Cass. 1re civ., 31 mai 1988, n° 87-10.479
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Eaux de l'Essonne (Sté)
Défendeur :
Chable
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Ponsard
Rapporteur :
M. Sargos
Avocat général :
M. Dontenwille
Avocat :
Me Célice.
LA COUR : - Sur le moyen unique, pris en ses trois branches : - Attendu, selon les énonciations du jugement attaqué (Tribunal d'instance de Corbeil-Essonnes, 22 août 1986), que, le 15 juillet 1980, M. Chable a passé avec la société des eaux de l'Essonne (la société) un contrat d'abonnement ; que, conformément à l'article II du cahier des charges type approuvé par le décret du 17 mars 1980, le règlement du service intervenu pour l'application aux usagers du cahier des charges a été remis à M. Chable au moment de la signature de sa demande d'abonnement ; que l'article 16 du règlement du service, reprenant pour l'essentiel les dispositions de l'article 64 du cahier des charges type, dispose que " l'entretien du compteur ne comprend pas les frais particuliers de réparation motivés par toute cause qui ne serait pas la conséquence de l'usage ; ces frais particuliers sont à la charge de l'abonné, auquel incombe le soin de prendre les précautions nécessaires, notamment en cas de gelée " ; qu'enfin, une mention figurant sur la demande d'abonnement elle-même précise que " il appartient à l'abonné de préserver du gel le compteur et le branchement, les frais de réparation pour ce motif étant à sa charge " ;
Attendu que la société des eaux de l'Essonne a procédé au changement du compteur d'eau installé chez M. Chable, à la suite d'avaries consécutives au gel, et lui en a demandé le paiement ; que le jugement attaqué a débouté la société de sa demande par des motifs tirés notamment du caractère abusif de la clause relative au gel ;
Attendu qu'à ce jugement, grief est fait par la société d'avoir ainsi statué alors que, d'une part, les dispositions du règlement du service s'imposent aux parties en raison de leur nature réglementaire ; alors que, d'autre part, l'insertion d'une clause exonératoire de responsabilité ne saurait être considérée comme abusive, de sorte qu'auraient été violés les articles 1134 du Code civil et 35 de la loi n° 78-23 du 10 janvier 1978 ; et alors que, enfin, l'avis émis par la Commission des clauses abusives dans sa recommandation n° 85-01-CCA, publié au BOCC du 17 janvier 1985, avis auquel se réfère le jugement, ne saurait fonder sa décision ;
Mais attendu que si, d'une part, les stipulations du cahier des charges type approuvé par le décret du 17 mars 1980 sont effectivement applicables aux usagers dès lors que le règlement du service qui s'y réfère leur a été remis lors de la signature de la demande d'abonnement, et si, d'autre part, les dispositions dudit cahier des charges, et notamment de son article 64, ont un caractère réglementaire, de sorte que les tribunaux de l'ordre judiciaire ne peuvent, sans méconnaître le principe de la séparation des pouvoirs, déclarer que des clauses figurant dans ce décret, ou reprises dans un règlement du service d'eau, ont un caractère abusif au sens de l'article 35 de la loi n° 78-23 du 10 janvier 1978, en l'espèce les énonciations erronées du tribunal sont surabondantes ;
Attendu, en effet, que les dispositions de l'article 64 du cahier des charges type n'ont pas pour effet de mettre à la charge de l'abonné les dommages causés par le gel dès lors qu'il démontre qu'il avait pris les précautions nécessaires pour protéger le compteur d'eau des gelées ; qu'en l'espèce, il résulte des appréciations non critiquées du juge du fond que la société des eaux de l'Essonne avait approuvé les conditions d'installation du compteur et que M. Chable n'avait pas manqué aux obligations afférentes à l'usage du compteur pesant sur lui ; que la décision étant ainsi légalement justifiée, les moyens ne peuvent être accueillis ;
Par ces motifs : rejette le pourvoi.