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Décisions

CA Paris, 25e ch. B, 4 février 2000, n° 1998-05191

PARIS

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Honda France (SA)

Défendeur :

Somborn, Schaming-Fidry (ès qual.), Squadra Moto (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Jacomet

Conseillers :

Mmes Collot, Radenne

Avoués :

Mes Olivier, Huyghe, SCP Fisselier-Chiloux-Boulay

Avocats :

Mes Honnet, Mihailov, Landault

T. com. Paris, 2e ch., du 25 nov. 1997

25 novembre 1997

Maître Schaming-Fidry, ès-qualités de mandataire liquidateur de la société Squadra Moto, venant aux droits, à la suite d'une opération de fusion absorption des sociétés Blin Braunwarth, Dimer et DMB, toutes trois concessionnaires Honda sous l'enseigne Squadra Moto respectivement à Troyes, Reims et Metz, reprochant à la société Honda France d'avoir notifié le non renouvellement des trois contrats de concession à leur échéance du 31 décembre 1992, puis, après avoir en définitive maintenu les relations contractuelles avec les concessions de Reims et de Metz, en réduisant toutefois le secteur de cette concession, d'avoir, le 25 septembre 1992, abusé de son droit de rompre les contrats à durée indéterminée la liant aux sociétés Dimer et DMB, ce en ne tenant aucun compte des investissements engagés, en tentant de justifier sa décision par des motifs fallacieux alors qu'elle avait provoqué les difficultés dont elle se prévalait et d'être ainsi à l'origine du dépôt de bilan et de la procédure de liquidation judiciaire de la société Squadra Moto, a fait assigner la société Honda France aux fins d'obtenir des dommages-intérêts à hauteur de l'insuffisance d'actif, outre une indemnité de 45 000 F en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Philippe Somborn, actionnaire, à hauteur de 34 %, de la société Michel Participations SA, holding des sociétés Blin Braunwarth, Dimer et DMB, et caution de certains des engagements souscrits par ces dernières, faisant grief à la société Honda France, non seulement d'avoir résilié les contrats en cause, mais aussi de s'être opposée à la cession de sa participation à la société Ardoin Saint-Amand et cie, est intervenu volontairement à la procédure pour réclamer les sommes de 500 000 F et de 1 052 202 représentant respectivement le prix de cession de ses actions et le montant de ses engagements de caution, outre 500 000 F à titre de dommages-intérêts et 30 000 F au titre des frais non recouvrables de procédure.

La société Honda France s'est opposée à ces demandes en soutenant que la rupture serait justifiée par les manquements commis par les sociétés animées par M. Michel, que le dépôt de bilan serait la conséquence d'un état de cessation de paiement antérieur aux résiliations, que son refus de voir M. Ardoin Saint-Amand, avec lequel elle avait été en litige, entrer dans le groupe Squadra Moto serait justifié, elle a sollicité indemnité sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Vu le jugement contradictoire assorti de l'exécution provisoire, rendu le 25 novembre 1997, par le Tribunal de commerce de Paris qui a condamné la société Honda France à verser à Maître Schaming-Fidry, ès-qualités, une indemnité forfaitaire de un million de francs et à Philippe Somborn une indemnité forfaitaire de six cent mille francs, outre, par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, vingt cinq mille francs à Maître Schaming-Fidry, et quinze mille francs à Philippe Somborn, et qui a débouté les parties de toutes leurs autres demandes,

Motifs essentiellement pris de ce que :

- les griefs invoqués par la société Honda France pour ne pas renouveler les contrats de concession arrivés à expiration fin décembre 1992, relevaient de simples remontrances de sorte qu'en ne reconduisant pas le contrat de concession de la société Blin Braunwarth et qu'en réduisant le territoire concédé à la société DMB, malgré l'ancienneté des relations et l'importance des investissements engagés, la société Honda France qui n'avait pas respecté avec loyauté l'obligation édictée par l'article 1134 alinéa 3 du Code civil, devait réparation des préjudices causés aux sociétés Blin Braunwarth et DMB, l'indemnisation devant correspondre à une partie des investissements non amortis,

- que, si en 1993, les violations accumulées des contrats de concession étaient par elles-mêmes suffisantes pour conduire la société Honda France à résilier les concessions de Reims et de Metz et à ne pas favoriser la reprise de celle de Troyes, c'était en définitive la décision de Monsieur Michel de cesser tous règlements qui était la cause des résiliations, de sorte que celles-ci étaient justifiées,

- qu'il n'était pas démontré que ces résiliations seraient à l'origine du dépôt de bilan de la société Squadra Moto puis de sa mise en liquidation judiciaire,

- qu'aux termes des contrats de concession du 4 janvier 1993, la société Honda France ne pouvait s'opposer à la cession de la participation seulement minoritaire de Philippe Somborn, de sorte qu'en ayant fait savoir que la cession envisagée était susceptible d'entraîner la résiliation des contrats en cours, la société Honda France avait engagé sa responsabilité, que par contre n'étant pas démontré que la société Ardoin Saint-Amand et cie se serait engagée à reprendre les engagements de caution souscrits par Philippe Somborn, celui-ci devait être débouté de ses demandes de ce chef

Vu l'appel interjeté à l'encontre de cette décision, par la société Honda France,

Vu les conclusions, en date du 12 novembre 1999, par lesquelles la société Honda Motor Europe (South), nouvelle dénomination sociale de la société Honda France, appelante, prie la Gour, par voie d'infirmation, de débouter Maître Schaming-Fidry, ès-qualités de mandataire liquidateur de la société Squadra Moto, et Philippe Somborn de l'intégralité de leurs demandes et de les condamner solidairement au paiement de la somme de 50 000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

Aux motifs essentiels:

- qu'en ce qui concerne les contrats à durée déterminée venus à échéance au 31 décembre 1992, elle n'était tenue ni de les renouveler ni de motiver sa décision de non renouvellement, le montant des investissements non amortis réalisés étant, à cet égard, sans incidence,

- que la politique agressive de vente au rabais avec prospection tous azimuts, la livraison par les sociétés DMB et Dimer à Blin Braunwarth à Troyes de motos neuves faisant de Troyes un point de vente secondaire en dehors de leur secteur au mépris des contrats signés mais également des engagements souscrits à plusieurs reprises par Monsieur Michel notamment dans son courrier du 8 décembre 1992, l'organisation d'une opération commerciale importante en dehors de son territoire, malgré le refus du concédant, les ventes extérieures par l'intermédiaire d'un réseau de revendeurs non qualifiés, auraient justifié la résiliation du 2 décembre 1993,

- qu'en raison de la suspension de tout paiement à compter du 2 décembre, elle aurait été en droit de prononcer, le 10 décembre, la résiliation des contrats sur le fondement de l'article 22.1 B,

- que la dégradation de la trésorerie, consécutive au non renouvellement des concours bancaires intervenu le 15 octobre 1993, soit antérieurement à la résiliation du 2 décembre 1993, serait à l'origine du dépôt de bilan, qu'elle aurait été fondée à refuser de poursuivre les approvisionnements de véhicules neufs, dès lors que les contrats de concession s'étaient trouvés rompus suite aux impayés de la société Squadra Moto,

Vu les conclusions, en date du 23 novembre 1999, par lesquelles Maître Schaming-Fidry, ès-qualités de mandataire liquidateur de la société Squadra Moto, intimée et appelante incidente, demande à la cour de confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a jugé que la société Honda France avait abusivement résilié le contrat de concession, mais, l'infirmant pour le surplus, de dire que cette dernière a directement contribué au dépôt de bilan et à la liquidation judiciaire de la société Squadra Moto, la condamner, en conséquence, à des dommages-intérêts équivalents à l'insuffisance d'actif telle qu'elle sera définie aux termes des opérations de liquidation, ainsi qu'à une indemnité de 50 000 F en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

Aux motifs principaux :

- que contrairement à ce que soutient la société Honda France celle-ci aurait encouragé Monsieur Michel à reprendre les concessions de Reims et de Metz et donc à engager des investissements, de sorte que c'est de manière brutale et arbitraire que l'appelante aurait le 25 septembre 1992 refusé de renouveler les contrats,

- que les fautes alléguées dans le courrier du 2 décembre 1993 pour justifier la résiliation des contrats ne seraient pas démontrées, le concédant ne pouvant, tout à la fois s'abstenir de reprendre le stock du concessionnaire et lui faire interdiction de le revendre, la manifestation de Mailly le Camp ayant été organisée avec l'accord verbal de la société Honda France, que cette dernière ne saurait, sans enfreindre le règlement communautaire 1983-83, lui interdire d'honorer les commandes émanant d'acheteurs résidant en dehors de son territoire,

- que la résiliation du 10 décembre motivée par l'enregistrement d'impayés entre le 26 novembre et le 7 décembre, bien que régulière en la forme, serait emprunte de mauvaise foi, dès lors que ces impayés résultaient d'une dégradation brutale de la trésorerie et non pas de la situation financière de l'entreprise, et que la société Honda France qui n'avait jamais enregistré d'impayés jusque là aurait disposé de garanties,

- qu'en bloquant l'approvisionnement de la concession, en interdisant la cession de l'entreprise au groupe Ardoin Saint-Amand, enfin en ne se préoccupant pas de ménager les conditions d'une cession de l'entreprise aux nouveaux concessionnaires, la société Honda France aurait conduit l'entreprise à mettre un terme à son activité et aurait fait échec à l'adoption d'un plan de redressement,

Vu les conclusions, en date du 25 novembre 1999, par lesquelles Philippe Somborn, intimé et appelant incident, demande à la cour de condamner la société Honda France à lui payer la somme de 500 000 F représentant le prix de cession de ses actions, celle de 550 000 F correspondant aux sommes par lui acquittées en sa qualité de caution, celle de 500 000 F à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice moral, outre une indemnité de 50 000 F en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, et de confirmer les dispositions non contraires du jugement,

Aux motifs que ce serait à la suite du remplacement de l'équipe dirigeante de la société Honda France que les difficultés auraient commencé, que cette dernière ce serait, sans aucun fondement juridique opposé à la cession de sa participation minoritaire dans la société Michel Participations à la société Ardoin Saint-Amand et cie et aurait par la même occasion compromis la poursuite d'activité du groupe Squadra et, partant, entraîné la mise en jeu de ses engagements de caution, souscrits pour garantir les investissements encouragés par l'appelante ainsi que le crédit fournisseur consenti par cette dernière,

Sur quoi, LA COUR :

Considérant qu'il convient de donner acte à la société Honda France de ce que sa nouvelle dénomination sociale est Honda Motor Europe (South);

Considérant qu'il ressort des productions des parties que Monsieur Michel a, repris la concession des motocyclettes de la marque Honda de Saint-Dizier en 1980, celle de Chaumont en 1981 et qu'en 1983 il a acquis les parts de la société Blin Braunwarth, laquelle exploitait la concession de Troyes, que les deux premiers magasins après avoir un temps été exploités sous le statut d'agences rattachées à la concession de Troyes, ont cessé d'être exploités par des sociétés du groupe Michel, en 1984 pour celui de Saint-Dizier, et, à une date inconnue pour celui de Chaumont ;

Qu'en 1989, la société Michel Participations et Monsieur Michel ont acquis le capital social de la société Dimer laquelle exploitait la concession de Reims, tandis que par acte sous seing privés des 26 mars et 10 avril 1991, la société DMB, ayant les mêmes porteurs de parts que la précédente, rachetait le fonds exploité par le concessionnaire Honda de Metz;

Que pour permettre ces investissements Philippe Somborn a, en septembre 1990 et en juin 1991, souscrit dans le capital de la société Michel Participations pour un montant total de 500 000 F, et, s'est, en juillet et décembre 1991, porté caution respectivement de la facilité de caisse consentie par la Société Générale à cette dernière société ainsi que du prêt accordé à la société DMB par le Crédit Agricole;

Considérant que le 25 septembre 1992, la société Honda France qui était liée avec chacune des sociétés Blin Braunwarth, Dimer et DMB par un contrat de concession à durée déterminée d'un an arrivant à expiration le 31 décembre 1992, faisait connaître, conformément aux dispositions de l'article 31 des dites conventions, son intention de ne pas conclure de nouveaux contrats

Que toutefois, après négociations l'appelante acceptait, en définitive, de conclure deux nouveaux contrats à durée indéterminée, l'un avec la société Dimer pour Reims, l'autre avec la société DMB laquelle voyait le territoire à elle concédé réduit;

Considérant que s'il n'est pas contestable que la société Honda France a donné son agrément au rachat de la société exploitant la concession de Reims ainsi qu'au rachat de la concession de Metz, il ne résulte d'aucune des pièces versées aux débats qu'elle aurait imposé ou favorisé ces rachats, qu'il est, au contraire, établi qu'elle n'a été avisée de ces opérations qu'alors que celles-ci étaient en courset que dès 1988, elle reprochait à la société Blin Braunwarth une politique de vente non conforme au renom de la marque, la nomination d'agent et la réalisation de travaux sans son accord préalable, griefs renouvelés en 1990, cette fois auprès de la société Dimer;

Considérant qu'en ce qui concerne les décisions du 25 septembre 1995 de ne pas renouveler les contrats de Troyes et de Metz, le concédant n'était pas tenu de motiver sa décision de ne pas conclure de nouveaux contrats et n'avait pas à tenir compte des investissements réalisés par le concessionnaire de surcroît à sa seule initiative, s'agissant de contrats conclus pour une durée déterminée dénoncés avant leur expiration dans le délai contractuellement prévu; que c'est donc à tort que les premiers juges ont considéré que la société Honda France avait engagé sa responsabilité en refusant de renouveler le contrat de Troyes et en réduisant le territoire concédé à Metz, ce d'autant que les intimés ne justifient ni des investissements qui auraient été engagés à Troyes, ni de la date à laquelle ils l'auraient été, ni, enfin que ceux-ci n'auraient pas été amortis ;

Que le jugement devra donc être infirmé en ce qu'il a alloué des dommages-intérêts à Maître Schaming-Fidry, ès-qualités, de ce chef;

Considérant qu'en ce qui concerne les contrats de concession à durée indéterminée conclus début 1993 entre les sociétés Dimer et DMB, d'une part et la société Honda France, d'autre part, ceux-ci ont, après plusieurs avertissements et mises en demeure en date des 19 mars, 13 avril, 2 août, 15 octobre, 22 novembre 1993, fait l'objet d'une double résiliation, une première en date du 2 décembre 1993 avec préavis de 6 mois, motivée aux termes de la lettre de résiliation adressée à la société Squadra Moto par les manquements graves à ses obligations contractuelles, en particulier en matière de respect de l'exclusivité territoriale (actions de prospection en dehors du territoire concédé, ventes par l'intermédiaire d'agents revendeurs ne correspondant pas aux critère de la société Honda France, réclamations de clients), une seconde, en date du 10 décembre 1993, avec effet immédiat, en raison d'impayés s'élevant à plus d'un million de F;

Que s'agissant de contrats de concession exclusive à durée indéterminée, le concédant pouvait les dénoncer à tout moment, sauf à respecter les délais et la procédure de résiliation contractuellement prévus, à la condition toutefois que l'exercice de ce droit ne soit pas abusif;

Qu'en l'espèce, nonobstant les dénégations de Maître Schanning-Fidry, ès-qualités, lesquelles ne sont étayées d'aucun élément justificatif, il est démontré, que les sociétés animées par Monsieur Michel continuaient la politique de prix et de publicité dénoncée depuis 1988 par l'appelante, comme contraire à son image de marque, qu'elles ont contrevenu à la clause d'exclusivité, d'une part en vendant par l'intermédiaire du magasin de Troyes, mais aussi de distributeurs non agréés du Mans, de Lille et de Gaen des motos livrées soit à la société Dimer, soit à la société DMB, et, d'autre part, en organisant les 20 et 21 novembre 1993, une démonstration de motocross à Mailly le Camp sur le territoire d'un autre concessionnaire ; qu'à cet égard Maître Schaming-Fidry, ès-qualités, soutient vainement que l'exclusivité imposée aux sociétés Dimer et DMB contreviendrait au règlement 1983-83 en date du 22 juin 1983;

Que n'étant pas établi que la reprise des fonds de commerce de Reims et Metz aurait été organisée par le concédant, ni que celui-ci aurait exigé, lors de ces reprises, des investissements d'agencement, la résiliation prononcée, le 2 décembre 1993, ne saurait revêtir un caractère abusif ;

Considérant, en tout état de cause, que la société Squadra Moto qui ne s'est pas vu renouveler les concours bancaires à partir du 15 octobre 1993, a laissé impayé certaines des factures venant à échéance en octobre, et, après régularisation de ces premiers impayés, n'a réglé ni les factures dues par la société Dimer à échéances des 26 novembre, 3, 4, 6 et 7 décembre 1993 d'un montant total de 619 410,11 F, ni celles dues par la société DMB à échéance des 3 et 6 décembre 1993 d'un montant total de 467 303,12 F, de sorte que la société Honda France pouvait, sans faire preuve de mauvaise foi, faire application de l'article 22.1 B des conventions selon lequel "le concédant pourra résilier le présent contrat par anticipation à tout moment par l'envoi d'une simple lettre recommandée avec accusé de réception, sans aucune formalité judiciaire, si le concessionnaire ne paie pas une livraison à son échéance ou émet un chèque sans provision" ;

Qu'en effet compte tenu de l'importance des impayés, intervenus après un premier incident, il ne saurait être soutenu que celle-ci aurait commis un abus de droit en dénonçant, conformément aux clauses contractuelles, le contrat avec effet immédiat, alors que, malgré les garanties invoquées par Maître Schaming-Fidry, ès-qualités, la créance déclarée par l'appelante s'élève à 999 252,73 F ;

Considérant que Maître Schaming-Fidry, ès-qualités, qui reconnaît expressément dans ses écritures "qu'en dépit de la perte de la concession de Troyes et de la moitié du potentiel commercial de la concession de Metz, le groupe Squadra non seulement n'a enregistré aucune dégradation de sa rentabilité mais est au contraire parvenu à l'améliorer" ne saurait soutenir que l'appelante serait à l'origine du dépôt de bilan de la société Squadra Moto, alors que, comme exactement relevé par le tribunal, l'examen des quelques documents comptables produits ne démontre pas que la situation financière de cette entreprise aurait en décembre 1993, été bonne, qu'il est, au contraire avéré que dès le mois de novembre 1993, l'actif disponible ne permettait pas de faire face au passif exigible, ce en raison notamment de la dénonciation par les organismes bancaires de leurs concours et surtout de l'important endettement ;

Que nonobstant la résiliation des conventions avec effet immédiat, il résulte des correspondances échangées avec l'administrateur judiciaire que la société Honda France a "dans un esprit d'ouverture" accepté de poursuivre la livraison des pièces de rechange dans la limite de l'expiration du préavis de six mois, soit jusqu'au 6 juin 1994, refusant toutefois de livrer des véhicules neufs ;

Que dans ces conditions, Maître Schaming-Fidry, ès-qualités, qui ne verse pas aux débats le rapport de l'administrateur judiciaire, ne justifie pas que l'appelante aurait par son attitude fait obstacle à la mise en place d'un plan de continuation ou d'un plan de cession, étant relevé que la seule proposition présentée au tribunal par Monsieur Michel consistait à pratiquer une politique "de prix cassés" sur le stock de véhicule neufs afin de dégager un maximum de trésorerie ;

Que M. Ardoin Saint-Amand ayant dans un courrier daté du 18 octobre 1993, après avoir relevé l'endettement important et trop éparpillé du groupe Squadra et le fait que l'une des sociétés du groupe aurait été sous le coup d'un concordat dont on ne lui avait pas parlé, écrit que rien ne lui paraissait possible tout de suite, notamment en raison de la restructuration du groupe, ajoutant qu'avant de concrétiser tout accord, il voulait connaître la situation exacte de l'endettement ainsi que le besoin de trésorerie du groupe, la preuve n'est pas davantage rapportée que la lettre par laquelle la société Honda France a, le 27 octobre 1993, fait savoir à la société DMB que "toute transaction se traduisant directement ou indirectement par la participation de M. Ardoin Saint-Amand dans la direction ou le capital de cette société, ne recevrait pas son agrément et aurait pour conséquence d'entraîner la résiliation du contrat de concession", aurait empêché la prise de participation de la société Ardoin Saint-Amand et GIE;

Qu'il s'ensuit que Maître Schaming-Fidry, ès-qualités, qui sous couvert d'une demande tendant à voir prendre en charge l'insuffisance d'actif, sans fournir aucun élément sur la consistance et l'importance tant de l'actif que du passif, tente d'obtenir le remboursement d'investissements réalisés aux risques et périls du concessionnaire, devra être déboutée de l'intégralité de ses demandes;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Philippe Somborn qui a investi dans la société Michel Participations à partir de 1990, alors que contrairement à ce qu'il soutient, les sociétés dirigées par Monsieur Michel se voyaient d'ores et déjà reprocher par la société Honda France leur politique de vente, qui ne produit aucun élément sur les négociations par lui engagées avec la société Ardoin Saint-Amand et cie, ne démontre pas davantage au regard des termes de la lettre de M. Ardoin Saint-Amand en date du 18 octobre 1993, que la cession de sa participation aurait échoué du fait de l'opposition manifestée par la société Honda France dans son courrier du 27 octobre 1995;

Qu'en conséquence, dès lors que la société Honda France n'est pas à l'origine du dépôt de bilan, qu'elle a usé de son droit de ne pas renouveler les contrats à durée déterminée, qu'elle a mis fin sans abus aux contrats à durée indéterminée et qu'il n'est pas établi que la lettre du 27 octobre 1995 aurait empêché la cession des actions détenues par Philippe Somborn, ce dernier doit être débouté de l'intégralité de ses demandes;

Considérant qu'en raison de la situation respective des parties, l'équité ne justifie pas qu'il soit fait application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile au profit de la société Honda France tandis que Maître Schaming-Fidry, ès-qualités, et Philippe Somborn, qui succombent dans leurs prétentions, ne sauraient obtenir aucune indemnité de ce chef, tant en première instance qu'en cause d'appel ;

Par ces motifs : Donne acte à la société Honda France de ce que sa nouvelle dénomination sociale est Honda Motor Europe( South), Infirme le jugement dont appel en toutes ses dispositions, Déboute Maître Schaming-Fidry, ès-qualités de mandataire liquidateur de la société Squadra Moto, et Philippe Somborn de l'intégralité de leurs demandes, Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, Condamne Philippe Somborn et Maître Schaming-Fidry, ès qualités, aux entiers dépens de première instance et d'appel, lesquels entreront en frais privilégiés de procédure collective, admet Me Huyghe, avoué, au bénéfice de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.