'on appréciait le marché à l'échelle de la région nordique.
Caractéristiques de la demande
(317) Les marchés finlandais, norvégien et danois n'ont pas encore atteint le même degré de privatisation que le marché suédois et la demande y est généralement moins concentrée. Par conséquent, pour les mêmes raisons que celles déjà indiquées pour la Suède, force est de conclure que Volvo n'a pas été en mesure de prouver que la puissance d'achat des opérateurs d'autobus urbains et interurbains en Finlande, en Norvège et au Danemark serait suffisante pour empêcher l'entité issue de la fusion de tirer profit du pouvoir de marché accru que lui conférerait la concentration.
Barrières à l'entrée et concurrence potentielle
(318) Les barrières à l'entrée liées au service après-vente et à l'attrait limité du marché qui ont été décrites pour la Suède s'appliquent également à la Finlande, à la Norvège et au Danemark. En outre, pour les mêmes raisons que celles invoquées à propos de la Suède, les arguments de Volvo relatifs à l'"érosion" des ventes ne peuvent pas être acceptés pour les autres pays nordiques. On est plutôt amené à conclure, de nouveau pour les mêmes raisons que celles indiquées à propos de la Suède, que la concentration prévue éliminerait la seule source effective de pression concurrentielle, en l'occurrence Scania, de chacun de ces marchés, ce qui renforcerait considérablement la possibilité, pour Volvo, d'exercer son pouvoir de marché.
(319) L'avantage concurrentiel dont la nouvelle entité bénéficierait en Finlande, où son réseau de centres de service après-vente serait beaucoup plus important, a été décrit dans la section consacrée aux autocars de tourisme. La situation est similaire en Norvège, où Volvo possède 65 centres de service après-vente et Scania 50, ainsi qu'au Danemark, où ces chiffres sont de 31 et 29 respectivement. Là aussi, tous les concurrents disposent d'un nombre beaucoup plus faible de centres de service après-vente dans chacun de ces pays (environ un tiers en Norvège pour le principal réseau concurrent, et moitié moins que le réseau combiné Volvo/Scania au Danemark). On peut donc en conclure que, en Norvège et au Danemark également, les concurrents de la nouvelle entité seront aussi défavorisés par rapport à celle-ci en ce qui concerne la possibilité d'offrir aux clients un réseau de centres de service après-vente adaptés à tous les véhicules. Enfin, les mêmes obstacles financiers à l'extension de ce réseau que ceux qui ont déjà été décrits existent également dans ces pays.
Conclusion relative aux marchés finlandais, norvégiens et danois des autobus urbains et interurbains
(320) Pour toutes ces raisons, la transaction notifiée aboutirait à la création d'une position dominante sur les marchés finlandais, norvégiens et danois des autobus urbains et interurbains.
Il aurait création d'une position dominante sur le marché irlandais des autobus urbains
Taille du marché et parts de marché
(321) En 1998, le volume total du marché irlandais s'est élevé à 110 autobus urbains. La part de marché cumulée réalisée cette année-là par les parties était extrêmement élevée, puisqu'elle a été de 92 %, dont 60 % pour Volvo et 32 % pour Scania. La part de marché de Volvo en Irlande a toujours été très élevée au cours des trois dernières années, puisqu'elle était de 88 % en 1997 et 79 % en 1996. La position traditionnellement forte détenue par Volvo en Irlande remonte à l'acquisition de British Leyland, à la fin des années 80.
(322) À l'exception de DAF et de Dennis, qui détenaient toutes deux une part de marché de 11 % en 1996 (mais qui sont ensuite tombées à moins de 5 %), aucun autre fournisseur (c'est-à-dire DaimlerChrysler ou MAN) n'a réussi à dépasser les 10 % au cours de la période 1996-1998. Quant à Scania, elle n'a réalisé aucune vente sur le marché irlandais des autobus urbains en 1996 et 1997, mais elle a réussi à obtenir 32 % de ce marché en 1998 (32).
(323) Le fait que Scania ait pu pénétrer sur le marché irlandais en réalisant un tel score, alors qu'aucun autre constructeur n'avait réussi à le faire au cours des trois dernières années, constitue une autre preuve substantielle du fait que les clients considèrent généralement que les autobus urbains de Volvo et de Scania sont de proches substituts. Or, la concentration prévue aura pour effet d'éliminer du marché irlandais ce concurrent qui venait juste d'y pénétrer.
(324) Du fait que Volvo et Scania possèdent des parts de marché très élevées, la position de tous les autres fournisseurs est très faible (moins de 5 %). L'entité issue de la fusion détiendrait une part de marché qui serait près de 20 fois plus élevée que celle de son plus proche concurrent.
Caractéristiques de la demande
(325) En Irlande, les services d'autobus urbains sont toujours exploités en grande partie par des organismes publics, dont le plus important est Dublin Bus. De ce fait, la plupart des achats d'autobus urbains en Irlande se font par le biais d'un appel d'offres public. Néanmoins, comme le montre le tableau figurant au considérant 291, Volvo a été en mesure de conserver des parts de marché très élevées et relativement stables au cours des trois dernières années (exception faite de la perte de parts de marché au profit de Scania enregistrée en 1998). Dans un tel contexte, force est de constater que rien ne permet de conclure que la procédure d'appels d'offres publics permettrait à d'autres fournisseurs d'autobus urbains de constituer, pour la nouvelle entité, une source de concurrence aussi forte que cela a été le cas récemment pour Scania.
(326) En conclusion, Volvo n'a pas été à même de prouver que la puissance d'achat actuelle des opérateurs d'autobus urbains en Irlande était suffisante pour empêcher l'entité issue de la fusion de faire usage du pouvoir de marché accru qui serait le sien à la suite de la concentration.
Barrières à l'entrée et concurrence potentielle
(327) La forte position occupée par Volvo en Irlande est due notamment à l'achat de la division "autobus" de British Leyland et au fait qu'elle est perçue comme fournissant le meilleur rapport prix/service après-vente. Sa capacité à conserver en permanence des parts de marché très élevées, en dépit du fait que les ventes se font essentiellement par le biais de procédures d'appels d'offres publics, montre que les autres fournisseurs ont des difficultés à pénétrer sur le marché à grande échelle. Pour les mêmes raisons que celles indiquées à propos des marchés nordiques, la taille limitée, et donc le manque d'attrait, du marché irlandais semble constituer une autre barrière importante à l'entrée.
(328) Étant donné que, au cours des trois dernières années, Scania a été le seul fournisseur capable de réduire sensiblement les ventes d'autobus urbains de Volvo en Irlande, force est de conclure que la concentration prévue améliorerait les possibilités de Volvo de faire usage de son pouvoir de marché. À titre d'exemple, si Volvo avait envisagé, avant la concentration, d'augmenter ses prix d'un montant faible mais significatif, elle aurait dû peser les avantages potentiels d'une telle action par rapport au risque qu'un certain nombre de clients la quittent au profit de Scania qui, en 1998, avait prouvé qu'elle était capable d'une percée importante sur le marché. Or, si la concentration prévue était réalisée, une telle réaction des consommateurs n'aurait plus aucune conséquence pour Volvo en termes de recettes. Par conséquent, comme aucun autre fournisseur n'a fait preuve de la même capacité à prendre des parts de marché à Volvo, l'opération prévue aurait pour conséquence directe de réduire les risques que celui-ci courra à exercer son pouvoir de marché.
(329) Il ressort de ce qui précède que, avant la concentration, Scania a été la seule source importante de pression concurrentielle à laquelle Volvo ait été confrontée sur le marché irlandais. Or, si la concentration prévue était réalisée, cette source de concurrence se trouverait éliminée, ce qui renforcerait considérablement la capacité de Volvo à faire usage de son pouvoir de marché. L'étude de marché n'a pas permis de prouver que la puissance d'achat des clients de la nouvelle entité serait suffisamment importante pour s'opposer à elle sur le marché. La Commission est donc parvenue à la conclusion que l'opération notifiée aboutirait à la création d'une position dominante sur le marché irlandais des autobus urbains.
Conclusion relative au marché irlandais des autobus urbains
(330) Pour toutes ces raisons, l'opération notifiée aboutirait à la création d'une position dominante sur le marché irlandais des autobus urbains.
Conclusion relative aux marchés des autobus
(331) La concentration prévue aboutirait à la création d'une position dominante sur les marchés des autocars de tourisme en Finlande et au Royaume-Uni, sur les marchés des autobus urbains et interurbains en Suède, en Finlande, en Norvège et au Danemark, ainsi que sur le marché irlandais des autobus urbains.
V. ENGAGEMENTS PROPOSÉS PAR VOLVO
(332) Afin de rendre possible l'adoption d'une décision en vertu de l'article 8, paragraphe 2, du règlement sur les concentrations, Volvo a proposé, le 21 février 2000, les engagements suivants, qui prendraient effet à la date d'adoption d'une telle décision.
A. POIDS LOURDS
1. Ouverture des réseaux de vente et de service après-vente de Volvo et Scania en Suède, en Finlande, au Danemark et en Norvège, ainsi que du réseau de Volvo en Irlande.
2. Cession de la participation de 37 % de Volvo dans Bilia AB (distributeur dans les pays nordiques).
3. Engagement de mettre tout en œuvre pour garantir la suppression du test suédois de résistance des cabines.
4. Suspension temporaire pour deux ans de la marque Scania en Suède, en Finlande et en Norvège.
B. AUTOCARS, AUTOBUS URBAINS ET AUTOBUS INTERURBAINS
1. Ouverture du réseau de vente et de service après-vente et suspension de la marque Scania comme pour les poids lourds (points 1 et 4 visés ci-dessus).
2. Cession de trois usines de carrosseries d'autobus et d'autocars (deux au Danemark, une en Suède).
3. Accès à la capacité de production de carrosseries en Finlande.
(333) Volvo s'est mise en rapport avec les autorités suédoises pour leur demander de supprimer la norme technique de sécurité spécifique à la Suède qui est applicable aux cabines utilisées sur les poids lourds (le "test de résistance des cabines") dès que possible et en tout état de cause au plus tard dans un délai de six mois à compter de la date d'adoption de la décision de la Commission. Une fois celle-ci adoptée, Volvo s'engage à mettre en œuvre tous ses efforts pour que le test de résistance des cabines soit supprimé en Suède et à tenir la Commission informée de la progression de ce dossier selon des modalités qui devront être déterminées par cette dernière.
(334) Volvo a proposé d'ouvrir ses réseaux de vente et de service après-vente et ceux de Scania en informant tous les concessionnaires et les centres de service après-vente agréés des pays concernés qu'ils sont libres de passer des contrats avec les concurrents de Volvo, y compris leurs filiales étrangères ou suédoises, pour la vente et la location-vente de poids lourds, d'autobus urbains et d'autobus interurbains de ces concurrents, ainsi que pour l'entretien, le service après-vente et les réparations liés à ces produits, ou de réaliser ces mêmes activités sur une base individuelle, sans avoir à créer de société distincte ou à effectuer ces opérations dans des locaux séparés. En outre, selon la proposition, les concessionnaires et les centres de service après-vente pourront résilier, s'ils le souhaitent et moyennant un préavis écrit de deux mois adressé à Volvo, tout accord de concession ou accord de centre de service après-vente existant. Volvo s'engage également à n'opérer aucune discrimination à l'encontre de concessionnaires ou centres de service, actuels ou futurs, en Suède, au motif qu'ils traiteraient avec des concurrents de Volvo. Au cas où la part de marché cumulée de Volvo et de Scania pour les poids lourds tomberait à moins de 40 % des ventes totales de poids lourds en Suède au cours d'une année donnée, Volvo serait, selon sa proposition, libre de conclure des accords exclusifs avec des concessionnaires ou centres de service nouveaux ou existants et elle ne serait plus liée par cet engagement, sauf spécification contraire dans les accords de concession ou de centres de service.
(335) Volvo propose de céder sa participation dans Bilia AB ainsi que les trois usines de carrosseries pour autobus et autocars (usine de Volvo à Aabenraa, au Danemark, usines de Scania à Silkeborg, au Danemark et à Katrineholm, en Suède) dans un délai de six mois à compter de la décision de la Commission, avec possibilité de prolongation d'une nouvelle période de six mois. La proposition contient aussi des dispositions concernant la supervision de la cession et sa réalisation possible par un administrateur.
(336) L'engagement de fournir à des tiers l'accès à la capacité de production de carrosseries d'autobus et d'autocars concerne la filiale de Volvo, Carrus Oy ("Carrus"), implantée en Finlande. Selon Volvo, Carrus fournit actuellement des carrosseries d'autobus et d'autocars à des fournisseurs d'autobus, d'autocars et de châssis avec lesquels elle n'a aucun lien, à des conditions commerciales. Volvo s'engagerait à obliger Carrus à fournir des carrosseries d'autobus et d'autocars à des fournisseurs européens d'autobus et d'autocars concurrents de Volvo pour leurs ventes d'autobus et d'autocars en Finlande, à des conditions non discriminatoires par rapport à celles appliquées à la fourniture de carrosseries d'autobus et d'autocars de Carrus à Volvo pour ses ventes en Finlande.
(337) Enfin, la proposition de ne pas utiliser la marque Scania pour les poids lourds, les autobus urbains et interurbains et les autocars vendus en Suède, en Finlande et en Norvège pendant une période de deux ans prendrait effet à la date de conclusion de l'opération ou le plus tôt possible dans le cadre des conditions contractuelles. La proposition est assortie de dispositions prévoyant que les véhicules Scania continueraient d'être vendus pendant la période de deux ans, mais sous une autre marque choisie exclusivement par Volvo. La proposition est également assortie d'une condition prévoyant l'exécution des contrats et des commandes en cours, ainsi que la vente des produits existant avant la conclusion de l'opération.
VI. APPRÉCIATION DES ENGAGEMENTS PROPOSÉS
(338) Bien que les engagements proposés par Volvo puissent, pour autant qu'il soient correctement mis en œuvre, avoir des effets favorables sur la concurrence sur les marchés en cause, à la lumière des contacts qu'elle a eus avec les acteurs du marché, la Commission est arrivée à la conclusion que ces engagements étaient manifestement insuffisants pour résoudre les problèmes de concurrence liés à l'élimination du principal concurrent de Volvo, Scania.
A. POIDS LOURDS
(339) L'enquête menée sur le marché a confirmé que les propositions de Volvo concernant le test suédois de résistance des cabines et la suspension de la marque Scania en Suède, en Norvège et en Finlande n'auraient guère d'incidence sur la situation concurrentielle. Le test de résistance des cabines ne peut être supprimé que par les autorités suédoises, qui n'ont pas indiqué qu'il serait supprimé dans le délai de six mois mentionné par Volvo. Malgré l'engagement pris par Volvo de mettre tout en œuvre pour obtenir sa suppression, il n'est donc pas possible de considérer, aux fins de la présente appréciation, que le test serait bel et bien supprimé. De même, la suspension de la marque Scania proposée par Volvo n'a qu'une portée limitée. Premièrement, elle porte sur une période de deux ans (et ne s'étend pas à l'Irlande). De plus, elle n'impliquerait pas le retrait de la gamme de produits de Scania, qui, selon la proposition, continuerait d'être vendue sous une autre marque, choisie par Volvo. La suspension ne s'appliquerait pas non plus aux contrats existants, aux commandes fermes ou aux produits en stock. En conclusion, ces propositions apparaissent très limitées quant au fond et par conséquent peu susceptibles d'avoir un quelconque impact sur la situation concurrentielle.
(340) L'enquête menée sur le marché a également révélé un certain scepticisme à l'égard de la proposition faite par Volvo de céder sa participation de 37 % dans Bilia AB (distributeur de camions, d'autobus et de voitures dans les pays nordiques), en dépit du fait que cette relation verticale serait ainsi supprimée. D'après l'enquête, même si cette relation était supprimée, Bilia continuerait, comme tous les autres distributeurs de Volvo, de dépendre économiquement de cette dernière, étant donné que ses activités commerciales consistent, pour l'essentiel, dans la vente de véhicules Volvo et le service après-vente qui en découle. En outre, l'idée a été émise que l'acheteur le plus probable était Ford, qui détient la division "voitures" de Volvo et utilise Bilia pour la distribution de ses voitures dans les pays nordiques. Ford n'exerce aucune activité sur le marché des poids lourds et des autobus et ne serait donc pas nécessairement une nouvelle source de concurrence sur ce marché. À cela s'ajoute que Volvo a indiqué qu'elle pourrait mettre fin à son contrat avec Bilia AB si cette dernière est acquise par un constructeur concurrent et assure ainsi la distribution d'une marque concurrente.
(341) En ce qui concerne les mesures proposées pour ouvrir les réseaux de vente et de service après-vente de Volvo et de Scania, l'enquête réalisée sur le marché a confirmé qu'il était peu probable qu'elles constituent, pour les distributeurs existants, une incitation suffisante à élargir leurs activités à une marque supplémentaire ou à changer purement et simplement de marque. La proposition laisserait, pour l'essentiel, la structure des organisations de Volvo et Scania intacte (en ce sens qu'il n'y aurait ni cession, ni résiliation de contrat par le constructeur, etc.), ce qui suffit à susciter des doutes considérables quant à son efficacité. C'est pourquoi, pour qu'il soit possible de conclure que les mesures proposées auraient un impact significatif sur la structure du marché dans un avenir prévisible, il faudrait démontrer que, bien que dépourvues de caractère structurel, elles ont de fortes chances de constituer, pour les distributeurs existants, une forte incitation à modifier leur comportement d'une manière propre à produire un impact structurel sur le marché. Des arguments de fond et d'ordre économique s'opposent cependant à cette conclusion. La plupart des opérateurs ayant répondu à l'enquête estiment peu probable que la mesure proposée contribue sensiblement à réduire la part de marché de New Volvo dans les deux à trois ans qui viennent. Des arguments de fond et d'ordre économique ont été invoqués pour contester l'efficacité de la proposition.
(342) Premièrement, un certain nombre d'opérateurs ayant répondu à l'enquête ont mis en doute l'efficacité des mesures proposées en ce qui concerne le réseau de distribution et de service après-vente de Scania, qui comprend des distributeurs qui sont des filiales à cent pour cent du constructeur dans tous les pays nordiques. En Suède, ces derniers représentent [30-40 %] des ventes de Scania. Les chiffres correspondants pour la Norvège et la Finlande sont encore plus élevés (respectivement [90-100 %] et [90-100 %]). En fait, l'ouverture proposée du réseau de Scania ne concernerait que trois concessionnaires indépendants en Norvège et un en Finlande. C'est pourquoi certains des opérateurs interrogés ont estimé que la cession des distributeurs qui sont des filiales à cent pour cent aurait une incidence plus grande sur le marché.
(343) Deuxièmement, conformément à l'exemption par catégorie en faveur de la distribution de véhicules automobiles (33), tous les distributeurs de Volvo et Scania peuvent déjà vendre une marque concurrente. La seule condition est qu'ils le fassent dans des locaux de vente séparés. Le fait que les distributeurs de Volvo et Scania n'ont pas, dans le passé, fait usage de la possibilité qu'ils avaient de vendre des véhicules d'une autre marque a été relevé comme un indice du peu d'intérêt suscité par la distribution d'une deuxième marque (du point de vue aussi bien du fournisseur que du distributeur). En ce qui concerne sa proposition de céder Bilia, Volvo s'est en outre réservé le droit de résilier son accord de distribution avec Bilia au cas où celle-ci serait acquise par un concurrent. Des tiers ont vu en cela la reconnaissance indirecte par Volvo du peu d'intérêt que présente la distribution d'une deuxième marque.
(344) Troisièmement, pour les centres de service, l'enquête réalisée sur le marché a confirmé que les réseaux de Volvo et Scania ont déjà, dans le passé, accepté de facto de travailler pour des marques concurrentes. Il est par conséquent peu probable que la mesure proposée conduise à un changement substantiel.
(345) Quatrièmement, plusieurs arguments ont été invoqués en faveur de la conclusion selon laquelle la mesure proposée ne constituerait pas, pour les distributeurs et les centres de service existants de Volvo et de Scania, une incitation économique suffisamment forte pour les amener à vendre une autre marque. D'un point de vue purement économique, il a été souligné que ces distributeurs continueront de dépendre des recettes générées par la vente de véhicules Volvo et Scania et du service après-vente qui en découle pendant encore longtemps (jusqu'à 15 ans selon certains). La raison en est que les camions et les autobus sont des biens durables et que, par voie de conséquence, la majeure partie du parc continuera d'être constituée de véhicules Volvo et Scania dans un avenir prévisible. Il convient de rappeler, à cet égard, qu'un distributeur tire environ [70-80 %] de ses recettes du service après-vente et de la vente de pièces de rechange (et [20-30 %] des ventes de véhicules neufs). Les tiers ont également mentionné comme facteurs susceptibles de dissuader les distributeurs de vendre de nouvelles marques le risque que New Volvo décide d'adopter une nouvelle politique plus favorable aux ventes directes à partir de son siège central (qui représenteraient actuellement 40 % des ventes totales de Volvo en Finlande) et l'opinion, largement partagée, selon laquelle New Volvo réduira la taille de son réseau de distributeurs à l'avenir et risque fort, à cette occasion, d'exclure les "distributeurs" infidèles.
(346) Cinquièmement, l'engagement proposé par Volvo de s'abstenir de toute discrimination à l'encontre des distributeurs qui décident de vendre une nouvelle marque a été jugé trop vague et impossible à contrôler dans la pratique. De même, la disposition selon laquelle l'engagement deviendrait sans effet si la part de marché cumulée de Volvo et Scania devait tomber au-dessous de 40 % a été considérée comme mettant aussi bien les distributeurs que les autres fournisseurs dans l'impossibilité de consentir les investissements à long terme nécessaires pour constituer un parc suffisant de véhicules d'une nouvelle marque.
(347) Sixièmement, l'enquête menée sur le marché a également confirmé qu'il était peu probable que la mesure proposée permette à d'autres fournisseurs de créer un réseau suffisamment étendu pour concurrencer efficacement New Volvo (compte tenu, en particulier, de la faible incitation qu'elle constituerait pour les distributeurs, comme il est expliqué ci-dessus). La plupart des tiers qui ont répondu à l'enquête estiment que seul un nombre très limité de distributeurs de Volvo et Scania réduiraient sensiblement leur dépendance à l'égard de New Volvo en vendant d'autres marques dans un délai de deux à trois ans. Ainsi, la mesure proposée donnerait, tout au plus, à chacun des autres fournisseurs, accès à un nombre limité de distributeurs.
(348) Septièmement, les concurrents estiment qu'il serait très risqué d'entrer sur le marché ou d'y renforcer leur présence en recourant aux réseaux existants de Volvo et/ou de Scania. Ils ont expliqué, à cet égard, que les coûts irrécupérables resteraient élevés. Les investissements comprendraient, entre autres, l'emploi d'un réseau complet de mécaniciens et de vendeurs spécialisés, la formation, l'installation d'outils spécialisés, les stocks de pièces de rechange et les systèmes informatiques et administratifs. En outre, le fait de vendre les produits à des prix inférieurs d'au moins 10 à 20 % à ceux de Volvo et Scania et d'offrir aux distributeurs une marge sensiblement plus élevée pour compenser le niveau plus faible des volumes jusqu'à la constitution d'un parc suffisant représenterait également un coût commercial important. Compte tenu de tous ces coûts, les concurrents ont exprimé de sérieuses réserves quant à la possibilité de confier la commercialisation de leurs véhicules à des distributeurs qui continueront de travailler pour Volvo et Scania, et qui, pendant des années, se sont employés à convaincre leurs clients que Volvo (ou Scania) était le meilleur choix.
(349) En conclusion, l'engagement proposé d'ouvrir les réseaux de distribution et de service après-vente n'a aucun caractère structurel et il est peu probable qu'il soit de nature à inciter fortement les distributeurs existants à modifier leur comportement d'une manière propre à produire un impact structurel sur le marché.
B. AUTOCARS ET AUTOBUS URBAINS ET INTERURBAINS
(350) Comme il est indiqué plus haut, la proposition de Volvo prévoit la même ouverture du réseau de distribution et de service après-vente que pour les poids lourds. Cela implique, premièrement, que la proposition ne prévoit aucune mesure visant le marché des autocars au Royaume-Uni, où New Volvo détiendrait une part de marché cumulée de 52 %. Deuxièmement, comme Volvo l'a elle-même indiqué, l'importance du réseau de distribution et de service après-vente est moindre sur les marchés des autobus urbains et interurbains, en particulier, que sur celui des poids lourds (étant donné que ces véhicules sont normalement vendus directement à partir du siège central du constructeur et que le service est plus souvent assuré par le client lui-même). Le manque de facteurs propres à inciter les distributeurs et les centres de service après-vente à élargir leurs activités à de nouvelles marques se vérifierait davantage encore sur ces marchés que sur celui des poids lourds. La mesure proposée n'est donc pas susceptible d'avoir une incidence sensible sur la situation concurrentielle sur les marchés en cause des autobus et des autocars.
(351) En outre, pour des raisons semblables à celles invoquées à propos des poids lourds, il est peu probable que la mesure consistant à suspendre, pour une durée limitée, la marque Scania, ait un impact sensible sur les marchés en cause des autocars, des autobus urbains et des autobus interurbains.
(352) L'enquête réalisée sur le marché a confirmé que la proposition prévoyant de permettre aux concurrents d'avoir accès à la capacité de production de carrosseries de Volvo en Finlande (Carrus Oy), ne modifierait guère la situation existante. Certains opérateurs ayant répondu à l'enquête ont indiqué qu'ils ne souhaitaient pas et ne souhaiteraient pas davantage à l'avenir traiter avec Carrus, celle-ci étant une filiale à cent pour cent de Volvo. D'autres, dont Volvo elle-même, ont confirmé que Carrus a déjà, dans le passé, fourni des carrosseries d'autobus et d'autocars à des fournisseurs de véhicules auxquels elle n'était pas liée, à des conditions commerciales. Il est peu probable que l'addition d'un engagement de non-discrimination renforce l'intérêt de la proposition (et elle n'aurait d'effet, d'un point de vue logique, que dans la mesure où Carrus a exercé une discrimination à l'encontre des tiers dans le passé). Pour ces raisons, il est peu probable que l'engagement proposé concernant Carrus ait une incidence significative sur les marchés en cause des autocars, des autobus urbains et des autobus interurbains.
(353) La proposition de Volvo de céder trois usines de carrosseries d'autobus et d'autocars (l'usine de Volvo à Aabenraa, au Danemark, et celles de Scania à Silkeborg, au Danemark et à Katrineholm, en Suède) a également été considérée comme n'améliorant pas l'accès des concurrents au marché en cause et, plus généralement, comme étant insuffisante pour éliminer les problèmes de concurrence relevés.
(354) Premièrement, un certain nombre d'opérateurs ayant répondu à l'enquête ont indiqué que cette proposition revenait en fait à proposer de céder la surcapacité qui résulterait de l'opération pour New Volvo. Ils ont souligné le fait que Volvo et Scania ont investi récemment dans une capacité moderne de production de carrosseries en Pologne et qu'elles conserveront les usines nordiques les plus efficientes (Carrus en Finlande et Säffle en Suède). Aucun des tiers interrogés ne s'est dit intéressé par l'acquisition des trois usines proposées.
(355) Certains ont également estimé que la cession des trois usines proposées ne faciliterait guère l'accès des concurrents aux marchés nordiques compte tenu, en particulier, de l'opinion qui prévaut selon laquelle, pour des raisons de compatibilité technique, ces usines continueront de dépendre des livraisons de châssis de New Volvo dans un avenir prévisible. Cette dépendance impliquera aussi que New Volvo devra continuer d'assurer le service après-vente sur les véhicules produits.
(356) Enfin, selon Volvo, l'usine d'Aabenraa a produit [230-240] carrosseries d'autobus urbains et interurbains en 1999. Sur ce total, [190-200] ont été livrées au Danemark, [20-30] en Suède et [10-20] en Norvège. L'usine de Scania située à Katrineholm n'a fourni que des carrosseries d'autobus urbains, dont [90-100 %] ont été vendues sur le marché suédois (une partie des [0-10 %] restants ayant été livrée en Finlande et en Islande). L'usine de Scania implantée à Silkeborg construit des autobus tant urbains qu'interurbains. Elle produit des carrosseries sous la marque DAB. Mis à part [10-20] unités immatriculées dans le Nord de la Suède, toute sa production est destinée au marché danois. C'est pourquoi, bien que les engagements proposés par Volvo pour les marchés des autocars et des autobus urbains et interurbains soient, du moins en partie, de caractère structurel, l'enquête réalisée sur le marché a montré qu'ils ne faciliteraient guère l'accès des concurrents aux marchés en cause et que, même interprétés de la façon la plus favorable, ils sont insuffisants pour éliminer les problèmes de concurrence sur chacun des marchés en cause.
(357) En conclusion, même interprétés de la façon la plus favorable, les engagements proposés par Volvo pour les marchés des autocars et des autobus urbains et interurbains sont d'une portée insuffisante pour éliminer les problèmes de concurrence sur chacun des marchés en cause.
Nouvelle proposition de Volvo
(358) À un stade très avancé de la procédure, le 7 mars 2000, Volvo a présenté une nouvelle proposition, qui constituait une modification substantielle. La nouvelle proposition diffère des engagements décrits plus haut, qui avaient été proposés le 21 février 2000, sur les points suivants:
- retrait de la proposition de céder la participation de 37 % de Volvo dans Bilia AB,
- retrait de la proposition de suspendre l'utilisation de la marque Scania pendant une période de deux ans,
- présentation d'une nouvelle proposition concerne les réseaux de distribution,
- ajout à la proposition de céder les usines de carrosseries de Scania d'une disposition [concerne les ventes de châssis pour autobus urbains et interurbains].
(359) L'article 18, paragraphe 2, du règlement (CE) n° 447-98 prévoit que les engagements que les parties veulent faire prendre en considération dans une décision déclarant la compatibilité en application de l'article 8, paragraphe 2, du règlement sur les concentrations, doivent être communiqués à la Commission dans un délai de trois mois à compter de la date d'engagement de la procédure, bien que la Commission puisse, dans des cas exceptionnels, prolonger ce délai. Volvo n'a invoqué aucune raison justifiant que la présente affaire soit considérée comme constituant un cas exceptionnel. La date limite de communication des engagements proposés était, en l'espèce, le 21 février 1999, et la nouvelle proposition de Volvo a été soumise le 7 mars 2000. Selon la Commission, la nouvelle proposition ne contenait aucun élément que Volvo n'aurait pu inclure dans un engagement présenté dans le délai de trois mois. La présente décision ne tient par conséquent pas compte de cette proposition.
(360) On peut ajouter à cela que les modalités de mise en œuvre des nouvelles propositions seraient complexes, en particulier en ce qui concerne la proposition de mettre fin aux contrats avec les distributeurs et/ou de céder des points de vente. La procédure selon laquelle des tiers pourraient reprendre une partie de la capacité de distribution de Volvo et de Scania est également complexe et nécessiterait un examen détaillé. La complexité de la mise en œuvre accroît forcément, en particulier lorsque la proposition est soumise à un stade avancé de la procédure, la difficulté qu'il y a à évaluer les effets potentiels de la proposition quant au fond.
(361) Il n'est pas possible de conclure que la nouvelle proposition éliminerait de manière évidente et indiscutable tous les problèmes de concurrence qui ont été relevés. Étant donné la complexité des nouvelles propositions, il aurait été impossible à la Commission de les évaluer efficacement dans le peu de temps qui lui restait avant l'expiration du délai prévu à l'article 10, paragraphe 3, du règlement sur les concentrations. Une enquête complémentaire aurait été nécessaire et il aurait aussi fallu recueillir les vues des tiers intéressés, conformément aux dispositions applicables en la matière du règlement sur les concentrations.
Conclusion concernant les engagements proposés
(362) Pour les raisons indiquées ci-dessus, la Commission est arrivée à la conclusion que les engagements proposés par Volvo le 21 février sont insuffisants pour éliminer les problèmes de concurrence qui résulteraient de l'acquisition de Scania. En ce qui concerne la nouvelle proposition du 7 mars 2000, la Commission constate, tout d'abord, que Volvo n'a pas été en mesure de justifier le fait qu'elle a communiqué cette proposition plusieurs semaines après l'expiration du délai prévu pour la communication des engagements. En tout état de cause, la nouvelle proposition n'élimine pas de manière évidente et indiscutable tous les problèmes de concurrence qui ont été relevés.
VII. CONCLUSION GÉNÉRALE
(363) Compte tenu de ce qui précède, la Commission est parvenue à la conclusion que la concentration notifiée était incompatible avec le Marché commun et avec le fonctionnement de l'accord EEE, étant donné que, même en supposant que les engagements soient pleinement respectés, elle créerait, sur les marchés des poids lourds en Suède, en Norvège, en Finlande et en Irlande, des autocars de tourisme en Finlande et au Royaume-Uni, des autobus interurbains en Suède, en Finlande, en Norvège et au Danemark et des autobus urbains en Suède, en Finlande, en Norvège, au Danemark et en Irlande, des positions dominantes qui auraient toutes pour effet d'entraver de manière significative une concurrence effective dans le Marché commun, au sens de l'article 2, paragraphe 3, du règlement sur les concentrations et de l'article 57 de l'accord EEE,
A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION:
Article premier
La concentration notifiée à la Commission par AB Volvo le 22 septembre 1999, qui lui permettrait d'acquérir le contrôle exclusif de Scania AB, est déclarée incompatible avec le Marché commun et avec le fonctionnement de l'accord EEE.
Article 2
La société
AB Volvo S - 40508 Göteborg
est destinataire de la présente décision.
(1) JO L 395 du 30.12.1989, p. 1.
JO L 257 du 21.9.1990, p. 13 (rectificatif).
(2) JO L 180 du 9.7.1997, p. 1.
(3) JO C 154 du 29.5.2001.
(4) JO L 61 du 2.3.1998, p. 1.
(5) Affaire IV/M.004 - Renault/Volvo, décision du 7 novembre 1990.
(6) Affaire IV/M.1202 - Renault/Iveco, décision du 22 octobre 1998.
(7) La pertinence de cette constatation en ce qui concerne les marchés des autobus sera examinée dans la section consacrée aux autobus et autocars.
(8) Certaines parties du texte ont été modifiées pour garantir la non-divulgation d'informations confidentielles; elles figurent entre crochets.
(9) Dans ces études, la Grèce n'est pas prise en considération en raison du faible nombre de véhicules vendus, le Luxembourg est agrégé à la Belgique et l'Irlande au Royaume-Uni.
(10) Il convient également de rappeler qu'il a fallu, dans les rapports, en vue de réduire la différence entre les prix ajustés, ne pas tenir compte de la Suède, de la France et de la Norvège dans le cas des tracteurs ni de la Suède et du Danemark dans le cas des porteurs.
(11) Les informations communiquées par Volvo portent sur les marges des trois modèles les plus vendus dans plusieurs pays. Cependant le modèle le plus populaire n'étant pas le même partout et Volvo n'ayant pas fourni des informations pour tous les pays, il est impossible d'effectuer une comparaison complète.
(12) Il convient de rappeler que même les rapports Lexecon et Neven, dans lesquels des efforts considérables ont été fournis pour ajuster les données disponibles en matière de prix, ont conclu, malgré l'omission de plusieurs pays où les écarts de prix étaient plus importants, à l'existence d'un écart de prix de 12 %.
(13) Dans sa réponse, Volvo a invoqué l'existence d'un commerce de poids lourds d'occasion pour attester l'interdépendance des marchés nationaux. À cet égard, il convient de noter, premièrement, que l'acheteur d'un véhicule d'occasion n'achète pas normalement l'ensemble comprenant le camion, le contrat d'entretien et éventuellement le financement, comme cela se fait pour les camions neufs. Deuxièmement, dans sa notification, Volvo n'a pas indiqué que les camions d'occasion faisaient partie du même marché que les véhicules neufs (elle n'a d'ailleurs fourni aucune information concernant les ventes de véhicules d'occasion). Troisièmement, Volvo n'a pas fourni d'informations montrant que le commerce parallèle des camions neufs se situe au même niveau que le commerce des véhicules d'occasion.
(14) Le chiffre le plus élevé en Suède, devant la Finlande, le Danemark et la Norvège, dans cet ordre.
(15) Les parts de marché établies par Volvo se fondent sur l'immatriculation de tous les types de poids lourds. Les chiffres communiqués correspondent en grande partie aux chiffres de vente recueillis par la Commission dans le cadre de l'enquête (notamment la ventilation entre camions porteurs et tracteurs).
(16) Il a été porté à l'attention de la Commission que le coût de la transformation d'un réseau spécialisé dans les utilitaires moyens/légers en un réseau capable de prendre également en charge les poids lourds équivaut à 50 % du coût d'établissement d'un réseau entièrement neuf pour poids lourds (voir, par exemple, le considérant 141).
(17) Comme cela a été expliqué précédemment, la Commission considère qu'il n'est pas significatif de fournir des statistiques à partir d'un échantillon non représentatif. Toutefois, il est à noter que, bien que le nombre de personnes interrogées qui ont exprimé des préoccupations varie d'un pays à l'autre, dans chaque pays, certaines de ces personnes ont fait l'une ou plusieurs des observations énoncées au considérant 88.
(18) Volvo a fourni ce type de renseignements sur ses ventes en France, en précisant qu'elle n'était pas en mesure de faire de même pour les autres pays.
(19) Voir l'affaire IV/M.477 - Mercedes-Benz/Kässbohrer, décision du 14 février 1995 (JO L 211 du 6.9.1995, p. 1).
(20) Étant donné que Scania et Volvo ont respectivement 106 et 103 centres de service après-vente en Suède, ces chiffres semblent vraisemblables pour une entreprise qui souhaiterait devenir aussi intéressante que Volvo et Scania pour les opérateurs de poids lourds (avant l'opération de concentration envisagée). Toutefois, le nombre de concessionnaires indiqué est nettement moins élevé que celui de Volvo et de Scania (environ 30 chacun).
(21) Source: "Kuorma-autoliikenne Suomessa 1999", Suomen Kuorma-autoliitto ("Transport routier en Finlande 1999", Association finlandaise des poids lourds), p. 16.
(22) D'après Volvo, le [...] est, en volume, le premier ou deuxième modèle le plus vendu dans tous les pays nordiques et représentait, en 1998, [20-30 %] du total des ventes de camions Volvo dans cette région.
(23) Voir l'affaire IV/M.477 - Mercedes-Benz/Kässbohrer, décision du 14 février 1995 (JO L 211 du 6.9.1995, p. 1), et l'affaire IV/M.1202 - Renault/Iveco, décision du 22 octobre 1998.
(24) Voir l'affaire IV/M.004 - Renault/Volvo, décision du 7 novembre 1990, point 15, et l'affaire IV/M.092 - Renault/Heuliez, décision du 3 juin 1991, point 5.
(25) Voir l'affaire IV/M.477 - Mercedes-Benz/Kässbohrer, décision du 14 février 1995 (JO L 211 du 6.9.1995, p. 1).
(26) Voir l'affaire IV/M.1202 - Renault/Iveco, décision du 22 octobre 1998.
(27) Dans sa réponse, Volvo invoque le débat en cours sur de nouvelles mesures d'harmonisation concernant la longueur et la largeur des autobus et des autocars utilisés dans le trafic international. Volvo estime que ces nouvelles mesures d'harmonisation prendront effet en 2002. Elle n'a cependant fourni aucune information concernant l'incidence que ces nouvelles règles auraient sur le marché, au cas où elles devraient être adoptées selon le calendrier qu'elle envisage.
(28) Dans le cadre de l'examen d'une concentration entre Henleys Group plc et Dennis Group plc.
(29) En 1998, l'Office of Fair Trading est arrivé à la conclusion, dans le cadre de l'examen d'une opération de concentration entre Henleys Group plc et Dennis Group plc, que le Royaume-Uni constituait un marché géographique en cause distinct du reste de l'Europe, y compris l'Irlande.
(30) D'après la notification, le Royaume-Uni est le seul État membre où l'on distingue deux catégories de véhicules pour les immatriculations, en l'occurrence les autobus urbains et les autocars de tourisme.
(31) Volvo avait affirmé que DaimlerChrysler aurait une part de marché d'environ 30 % pour les autobus urbains en Norvège. Toutefois, l'enquête n'a pas confirmé ce chiffre.
(32) Dans sa réponse, Volvo soutient que cette part de marché ne se rapporte pas aux ventes mais aux immatriculations étant donné que la part de marché de Scania est basée sur les autobus urbains loués par Bus Eirann à Scania Bus and Coach au Royaume-Uni. Volvo n'a cependant pas proposé que le marché en cause exclue les véhicules loués et elle n'a pas fourni de chiffres basés exclusivement sur les ventes.
(33) Règlement (CE) n° 1475-95 de la Commission du 28 juin 1995 concernant l'application de l'article 85, paragraphe 3, du traité à des catégories d'accords de distribution et de service de vente et d'après-vente de véhicules automobiles (JO L 145 du 29.6.1995, p. 25).