CCE, 21 décembre 1976, n° 77-129
COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES
Décision
Theal-Watts
LA COMMISSION DES COMMUNAUTES EUROPEENNES,
Vu le traité instituant la Communauté économique européenne, et notamment son article 85, vue le règlement nº 17 du Conseil du 6 février 1962 (1), et notamment ses articles 3, 5 et 15, vu la notification faite le 24 janvier 1963, conformément à l'article 5 paragraphe 1 du règlement nº 17, par Theal NV à Amsterdam (Pays-Bas), d'un accord verbal conclu le 8 septembre 1956 entre Theal NV et M. Cecil E. Watts de Sunbury-on-Thames (Royaume-Uni), vu la demande présentée à la Commission le 30 janvier 1974, conformément à l'article 3 du règlement nº 17, au nom de M. Jacob Dietrich Wilkes de Leeuwarden (Pays-Bas), vu la décision de la Commission du 2 décembre 1975 d'engager une procédure dans cette affaire, après avoir entendu les entreprises et personnes intéressées conformément aux dispositions de l'article 19 du règlement nº 17 et du règlement nº 99 du 25 juillet 1963 (2), vu l'avis du comité consultatif en matière d'ententes et de positions dominantes, recueilli, conformément à l'article 10 du règlement nº 17, le 19 octobre 1976,
I. EXPOSE DES FAITS
Considérant que les faits peuvent être résumés comme suit:
En 1954, M. Cecil E Watts de Sunbury-on-Thames (Royaume-Uni), qui avait récemment inventé le premier d'une série de produits destinés à nettoyer et entretenir des disques d'enregistrement, en commença la fabrication et la vente.
Les principaux produits fabriqués par Watts sont les suivants:
a) Watts "Dust Bug" : dispositif de nettoyage automatique pour tables de lecture. Il s'agit du premier produit fabriqué par Watts.
b) Watts "Parostatik" Disc Preener : destiné à l'entretien des disques neufs qui n'ont pas subi de traitement anti-statique préalable.
c) Watts Manual Parastat : utilisable pour disques neufs ou usagés, ce dispositif sert aussi à rendre aux disques usés une partie de leur qualité perdue. Il est également vendu avec un "Humid Mop" (balai humide), accessoire destiné à mouiller le disque avant application du Manual Parastat.
d) L'ensemble Hi-Fi-Parastat, comportant un nettoyeur d'aiguille, une brosse et un tampon pour utilisation sur des équipements phonographiques de haute qualité.
Le 8 septembre 1956, M. Watts désigna Theal NV, d'Amsterdam, Pays-Bas (devenu par la suite Theal BV et, depuis le 13 avril 1976, Tepea BV, mais ci-après dénommé Theal) en qualité de distributeur exclusif aux Pays-Bas. Cette désignation fut faite verbalement.
En liaison avec cette désignation et à peu près à la même époque, M. Watts concéda aussi expressément à Theal le droit exclusif d'utiliser aux Pays-Bas les marques attachées à tous les produits fournis par M. Watts. Cette concession a été également accordée verbalement.
En 1960, M. Watts constitua son entreprise en société à responsabilité limitée conformément à la loi du Royaume-Uni, sous la raison sociale Cecil E. Watts Ltd (ci-après dénommée Watts). Cette société a repris les droits et obligations résultant de l'accord en vertu duquel M. Watts avait désigné Theal comme son distributeur exclusif aux Pays-Bas avec le droit d'utiliser les marques attachées aux produits en cause.
Le 24 janvier 1963, Theal notifia à la Commission un accord verbal conclu avec Watts le 8 septembre 1956 concernant la désignation de Theal en qualité de distributeur exclusif aux Pays-Bas. Cet accord était décrit comme accord de concession exclusive de durée indéterminée aux termes duquel Watts était tenu de fournir Theal exclusivement aux Pays-Bas et de transmettre à Theal toutes commandes que Watts recevrait pour les Pays-Bas.
Theal déclara dans le formulaire de notification que l'accord ne comportait aucune restriction à la liberté d'acheter ou de revendre à des tiers, ne prévoyait aucune répartition de marché et n'excluait pas la libre concurrence à l'intérieur des Etats membres ou entre ceux-ci.
Aucune mention ne fut faite de ce que Theal avait également acquis le droit d'utiliser pour son propre compte aux Pays-Bas les marques de Watts.
La Commission n'a eu connaissance de l'octroi du droit exclusif d'utiliser lesdites marques que le 11 juillet 1975 lors d'une réunion avec Theal et Watts. De plus, les deux parties ont formellement déclaré lors de l'audition du 23 février 1976 que l'accord du 8 septembre 1956 n'avait jamais été modifié.
Le 18 avril 1969, la Commission a informé Theal par une lettre qu'il reconnaît avoir reçue, qu'après examen provisoire, l'accord notifié paraissait entrer dans la catégorie d'accords ne comportant d'autres restrictions à la concurrence que celles admises par le règlement nº 67-67. La Commission soulignait que l'exemption prévue par ce règlement ne joue pas dès lors que les contractants s'efforcent par un moyen quelconque de réaliser une protection territoriale absolue, que ce soit par un accord formel ou par tout autre moyen.
La lettre informait également Theal que, au vu de la notification et des indications données par Theal, l'accord semblait ne contenir aucune disposition réalisant une protection territoriale absolue et qu'il pouvait dès lors bénéficier de l'exemption prévue par le règlement. La Commission indiquait toutefois, par la même occasion, que si l'accord ne répondait pas effectivement aux conditions d'exemption prévues dans le règlement nº 67-67, il devait être modifié en conséquence, auquel cas il ne serait exempté qu'à la date de cette modification.
Theal était invité à informer la Commission de tout commentaire concernant l'examen provisoire de l'accord. Theal n'ayant pas répondu, la Commission n'avait aucune raison de mettre en doute le fait que l'accord était conforme aux dispositions de l'article 1er paragraphe 1 du règlement nº 67-67.
Les produits fabriqués au Royaume-Uni par Watts et faisant l'objet de cet accord ont eu beaucoup de succès. En 1973, quelque 56 % de la production totale était exportée vers des pays situés en dehors du Marché commun. A l'intérieur du Marché commun, les ventes au Royaume-Uni représentaient environ 27 % de la production, aux Pays-Bas environ 7 % et en Allemagne un peu plus de 5 %. Dans les autres Etats membres, les ventes étaient de moindre importance et représentaient dans l'ensemble moins de 5 %. Aux dires des contractants eux-mêmes, les ventes effectuées au Royaume-Uni en 1975, représentaient au moins 5 % et au plus... (3) du marché global des produits de nettoyage des disques, et aux Pays-Bas environ 15 %.
Après avoir créé en 1954 l'entreprise qui devait fabriquer et vendre les produits de son invention, M. Watts a conclu avec d'autres distributeurs en Allemagne, en Belgique, au Danemark, en France, en Irlande et en Italie des accords verbaux qui ont tous été tacitement reconduits lorsqu'il a constitué son entreprise en société. Selon Watts, ces accords verbaux prévoient simplement que le distributeur opérera en qualité de distributeur exclusif sur son territoire, sauf en Allemagne où les deux distributeurs ne sont pas exclusifs.
Watts fournit une vingtaine de grossistes au Royaume-Uni, où il applique un barème de prix standard pour grossistes. Watts n'approvisionne pas de détaillants au Royaume-Uni. Il entretient cependant un service restreint de vente par correspondance pour la livraison directe de ses produits aux utilisateurs.
Au Royaume-Uni, Watts, de son propre aveu, et au moins depuis mai 1972, a vendu les produits à ses clients grossistes à la condition expresse qu'ils ne soient pas exportés.
Le mode d'emploi joint aux produits fournis à divers grossistes au Royaume-Uni indiquait que les produits avaient été conditionnés spécialement pour ledit grossiste et portaient la mention "Not for export".
Watts a fait respecter cette interdiction d'exporter en cessant de fournir un grossiste du Royaume-Uni, Howland-West Ltd, après que cette entreprise eut exporté des produits Watts vers les Pays-Bas en mai 1972. De plus, le 28 novembre 1973, Watts écrivait à la société néerlandaise Fortissimo de Leeuwarden, en réponse à une demande de renseignements:
"Nous vous remercions pour votre lettre du 26 courant ; nous devons vous informer que nous n'acceptons aucune commande en provenance de pays où nous avons établi des distributeurs ; tous nos clients au Royaume-Uni ont souscrit l'engagement de ne pas exporter les produits que nous leur vendons et qui sont destinés au marché intérieur".
Le 11 juillet 1975, Watts a informé la Commission que cette interdiction visait à protéger le marché intérieur et qu'il y avait mis fin lorsque le Royaume-Uni était devenu membre de la CEE, parce qu'elle violait les règles de concurrence. Watts a également présenté à la Commission des exemplaires des modes d'emploi en vigueur destinés aux grossistes du Royaume-Uni et sur lesquels ne figurait aucune interdiction d'exporter.
A l'audition du 23 mars 1976, cependant, le demandeur, M. Wilkes, apportait la preuve formelle que, en février 1976, les produits étaient encore vendus au Royaume-Uni accompagnés de feuillets mentionnant une interdiction d'exporter. En juin 1976, une grande quantité de produits Watts, accompagnés chacun d'un mode d'emploi comportant une interdiction d'exporter, ont été livrés par un commerçant détaillant du Royaume-Uni à un revendeur sis aux Pays-Bas. Ces produits avaient été fabriqués et emballés postérieurement au 11 juillet 1975.
Les produits destinés à l'exportation, qui sont identiques aux produits destinés au marché intérieur, sont vendus sur la base du barème des prix à l'exportation pour distributeurs où tous les prix mentionnés en livres sterling sont des prix de gros nets départ usine. En 1972, les prix à l'exportation, qui avaient été jusqu'alors identiques ou similaires aux prix du marché intérieur, ont commencé à monter par rapport à ces derniers. En juillet 1974, le même produit se vendait à des prix fort différents, le prix à l'exportation étant généralement plus élevé que le prix intérieur, jusqu'à 32 % dans certains cas. Les premières augmentations de prix ont coïncidé approximativement avec l'interdiction d'exporter imposée aux grossistes au Royaume-Uni. Ces différences de prix furent en outre accrues par les différences de parités monétaires, notamment entre les monnaies du Royaume-Uni et des Pays-Bas.
Les produits fabriqués par Watts sont tous vendus sous des marques déposées au Royaume-Uni. Watts a également obtenu des marques similaires en son nom ou à celui de sa filiale entièrement contrôlée, Cecil E. Watts Export Sales Ltd, au Danemark, en Allemagne et en France. En Belgique, au Luxembourg et aux Pays-Bas, cependant, les marques relatives aux produits sont maintenant inscrites au registre des marques du Benelux sous le nom de Theal, conformément à la concession visée supra. En 1971 et 1972, à la suite de ce que les parties ont qualifié d'erreur administrative, Watts et Theal avaient chacun fait inscrire lesdites marques au registre des marques du Benelux. Watts a toutefois renoncé à ses inscriptions en octobre et novembre 1973, à la demande expresse de Theal et en accord avec ce dernier.
En 1972, Theal était le distributeur exclusif le plus important de Watts dans la CEE, avec des ventes triples de celles de tous les autres distributeurs exclusifs réunis. Les produits Watts revêtaient aussi une grande importance pour Theal, car ils représentaient nettement plus de 25 % de son chiffre d'affaires. Les liens économiques étroits qui unissaient les deux entreprises avaient été renforcés par la circonstance que, vers 1960, Watts avait accepté d'apposer des étiquettes spéciales sur tous les produits qu'il fournissait à Theal ; Theal fournissait à Watts ces étiquettes, qui portaient la marque Theal et les mots "Een Theal Produkt", en le chargeant de les apposer sur tous les produits Watts fournis à Theal. Aujourd'hui encore, les produits livrés à Theal portent l'étiquette Theal.
M. Jacob Dietrich Wilkes de Leeuwarden, Pays-Bas, est propriétaire d'une entreprise connue sous le nom de Poort's Muziekhandel, sise Voorstreek 6, à Leeuwarden, qui revend au public des appareils radios, tourne-disques, disques et produits similaires, y compris l'équipement destiné à l'entretien des disques. Jusqu'en 1972, M. Wilkes avait été un client régulier de Theal, auprès de qui il achetait les produits Watts pour les revendre dans son magasin. En 1972, les prix recommandés de vente au détail étaient toutefois nettement plus élevés aux Pays-Bas qu'au Royaume-Uni.
En 1972, M. Wilkes était également administrateur d'une entreprise connue sous le nom d'Audiogram BV à Leeuwarden, créée pour servir de grossiste et d'importateur à ses membres. Les autres administrateurs étaient M. P. Kardoes, de la société Partimex Holland BV, propriétaire d'un magasin dénommé King Peter, à Bussum, M.H. van der Tuin, administrateur de la société Willem de Jong NV, à Rotterdam, et M. N.A. van N°rden, propriétaire de la société Intermezzo, à Amsterdam. Toutes ces entreprises vendaient au public des articles d'entretien pour disques.
En mai 1972, M. van N°rden, agissant pour le compte d'Audiogram, a acheté une certaine quantité de produits Watts directement auprès de Howland-West Ltd, grossiste londonien, qui les avait lui-même achetés directement à Watts au Royaume-Uni. Le prix payé par Audiogram était tel que cette entreprise put revendre les produits à M. Wilkes à des prix qui lui permirent d'offrir ces produits à des prix notablement inférieurs à ceux qu'il aurait dû pratiquer pour les mêmes produits achetés chez Theal.
A peu près au même moment, Partimex Holland et Willem de Jong ont aussi acheté certaines quantités de produits Watts à Audiogram et les ont offerts à la revente au public dans leurs magasins.
Le 5 septembre 1972, Theal a écrit à Audiogram, pour se plaindre de ce que M. van N°rden d'Intermezzo vendait au public des produits Watts qu'il ne s'était pas procurés chez Theal.
Theal affirmait que, son entreprise étant seule titulaire des marques sur ces produits aux Pays-Bas, cet acte constituait une violation des droits acquis par Theal sur lesdites marques et était contraire à la loi.
Le 10 novembre 1972, Theal assignait M. Wilkes en référé, devant le président du Tribunal de district de Leeuwarden, pour avoir vendu des produits Watts qu'elle ne lui avait pas fournis et avoir ainsi contrevenu à ses droits. Theal se réclamait, dans la citation, de son droit exclusif d'exploiter les marques Parastat, Dix Preener, Dust Bug et Watts et alléguait que M. Wilkes avait contrevenu aux droits de Theal en commercialisant aux Pays-Bas des articles portant ces marques, qui n'avaient pas été livrés par Theal.
Par jugement rendu le 20 novembre 1972, le président du Tribunal de district de Leeuwarden ordonnait à M. Wilkes, à la requête de M. Theal, de cesser dans les vingt-quatre heures tout commerce des produits portant les marques susmentionnées.
Theal a obtenu des jugements similaires contre Willem de Jong le 16 janvier 1973 auprès du Tribunal de district de Rotterdam et contre Partimex Holland le 5 juin 1973 auprès du Tribunal de district d'Amsterdam. Depuis que la Commission a commencé l'instruction de cette affaire, Theal a obtenu un autre jugement similaire du Tribunal de district de La Haye, le 30 mai 1975, contre Radio-Technisch Bureau All-Wave BV de Delft, et il continue d'écrire aux revendeurs des Pays-Bas qui ont acheté des produits Watts directement ou indirectement auprès de grossistes du Royaume-Uni, en affirmant que ces actes sont une infraction aux droits de marque de Theal aux Pays-Bas.
Le 30 juillet 1973, M. Wilkes assignait à la fois Watts et Theal devant le Tribunal de district d'Amsterdam, aux fins d'obtenir, entre autres, une ordonnance empêchant Theal de réclamer l'exécution du jugement du Tribunal de district de Leeuwarden, ainsi qu'une confirmation de son droit de faire commerce des produits Watts et de l'impossibilité pour les défendeurs, Theal et Watts, d'invoquer la loi pour l'empêcher d'agir ainsi. Wilkes avançait en outre que le fait pour les défendeurs d'exercer des droits de marque pour empêcher des importations parallèles, était contraire aux règles de concurrence établies par le traité instituant la CEE. Cette instance est encore pendante devant le Tribunal. Dans son assignation, M. Wilkes faisait également référence à la double inscription des marques qui subsistait alors au registre du Benelux, à la suite de quoi Theal a écrit à Watts, le 10 octobre 1973, qu'il reconnaissait la propriété de Watts sur ses marques et lui demandait de renoncer à son inscription, étant entendu que Theal rétrocéderait les droits à tout moment sur demande de Watts. Sur la foi de cette lettre, Watts a renoncé à ses propres inscriptions en faveur de Theal, en octobre et novembre 1973.
Dans toutes les instances précitées introduites par Theal, le demandeur se réclame, quant au fond, de son droit d'exploiter les marques citées et allègue que même la commercialisation aux Pays-Bas de produits Watts d'origine constitue une infraction à ses droits sur lesdites marques si ces produits n'ont pas été fournis par Theal. Theal a déclaré expressément qu'il est fondé à exercer sur ces marques les droits découlant de l'accord de concession exclusive conclu avec Watts et à empêcher des importations parallèles aux Pays-Bas, quelle qu'en soient la source, même s'il s'agit d'autres Etats membres.
Theal a cependant déclaré par la suite, et dans ses conclusions devant le Tribunal de district d'Amsterdam, et aux représentants de la Commission, lors de la réunion du 11 juillet 1975 et lors de l'audition, que ses griefs portent en réalité sur le fait que les marchandises vendues par les divers défendeurs n'étaient pas de véritables produits Watts et que, par conséquent, la violation invoquée comme fondement de l'action concerne la commercialisation non de produits authentiques, mais de leur contrefaçon. Tous les jugements, ainsi que les moyens de défense invoqués jusqu'à présent dans l'action introduite par M. Wilkes, se fondaient cependant sur le fait que les marchandises étaient des produits Watts authentiques qui n'avaient pas été fournis par Theal, et que la vente de ces produits sans le consentement de Theal violait ses droits en tant que titulaire des marques.
Dans tous les cas mentionnés plus haut, les factures, échantillons et autres pièces à l'appui soumis à la Commission, prouvent que les marchandises importées à l'intention de M. Wilkes et des autres destinataires étaient en fait de véritables produits Watts achetés auprès de Howland-West et d'autres grossistes du Royaume-Uni, qui se les étaient eux-mêmes procurés directement auprès de Watts. Theal a, certes, soumis à la Commission la preuve de cas dans lesquels des produits commercialisés aux Pays-Bas auraient pu violer les droits de marque de Theal parce qu'il s'agissait soit de contrefaçons, soit de produits différents présentés comme étant des produits Watts, mais ces cas sont sans portée en l'espèce.
Dans les conclusions formelles déposées par les deux parties défenderesses devant le Tribunal de district d'Amsterdam le 21 novembre 1973, Theal déclarait qu'il était seul fondé à utiliser les marques en cause et que, partant, M. Wilkes n'avait aucun droit de vendre les produits portant ces marques à moins de se les être procurés auprès de Theal.
Dans ses conclusions, Watts affirmait soutenir pleinement toutes les déclarations et tous les démentis exprimés par Theal.
Depuis avril 1973, Theal n'a plus livré de produits Watts à M. Wilkes, et ce dernier a subi un préjudice important en raison de cette cessation et de l'action intentée par Theal.
II. LES RÈGLES DE CONCURRENCE DE LA CEE
A. Article 85 paragraphe 1
Considérant que l'article 85 paragraphe 1 du traité instituant la Communauté économique européenne interdit, comme incompatibles avec le Marché commun, tous accords entre entreprises, toutes décisions d'associations d'entreprises et toutes pratiques concertées qui sont susceptibles d'affecter le commerce entre Etats membres et qui ont pour objet ou pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence à l'intérieur du Marché commun;
Watts et Theal sont toutes deux des entreprises et l'accord verbal de distribution exclusive est un accord au sens de l'article 85 paragraphe 1. L'accord intervenu entre ces deux entreprises est constitué tout d'abord par la désignation verbale par Watts, le 8 septembre 1956, de Theal en qualité de distributeur exclusif des produits Watts aux Pays-Bas, par laquelle Watts s'est engagé à fournir uniquement Theal aux Pays-Bas et à lui transmettre toutes les commandes reçus par Watts à destination des Pays-Bas. L'accord consiste également en la concession verbale, accordée par Watts à Theal vers à peu près la même époque que la désignation, du droit exclusif d'utiliser les marques attachées à ces produits aux Pays-Bas. L'accord conférait à Theal aux Pays-Bas une protection territoriale absolue, matière qui, en 1956, n'était régie que par le droit national applicable.
L'interdiction d'exporter imposée aux grossistes du Royaume-Uni concrétisait et renforçait l'exclusivité conférée par Watts à Theal et à d'autres distributeurs exclusifs dans le Marché commun. Etant donné sa position particulière en tant que distributeur exclusif de Watts le plus important dans le Marché commun, Theal était le principal bénéficiaire de cet interdiction d'exporter.
L'accord ainsi défini et appliqué a pour objet et pour effet d'empêcher, de restreindre et de fausser le jeu de la concurrence à l'intérieur du Marché commun, étant donné que, conjugué aux effets de la législation nationale sur les marques, il donne à Theal le moyen d'empêcher des importations parallèles du Royaume-Uni ou de tout autre Etat membre à destination des Pays-Bas.
L'interdiction d'exporter imposée par Watts aux grossistes du Royaume-Uni était susceptible de faire obstacle à la liberté d'action de tiers et, partant, de renforcer l'exclusivité dont tous les distributeurs exclusifs de Watts, et notamment Theal, bénéficiaient dans le Marché commun.
La concurrence est empêchée aux Pays-Bas du fait que Theal exerce des droits de marque pour s'assurer que seuls les produits qui lui sont fournis directement par Watts y soient offerts à la vente. D'autres revendeurs, qui souhaiteraient profiter des prix favorables pratiqués au Royaume-Uni, sont mis dans l'impossibilité d'y acheter les produits en cause à des grossistes qui accepteraient de les leur vendre, ce qui a pour résultat d'empêcher les utilisateurs aux Pays-Bas de bénéficier de prix éventuellement plus avantageux. Les revendeurs aux Pays-Bas se voient interdire en fait ce commerce avec le Royaume-Uni, parce qu'ils courent le risque sérieux et réel que Theal intente contre eux une action devant les tribunaux néerlandais pour faire respecter les droits que lui confère la loi nationale sur les marques qu'il a déposées en son nom, et se faire attribuer des dommages et intérêts substantiels. La réalité de ce risque est démontrée par les jugements que Theal a déjà obtenus à l'encontre de certains revendeurs et qui lui ont permis de supprimer quatre débouchés pour les produits Watts aux Pays-Bas.
Au Royaume-Uni les grossistes, dont les débouchés pour les produits en cause sont ou ont été restreints du fait de l'interdiction d'exporter qui leur est imposée par Watts, subissent une autre restriction du fait que Theal, en exerçant des droits de marque, s'oppose à des importations parallèles aux Pays-Bas en provenance du Royaume-Uni.
La concurrence est faussée à l'intérieur du Marché commun du fait des agissements de Watts et de Theal dans l'application de leur accord, qui ont pour objet et pour effet d'isoler les Pays-Bas du Royaume-Uni pour les produits en cause, de permettre à Theal d'éviter les répercussions des prix inférieurs pratiqués au Royaume-Uni et, partant, de lui laisser toute liberté de fixer aux Pays-Bas, pour ces produits, des prix qui sont entièrement à l'abri de toute concurrence effective de la part des produits de la même marque.
De plus, l'exercice, par le titulaire d'une marque, du droit que lui confère la législation d'un Etat membre d'interdire la commercialisation, dans cet Etat, d'un produit commercialisé dans un autre Etat membre, sous la même marque, par son titulaire original ou avec son consentement, est incompatible avec les règles du traité CEE relatives à la libre circulation des marchandises à l'intérieur du Marché commun, lorsque lesdites marques ont une origine commune.
L'accord affecte à la fois la concurrence et la liberté des échanges entre les Pays-Bas et le Royaume-Uni et entre les Pays-Bas et les autres Etats membres et fait ainsi obstacle à l'objectif de l'établissement d'un marché unique entre Etats membres. L'exercice de droits des marques et l'interdiction d'exporter ont un effet direct sur les conditions du marché et modifient sensiblement la position des entreprises tierces et des utilisateurs quant à leurs débouchés ou sources d'approvisionnement. Il en est ainsi bien que le volume des importations parallèles connues en l'espèce ait été modeste, en raison de l'importance de la restriction à la concurrence potentielle. Dans ces circonstances, l'exercice de droits de marque et le recours à des interdictions d'exporter dans l'intention d'éliminer la concurrence actuelle ou potentielle affectent donc directement et de manière sensible le commerce entre Etats membres, et, partant, relèvent de l'interdiction édictée par l'article 85 paragraphe 1 du traité.
En conséquence, l'accord en cause est visé par les dispositions de l'article 85 paragraphe 1 du traité instituant la CEE.
B. Article 85 paragraphe 3
Considérant que, en vertu de l'article 85 paragraphe 3 du traité, les dispositions de l'article 85 paragraphe 1 peuvent être déclarées inapplicables à tout accord qui contribue à améliorer la production ou la distribution des produits ou à promouvoir le progrès technique ou économique, tout en réservant aux utilisateurs une partie équitable du profit qui en résulte, et sans
a) imposer aux entreprises intéressées des restrictions qui ne sont pas indispensables pour atteindre ces objectifs;
b) donner à ces entreprises la possibilité, pour une partie substantielle des produits en cause, d'éliminer la concurrence;
que l'accord en cause ne réunit pas ces conditions:
Pour pouvoir bénéficier de l'exemption prévue par l'article 85 paragraphe 3, l'accord doit avoir été préalablement notifié à la Commission, conformément aux dispositions de l'article 4 paragraphe 1 ou de l'article 5 paragraphe 1 du règlement nº 17, sauf lorsqu'il est dispensé de cette notification en application des articles 5 paragraphe 2 ou 4 paragraphe 2 du même règlement.
L'accord en cause n'est pas dispensé de la notification en vertu de ces deux dernières dispositions, étant donné qu'il n'a pas seulement pour effet d'imposer des limitations à l'exercice des droits de l'acquéreur ou de l'utilisateur de marques, puisqu'il empêche des tiers d'exporter librement les produits du Royaume-Uni et de les importer aux Pays-Bas.
En l'espèce, bien qu'un accord verbal ait été notifié à la Commission conformément à l'article 5 paragraphe 1 du règlement nº 17 et dans les délais impartis par l'article 7 paragraphe 2 du même règlement, les indications données dans la notification étaient inexactes et dénaturées. Il n'y a été fait aucune mention du droit concédé par Watts à Theal d'utiliser les marques de Watts, ni de ce que l'accord avait pour effet de conférer à Theal une protection territoriale absolue.
L'accord tel qu'il fut notifié ne représentait donc pas l'ensemble des dispositions dont étaient convenues les parties ; partant, l'accord réel n'a pas été régulièrement notifié.
Même si l'accord entier avait été notifié régulièrement ou avait été exempté de la notification, l'exemption resterait exclue, les conditions requises par l'article 85 paragraphe 3 n'étant pas réunies. L'accord entre les parties qui donnait à Theal le droit d'utiliser les marques et par conséquent, lui assurait une protection territoriale absolue en empêchant les importations parallèles, protection encore renforcée par l'interdiction d'exporter imposée par Watts, ne contribue pas à améliorer la production ou la distribution des produits ni à promouvoir le progrès technique ou économique. Les avantages éventuels résultant de cette protection territoriale absolue vont aux seules parties et non à l'utilisateur ; celui-ci est ainsi privé des avantages dérivés d'une concurrence effective entre produits d'une même marque, qui pourrait résulter de débouchés plus nombreux et de prix plus bas. Dans les circonstances de l'espèce, où il n'existe aucune justification objective à des restrictions permettant aux parties d'éliminer les importations parallèles, pareilles restrictions ne peuvent être considérées comme indispensables à la poursuite des objectifs visés à l'article 85 paragraphe 3.
C. Règlement nº 67-67
Considérant que, tant dans son préambule que dans son article 3 sous b), le règlement nº 67-67 exclut expressément de l'exemption qu'il prévoit tous accords en vertu desquels les contractants restreignent la possibilité pour les intermédiaires ou utilisateurs de se procurer les produits visés au contrat auprès d'autres revendeurs à l'intérieur du Marché commun, en particulier par l'exercice de droits de propriété industrielle ; que, dès lors, l'accord en cause ne peut se prévaloir de ce règlement. La lettre de la Commission du 18 avril 1969 ne pouvait raisonnablement amener Theal à penser que l'accord entrait dans la catégorie d'accords exemptés ipso facto par le règlement nº 67-67. Le point de vue exprimé par la Commission était en effet basé, comme au moins Theal le savait pertinemment, sur les indications données dans la notification, indications qui, pour les motifs exposés plus haut, étaient inexactes et dénaturées. En tout état de cause, la Commission soumettait ses conclusions à la condition expresse que l'accord ne contienne aucune disposition restrictive autre que celles notifiées.
D. Article 25 du règlement nº 17
Considérant que même en 1963 l'accord restreignait le jeu de la concurrence à l'intérieur du Marché commun puisqu'il visait à empêcher l'importation aux Pays-Bas des produits Watts par des personnes autres que Theal, soit directement du Royaume-Uni, soit d'autres Etats membres ; que dans son arrêt du 25 novembre 1971 dans l'affaire 22-71, Béguelin Import Co contre SA G.L. Import Export (Recueil, volume XVII, 1971, p. 949), la Cour de justice a dit pour droit qu'un accord d'exclusivité passé entre un producteur ressortissant à un pays tiers et un distributeur établi dans le Marché commun relève de l'interdiction énoncée à l'article 85 du traité, lorsqu'il fait obstacle, en droit ou en fait, ... à ce que ces produits soient importés d'autres Etats membres dans la zone protégée, et y soient distribués, par des personnes autres que le concessionnaire ou ses clients ; que l'accord n'est donc pas couvert par l'article 25 du règlement nº 17, ajouté par l'article 29 de l'acte relatif aux conditions d'adhésion et aux adaptations des traités, étant donné qu'il ne relève pas de l'article 85 du fait de l'adhésion, mais était déjà antérieurement visé par cette disposition;
E. Article 15 du règlement nº 17
Considérant que, aux termes de l'article 15 paragraphe 1 du règlement nº 17, la Commission peut, par voie de décision, infliger aux entreprises des amendes d'un montant de cent à cinq mille unités de compte lorsque, de propos délibéré ou par négligence, elles donnent des indications inexactes ou dénaturées à l'occasion d'une notification en application des articles 4 et 5 dudit règlement ; que, en vertu de l'article 15 paragraphe 2, la Commission peut également infliger des amendes de mille unités de compte au moins et d'un million d'unités de compte au plus, ce dernier montant pouvant être porté à dix pour cent du chiffre d'affaires réalisé au cours de l'exercice social précédent par chacune des entreprises ayant participé à l'infraction, lorsque, de propos délibéré ou par négligence, elles commettent une infraction aux dispositions de l'article 85 paragraphe 1 du traité ; que pour déterminer le montant de l'amende, il y a lieu de prendre en considération, outre la gravité de l'infraction, la durée de celle-ci ; que, en vertu de l'article 15 paragraphe 5 sous a) dudit règlement, les amendes pour infraction à l'article 85 paragraphe 1 du traité ne peuvent pas être infligées pour des agissements postérieurs à la notification et antérieurs à la décision par laquelle elle accorde ou refuse l'application de l'article 85 paragraphe 3 du traité, pour autant qu'ils restent dans les limites de l'activité décrite dans la notification.
Etant donné les circonstances de l'espèce, la Commission estime en conséquence justifié d'infliger des amendes pour la présentation d'indications inexactes et dénaturées par Theal dans la notification à la Commission datée du 24 janvier 1963, qui ont abusé la Commission quant au contenu réel de l'accord, jusqu'à ce que M. Wilkes ait attiré son attention sur celui-ci dans sa demande du 30 janvier 1974.
La Commission est d'avis que des amendes doivent être infligées aux deux parties concernant leur accord d'exclusivité territoriale, en raison
a) de l'exercice par Theal de droits de marque pour empêcher des importations parallèles des produits en cause, exercice qui ne restait pas dans les limites de l'activité décrite dans la notification, et
b) de la mise à exécution de l'accord au moyen de l'interdiction d'exporter les produits en cause, imposée par Watts à ses grossistes au Royaume-Uni, également non notifié.
Eu égard aux circonstances de l'espèce, la Commission ne se propose pas d'infliger une amende à Watts pour avoir participé à la fourniture d'indications inexactes ou dénaturées.
Pour déterminer le montant des amendes à infliger à Watts ou à Theal concernant les autres infractions au traité, la Commission n'a pas l'intention de tenir compte des infractions antérieures à mai 1972, date à laquelle l'interdiction d'exporter était incontestablement en vigueur et sortait ses effets.
L'infraction commise par Theal en fournissant des indications inexactes et dénaturées l'a été, sinon de propos délibéré, à tout le moins par négligence puisque l'attention de Theal était clairement attirée, dans le formulaire de notification, non seulement sur les dispositions de l'article 85 paragraphe 1 du traité, mais aussi sur l'obligation d'informer la Commission, entre autres, du contenu de l'accord et d'indiquer s'il comportait une répartition des marchés ou des restrictions à la liberté d'acheter ou de revendre à des tiers ou pouvait de toute autre manière avoir pour objet ou pour effet de restreindre ou de fausser la concurrence.
L'infraction commise par Theal en exerçant des droits de marques pour empêcher les importations parallèles des produits en cause ne peut que résulter d'un propos délibéré et intentionnel. Outre qu'en raison même de la notification, Theal était parfaitement conscient de l'existence des règles de concurrence établies par le traité CEE, la lettre du 18 avril 1969, que Theal reconnaît avoir reçue, stipulait dans les termes les plus clairs que les accords de distribution exclusive ne pouvaient bénéficier de l'exemption en application de l'article 85 paragraphe 3 du traité si, notamment, l'accord permettait de quelque façon aux contractants de réaliser une protection territoriale absolue, que ce soit par un accord formel ou par tout autre moyen. A la lumière de cette explication complète toute action ultérieure visant à empêcher des importations parallèles dans le territoire contractuel doit être considérée comme une infraction délibérée et intentionnelle aux dispositions de l'article 85 du traité.
L'infraction commise par Watts en imposant une interdiction d'exporter l'a aussi été de propos délibéré. Watts aurait dû être conscient des restrictions sur le jeu de la concurrence qui découlaient de cette interdiction, étant donné notamment que les prix des produits en cause sur son marché intérieur étaient inférieurs à ceux qu'il pratiquait à l'exportation. Combinée à l'exclusivité concédée à la plupart de ses distributeurs dans les autres Etats membres, l'interdiction d'exporter ne pouvait que constituer un obstacle effectif à la libre circulation des produits concernés entre Etats membres et entraîner l'élimination d'importations parallèles.
Considérant que, pour déterminer le montant des amendes à infliger pour une infraction à l'article 85 paragraphe 1, la Commission doit prendre en considération, outre la gravité de l'infraction, la durée de celle-ci ; que, en ce qui concerne la durée des infractions à l'article 85 paragraphe 1, la Commission tient compte des faits suivants:
a) d'après les éléments de preuve existants, c'est en septembre 1972 que Theal a pour la première fois exercé ses droits de marques pour empêcher des importations parallèles et il a persisté à se réclamer de ce droit;
b) Watts, pour ce qui le concerne, a imposé l'interdiction d'exporter à partir de mai 1972 au moins, soit pendant la période où son effet risquait d'être le plus sensible, eu égard à la différence croissante entre les prix obtenus au Royaume-Uni et ceux pratiqués ailleurs. La Commission a des preuves de ce que, contrairement aux affirmations de Watts, l'interdiction d'exporter était toujours mentionnée en caractères imprimés sur les produits vendus au Royaume-Uni en juin 1976.
Considérant que, pour ce qui est de la gravité des infractions à l'article 85 paragraphe 1, la Commission tient compte des faits suivants:
a) deux entreprises seulement sont concernées, dont aucune ne détient une large part du marché pour les produits en cause, ni dans l'ensemble de la Communauté, ni dans un Etat membre déterminé;
b) de par leur nature les produits en cause ne peuvent être considérés comme nécessaires pour les utilisateurs ou comme constituant une partie essentielle de leurs dépenses;
c) par ailleurs, les agissements des parties ont entraîné des restrictions évidentes de la concurrence qui contreviennent à l'un des objectifs fondamentaux du traité CEE qui est d'établir dans la Communauté un marché unique à l'intérieur duquel les forces compétitives exemptes de distorsions peuvent opérer au bénéfice des utilisateurs;
d) le fait pour Watts d'avoir imposé une interdiction d'exporter a manifestement contribué à établir une protection territoriale absolue pour Theal aux Pays-Bas. Le comportement de Watts à cet égard est aggravé par le fait qu'en dépit des assurances réitérées données par lui à la Commission que l'interdiction avait été levée, Watts a continué ultérieurement à distribuer à des grossistes au Royaume-Uni certains produits qui comportaient encore une interdiction d'exporter mentionnée sur le feuillet joint à chaque article;
e) la perte pour l'utilisateur, si elle est évidente, n'a pas été sévère, étant donné le type de produit en cause, son prix et son importance minime dans l'échelle des priorités de l'utilisateur moyen. Néanmoins, le comportement des parties a effectivement contribué à éliminer la concurrence entre produits de la même marque et les effets potentiels qui auraient pu en résulter sur le niveau des prix des produits en cause;
f) Theal s'est constamment réclamé de son droit de faire usage des marques protégeant les produits Watts ; il a exercé ces droits devant les tribunaux néerlandais à quatre reprises au moins ; il a persisté à ce faire, alors que son attention avait été attirée sur les règles établies par le traité de Rome.
Considérant que, pour ces motifs, la Commission se propose d'infliger à Theal des amendes pour un montant total de 15 000 unités de compte, soit 54 300 florins néerlandais et à Watts, une amende de 10 000 unités de compte, soit 4 166 livres sterling comme indiqué à l'article 4 de la présente décision.
F. Article 3 paragraphe 1 du règlement nº 17
Considérant que, en conséquence, la Commission se propose de constater que les entreprises parties à l'accord ont commis une infraction à l'article 85 paragraphe 1 du traité instituant la Communauté économique européenne et, conformément à l'article 3 du règlement nº 17, d'obliger par voie de décision les entreprises intéressées à mettre fin sans délai aux infractions constatées, en s'abstenant à l'avenir, envers toute personne ou entreprise, de tout acte visant à empêcher la revente de produits Watts importés aux Pays-Bas.
G. Article 192 du traité CEE
Considérant que la présente décision forme titre exécutoire conformément aux dispositions de l'article 192 du traité CEE,
A ARRÊTE LA PRESENTE DECISION:
Article premier
1. L'accord verbal de distribution exclusive conclu entre Theal NV et M. Cecil E. Watts, et présentement entre Tepea BV et Cecil E. Watts Ltd, y compris la concession du droit exclusif de faire usage de marques déposées aux Pays-Bas, constitue une infraction à l'article 85 paragraphe 1 du traité instituant la Communauté économique européenne.
2. La fourniture d'indications inexactes et dénaturées dans la notification datée du 24 janvier 1963, faite par Theal NV, présentement Tepea BV, constitue une infraction sanctionnée par l'article 15 paragraphe 1 sous a) du règlement nº 17 du 6 février 1962.
Article 2
La demande tendant à ce que, en application de l'article 85 paragraphe 3, les dispositions du paragraphe 1 soient déclarées inapplicables à l'accord visé à l'article 1er de la présente décision, est rejetée.
Article 3
Les entreprises destinataires de la présente décision mettront fin sans délai à l'infraction visée à l'article 1er paragraphe 1. En particulier, ces entreprises s'abstiendront à l'avenir de tout acte quelconque visant à empêcher l'importation ou la revente de produits Watts aux Pays-Bas.
Article 4
1. Les amendes suivantes sont infligées pour infraction à l'article 85 paragraphe 1:
a) à Tepea BV, une amende de 10 000 unités de compte, soit 36 200 florins néerlandais.
b) à Cecil E. Watts Limited, une amende de 10 000 unités de compte, soit 4 166 livres sterling.
2. En outre, une amende de 5 000 unités de compte, soit 18 100 florins néerlandais, est infligée à Tepea BV pour avoir fourni des indications inexactes et dénaturées dans une notification faite conformément à l'article 5 dudit règlement nº 17.
Article 5
La présente décision forme titre exécutoire conformément aux dispositions de l'article 192 du traité instituant la Communauté économique européenne.
Article 6
La présente décision est destinée à Tepea BV, à Amsterdam, Postbus 396, Pays-Bas et à Cecil E. Watts Limited, Darby House, à Sunbury-on-Thames, Middlesex, Angleterre.
Notes :
(1) JO nº 13 du 21.2.1962, p. 204/62.
(2) JO nº 127 du 20.8.1963, p. 2268/63.
(3) Les données non reproduites sont couvertes par le secret professionnel.