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Décisions

Cass. com., 4 mars 2003, n° 01-01.053

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Hapag Lloyd container Linie GMBH (Sté), capitaine du navire Sonara

Défendeur :

La Réunion Européenne (Cie), Les Mutuelles du Mans Assurances IARD(Cie), The British and Foreign Marine inscrance company(Sté), AGF Marine Aviation Transport (Cie), Siat (Cie), Mutuelle électrique d'assurances, Alte Leipziger Versicherung AG (Cie), Generali Transports (Cie)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Tricot

Rapporteur :

M. de Monteynard

Avocat général :

M. Jobart

Avocats :

Mes Le Prado, Balat.

Paris, 5e ch. civ., sect. A, du 29 nov. …

29 novembre 2000

LA COUR: - Attendu, selon l'arrêt déféré (Paris, 29 novembre 2000), rendu sur contredit de compétence, que la société mexicaine Tropic de Mexico (le chargeur) a expédié un conteneur d'avocats depuis le Mexique jusqu'à Rungis à la société française Tropic international (le destinataire) ; que la marchandise a été prise en charge par la société allemande Hapag Lloyd (la société Hapag), qui l'a acheminée sur le navire " Sonora " sous couvert d'un connaissement de transport combiné depuis le port mexicain d'Altamira, via Anvers jusqu'à Rungis ; que, subrogée dans les droits du destinataire pour l'avoir indemnisé des avaries constatées à l'arrivée, la société La Réunion européenne, ainsi que sept autres assureurs (les assureurs), ont assigné la société Hapag en indemnisation devant le Tribunal de commerce de Créteil dont la compétence a été déclinée par cette dernière société sur le fondement d'une clause du connaissement donnant compétence aux tribunaux de Hambourg ;

Sur le premier moyen. pris en ses trois branches : - Attendu que la société Hapag reproche à l'arrêt d'avoir, en rejetant le contredit, retenu la compétence du tribunal de commerce de Créteil, alors, selon le moyen : 1°) que si les assureurs ont contesté l'opposabilité de la stipulation relative au choix de la loi applicable, ils n'en ont pas contesté l'existence, de sorte que la cour d'appel n'a pu nier cette existence sans méconnaître les données du litige, et violer l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ; 2°) qu'ainsi que la société Hapag l'a fait valoir au soutien de son contredit, aux termes de la clause 25 des conditions générales des connaissements, le droit applicable au contrat de transport est le droit allemand ; que, en l'état du choix exprès et formel de la loi applicable (juridiquement distinct de celui des tribunaux compétents, bien que les deux choix soient exprimés dans la même clause), choix en toute hypothèse opposable, quant à lui, au destinataire-porteur du connaissement, la cour d'appel en recherchant dans les termes de l'article 4 de la Convention de Rome, quelle pouvait être la loi applicable a violé l'article 3 de ladite Convention, selon lequel le contrat est en principe régi par la loi choisie par les parties ; 3°) que le choix de la loi applicable au contrat de transport maritime est opposable au destinataire porteur du connaissement ; que les juges du fond n'ont pu le nier sans violer les articles 18 et suivants de la loi n° 66-420 du 18 juin 1966 sur les contrats d'affrètement et de transport maritime ;

Mais attendu que la cour d'appel a énoncé, à bon droit, qu'à défaut de choix des parties, la loi applicable devait être déterminée selon l'article 4.5 de la Convention de Rome du 19 juin 1980 ratifiée par la France et l'Allemagne, qui prévoit que les présomptions de l'article 4.4 de cette Convention, relatif au contrat de transport de marchandises sont écartées lorsqu'il résulte de l'ensemble des circonstances que le contrat présente des liens plus étroits avec un autre pays, comme en l'espèce avec la France où devaient être livrées les marchandises à Rungis à la société Tropic de Mexico par un transporteur allemand à l'issue d'un transport du Mexique à destination de Rungis via les Etats-Unis et la Belgique et que, par suite, la loi française est applicable au contrat de transport ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen et sur le troisième moyen. pris en ses deux branches, réunis : - Attendu que la société Hapag fait encore le même reproche à l'arrêt, alors, selon le moyen : 1°) que dès lors qu'en droit français, et ainsi que la cour d'appel l'a reconnu, le porteur du connaissement succède aux droits du chargeur, la clause attributive de compétence stipulée au connaissement, acceptée par le chargeur, était opposable au porteur/destinataire ; que la cour d'appel n'a pu le nier sans violer l'article 17 de la Convention de Bruxelles du 27septembre 1968, tel que ce texte est compris par la Cour de justice des Communautés européennes (arrêt Tilly Russ du 19 juin 1984, Trasporti Castelletti du 19 mars 1999 et Coreck Maritime du 9 novembre 2000) ; 2°) que, si le porteur du connaissement n'a pas succédé aux droits et obligations du chargeur en vertu du droit national applicable, il convient de vérifier son consentement à la clause attributive de compétence au regard des exigences de l'article 17, premier alinéa, de la convention de Bruxelles du 27 septembre 1968 (arrêt Coreck Maritime, de la Cour de justice des Communautés européennes du 9 novembre 2000) ; que, pour juger que la clause litigieuse a été acceptée par le chargeur, les juges du fond ont reconnu l'usage existant dans le domaine du transport maritime et l'existence de relations habituelles entre le chargeur et le transporteur ; que, le destinataire exerçant, selon les constatations de l'arrêt, la même profession que le chargeur, recourant en conséquence de la même façon que le chargeur aux services de transporteurs maritimes, et ayant en outre les mêmes relations habituelles, avec la société Hapax, que le chargeur, la cour d'appel n'a pu ignorer que l'usage et les relations dont elle a fait la constatation impliquaient l'opposabilité de la clause litigieuse au porteur du connaissement, sans omettre de tirer les conséquences de ses propres constatations et violer l'article 17 alinéa 1b) et c) de la Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968 ; 3°) qu'en tout état de cause et très subsidiairement, en ne vérifiant pas le consentement du porteur du connaissement au regard des exigences de l'article 17, alinéa 1, de la Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968, la cour d'appel a, à tout le moins, entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard des dispositions de ce texte ;

Mais attendu qu'il ne résulte d'aucun texte de droit interne que le porteur de connaissement, en acceptant la livraison de la marchandise, succède aux droits et obligations du chargeur découlant de la clause attributive de juridiction acceptée par celui-ci et dès lors que par l'arrêt Coreck du 9 novembre 2000, la Cour de justice des Communautés européennes a dit pour droit qu'une clause attributive de juridiction, qui a été convenue entre un transporteur et un chargeur et qui a été insérée dans un connaissement, produit ses effets à l'égard du tiers porteur du connaissement pour autant qu'il a donné son consentement à ladite clause au regard des exigences de l'article 17, premier alinéa, de la Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968 concernant la compétence judiciaire et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale, modifiée, la cour d'appel, en retenant que la clause attributive de juridiction n'était pas opposable aux assureurs subrogés dans les droits du destinataire, porteur du connaissement, faute d'avoir été acceptée au plus tard lors de la livraison, a légalement justifié sa décision ; que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;

Par ces motifs : Rejette le pourvoi.