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Décisions

CCE, 5 octobre 1992, n° M.157

COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

Décision

Air France/Sabena

CCE n° M.157

5 octobre 1992

LA COMMISSION DES COMMUNAUTES EUROPEENNES

1. La notification concerne le protocole d'accord signé le 10 avril 1992 par Air France SA (Air France), la Société Anonyme Belge d'Exploitation de la Navigation Aérienne (Sabena) et l'Etat belge. Le protocole confère notamment à Air France, à travers la société nouvellement créée Finacta, une participation de 37,58 % dans le capital de la Sabena.

2. Après examen de cette notification, la Commission a abouti à la conclusion que l'opération notifiée entre dans le champ d'application du règlement (CEE) du Conseil n° 4064-89 et ne soulève pas de doutes sérieux quant à sa compatibilité avec le Marché commun.

I. LES PARTIES

3. Air France et la Sabena sont respectivement un groupe français et un groupe belge dont l'activité principale est le transport aérien régulier de passagers et de fret. Ils sont également tous deux présents dans les secteurs du transport aérien charter, de l'hôtellerie, du tourisme et des services divers aux compagnies aériennes.

4. L'Etat belge est présent dans le domaine du transport aérien à travers la Sabena dont il avait seul le contrôle jusqu'à la date de signature du protocole d'accord susmentionné.

II. L'OPERATION

5. A l'issue d'une opération de recapitalisation menée par l'Etat belge et Finacta, société dont Air France a et conservera le contrôle majoritaire, l'Etat belge détiendra 62,11 % du capital de la Sabena (62,5 % des droits de vote à l'assemblée Générale) et Air France - à travers Finacta - 37,58 % (37,5 % des droits de vote).

6. Le protocole susmentionné prévoit également:

a) que le Président et le Vice-Président de la Sabena sont élus par l'Assemblée générale à la majorité simple mais que Finacta doit en approuver la nomination;

b) que les décisions du Conseil d'administration de la Sabena, lequel comprend le Président, le Vice-Président, 7 membres nommés par l'Etat belge et 5 membres nommés par Finacta, sont prises à la majorité simple, sauf celles impliquant un changement de stratégie, du business plan, du plan d'investissement et du plan de coopération industrielle qui requièrent les trois quarts des voix;

c) qu'il est institué un Comité éxécutif qui agit sur délégation du Conseil d'administration notamment dans les domaines de la stratégie qui sous-tend le business plan, du business plan lui-même, du budget annuel, de la structure de l'organigramme, du programme d'investissement, du reporting et de la mise en œuvre du plan de coopération industrielle. Ce Comité éxécutif sera composé du Président, du Vice-Président et de 8 ou 10 membres dont la moitié sera désignée par le Président et l'autre moitié par Finacta;

d) que la gestion journalière est confiée au Président assisté par un comité de direction (auquel appartient le Vice-Président) dont le Président détermine la composition;

e) que les Présidents d'Air France et de la Sabena se concerteront et s'efforceront de trouver une solution en cas de difficulté importante dans le fonctionnement des organes ou dans la mise en œuvre de la stratégie qui sous-tend le business plan, du business plan ou du plan d'investissement.

III. ENTREPRISE COMMUNE

7. Les éléments fondamentaux de la stratégie future de la Sabena, lesquels sont traduits dans le business plan et le plan de coopération industrielle qui font partie intégrante du protocole (article 1 [Les articles sont ceux du protocole d'accord.]), ont été co-décidés par Air France. En effet, en signant ledit protocole, Air France a confirmé et permis la mise en œuvre du business plan dont la réalisation est directement liée au plan de coopération industrielle, lui-même co-déterminé par Air France. En outre, aucune modification à cette stratégie ne pourra être apportée sans l'accord d'Air France puisqu'une majorité des trois quarts des voix au Conseil d'administration est nécessaire pour ce faire (art. 6 paragraphe 2 alinéa 3). Or, Air France y dispose, à travers Finacta, de 5 voix sur 14. Le fait que ce droit soit exercé à travers Finacta n'affaiblit en rien les prérogatives d'Air France car elle exerce un contrôle majoritaire dans Finacta qui perdurera pendant toute la durée de l'accord (article 3 paragraphe 1 alinéa 5). Ce contrôle majoritaire permettra à Air France de proposer la nomination des 5 administrateurs qu'elle souhaite.

Il y a lieu d'ajouter comme il ressort de l'examen du business plan et du plan de coopération industrielle, que le protocole d'accord couvre en fait l'ensemble des activités de transport aérien régulier de l'entreprise, lesquelles représentent l'essentiel de l'activité de la Sabena.

8. Finacta nommera la moitié des membres ordinaires du Comité éxécutif dont les fonctions en matière de stratégie ont été décrites au point II.6.c) ci-dessus.

9. Le Président et le Vice-Président actuels de la Sabena, dont les mandats expirent respectivement les 31 décembre 1996 et 30 juin 1996 ont été confirmés dans leurs fonctions avec l'accord d'Air France (art. 6 paragraphe 2 alinéa 2 première phrase). Les futurs Présidents et Vice-Présidents ne pourront être nommés qu'avec l'accord d'Air France (ou de Finacta) (article 6 paragraphe 2 alinéa 2 deuxième phrase). Même si le refus d'Air France doit être motivé, il n'en reste pas moins que ce droit de veto lui permettra d'exercer une influence considérable tant au sein du Conseil d'administration et du Comité éxécutif qu'en matière de gestion journalière laquelle sera confiée au Président (article 6 paragraphe 5).

10. Bien que l'Etat belge détienne une participation majoritaire dans le capital de la Sabena, il n'existe aucun mécanisme spécifique de résolution des conflits qui lui donne prédominance en cas de difficultés importantes dans le fonctionnement, tel que prévu par le protocole d'accord, des organes de la Sabena ou de la Sabena elle-même (article 6 paragraphe 5). Ce fait renforce la nature de contrôle conjoint.

11. A. L'analyse du protocole d'accord conduit donc la Commission à qualifier la Sabena d'entreprise commune contrôlée conjointement par l'Etat belge et Air France , laquelle dispose de droits qui vont bien au-delà de ceux normalement reconnus aux actionnaires minoritaires pour la protection de leur investissement.

B. a) Cette conclusion ne saurait être affaiblie par le fait que la Sabena est signataire de l'accord: en effet, le Président de cette dernière a signé après y avoir été habilité par décision du Gouvernement belge et ce Gouvernement a spécifiquement approuvé l'accord de partenariat industriel. En outre, l'Etat belge a souscrit directement aux engagements qui découlent de ce protocole en ce qui le concerne.

b) La conclusion qui précède ne saurait non plus être remise en cause par le fait que l'Etat belge n'est pas une "entreprise": l'article 3 paragraphe 1 lettre b) du règlement n° 4064-89 dispose expressément que les parties au contrôle en commun peuvent être des "personnes".

c) Il y a lieu de plus d'ajouter que les possibilités d'augmentation du capital de la Sabena prévues par les articles 3 et 4 ne sont pas susceptibles de conduire à une diminution substantielle du pourcentage de la participation d'Air France : cette dernière disposera de droits de souscription préférentielle proportionnels à sa participation actuelle au capital tant pour les obligations convertibles que pour de nouvelles actions ordinaires. La souscription par le personnel du nombre maximum de titres prévu dans le protocole ne serait pas susceptible, compte tenu des mécanismes dudit protocole, de modifier les pouvoirs d'Air France.

d) Enfin, le contrôle que l'Etat belge exercera sur la Sabena est suffisant pour permettre à cet Etat de satisfaire aux conditions requises par les accords aériens bilatéraux.

IV. ENTREPRISE COMMUNE RELEVANT DU REGLEMENT 4064-89

12. L'entreprise commune Sabena accomplira de manière durable toutes les fonctions d'une entité économique autonome. Le protocole d'accord a une durée de 30 ans qui pourra être prorogée, par tacite reconduction, pour des périodes successives de 10 ans. L'entreprise disposera également de tous les moyens matériels et humains nécessaires pour opérer sur le marché et fonctionnera comme une compagnie aérienne de plein exercice.

13. En ce qui concerne la relation concurrentielle entre l'Etat belge et l'entreprise commune et/ou entre l'Etat belge et Air France, la conclusion du protocole d'accord implique que toutes les activités de l'Etat belge, partenaire de l'entreprise commune, dans le domaine du transport aérien [Le reste des opérations de la Sabena (transport aérien charter, hôtellerie, tourisme, etc), qui représente un pourcentage relativement faible des activités de la Sabena, n'est pas couvert par le business plan et le plan de coopération industrielle, et n'est donc pas concerné par la présente décision.], sont incluses dans l'entreprise commune. L'Etat belge ne contrôle en effet aucune autre compagnie aérienne et la création d'une nouvelle apparait illusoire. Il s'ensuit que l'Etat belge ne peut en aucune manière être considéré comme un concurrent effectif ou potentiel de la Sabena.

14. En ce qui concerne la relation concurrentielle entre Air France et l'entreprise commune, il y a lieu de préciser:

a) que l'objectif de l'accord est le développement de la coopération d'Air France et de la Sabena et la mise en œuvre de l'ensemble des synergies identifiées entre les deux partenaires. Comme il a déjà été dit au point III.1 ci-dessus, cette coopération recouvre en fait la totalité des activités de transport aérien régulier de la Sabena et des synergies sont identifiées dans la plupart des domaines,

b) que l'Etat belge, en lui-même, ne saurait prétendre aux mêmes compétences dans le domaine du transport aérien qu'Air France, dont c'est le métier et qui dispose d'une expertise reconnue en la matière. La création de l'entreprise commune traduit d'ailleurs le fait que la politique menée par l'Etat belge lorsqu'il était l'actionnaire unique de la Sabena et les objectifs à atteindre par la Sabena en tant que compagnie aérienne de dimension internationale exigeaient de trouver un nouveau partenaire qui, outre son apport au capital, soit à même d'engendrer des synergies et de faire bénéficier l'entreprise de son expérience,

c) que certains mécanismes juridiques montrent que Air France jouera un rôle plus actif face à l'Etat belge, lequel apparait comme un partenaire plus lointain. C'est ainsi qu'en cas de difficultés importantes dans le fonctionnement des organes prévus par le protocole ou dans la mise en œuvre de la stratégie, du business plan ou du plan d'investissement [C'est-à-dire en matière de gestion journalière.] est prévue non pas une concertation entre un représentant de l'Etat belge et un représentant d'Air France, mais entre le Président de la Sabena et un représentant d'Air France (son Président). De même, ce n'est pas l'Etat belge qui nomme la moitié des membres ordinaires du Comité éxécutif (Air France - Finacta nommant l'autre moitié) mais le Président de la Sabena. Ces éléments sont significatifs d'un relatif effacement de l'Etat belge dans la gestion stratégique et journalière de l'entreprise commune à tous les niveaux.

Comme en outre le Président de la Sabena ne se trouve pas parfaitement sur un pied d'égalité avec le Président d'Air France, puisque sa nomination exige l'accord explicite d'Air France, on ne peut qu'en déduire une certaine prépondérance d'Air France dans cette gestion;

d) il y a lieu de mentionner enfin que le plan de coopération industrielle prévoit en plusieurs points l'utilisation par la Sabena d'installations ou d'équipements d'Air France [Cf. par exemple point 2 (systèmes informatiques dans le domaine de la réservation, de l'enregistrement des passagers et de la distribution et système informatique fret.)] ou de techniques déjà développées par Air France [Cf. par exemple point 3 a) (la Sabena s'appuiera sur l'expérience d'Air France en matière de gestion des aéroports de grande capacité).] alors que le contraire est beaucoup plus rare. Cet état de fait montre que l'entreprise commune sera dans plusieurs domaines dépendante de l'outil de production et des technologies d'Air France et traduit, par conséquent, une certaine intégration de la Sabena dans Air France.

Il résulte des points b) à d) ci-dessus qu'Air France disposera des moyens lui permettant de maîtriser le comportement de l'entreprise commune sur le marché. Cette conclusion ne remet pas en cause les pouvoirs que le protocole reconnaît à l'Etat belge et qui ont permis de conclure à un contrôle conjoint de la Sabena tel que décrit au point III ci-dessus.

Dans ces conditions, l'acquisition par Air France du contrôle conjoint sur la Sabena n'a pas pour objet ou pour effet la coordination du comportement concurrentiel d'entreprises qui restent indépendantes.

On ne saurait déduire de cette constatation une intégration complète des deux entreprises ou une uniformisation de leurs politiques de gestion - par exemple en matière commerciale ou de marketing - à tous les niveaux. L'observation par la Commission de nombreuses affaires antérieures montre d'ailleurs que tel n'est que rarement le cas.

15. Il y a lieu de mentionner en outre que:

a) La décision 91-555-CEE de la Commission du 24 juillet 1991 relative aux aides que le Gouvernement belge prévoit d'octroyer au transporteur aérien communautaire Sabena envisageait une nouvelle structure de l'actionnariat de la Sabena avec l'entrée au capital d'un ou plusieurs partenaires industriels. En aucun cas cette décision ne préjugeait de la qualification juridique de l'opération résultant de l'entrée du ou des partenaires en question.

b) La forme de l'accord et les objectifs qu'il énonce n'ont pas d'incidence sur sa qualification. La Commission doit en effet analyser la substance des documents contractuels et leurs effets sur le plan économique et ne pas s'en tenir à leur présentation.

c) La qualification de l'opération comme relevant du règlement n° 4064-89 n'est pas affectée par le fait que le protocole stipule (article 6 paragraphe 1) que "la Sabena sera gérée dans l'intérêt de la société et de ses actionnaires suivant des critères purement économiques" ou par le fait que, conformément au droit belge, les pouvoirs conférés à Air France ne sauraient porter préjudice à l'entreprise. Il est clair en effet que les droits de veto dont dispose Air France, au même titre que le principe de concertation entre les Présidents, n'a pas pour but de paralyser l'activité de la Sabena, dans laquelle Air France détient d'ailleurs une participation de près de 40 %, mais d'influencer de manière permanente la bonne marche de l'entreprise, et ceci par rapport à la politique d'Air France. Il y a lieu de mentionner en outre que le devoir des actionnaires vis-à-vis de l'entreprise est une obligation générale qui s'impose à tous, qu'ils soient minoritaires ou majoritaires.

16. Il apparaît en conséquence que l'entreprise commune Sabena doit être examinée à la lumière de l'article 3 du règlement n° 4064-89.

V. DIMENSION COMMUNAUTAIRE

17. La présente opération est de dimension communautaire. En effet, les chiffres d'affaires des seuls groupes Air France et Sabena remplissent les conditions établies à l'article 1 paragraphe 2 du règlement n° 4064-89.

18. Le chiffre d'affaires total réalisé sur le plan mondial par les groupes Air France et Sabena représentait en 1991 un montant supérieur à 5 milliards d'écus (Air France environ 8 milliards et Sabena environ 1 milliard).

19. En ce qui concerne le calcul du chiffre d'affaires communautaire, la Commission a déjà abordé, dans sa décision Delta Air Lines-Pan Am [Voir décision dans l'affaire n° IV/M.130 - Delta Air Lines-Pan Am, du 13.09.1991, paragraphe 9.] la question de l'allocation géographique de celui-ci en application des dispositions de l'article 5 paragraphe 1 du règlement n° 4064-89. Compte tenu de la difficulté inhérente au choix d'un critère de calcul ainsi que des possibles résultats divergents entre eux, la Commission a préféré proposer trois méthodes sans se prononcer définitivement sur celle qui s'avèrerait la plus adéquate.

Ces trois méthodes étaient les suivantes :

(i) attribution du chiffre d'affaires résultant de la prestation du service de transport aérien au pays de destination. Dans le cas de vols aller-retour ou circulaires, le pays de destination est celui qui est différent du pays d'origine (par exemple, dans le cas d'une route New-York/Paris/New-York desservie par une compagnie américaine, le chiffre d'affaires correspondant devrait être imputé à la France);

(ii) attribution du chiffre d'affaires sur la base d'un ratio 50 %-50 % respectivement au pays d'origine et de destination finale;

(iii) attribution du chiffre d'affaires résultant du service de transport aérien à l'Etat où le billet a été vendu.

20. Même si le deuxième critère semble être le plus proche de l'esprit de l'article 5 paragraphe 1 car il vise les deux endroits entre lesquels le service de transport aérien a été effectivement rendu, incorporant ainsi le caractère transfrontalier de celui-ci, la Commission a examiné les résultats de l'application de chacun d'entre eux dans le cas d'Air France et de la Sabena. Selon les trois critères, le chiffre d'affaires total réalisé dans la Communauté en 1991 tant par le groupe Air France que par le groupe Sabena a dépassé le montant de 250 millions d'écus sans que plus des deux tiers aient été réalisés à l'intérieur d'un seul et même Etat membre.

VI. NOTIFICATION TARDIVE

21. La Commission estime qu'il n'y a pas lieu d'imposer, sur la base de l'article 14 du règlement, une amende aux parties pour notification tardive. Cette attitude est justifiée par le fait que la qualification de l'opération était complexe à effectuer et de ce que le protocole d'accord avait été présenté de bonne foi à la Commission au titre de l'article 85 du traité.

VII. COMPATIBILITE AVEC LE Marché commun

A. INTRODUCTION

22. Seront seules abordées ci-après les activités d'Air France et de la Sabena relatives au transport aérien régulier de passagers et de fret. Les autres activités (charters, hôtellerie, services techniques, etc) ne sont pas couvertes par la présente décision.

23. En matière de transport aérien régulier de passagers et de fret, Air France est principalement active sur les lignes intérieures françaises ainsi que sur les liaisons moyen et long courriers au départ de France à destination des cinq continents. La Sabena est présente sur les liaisons moyen et long courriers au départ de Belgique à destination d'Europe, d'Afrique, et dans une moindre mesure d'Amérique du Nord et d'Asie.

24. L'opération a des incidences sur la concurrence dans plusieurs domaines qu'il convient d'examiner séparément.

1. Lignes aériennes régulières

25. Dans ce domaine, le marché pertinent peut être défini comme le transport aérien régulier de passagers ou de fret permettant de relier deux aires géographiques données. Dans cette optique, le marché pertinent sera, selon les cas, ou bien la route, ou bien le faisceau de routes pour autant qu'il y ait substituabilité du point de vue du consommateur entre les routes qui composent ledit faisceau [Cf. décision Delta Air Lines-Pan Am du 13 septembre 1991]. Une telle substituabilité résulte de différents facteurs tels que notamment la longueur des routes (plus la distance entre point de départ et point d'arrivée est grande, plus grande sera la substituabilité entre les différentes routes) ou la distance qui sépare les différents aéroports situés aux extrémités de chacune des routes qui composent le faisceau (la proximité entre Paris et Bruxelles est telle que la route Paris-Bamako est dans une large mesure substituable à la route Bruxelles-Bamako) ou le nombre de fréquences sur chaque route (plus le nombre de fréquences sur une route est grand, plus faible est la substituabilité avec d'autres routes) [Il n'y a pas lieu de distinguer entre "business class", "classe touristes" ou autres compte tenu d'une parfaite substituabilité de l'offre et de ce que l'opération a des incidences identiques pour ces différentes catégories]. Les modes alternatifs de transport (transport aérien charter, train, etc) constituent en général des marchés distincts (fortes différences de prix, usagers spécifiques et irrégularité du service pour les charters, durée du transport et non-substituabilité de l'offre pour les autres moyens de transport offerts) et ne seront par conséquent pris en considération que dans la mesure où il existe dans chaque cas une substituabilité réelle [Cf. point 40 de l'arrêt de la Cour du 11 avril 1989].

2. Mise à disposition par les autorités publiques des installations aéroportuaires et de créneaux horaires

26. Pour l'activité de service que constitue le transport aérien régulier, les aéroports et les installations aéroportuaires (pistes, terminaux, créneaux horaires, contrôle de la navigation aérienne, etc) doivent être regardés comme des facteurs de production indispensables et difficilement substituables. Ces facteurs de production sont, dans la Communauté, offerts et administrés par la puissance publique qui les met à la disposition des compagnies. Il sont de plus physiquement limités, tant par l'efficacité et la taille même de ces installations que par les contraintes (budgétaires, environnementales, etc) pesant sur les projets d'extension. Aussi le contrôle de ces facteurs de production par une ou plusieurs compagnies peut dans certains cas être à l'origine de l'érection de barrières à l'entrée et de la création d'effets verticaux susceptibles de créer ou renforcer une position dominante sur le marché des transports aériens.

Les positions qu'occupent actuellement Air France et Sabena sur les aéroports français et belges ainsi que les perspectives de développement des activités de Sabena envisagées par le business plan impliquent par conséquent d'examiner les incidences de l'opération également sur le plan aéroportuaire.

27. Ne seront pas abordés ci-après les domaines dans lesquels les compagnies ne sont que faiblement présentes par rapport à leurs concurrents et pour lesquels aucun problème de concurrence ne se pose.

B. RELATIONS ENTRE LA FRANCE ET LA BELGIQUE

1. Marché pertinent

28. En matière de liaisons entre la Belgique et la France, le marché pertinent peut être défini comme la "route". Les distances sont en effet trop courtes pour que des faisceaux de routes puissent être pris en compte.

2. Position des parties

29. a) La concentration conduit à une augmentation des parts de marché de la nouvelle entité sur trois routes:

Brx - Lyon Brx - Nice Brx - Paris

Air France 50 % 50 % 40 %

Sabena 50 % 50 % 60 %

TOTAL 100 % 100 % 100 %

La concentration engendre donc une situation de monopole sur chacun des marchés concernés.

30. b) Une telle situation n'est pas susceptible de changer dans un proche avenir en ce qui concerne Bruxelles-Lyon et Bruxelles-Nice:

- la demande anticipée est stable, ce qui laisse peu de place pour un nouvel entrant qui aurait de toute façon besoin d'un minimum de fréquences;

- les deux compagnies sont les compagnies nationales de chacun des Etats et sont particulièrement bien implantées sur les aéroports concernés;

- compte tenu de ces éléments et du monopole actuel, la liberté d'accès au marché instaurée par le 3e paquet ne saurait conduire à une situation de concurrence effective que dans une longue période.

31. La ligne Bruxelles-Paris obéit aux mêmes caractéristiques. Toutefois, la Commission note qu'il existe une substituabilité, du point de vue du consommateur, entre le trajet en avion et le trajet grâce à d'autres moyens de transport (train) offerts sur le marché. Cette substituabilité est toutefois trop imparfaite pour qu'elle puisse conduire à des conclusions différentes en ce qui concerne la création d'une position dominante. En effet:

- elle ne joue pas pour les voyageurs dont Paris ou Bruxelles ne sont pas des destinations mais des lieux de transit qui leur permettront de gagner, en avion, une destination finale;

- elle ne joue que partiellement pour certaines catégories spécifiques de voyageurs (hommes d'affaires prêts à payer un prix très élevé pour un gain de temps (ou une heure de départ ou d'arrivée particulière ou pour des raisons de prestige, etc...).

Il y a lieu de mentionner en outre que, suite à la concentration, sera mise en place une navette cadencée qui se traduira par une augmentation du nombre de fréquences offertes et aura notamment pour but de mieux répondre aux besoins des passagers en transit.

La mise en place du TGV n'améliorera pas la substituabilité entre train et avion avant une longue période. En effet, le TGV ne fonctionnera au plus tôt qu'en 1996; à cette date, il ne permettra pas d'offrir un service comparable à celui de la navette (absence de connexions entre gares et aéroports, horaires, etc...).

32. Toutefois, des engagements ont été pris par Air France et Sabena ainsi que par les gouvernements français et belge vis-à-vis de la Commission. Ces engagements, qui figurent in extenso en annexe font partie intégrante de la présente décision.

a) En ce qui concerne les liaisons Bruxelles-Lyon et Bruxelles-Nice, l'une des deux compagnies se retirera au profit d'une ou plusieurs compagnies repreneuses. Les créneaux horaires correspondants et les facilités aéroportuaires nécessaires seront garantis au(x) nouvel(aux) entrant(s). Un accord d'interligne sera conclu avec la ou les compagnies repreneuses qui le demanderaient.

b) En ce qui concerne la liaison Bruxelles-Paris, d'autres compagnies communautaires pourront assurer cette desserte en ayant sur cette liaison, et dans des tranches horaires comparables à celles offertes par Air France et Sabena, un nombre de fréquences égal à celui des deux compagnies. Un tel engagement pourra éventuellement impliquer une rétrocession de créneaux horaires par Air France et Sabena dans la limite maximale de dix par jour et par aéroport concerné. Un accord d'interligne sera conclu avec les nouveaux entrants qui le demanderaient.Air France et Sabena offriront aux nouveaux entrants qui le souhaiteraient de participer à leur programme de fidélisation, si elles ne disposent pas déjà, de manière directe ou indirecte, d'un tel programme.

La différence dans la substance des engagements entre Bruxelles-Lyon et Bruxelles-Nice d'une part, Bruxelles-Paris d'autre part, résulte dans ce dernier cas, de ce qu'une certaine substituabilité, même très imparfaite, existe entre le train et l'avion et de ce qu'il ne pouvait être envisagé de remettre en cause la navette, bénéfique à l'usager.

33. Compte tenu de ce qui précède et sur la base de ces engagements, la Commission considère que l'opération ne conduira pas à la création ou au renforcement d'une position dominante susceptible d'entraver de façon significative la concurrence sur une partie substantielle du Marché commun.

C. LIAISONS VERS LA TURQUIE ET LA HONGRIE [Les autres destinations vers les pays de l'Est ne posent pas de problèmes de concurrence.]

34. En ce qui concerne ces liaisons le marché pertinent peut être défini comme un faisceau de routes entre Paris et Bruxelles d'une part et Ankara ou Budapest d'autre part et ce pour les raisons suivantes. Pour les quelques millions d'habitants situés à la fois au nord de la zone d'attraction des aéroports parisiens et au sud de la zone d'attraction de l'aéroport de Bruxelles, lesdits aéroports peuvent être considérés, en raison de leur proximité, comme substituables, pour les vols de durée assez longue comme ceux vers Ankara et Budapest. Par contre, pour lesdits consommateurs les vols existants vers Ankara et Budapest au départ d'autres aéroports (par exemple au départ d'Amsterdam) ne constituent pas une alternative valable qui puisse être prise en considération dans le cadre de la définition du marché pertinent.

Sur la base de cette analyse il doit être considéré qu'il existe en matière desdites liaisons deux marchés pertinents: un marché qui comprend les routes vers Ankara au départ de Bruxelles et de Paris et un marché qui comprend les routes vers Budapest au départ de Bruxelles et de Paris.

35. Suite à la concentration Air France et Sabena détiendront ensemble une part très élevée des marchés en cause, notamment 81 % sur Bruxelles/Paris-Ankara et 54 % sur Bruxelles/Paris-Budapest (pourcentages calculés en termes de passagers transportés par les deux compagnies sur lesdites routes en 1990).

36. Toutefois, des engagements ont été pris par les gouvernements français et belge ainsi que par Air France et Sabena vis-à-vis de la Commission. Ces engagements qui figurent in extenso en annexe font partie intégrante de la présente décision.

37. Ils visent à ouvrir à la multi-désignation lesdites liaisons au profit des compagnies françaises ou belges extérieures aux groupes Air France et Sabena. Compte tenu toutefois du volume relativement faible du trafic sur ces routes et de la nécessité d'un nombre minimal de passagers pour assurer l'exploitation des liaisons, la multi-désignation ne sera mise en œuvre qu'à partir d'un seuil de 100 000 passagers annuels sur chacune d'entre elles.

38. Compte tenu de ce qui précède et sur la base de ces engagements, la Commission considère que l'opération ne conduira pas à la création ou au renforcement d'une position dominante susceptible d'entraver de façon significative la concurrence sur une partie substantielle du Marché commun.

D. LIAISONS VERS L'AFRIQUE

39. En matière de liaisons entre l'Europe et l'Afrique Noire Francophone, le marché pertinent peut être défini comme un faisceau de routes entre l'ensemble des points de départ de la CEE et l'AELE d'une part, et chacune des destinations de l'Afrique Noire Francophone d'autre part et ce pour les raisons suivantes :

- longue durée des vols ainsi que nombre limité des fréquences hebdomadaires offertes sur lesdites liaisons;

- du côté européen, bonnes possibilités de connexions intra-européennes;

- du côté africain, absence de substituabilité entre les différentes villes africaines en raison de mauvaises connexions ou même de l'absence de liaisons entre elles, dans la plupart des cas.

Par exemple, pour les raisons exposées ci-dessus, du point de vue du consommateur, il existe une substituabilité réelle entre un vol vers Douala au départ de Paris et les vols existants au départ de Bruxelles, Genève ou Frankfort. En revanche, les possibilités pour arriver à Douala via Cotonou, Lagos ou Libreville sont extrêmement limitées.

40. En matière de transport de passagers, la position des groupes Air France (directement ou à travers sa filiale UTA) et Sabena est très forte sur les destinations suivantes notamment en termes de parts de marché: Ouagadougou (Burkina Faso), Bujumbura (Burundi), Bamako (Mali), Niamey (Niger) et Kigali (Rwanda).

41. En ce qui concerne le fret, il en est de même pour les destinations suivantes: Bujumbura (Burundi), Bamako (Mali) et Niamey (Niger).

42. Une telle situation est imputable à plusieurs facteurs que sont:

- les liens traditionnels d'ordre historique, culturel et linguistique entre les pays concernés et la France et la Belgique,

- les accords bilatéraux existants qui ne prévoient pas la multi-désignation [possibilité pour les autorités gouvernementales de désigner plus d'une compagnie aérienne sur une liaison donnée.] ou la permettent seulement en faveur des compagnies françaises et belges,

- la faiblesse du trafic annuel sur les liaisons en cause (entre 20 000 passagers annuels environ vers Kigali à 58 000 vers Bamako; entre 2 500 tonnes de fret par an vers Niamey à 5 500 vers Bujumbura).

43. Dans ce contexte, et en vue de remédier aux situations parmi les plus problématiques, des engagements ont été pris par Air France et Sabena ainsi que par les gouvernements belge et français. Ces engagements qui figurent in extenso en annexe font partie intégrante de la présente décision.

44. Ces engagements visent à ouvrir certaines desdites liaisons à la concurrence.En particulier Air France s'est engagée à abandonner une desserte hebdomadaire au départ de Paris sur Kigali et Bujumbura, afin de permettre à un nouvel entrant d'exploiter cette liaison en tant que telle ou en combinaison avec Nairobi en point intermédiaire, s'il le souhaite et afin d'assurer une meilleure rentabilité de la ligne. De même Sabena s'est engagée à abandonner une desserte hebdomadaire au départ de Bruxelles sur Niamey, Ouagadougou et Bamako, afin de permettre à un nouvel entrant de desservir cette liaison en tant que telle ou en combinaison avec Bangui en point intermédiaire s'il le souhaite.

45. Des engagements supplémentaires ont été demandés aux gouvernements belge et français dans ce domaine, afin de s'assurer de ce que les mesures étatiques nécessaires pour exploiter les dessertes abandonnées par Air France et Sabena seraient prises en faveur des nouveaux entrants. Ces engagements consistent en l'obligation pour les deux gouvernements d'accorder aux nouveaux entrants les droits de trafic ainsi que les créneaux horaires et les facilités aéroportuaires nécessaires, et de s'employer au besoin à la renégociation des accords bilatéraux avec les Etats africains concernés qui ne prévoient pas actuellement la multi-désignation.

46. Compte tenu de ce qui précède, et sur la base de ces engagements, la Commission considère que l'opération ne conduira pas à la création ou au renforcement d'une position dominante susceptible d'entraver de façon significative la concurrence sur une partie substantielle du Marché commun.

E. MISE A DISPOSITION PAR LES AUTORITES PUBLIQUES DES INSTALLATIONS AEROPORTUAIRES ET DES CRENEAUX HORAIRES

1. Créneaux horaires et facilités aéroportuaires sur l'aéroport de Zaventem

47. L'aéroport de Bruxelles-Zaventem dispose actuellement d'une capacité horaire de 45 créneaux horaires. Suivant les tranches horaires, Sabena possède entre 11 % et 44 % des créneaux horaires disponibles. Cette proportion est naturellement plus élevée durant les heures de pointe. Sabena transporte globalement environ 38 % des passagers utilisateurs de l'aéroport.

48. Les projets d'extension des installations aéroportuaires de Bruxelles-Zaventem devraient permettre de porter à l'horizon 2000 la capacité de l'aéroport à 80 mouvements à l'heure. Cependant, le business plan annexé à l'accord prévoit que Sabena devrait au même moment, avec Air France , exploiter un réseau "hub and spoke" centré sur l'aéroport de Zaventem et desservant 75 destinations européennes, principalement secondaires. Un tel réseau se révèlera particulièrement consommateur de créneaux horaires aux heures de pointe (matin et fin d'après-midi), dès lors qu'il concerne principalement la clientèle d'affaires et qu'il s'agit de vols de durée assez brève vers des destinations européennes effectués le plus souvent à l'aide d'appareils de faible capacité.

49. A titre de simple simulation, le fonctionnement d'un réseau "hub and spoke" efficace desservant simultanément 75 destinations exige 150 créneaux horaires durant une période d'environ deux heures le matin et le soir. L'extension du réseau européen de la Sabena se traduira par conséquent nécessairement par une occupation des créneaux horaires disponibles sur l'aéroport de Zaventem qui impliquera que les compagnies concurrentes désirant exploiter de nouvelles lignes au départ ou à destination de Bruxelles, ne seront pas en mesure de le faire faute de créneaux disponibles ou de créneaux adéquats.

50. Pour éviter que le nouvel ensemble, compte tenu de ses projets de développement, ne jouisse d'une position dominante sur l'ensemble des routes au départ de Bruxelles, il était nécessaire que des créneaux horaires soient laissés disponibles pour d'autres compagnies. A cet effet, les deux compagnies se sont engagées[Ces engagements figurent in extenso en annexe et font partie intégrante de la présente décision.] à se limiter sur l'aéroport de Zaventem et pour une période de 10 ans, à un nombre de slots égal à 65 % des slots disponibles par tranche glissante de deux heures, cette limite étant combinée avec une disponibilité pour Air France et Sabena de 75 % de slots par tranche glissante de 60 minutes.

Le Gouvernement belge [Ces engagements figurent in extenso en annexe et font partie intégrante de la présente décision.] a confirmé cet engagement et s'est lui-même engagé à ce que les concurrents des groupes Air France et Sabena puissent créer, s'ils le souhaitent, leur propre service d'assistance en escale.

51. Compte tenu de ce qui précède et sur la base de ces engagements, la Commission considère que l'opération ne conduira pas à la création ou au renforcement d'une position dominante susceptible d'entraver de façon significative la concurrence sur une partie substantielle du Marché commun.

2. Réseaux "hub and spoke" intra-communautaires

52. La création par Air France et Sabena d'un réseau "hub and spoke" centré sur l'aéroport de Zaventem implique la mise en place d'un système de dessertes au moins biquotidiennes vers 75 destinations européennes permettant une correspondance très rapide (dans une période de deux heures maximum) entre les vols à l'arrivée et ceux au départ. Ce réseau sera essentiellement constitué de liaisons entre villes principales et villes secondaires ou régionales de l'ensemble CEE et AELE. Il s'agit ainsi d'un système qui ajoute un élément par rapport aux autres aéroports existants aujourd'hui: la possibilité, grâce à des correspondances très rapides, de faire des trajets aller-retours entre villes principales et villes secondaires européennes ou entre villes secondaires européennes entre elles dans des délais beaucoup plus brefs qu'actuellement. De tels trajets aller-retours devraient notamment pouvoir être effectués au cours d'une même journée.

53. Pour qu'un aéroport soit susceptible d'accueillir un tel réseau, il faut qu'il présente les caractéristiques suivantes:

- un emplacement géographique central maximisant les effets bénéfiques des différentes combinaisons possibles en termes de temps de vol et de coûts d'exploitation. S'agissant de la partie occidentale de l'Europe, la zone possible s'étend des Pays-Bas à la Vallée du Rhône et du Bassin Parisien à la Bavière. En effet, l'aéroport pivot permettant d'effectuer de manière indirecte des liaisons aériennes telles que Glasgow-Milan, Copenhague-Porto ou encore Bordeaux-Prague, est susceptible de se trouver indifféremment dans cette zone. Telle est en conséquence l'aire géographique à prendre ici en considération;

- une aire d'attraction immédiate suffisante tant sur le plan économique que pour le nombre d'habitants et disposant d'un bon réseau de communications routières et ferroviaires à grande vitesse. L'aéroport pivot doit en effet lui-même générer un trafic propre que l'on estime généralement au moins égal au quart de l'ensemble des passagers transportés;

- de substantielles possibilités d'accroissement du trafic, notamment aux heures de pointe. L'existence de deux pistes parallèles est à cet égard un élément très important à considérer; surtout, l'aéroport doit être loin du seuil de saturation et posséder des capacités d'extension;

- l'absence de proximité d'un autre aéroport pivot d'un réseau intra-communautaire concurrent; et ceci tant pour des raisons commerciales qu'à cause des risques d'encombrement des systèmes d'ATC;

- dans un grand pays, l'accueil d'un nombre suffisant de vols intérieurs de façon à alimenter le réseau aussi bien à partir des régions de ce pays qu'avec le trafic de villes situées dans d'autres pays.

Ces différents avantages sont présents à des degrès divers dans les aéroports de la Communauté mais en France, on peut cependant estimer que les aéroports du sud du pays sont trop à l'écart pour accueillir le centre d'un réseau "hub and spoke" qui couvrirait les mêmes régions de l'Europe occidentale que celui projeté à Bruxelles-Zaventem.

54. Le réseau projeté par Air France et Sabena à partir de l'aéroport de Zaventem pourrait avoir pour effet :

a) de renforcer la position dominante d'Air France et de la Sabena sur l'ensemble des routes existantes entre la Belgique et la France. Grâce à la mise en œuvre du hub, les vols des deux compagnies se trouveront alors être les plus pratiques pour les usagers en transit, ce qui rendra très difficile l'exploitation des lignes concernées par un nouvel entrant;

b) d'ériger des barrières à l'entrée par le fait que Air France et la Sabena, auront accès aux installations aéroportuaires susceptibles d'accueillir le pivot d'un réseau "hub and spoke" performant et viable au détriment des compagnies qui souhaiteront faire de même ultérieurement.

55. En conséquence, afin de contrebalancer la position dominante existante et de contrecarrer le renforcement de celle susceptible d'être créée par la constitution du réseau "hub and spoke" prévu conjointement par Air France et Sabena, il y a lieu de s'assurer que la mise en place d'un réseau "hub and spoke" concurrent basé sur un aéroport pivot situé dans l'aire géographique précitée et présentant des avantages comparables à ceux de l'aéroport de Bruxelles-Zaventem, soit réalisable à court terme de façon à ce que la concurrence puisse se manifester dès que possible.

56. La Commission a pris note de l'engagement [Cet engagement qui fait partie intégrante de la présente décision figure in extenso en annexe.] du Gouvernement français par lequel celui-ci permettra, si des entreprises concurrentes d'Air France et Sabena le demandent, la création ou le développement d'un réseau intégré en étoile situé au nord d'une ligne La Rochelle, Chaumont, Nancy, et comparable à celui prévu par Air France et Sabena à Bruxelles.

57. Compte tenu de ce qui précède et sur la base de ces engagements, la Commission considère que l'opération ne conduira pas à la création ou au renforcement d'une position dominante susceptible d'entraver de façon significative la concurrence sur une partie substantielle du Marché commun.

VII. OBSERVATIONS DES GOUVERNEMENTS DES ETATS MEMBRES ET DE TIERS

58. Suite à la notification et à la transmission des engagements des deux compagnies et des gouvernements belge et français aux autorités compétentes des Etats membres, la Commission a reçu des observations de quatre gouvernements, de trois entreprises et d'un membre du Comité Economique et Social.

Elle a pris en compte ces observations dans la présente décision.

VIII. CONCLUSION

59. Pour les raisons exposées ci-dessus et compte tenu des engagements unilatéraux pris par les compagnies Air France et Sabena ainsi que par les gouvernements belge et français, la Commission a décidé de ne pas s'opposer à l'opération notifiée et de la déclarer compatible avec le Marché commun.

Cette décision est adoptée conformément à l'article 6 paragraphe 1 lettre b) du règlement du Conseil n° 4064-89.

Pour la Commission

ANNEXES

9 septembre 1992

Engagements Air France ET Sabena

Les engagements d'Air France et de Sabena ont pris en compte le Protocole d'Accord qui inclut notamment la Business Plan de Sabena et la Plan de Coopération Industrielle Air France - Sabena.

1. LIAISONS ENTRE LA FRANCE ET LA BELGIQUE

1.1. Cassions de lignes

Sur les liaisons entre Bruxelles d'une part et Lyon et Nice d'autre part, actuellement exploitées par les Compagnies du Groupe Air France et Sabena, l'une des deux Compagnies se retirera moyennant un préavis de trois mois après l'obtention des autorisations nécessaires pour l'exploitation par une Compagnie repreneuse. Les créneaux horaires [Sans préjudice des attributions conférées aux Autorités publiques et administratives] correspondant ainsi que les facilités aéroportuaires nécessaires [Sans préjudice des attributions conférées aux Autorités publiques et administratives] seront garantis sur ces aéroports, pour la Compagnie ou les Compagnies communautaires qui reprendront ces deux liaisons.

Le retrait des fréquences correspondra à la moitié des passagers actuellement transportés entre Bruxelles d'une part, Lyon et Nice d'autre part.

La présence obligation sera d'application jusqu'au 1er avril 1997. Si, à cette date, aucun repreneur ne s'est présenté, les Groupes Air France et Sabena saisiront la Commission qui examinera, dans un délai d'un moins, dans quelle mesure et pour quelle durée, il y a lieu de maintenir ladite obligation d'abandon.

Les groupes Air France et Sabena s'interdisent, pendant une durée de 4 ans prenant cours à compter de la date de leur retrait d'augmenter le nombre de fréquences qu'elles exploitent sur les liaisons en cause, sauf dans les cas suivants:

a) abandon de fréquences par la ou les Compagnies repreneuses et absence de nouvel entrant dans un délai de trois mois après ledit abandon. Sur ce point toutefois, le Groupe Air France et/ou le Groupe Sabena devront informer la Commission de ce qu'elles augmentent le nombre de fréquences qu'elles exploitent sur les liaisons en cause et établir l'équivalence, en terme de capacité, entre ladite augmentation et l'abandon susmentionné;

b) évolution à la hausse du trafic nécessitant l'augmentation globale des capacités à mettre en ligne sur l'une et/ou l'autre des destinations. Sur ce point toutefois, le Groupe Air France et/ou le Groupe Sabena devront informer la Commission de son désir d'augmenter le nombre de fréquences exploitées sur les liaisons en cause et établir l'équivalence entre l'évolution du trafic et l'augmentation de capacités désirée. Si dans un délai d'un mois, la Commission n'a pas exprimé son désaccord, l'augmentation de capacités désirée sera réputée acquise;

c) dans un souci de clarification, dans le cas où une des deux Compagnies déciderait de se retirer, de son propre chef, sans qu'il y ait de repreneur indépendant, le Groupe restant pourra augmenter ses capacités sur les liaisons en cause, dans les limites nécessaires pour remplacer les capacités du Groupe qui s'est retiré.

Un accord d'interligne, d'une durée de cinq ans à compter de l'arrivée du nouvel entrant, sera conclu sous des conditions raisonnables et conformément aux usages communément admis dans la profession - notamment en ce qui concerne les possibilités de réciprocité et en matière de caution - avec la ou les Compagnies repreneuses qui le demanderaient.

1.2. Liaisons Paris - Bruxelles

Sur la liaison entre Paris et Bruxelles où les Compagnies Air France et Sabena ont l'intention de mettre en œuvre des programmes cadencés, les deux Compagnies ne s'opposeront pas à ce que les Autorités françaises et belges autorisent d'autres Compagnies communautaires à assurer cette desserte, en leur donnant la possibilité d'avoir globalement sur cette liaison, et dans des tranches horaires raisonnables, un nombre de fréquences égal à celui qu'elles exploiteront, à partir des mêmes plates-formes aéroportuaires utilisées par Air France et Sabena.

Des créneaux horaires et des facilités aéroportuaires satisfaisantes seront garantis [Sans préjudice des attributions conférées aux Autorités publiques et administratives] aux Compagnies communautaires désireuses d'exploiter cette desserte cadencée dans la limite d'un nombre de fréquences égal à celui d'Air France et de Sabena, et dans le cas où interviendrait éventuellement une rétrocession de créneaux horaires des Compagnies du Groupe Air France ou de Sabena, dans la limite maximale de dix par jour, par aéroport concerné.

2. LIGNES EXTRA-COMMUNAUTAIRES

2.1. Liaisons vers les pays tiers hors AELE et Afrique Noire francophone

En fonction des demandes présentées et sous réserve des accords bilatéraux, les Groupes Air France et Sabena ne s'opposeront pas à ce que leurs Autorités respectives désignent au moins une Compagnie extérieure à leurs Groupes, licenciée en France sur les liaisons extra-communautaires au départ des aéroports parisiens, ou licenciée en Belgique sur les liaisons extra-communautaire au départ de l'aéroport de Bruxelles-National, vers les destinations d'Ankara et de Budapest, dès que les routes en question dépassent le seuil de 100 000 passagers annuels sur chacune d'entre elles pour ce qui est de respectivement Air France et Sabena. Cette obligation sera réexaminée en cas de changement structurel ou juridique important affectant l'exploitation de ces routes.

2.2. Desserte de l'Afrique Noire francophone

Air France et Sabena prennent acte de ce que la Commission ne leur demande d'abandonner des liaisons africaines que dès qu'une compagnie repreneuse, présentant une crédibilité suffisante pour garantir la permanence de son exploitation, se présente.

Air France abandonnera, moyennant un préavis de 3 mois après l'obtention des autorisations nécessaires pour l'exploitation par la compagnie repreneuse licenciée en France, une desserte hebdomadaire au départ de Paris sur Kigali et Bujumbura.

L'abandon coïncidera toujours avec la fin d'une saison IATA. Air France ne s'opposera pas à ce qu'une compagnie repreneuse puisse combiner, au départ de Paris, et avec une fréquence hebdomadaire, la desserte de Kigali et Bujumbura avec celle de Nairobi en point intermédiaire, sans pour autant abandonner de dessertes sur ce dernier point.

Sabena abandonnera, moyennant un préavis de 3 mois après l'obtention des autorisations nécessaires pour l'exploitation par la compagnie repreneuse licenciée en Belgique, une desserte hebdomadaire au départ de Bruxelles sur Niamey, Ouagadougou et Bamako. L'abandon coïncider toujours avec la fin d'une saison IATA. Sabena ne s'opposera pas à ce qu'une compagnie repreneuse puisse combiner au départ de Bruxelles, et avec une fréquence hebdomadaire, la desserte de Niamey, Ouagadougou et Bamako avec celle de Bangui en point intermédiaire, sans pour autant abandonner la faculté de desservir ce dernier point suivant les accords existants.

Dans la mesure ou ce sera nécessaire, les autorités françaises et belges s'emploieront à renégocier les accords bilatéraux avec les Etats africains concernés qui ne prévoient pas actuellement la multi-désignation.

Les Autorités françaises et belges veilleront à ce que des créneaux horaires, des facilités aéroportuaires, soient attribués aux compagnies repreneuses pour leur permettre d'exploiter dans des conditions raisonnables les liaisons visées au présent article.

Un accord d'interligne prenant effet à compter de la date de la reprise sera conclu sous des conditions raisonnables et conformément aux usages communément admis dans la profession (notamment en ce qui concerne les possibilités de réciprocité et en matière de caution) avec la ou les compagnies repreneuses qui le demanderaient.

La présente obligation sera d'application jusqu'au 31 décembre 1999.

Les Groupes Air France et Sabena s'interdisent pendant une durée de quatre ans prenant cours à compter de la date de leur retrait d'exploiter les fréquences abandonnées par l'un et par l'autre sauf dans les cas suivants:

a) abandon de fréquences par la ou les compagnies repreneuses et absence de nouveaux entrants, dans un délai de trois mois après l'annonce de l'abandon;

b) évolution à la hausse du trafic nécessitant l'augmentation globale des capacité sur une des destinations en cause. L'avis conforme de la Commission devra, au préalable, avoir été obtenu, dans un délai d'un mois à compter de la demande;

c) augmentation significative du nombre de fréquences par des compagnies autres que les compagnies repreneuses entre la Communauté et les destinations susvisées sans rapport avec l'évolution du trafic;

d) retrait partiel ou total d'Air France ou de Sabena de leur propre chef sur l'une ou plusieurs des destinations visées au présent article. La compagnie restante pourra augmenter ses capacités sur les liaisons en cause, dans la limite nécessaire pour remplacer les capacités abandonnées.

3. GENERAUX HORAIRES A ZAVENTEM

Air France et la Sabena se limiteront pour une période de 10 ans, à un nombre de slots égal à 65 % des slots disponible par tranche glissante de deux heures.

Cette limite sera combinée avec une disponibilité pour Sabena et Air France de 75 % de slots par tranche glissante de 60 minutes.

4. CLAUSE DE REVISION

Sabena et Air France pourront demander, à tout moment à la Commission, eu égard à des circonstances imprévues, ou des changements structurels ou juridiques importants en matière de transport aérien, un aménagement de leurs engagements, il est entendu que la Commission agira avec célérité et examinera toute demande dans les meilleurs délais.

5. DEFINITIONS

Au sens du présent Accord:

a) l'expression "Compagnie communautaire" signifie toute Compagnie désignée dans l'un des Etats Membres au sens du règlement "licence" du 3e paquet,

b) l'expression "Groupe Air France " signifie:

- Air France

- UTA

- Air Inter

- Air Charter International

- toute société contrôlée directement ou indirectement

par l'une ou plusieurs des entreprises ci-dessus

- toute personne agissant pour le compte d'une entreprise visée aux tirets qui précèdent

c) l'expression "Groupe Sabena" signifie:

- Sabena

- Delta Air Transport

- DAT Wallonie

- SOBELAIR

- toute société contrôlée directement ou indirectement par l'une ou plusieurs des entreprises ci-dessus

- toute personne agissant pour le compte d'une entreprise visée aux tirets qui précèdent.

Pour Air France Monsieur Bernard Attali Président

Pour la Sabena Monsieur Jan Ghysebaert Secrétaire Général

LETTRES ANNEXEES

Lettre 1:

Expéditeur : Représentation Permanente de la Belgique auprès des Communautés Européennes

Destinataire : Monsieur CD Ehlermann

Directeur Général

Direction Générale de la Concurrence

Commission des Communautés européennes

Rue de la Loi 200

1049 Bruxelles

Référence : MS-nf

P11-91-42-35.803

Monsieur le Directeur Général,

Objet : Règlement (CEE) n° 4046-89 du Conseil

Affaire IV/M.157 - Air France-Sabena

Par lettre 16680 du 11 septembre 1992, vous avez bien voulu me faire part de l'état de vos réflexions à propos du Protocole d'accord signé le 10 avril 1992 par Air France, Sabena et l'Etat belge ainsi que des aménagements envisagés par ces deux groupes pour éviter la constitution ou le renforcement de positions dominantes.

Dans cette perspective et afin de vous assurer du maintien d'un niveau de concurrence satisfaisant sur un certain nombre de marchés concernés par cette coopération, vous souhaitez connaître les engagements que le Gouvernement belge est prêt à prendre, en sa qualité d'autorité publique en vue de résoudre les problèmes de concurrence posés par l'opération en objet.

De façon à vous permettre de prendre une décision sur cette affaire, j'ai l'honneur de vous préciser ces engagements :

1) Le Gouvernement belge prend acte du texte ci-joint dénommé "engagements Air France et Sabena".

2) Relations entre la France et la Belgique

Le Gouvernement belge appliquera dès la saison d'hiver 92-93, les dispositions du troisième paquet de libéralisation adopté le 22 juin de façon à permettre à tout transporteur communautaire désireux d'exploiter des vols entre la France et la Belgique de le faire conformément aux dispositions des règlements correspondants.

Le Gouvernement belge veillera à ce que les créneaux horaires cédés par les deux compagnies et les facilités aéroportuaires qui s'y rapportent soient attribués aux nouveaux entrants pour leur permettre d'exploiter dans des conditions raisonnables les liaisons Bruxelles-Lyon, Bruxelles-Nice et Bruxelles-Paris. La présente obligation sera d'application jusqu'au 1er avril 1997 en ce qui concerne les liaisons Bruxelles-Lyon et Bruxelles-Nice, et tant que cette liaison sera exploitée, en ce qui concerne la liaison Paris-Bruxelles.

3) Relations entre la Belgique et les pays tiers européens hors AELE

En fonction des demandes présentées et sous réserve des accords bilatéraux, le Gouvernement belge ouvrira à la multi-désignation en faveur d'au moins un transporteur extérieur aux groupes Air France et Sabena et titulaire d'une licence belge, les liaisons au départ de Bruxelles vers Ankara et Budapest dès que le trafic sur chacune de ces routes dépassera le seuil de 100 000 passagers annuels. Cette obligation sera réexaminée en cas de changement structurel ou juridique important affectant l'exploitation de ces routes.

4) Relations entre la Belgique et l'Afrique

Les autorités belges accorderont aux transporteurs licenciés en Belgique désireux d'exploiter une desserte hebdomadaire au départ de Bruxelles sur Niamey, Ouagadougou et Bamako, en combinaison, s'ils le souhaitent, avec Bangui en point intermédiaire, tous les droits de trafic nécessaires pour ce faire. Elles s'emploieront au besoin à renégocier les accords bilatéraux avec les Etats africains concernés qui ne prévoient pas actuellement la multi-désignation. Elles veilleront également à ce que des créneaux horaires et des facilités aéroportuaires soient attribués aux compagnies repreneuses pour leur permettre d'exploiter dans des conditions raisonnables ledites liaisons.

Les présentes obligations seront d'application jusqu'au 31 décembre 1999.

5) Créneaux horaires et assistance en escale sur l'aéroport national

Le Gouvernement belge veillera pendant une période de dix ans à ce que les groupes Air France et Sabena ne détiennent pas conjointement, par tranche glissante de deux heures, plus de 65 % du total des créneaux horaires disponibles sur l'aéroport national. Cette limite sera combinée avec une disponibilité pour ledits groupes d'un maximum de 75 % de créneaux horaires par tranche glissante de 60 minutes.

De même, les autorités belges interviendront auprès des autorités aéroportuaires concernées afin que les concurrents des groupes Air France et Sabena puissent créer, s'ils le souhaitent, leur propre service d'assistance en escale (Self handling). Elles modifieront au besoin pour ce faire les règlements applicables.

6) Définitions

Au sens de la présente lettre :

a) l'expression "transporteur" signifie tout transporteur

désigné dans l'un des Etats membres au sens du règlement "licence" du 3ème paquet;

b) l'expression "groupe Air France " signifie :

- Air France

- UTA, Air Inter, Air Charter International

- toute société contrôlée directement ou indirectement par l'une ou plusieurs des entreprises ci-dessus

- toute personne agissant pour le compte d'une entreprise visée aux tirets qui précèdent.

7) Les engagements ci-dessus ne portent pas préjudice aux droits reconnus aux transporteurs aériens par les dispositions communautaires et nationales plus favorables.

Veuillez agréer, Monsieur le Directeur Général, l'assurance de ma considération très distinguée.

Ph. de Schoutheete de Tervarent,

Représentant Permanent

Lettre 2:

Expéditeur : Représentation Permanente de la France auprès des Communautés européennes

Destinataire : M. Claus Ehlermann

Directeur Général de la Concurrence (DG/IV)

Commission des Communautés européennes

Rue de la Loi 200

B - 1049 Bruxelles

Bruxelles, le 29 septembre 1992

Monsieur le Directeur Général,

Je vous prie de bien vouloir trouver ci-joint la réponse des autorités françaises à la lettre n° 16679 du 11 septembre 1992 relative aux mesures à prendre pour assurer la compatibilité avec les règles du Marché commun du protocole d'accord signé par Air France, la Sabena et l'Etat belge, tel que notifié à la Commission des Communautés européennes le 7 septembre dernier.

Vous en souhaitant bonne réception, je vous prie de croire, Monsieur le Directeur Général, à l'assurance de ma considération distinguée.

François Scheer

Annexe à la Lettre 2

Par la lettre 16 679 du 11 septembre 1992, vous avez bien voulu me faire part de l'état de vos réflexions à propos du dossier de coopération qui vous a été présenté par Air France et Sabena ainsi que des aménagements envisagés par ces deux groupes pour éviter la constitution ou le renforcement de positions dominantes.

Dans cette perspective et afin de vous assurer du maintien d'un niveau de concurrence satisfaisant sur un certain nombre de marchés concernés par cette coopération, vous souhaitez connaître les engagements que le Gouvernement français est prêt à prendre quant aux suites qu'il réserverait à certaines demandes qui lui seraient présentées par des transporteurs extérieurs aux deux groupes impliqués.

De façon à vous permettre de prendre une décision sur cette affaire, j'ai l'honneur de vous préciser ci-dessous ce que le gouvernement considèrerait être ses obligations au regard des dispositions du traité, dans le cas où le projet de coopération entre Air France et Sabena entrerait en vigueur.

1) Le Gouvernement français prend acte du texte ci-joint dénommé "engagements Air France et Sabena".

2) Relations entre la France et la Belgique.

Le Gouvernement français appliquera dès la saison d'hiver 92-93 les dispositions du troisième paquet de libéralisation adopté le 22 juin de façon à permettre à tout transporteur communautaire désireux d'exploiter des vols entre la France et la Belgique de le faire conformément aux dispositions des règlements correspondants.

Le Gouvernement français veillera à ce que les créneaux horaires cédés par les deux compagnies et les facilités aéroportuaires qui s'y rapportent soient attribués aux nouveaux entrants pour leur permettre d'exploiter dans des conditions raisonnables les liaisons Bruxelles-Lyon, Bruxelles-Nice et Bruxelles-Paris. La présente obligation sera d'application jusqu'au 1er avril 18997 en ce qui concerne les liaisons Bruxelles-Lyon et Bruxelles-Nice, et tant que cette liaison sera exploitée, en ce qui concerne la liaison Paris-Bruxelles.

3) Relation entre la France et les pays tiers européens hors AELE.

En fonction des demandes présentées et sous réserve des accords bilatéraux, le Gouvernement français ouvrira à la multi-désignation, en faveur d'au moins un transporteur extérieur aux groupes Air France et Sabena et titulaire d'une licence française, les liaisons au départ de Paris vers Ankara et Budapest, dès que le trafic sur chacune de ces routes dépassera le seuil de 100 000 passagers annuels. Cette obligation sera réexaminée en cas de changement structurel ou juridique important affectant l'exploitation de ces routes.

4) Relations entre la France et l'Afrique.

Les autorités françaises accorderont aux transporteurs licenciés en France désireux d'exploiter une desserte hebdomadaire au départ de Paris sur Kigali et/ou Bujumbura, en combinaison, s'ils le souhaitent, avec Nairobi en point intermédiaire, tous les droits de trafic nécessaires pour ce faire. Elles s'emploieront au besoin à renégocier les accords bilatéraux avec les Etats africains concernés qui ne prévoient pas actuellement la multi-désignation. Elles veilleront également à ce que des créneaux horaires et des facilités aéroportuaires soient attribués aux compagnies repreneuses pour leur permettre d'exploiter dans des conditions raisonnables ledites liaisons.

Les présentes obligations seront d'application jusqu'au 31 décembre 1999.

5) Création d'une plate-forme de correspondance concurrente de Paris et Bruxelles.

Le Gouvernement français a indiqué par ailleurs dans un courrier concomitant la manière dont il mettra en œuvre au plan national sa politique en ce domaine.

6) Définitions.

Au sens de la présente lettre:

a) l'expression "transporteur" signifie tout transporteur désigné dans l'un des Etats membres au sens du règlement "licence" du 3ème paquet;

b) l'expression "groupe Air France " signifie:

- Air France,

- UTA, Air Inter, Air Charter International,

- toute société contrôlée directement ou indirectement par l'une ou plusieurs des entreprises ci-dessus,

- toute personne agissant pour le compte d'une

entreprise visée aux tirets qui précèdent.

c) l'expression "groupe Sabena" signifie:

- Sabena,

- Sobelair, Delta Air Transport (DAT), DAT Wallonie,

- toute société contrôlée directement ou indirectement par l'une ou plusieurs des entreprises ci-dessus,

- toute personne agissant pour le compte d'une entreprise visée aux tirets qui précèdent.

7) Les engagements ci-dessus ne préjudicient pas aux droits reconnus aux transporteurs aériens par les dispositions communautaires et nationales plus favorables.

Lettre 3:

Expéditeur : Représentation Permanente de la France auprès des Communautés européennes

Destinataire : M. Pascal Lamy

Chef de Cabinet de M. Jacques Delors

Président des Communautés européennes

Rue de la Loi 200

B - 1049 Bruxelles

Bruxellles, le 29 septembre 1992

Monsieur le Chef de Cabinet,

Je vous prie de bien vouloir trouver ci-joint la teneur d'une lettre que M. Jean-Louis Bianco, ministre français du Logement, de l'Equipement et des Transports adresse au Président de la Commission et dont l'original vous parviendra dans les plus brefs délais.

Les dispositions communiquées dans la présente lettre répondent, vous le verrez, aux demandes formulées par la Commission au paragraphe 5 dans sa lettre du 11 septembre dernier relatif à la création et au fonctionnement d'une plate-forme de correspondance concurrente de celles de Paris et Bruxelles telles qu'envisagées par le protocole d'Accord entre Air France et Sabena.

A la lumière de la présente communication, au vu des engagements spécifiques souscrits par le Groupe Air France et le Groupe Sabena, ainsi que des obligations acceptées par mon Gouvernement, les autorités françaises s'attendent à ce que la Commission puisse sans retard déclarer, dans le cadre des dispositions du droit communautaire qu'elle a estimé pertinentes en l'espèce, le protocole d'accord Air France-Sabena-Etat belge compatible avec les règles du Marché commun.

Veuillez agréer, Monsieur le Chef de Cabinet, l'expression de ma considération distinguée.

Pierre Sellal

Annexe à la Lettre 3

Expéditeur : Le ministre de l'Equipement, du Logement et des Transports

Destinataire : Monsieur Jacques Delors

Président de la Commission des Communautés européennes

Monsieur le Président,

Dans le cadre de la politique commune du transport aérien et en particulier de son règlement 2408-92, le Gouvernement français souhaite apporter quelques précisions sur la façon dont il compte mettre celle-ci en œuvre au plan national.

Si une demande en ce sens lui est présentée, le Gouvernement français permettra la création, ou le développement d'un réseau intégré en étoile pour desservir principalement l'Espace Economique Européen à partir, en accord avec le transporteur concerné, d'un aéroport français non parisien situé au nord d'une ligne reliant La Rochelle, Chaumont et Nancy.

A cette fin le Gouvernement français accordera au départ de cet aéroport les droits de trafic que lui demanderait un transporteur titulaire d'une licence française vers six points situés en France, quatre points européens hors CEE et trois point situés dans le Maghreb (dans les conditions des accords aériens bilatéraux existants) pour autant que ce transporteur, seul ou en association avec d'autres transporteurs communautaires, présente un projet compatible avec les dispositions réglementaires applicables à la création et à l'exploitation des aéroports.

Un tel réseau devra avoir pour objectif minimum la mise en place d'ici 5 ans d'une desserte biquotidienne de 10 destinations européennes à l'aide d'un système de rendez-vous permettant la mise en correspondance deux fois par jour dans une période de deux heures de 10 vols à l'arrivée et de 10 vols au départ.

L'octroi de droits de cabotage français, par anticipation des dispositions prévue au 3ème paquet, étant destiné à alimenter le réseau européen en étoile, devra garder, jusqu'au 1er avril 1997, un caractère subsidiaire par rapport aux droits intra-européens, et sera subordonné dans des proportions raisonnables à l'exploitation effective de liaisons européennes avec des appareils de taille au moins équivalente à ceux exploités sur les liaisons de cabotage.

De façon générale, le Gouvernement français veillera également à ce que les transporteurs associés au réseau intégré bénéficient de façon non discriminatoire des dispositions nationales, régionales ou locales réglementaires et contractuelles les plus favorables applicables à l'utilisation des infrastructures aéroportuaires et des services de navigation aérienne.

Je vous prie d'agréer, Monsieur le Président, l'assurance de mes sentiments les meilleurs.