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Décisions

CA Aix-en-Provence, 2e ch., 6 avril 2000, n° 97-1454

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Moralis (SARL)

Défendeur :

Pompes Funèbres du Sud Est (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Dragon

Conseillers :

MM. Blin, Sémériva

Avoués :

Me Jauffrès, SCP Blanc Amsellem Mimran

Avocats :

Mes Auda, Duminy.

TGI Digne, du 4 sept. 1996

4 septembre 1996

FAITS ET PROCÉDURE

Par convention du 15 décembre 1992, la ville de Digne-les-Bains (Alpes-de-Haute-Provence) a confié à la SA Pompes Funèbres Dignoises "le droit d'assurer la gestion de la maison funéraire sise Quartier Saint-Véran ".

Le 18 mai 1993, par " convention de morgue hospitalière relative à l'utilisation par le Centre Hospitalier de Digne-les-Bains " de ladite chambre, cet établissement a confié à la société Pompes Funèbres du Sud Est, ultérieurement absorbée par la société OGF, " toutes opérations consécutives aux décès survenant à l'hôpital [...] " et en prévoyant que la chambre funéraire par elle gérée en vertu de la convention précédente devait être " la maison funéraire [sic] du Centre hospitalier [et recevoir] les corps des personnes décédées dans cet établissement".

Estimant que la société Pompes Funèbres du Sud Est ne pouvait gérer la chambre mortuaire de cet hôpital au mépris des dispositions de la loi n° 93-23 du 8 janvier 1993 et sans violer le principe de la libre concurrence, la SARL Moralis, exploitante d'une entreprise de pompes funèbres à Digne-les-Bains, l'a assignée le 27 septembre 1995 devant le tribunal de commerce de cette ville statuant commercialement afin de l'entendre condamnée sous astreinte à prendre les mesures propres à assurer une indépendance totale entre son activité de gestionnaire de la chambre mortuaire et celle d'entrepreneur de pompes funèbres ainsi qu'au paiement de la somme de 200 000 F à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi en raison des pratiques anticoncurrentielles dénoncées.

La société défenderesse ayant demandé par voie reconventionnelle la condamnation de la société Moralis au paiement de la somme provisionnelle de 50 000 F et l'institution d'une mesure d'expertise à la suite de sa violation du monopole du service extérieur des pompes funèbres de la ville de Digne-les-Bains dont elle était titulaire, cette juridiction a, le 4 septembre 1996, débouté les parties de leurs demandes et condamné la société Moralis au paiement de la somme de 6 000 F en application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

La société Moralis, qui a relevé appel le 23 décembre 1996, soutient par conclusions déposées le 22 avril 1997 :

- que l'hôpital de Digne - établissement " de soins" et non " de santé" - était tenu de disposer d'une chambre mortuaire en application des dispositions du décret n° 74-27 du 14 janvier 1987,

- que le transfert des corps de la chambre mortuaire à la chambre funéraire obéit à des règles strictes,

- que si la cour ne pourra apprécier l'illégalité manifeste de la convention du 18 mai 1993, elle constatera qu'elle met la société intimée en position privilégiée,

- que les corps des défunts sont en effet systématiquement confiés à la société Pompes Funèbres du Sud Est, sauf demande expresse de la famille,

- que la liste des entreprises de pompes funèbres n'est pas affichée à l'hôpital mais dans la maison funéraire,

- que les ambulanciers agissent en sous-traitance de la société Pompes Funèbres du Sud Est,

- que les modalités pratiques d'accès aux locaux contrôlés par la société intimée constituent autant de violations de la libre concurrence,

- que les premiers juges ont fait une interprétation erronée des textes et ont réduit la portée des pratiques anticoncurrentielles de la société Pompes Funèbres du Sud Est.

La société Moralis fait valoir sur la demande reconventionnelle :

- que la société Pompes Funèbres du Sud Est n'est pas concessionnaire du service extérieur des pompes funèbres, service concédé à la société Pompes Funèbres Dignoises dont elle se dit aux droits, l'avenant du 14 juin 1991 et la délibération du conseil municipal du 22 mai 1991 dont elle se prévaut n'autorisant que les changements de nom et de siège social et non le transfert de la concession à une autre société,

- que la loi du 8 janvier 1993, qui est d'application immédiate, permet aux communes d'assurer le service extérieur des pompes funèbres directement ou par voie de gestion déléguée, non par voie de concession, et sans exclusivité,

- que l'exclusivité ne s'impose qu'aux communes et qu'en l'espèce, il n'existait aucune stipulation en ce sens.

Elle demande en conséquence, outre l'infirmation partielle de la décision entreprise, qu'il soit ordonné à la société Pompes Funèbres du Sud Est sous astreinte de 3 000 F par infraction constatée :

- de cesser de transférer les corps de l'hôpital vers la maison funéraire autrement que dans les conditions fixés par l'article R. 361-37 du Code des communes,

- d'organiser le fonctionnement de la maison funéraire de digne service public de manière strictement indépendante et distincte de celle de son activité privée d'entrepreneur de pompes funèbres,

- à cet effet, de réorganiser entièrement les procédures internes à la maison funéraire de Digne pour que le fonctionnement de celle-ci présente une neutralité absolue afin que les utilisateurs se trouvent en présence d'un choix et non d'une exclusivité latente,

- de ne plus affecter à la maison funéraire, pour quelque tâche que ce soit, de direction commerciale, technique ou matérielle, du personnel dépendant des Pompes Funèbres Dignoises,

- de supprimer tous contacts directs ou indirects, physiques ou téléphoniques entre les personnels de son magasin et les familles susceptibles de se rendre à la maison funéraire,

- de permettre un accès direct à la maison funéraire aux familles et entreprises agréées chargées d'obsèques, sans intervention de la société Pompes Funèbres du Sud Est pour l'ouverture de la maison funéraire,

- de cesser tout renvoi de la ligne téléphonique de la maison funéraire vers le local de la société Pompes Funèbres du Sud Est de la rue Grenette ou vers le domicile d'un employé de cette entreprise,

- d'éliminer, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de la maison funéraire de Digne ou sur les plaquettes et documents la concernant, toute mention de l'entreprise intimée.

Elle demande en outre la condamnation de la société Pompes Funèbres du Sud Est au paiement des sommes de 200 000 F à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice commercial et de 35 000 F sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

La société OGF réplique par conclusions récapitulatives déposées le 25 janvier 2000 :

- que la loi du 8 janvier 1993 a inclus dans le service extérieur des pompes funèbres la gestion et l'utilisation des chambres funéraires,

- que le régime juridique des chambres mortuaires a été fixé par ce texte et par son décret d'application du 14 janvier 1994,

- que la société appelante prétend inexactement qu'avant même l'entrée en vigueur de ce dernier texte, les hôpitaux étaient tenus de disposer dans leur établissement d'un tel local,

- que les dispositions de l'article 73 du décret du 14 janvier 1994 sont compatibles avec la gestion déléguée d'une chambre mortuaire,

- qu'aucun acte constitutif de concurrence déloyale n'est établi,

- sur la demande reconventionnelle, que l'augmentation de capital à laquelle elle a procédé ne rend pas distincte la société Pompes funèbres du Sud Est de la société qui avait obtenu la concession du service extérieur des pompes funèbres,

- que l'exclusivité avait bien été accordée,

- que les premiers juges ont statué ultra petita en fondant leur décision de débouté sur la dérogation prévue à l'article 28 de la loi du 8 janvier 1993 alors qu'il appartenait à la société appelante de justifier de son implantation dans la commune de domicile ou la commune d'inhumation du défunt.

Formant appel incident, elle demande ainsi, outre la confirmation de la décision attaquée sauf en ce qu'elle l'a déboutée de sa demande reconventionnelle, la condamnation de la société Moralis au paiement de la somme de 50 000 F à titre de dommages et intérêts provisionnels, l'institution d'une mesure d'expertise et sa condamnation au paiement de la somme de 20 000 F au titre des frais non compris dans les dépens.

L'instruction a été déclarée close le 14 février 2000 en cet état de la procédure, les avoués ayant été informés à " l'ordre de travail" du 3 novembre 1999 que la clôture interviendrait un mois avant les débats, date prorogée le 2 février 2000 par le conseiller de la mise en état.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Attendu qu'il convient de donner acte à la société OGF de ce qu'elle vient, après fusion-absorption, aux droits de la société Pompes Funèbres du Sud Est dont la dernière dénomination sociale était Sud Est Services ;

- que la recevabilité des appels, tant principal qu'incident, n'est pas contestée qu'en l'absence de moyen constitutif de fin de non-recevoir susceptible d'être relevé d'office, il convient de les déclarer recevables.

Attendu, sur le fond, qu'il convient de rappeler que sous l'empire des lois du 28 décembre 1904 et 9 janvier 1986, le service extérieur des pompes funèbres - auquel était reconnu le caractère de service public communal et qui comprenait en application des dispositions de l'article L. 362-1 du Code des communes exclusivement le transport des corps, la fourniture du corbillard, du cercueil, des tentures extérieures des maisons funéraires, des voitures de deuil, les fournitures et le personnel nécessaires aux inhumations, exhumations et crémations - faisait seul l'objet d'un monopole des communes ;

- que c'est donc sous l'empire de cette législation que le 7 juin 1990, la commune de Digne-les-Bains a concédé le service extérieur des pompes funèbres à la société Pompes Funèbres Dignoises pour une durée de six ans ;

- que par avenant du 14 juin 1991, la ville de Digne-les-Bains a constaté que la dénomination sociale de la société concessionnaire était devenue Pompes Funèbres du Sud Est ;

- que le 15 décembre 1992, la ville de Digne-les-Bains a concédé à ladite personne morale la concession de " l'édification, l'aménagement et le gestion du service public de la Maison Funéraire " sur un terrain communal donné à bail pour une durée de trente ans à compter de la mise en service effective de l'établissement ;

- que le 18 mai 1993, le Centre hospitalier de Digne-les-Bains a conclu avec la société Pompes Funèbres du Sud Est une " convention de morgue hospitalière relative à l'utilisation par le Centre Hospitalier de Digne-les-Bains de la Maison Funéraire " dont l'article 8 est ainsi rédigé : " La maison funéraire, tenant lieu de maison mortuaire de l'hôpital , il est convenu [...] ;

- que cette convention est entrée en vigueur le 1er juin 1993.

Attendu qu'à cette date, les textes de 1904 et 1986 avaient été abrogés par la loi n° 93-23 du 8 janvier 1993 (articles 2223-19 et suivants du Code général des collectivités territoriales) qui a mis fin - les dispositions transitoires sont examinées infra - au monopole communal du service extérieur des pompes funèbres désormais qualifié par le législateur de simple mission de service public ;

- que l'article L. 2223-39 du Code général des collectivités territoriales a ainsi imposé aux établissements de santé publics ou privés qui remplissent des conditions fixés par décret en Conseil d'Etat de disposer d'une chambre mortuaire dans laquelle doit être déposé le corps des personnes qui y sont décédées ;

- que si les prescriptions techniques applicables aux chambres mortuaires ont été. définies par le décret n° 97-1039 du 14 novembre 1997 et par l'arrêté du 24 août 1998, force est de constater qu'au 1er juin 1993, le Centre hospitalier de Digne-les-Bains avait pris l'initiative de s'assurer la disposition d'une chambre mortuaire répondant à la définition donnée par le nouveau texte ;

- qu'ainsi, à supposer même que ledit Centre ait anticipé l'application de la loi n° 93-23 du 8 janvier 1993, dès lors qu'il s'assurait la disposition d'une chambre mortuaire, les modalités de la gestion de cet élément du service intérieur des pompes funèbres devaient obéir à ce texte sous l'empire duquel cet établissement de santé public s'était placé.

Attendu que si l'article L. 223-19-6°, du Code général des collectivités territoriales a inclus dans le service extérieur des pompes funèbres pouvant être assuré par les communes directement ou par voie de gestion déléguée, la gestion et l'utilisation des chambres funéraires, la loi n° 93-23 du 8 janvier 1993 - texte d'interprétation stricte - ne prévoit aucune voie de gestion déléguée en ce qui concerne les chambres mortuaires ;

- que ces locaux doivent en effet accueillir les corps dès la constatation du décès ;

- que le législateur a marqué sa constante préoccupation de voir préserver l'entière liberté de choix de familles qui, eu égard aux circonstances, ne disposent pas de l'entière latitude dont doit bénéficier tout consommateur face à un prestataire de service du secteur ouvert à la libre concurrence ;

- que la gestion de la chambre mortuaire d'un établissement de santé par une entreprise de pompes funèbres est en elle-même, donc sans qu'il y ait lieu de se livrer à une appréciation in concreto des modalités de sa gestion, constitutive de concurrence déloyale au détriment des entreprises concurrentes dans la mesure où le délégataire de ladite gestion entrera nécessairement en contact le premier avec les familles en deuil et qu'à l'évidence ce premier contact sera souvent déterminant de son choix en tant que prestataire chargé de l'organisation des obsèques.

Attendu, cependant, qu'il n'a pu y avoir concurrence déloyale qu'au terme de la concession du service extérieur des pompes funèbres dont la société Pompes funèbres du Sud Est était titulaire;

- que l'article L. 2223-44 du Code général des collectivités territoriales dispose en effet qu'à compter du 9 janvier 1993, date de publication de la loi n° 93-23 du 8 janvier 1993, les contrats de concession, y compris ceux comportant une clause d'exclusivité, conclus avant cette date continuent à produire effet jusqu'à leur terme durant une période de trois ans, sauf dénonciation ;

- que le 7 juin 1990, la commune de Digne-les-Bains a concédé le service extérieur des pompes funèbres à la société Pompes Funèbres Dignoises pour une durée de six ans ;

- que par avenant du 14 juin 1991, la ville de Digne-les-Bains a constaté que la dénomination sociale de la société concessionnaire était devenue Pompes Funèbres du Sud Est ;

- que la société Moralis ne peut donc sérieusement soutenir que celle-ci n'était pas concessionnaire du service extérieur des pompes funèbres de ladite commune ;

- qu'elle ne peut davantage prétendre que la société Pompes funèbres du Sud Est n'était pas titulaire d'une concession exclusive ;

- que l'article 2 - " Objet de la concession " - du contrat du 7 juin 1990 prévoit en effet que " la commande des fournitures et services concédés énumérés ci-dessus [1] doit être passée exclusivement au concessionnaire, soit directement, soit par l'intermédiaire d'une agence de funérailles" ;

- qu'il découle de ces constatations que la société Pompes funèbres du Sud Est a été concessionnaire exclusif du service extérieur des pompes funèbres jusqu'au 9 janvier 1996 ;

- qu'il résulte par ailleurs d'un échange de correspondance entre le Centre hospitalier de Digne-les-Bains et la société OGF utilisant l'enseigne Pompes Funèbres Dignoises que cet établissement dispose depuis le 1er janvier 1999 d'une chambre mortuaire dont il assure la gestion ;

- qu'il lui a donc été conféré un avantage faussant le jeu de la libre concurrence seulement durant la période du 9 janvier 1996 au 31 décembre 1998, soit pendant trois années ;

- qu'il est acquis aux débats que le Centre hospitalier de Digne-les-Bains enregistre plus de 200 décès par an ;

- que les corps de 600 personnes environ ont été ainsi transférés de cet établissement à la chambre mortuaire gérée par la société Pompes funèbres du Sud Est en violation de la loi n° 93-23 du 8 janvier 1993

- que la société Pompes funèbres du Sud Est a été ainsi en mesure de peser par son intervention en qualité de gestionnaire de la maison mortuaire du Centre hospitalier sur le choix de l'entreprise chargée de l'organisation des obsèques

- que la somme de 200 000 F demandée par la société Moralis à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice consécutif à la concurrence déloyale dont elle a été victime est de nature à indemniser la perte subie du début de l'année 1996 à la fin de l'année 1998.

Attendu, en revanche, que la Cour constate que les mesures sollicitées par la société Moralis sont devenues sans objet en ce qu'elles concernent l'ancienne utilisation de la chambre funéraire de Digne-les-Bains en tant que chambre mortuaire du Centre hospitalier de cette ville ;

- que les modalités de fonctionnement de la chambre funéraire stricto sensu, telles qu'elles sont décrites par les constats d'huissier versés aux débats, ne révèlent quant à elles aucune pratique anticoncurrentielle ou violation des dispositions de l'article L. 2223-38, alinéa 2, du Code général des collectivités territoriales ou de celles des décrets n°' 94-1027 du 23 novembre 1994, 94-1118 du 20 décembre 1994 et 95-653 du 9 mai 1995

- que les premiers juges l'ont exactement établi par des motifs que la Cour adopte.

Attendu, sur la demande reconventionnelle, que la société Pompes funèbres du Sud Est était donc concessionnaire du service extérieur des pompes funèbres jusqu'au 9 janvier 1996 ;

- que la société appelante ne conteste pas avoir assuré l'exécution de prestations relevant du service extérieur des pompes funèbres ;

- qu'en application des dispositions de l'article L. 362-1 du Code des communes, ledit service comprenait exclusivement le transport des corps, la fourniture du corbillard, du cercueil, des tentures extérieures des maisons funéraires, des voitures de deuil, les fournitures et le personnel nécessaires aux inhumations, exhumations et crémations

- qu'il résulte des pièces communiquées à la cour - des annonces de presse - que l'activité de la société Moralis sur le territoire de la commune de Digne-les-Bains a débuté en septembre 1994 ;

- que c'est donc durant la période de septembre 1994 au 9 janvier 1996 que le monopole concédé à la société Pompes funèbres du Sud Est a été enfreint par la société Moralis ;

- qu'il convient en conséquence de faire droit à la demande d'expertise sollicitée, la Cour ne disposant d'aucun élément permettant d'évaluer le montant des dommages et intérêts indemnisant la société OGF du préjudice consécutif à la violation dudit monopole ;

- qu'il y a lieu de lui allouer la somme de 30 000 F à titre provisionnel en réparation de son préjudice constitué par la perte de la marge nette que lui aurait procuré l'exécution des prestations soumises à monopole effectuées par son adversaire durant la période de référence ;

- que cette somme se compensera avec celle de 200 000 F au paiement de laquelle la société OGF est condamnée ;

- que la société OGF devra consigner les frais d'expertise en sa qualité de demanderesse reconventionnelle ;

- qu'il y a lieu de réserver les entiers dépens et l'application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Par ces motifs, LA COUR, statuant publiquement et contradictoirement : Donne acte à la société OGF de ce qu'elle vient, après fusion-absorption, aux droits de la société Pompes Funèbres du Sud Est dont la dernière dénomination sociale était Sud Est Services ; Reçoit les appels ; Infirme la décision entreprise et, statuant à nouveau, déclare constitutive de concurrence déloyale la gestion de la chambre mortuaire du Centre hospitalier de Digne-les-Bains par la société Pompes funèbres du Sud Est du 9 janvier 1993 au 31 décembre 1998 ; Condamne la société OGF à payer à la société Moralis la somme de 200 000 F [30 489,80 euros] à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice consécutif à ladite concurrence déloyale ; Déclare sans objet la demande de la société Moralis de condamnation sous astreinte de la société intimée, relative aux modalités de gestion de la chambre mortuaire du Centre hospitalier de Digne-les-Bains ; La déboute de sa demande relative aux modalités de fonctionnement de la chambre funéraire de ladite commune ; Dit que de septembre 1994 au 9 janvier 1996, la société Moralis a enfreint la concession exclusive du service extérieur des pompes funèbres accordé par la ville de Digne-les-Bains, en exécutant les prestations énumérées limitativement par les dispositions de l'article L. 362-1 du Code des communes, c'est-à-dire le transport des corps, la fourniture du corbillard, du cercueil, des tentures extérieures des maisons funéraires, des voitures de deuil, les fournitures et le personnel nécessaires aux inhumations, exhumations et crémations ; Condamne la société Moralis à payer à la société OGF la somme provisionnelle de 30 000 F [4 573,47 euros] en réparation du préjudice consécutif à la violation du monopole concédé ; Ordonne la compensation jusqu'à due-concurrence des condamnations prononcées ; Avant dire droit sur l'indemnisation intégrale du préjudice de la société OGF, désigne en qualité d'expert Monsieur Paul Jaeck, 215, allée de Provence - 04000 Manosque avec mission : de rechercher les prestations funéraires effectuées par la société Moralis de septembre 1994 au 9 janvier 1996 relevant de la concession du service extérieur des pompes funèbres de la commune de Digne, au sens de l'article L. 362-1 du Code des communes, soit exclusivement le transport des corps, la fourniture du corbillard, du cercueil, des tentures extérieures des maisons funéraires, des voitures de deuil, les fournitures et le personnel nécessaires aux inhumations, exhumations et crémations, de fournir à la Cour les éléments lui permettant d'apprécier si certaines prestations relèvent ou non de la dérogation prévue à l'article L. 2223-44, alinéa 4, du Code général des collectivités territoriales, de chiffrer la marge nette que la société Pompes funèbres du Sud Est aurait perçue si elle avait facturé les prestations relevant de son contrat de concession ; Dit que le contrôle de l'expertise sera exercé par le magistrat qui était chargé de l'instruction ou, à défaut, par Monsieur le Président ; Dit que l'expert devra faire connaître sans délai son acceptation et dit qu'à défaut ou en cas de carence dans l'accomplissement de la mission, il sera pourvu à son remplacement par ordonnance du magistrat chargé du contrôle de l'expertise ; Dit que la société OGF devra consigner au greffe dans le délai d'un mois à compter de la signification qui lui sera faite de la présente décision, la somme de 15 000 F [2 286,74 euros] F afin de garantir le paiement des frais et honoraires de l'expert ; Dit qu'à défaut de consignation selon les modalités imparties, la désignation de l'expert sera caduque à moins que le magistrat chargé du contrôle de l'expertise, à la demande d'une partie se prévalant d'un motif légitime, ne décide une prorogation du délai ou un relevé de caducité ; Dit que s'il estime insuffisante la provision ainsi fixée, l'expert devra, lors de la première ou au plus tard de la deuxième réunion des parties, dresser un programme de ses investigations et évaluer de manière aussi précise que possible le montant prévisible de ses honoraires et de ses débours ; Dit qu'à l'issue de cette réunion, l'expert fera connaître au magistrat chargé du contrôle de l'expertise la somme globale qui lui paraît nécessaire pour garantir en totalité le recouvrement de ses honoraires et de ses débours et sollicitera, le cas échéant, le versement d'une consignation complémentaire ; Dit qu'en cours d'expertise, l'expert pourra, conformément aux dispositions de l'article 280 du nouveau Code de procédure civile, solliciter du magistrat chargé du contrôle de l'expertise la consignation d'une provision complémentaire dès lors qu'il établira que la provision allouée s'avère insuffisante ; Dit que l'expert devra déposer son rapport au greffe dans le délai de quatre mois à compter de la notification qui lui sera faite par celui-ci de la consignation, à moins qu'il ne refuse sa mission ; Dit qu'il devra solliciter du magistrat chargé du contrôle de l'expertise une prorogation de ce délai si celui-ci s'avère insuffisant ; L'informe que les dossiers des parties sont restitués à leurs avoués ; Dit que l'expert devra accomplir sa mission en présence des parties ou celles-ci dûment convoquées, les entendre en leurs observations et répondre à leurs dires ; Dit qu'à défaut de pré-rapport, l'expert organisera une réunion de clôture afin d'informer les parties du résultat de ses investigations et recueillera leurs ultimes observations, le tout devant être consigné dans son rapport d'expertise ; Dit qu'en application de l'article 173 du nouveau Code de procédure civile, l'expert devra remettre une copie de son rapport à chacune des parties, ou à leurs représentants, en mentionnant cette remise sur l'original ; Réserve les entiers dépens et l'application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; Renvoie à la mise en état.

1. " Les transports de corps après mise en bière,

- les corbillards,

- les cercueils,

- les tentures extérieures des maisons mortuaires,

- les voitures de deuil,

- les prestations en personnel nécessaires aux opérations d'inhumation, d'exhumations et de crémations."