CA Bordeaux, 2e ch., 3 décembre 1996, n° 95000837
BORDEAUX
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Mutuelle Smatis France
Défendeur :
Mutuelle générale du personnel des collectivités locales
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Présidents :
M. Frizon de Lamotte, Conseillers : Melle Courbin, M. Ors
Avoués :
SCP Touton-Pineau, Me Fournier
Avocats :
Mes Ciria, Boncenne.
Par acte du 9 février 1995, la Mutuelle Smatis France a relevé appel d'une ordonnance de référé rendue par le Président du Tribunal de grande instance d'Angoulême le 26 janvier 1995 qui lui a enjoint de cesser toute diffusion de ses tableaux comparatifs sans communication préalable à la Mutuelle Générale du personnel des collectivités locales et ce sous astreinte provisoire de 1 000 F par infraction constatée.
Par des conclusions du 16 mai 1995 l'appelante conteste les faits qui lui sont reprochés. Elle expose qu'à la demande du Centre d'abattage de la mairie de Thiviers elle a adressé à son responsable, par télécopie le 17 juin 1994, un tableau récapitulatif des tarifs et des garanties offerts par l'intimée puis le 27 juin 1994 une étude comparative entre les deux mutuelles.
Elle soutient qu'il n'y a pas eu publicité comparative au sens de l'article L. 121-8 du Code de la consommation mais étude et information comparative destinées au client.
Elle indique que le juge des référés était incompétent pour trancher la question dont l'appréciation relevait nécessairement du juge du fond.
Elle ajoute, à supposer que la loi puisse s'appliquer en l'espèce, qu'il ne pourrait y avoir sanction que si la publicité était inexacte et subjective, aucune sanction n'étant encourue du fait de l'absence de communication préalable. Or en l'espèce, le premier juge a reconnu que les documents établis ne comportaient aucune inexactitude. De ce fait la décision entreprise ne peut être que réformée.
Elle sollicite 10 000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile .
L'intimée a répliqué le 22 décembre 1995. Elle désire la confirmation de la décision entreprise ainsi que l'allocation d'une somme de 10 000 F pour les frais irrépétibles qu'elle a dû exposer.
Elle soutient que l'appelante s'est bien livrée à une publicité comparative et il est faux de soutenir que l'article L. 121-12 du Code de la consommation ne prévoit aucune sanction.
Elle ajoute que l'appelante s'est livrée à une énumération tendancieuse des prestations offertes et que si elle avait été consultée elle n'aurait pas laissé passer cette publicité sans demander des modifications.
Sur quoi, LA COUR :
Attendu que par des motifs pertinents que la Cour adopte le premier juge a relevé que le terme publicité recouvrait tous les moyens d'information et de suggestion à effet collectif utilisés par une entreprise afin d'acquérir, de maintenir ou de développer une clientèle, qu'en l'espèce en adressant des tableaux rapprochant ses prestations de celles offertes par l'intimée, l'appelante a bien cherché à convaincre le personnel des abattoirs de Thiviers du bien-fondé d'un changement de mutuelle, qu'au surplusil a ajouté que ces tableaux ne pouvaient constituer une information comparative même en l'absence de toute annotation subjective puisque la notion d'information nécessite qu'elle émane d'un tiers pouvant objectivement comparer les prestations offertes par des entreprises concurrentes et non d'une des entreprises concernées qui ne recherche par cette diffusion qu'à développer sa clientèle .
Attendu qu'ainsi l'appelante s'est bien livrée à une publicité comparative.
Attendu que la loi exige que cette publicité soit loyale et véridique et que l'annonce soit communiquée au professionnel visé avant sa diffusion.
Attendu que le juge des référés est le juge de l'évidence, qu'il n'a pas rechercher si la publicité est loyale et véridique mais si simplement les obligations légales pesant sur l'annonceur ont été respectées.
Attendu qu'en l'espèce, il est reconnu que cette publicité n'a pas été communiquée à l'intimée conformément à l'article L. 121-12 du Code de la consommation, qu'en agissant ainsi l'appelante lui a causé un trouble manifestement illicite qu'elle était fondée à faire cesser en saisissant le juge des référés, le problème d'une éventuelle sanction ne concernant que les juges du fond.
Attendu qu'ainsi, la décision entreprise ne peut être que confirmée dans toutes ses dispositions.
Attendu qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de l'intimée les frais irrépétibles qu'elle a dû exposer, qu'il échet de lui allouer une somme de 5 000 F.
Attendu que l'appelante supportera les dépens.
Par ces motifs, LA COUR, Déclare la Mutuelle Smatis France mal fondée en son appel, en conséquence l'en déboute et confirme la décision entreprise dans toutes ses dispositions ; Y ajoutant en cause d'appel, Condamne la Mutuelle Smatis France à verser à la MGPCL la somme de 5 000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; Met les dépens de l'appel à la charge de la Mutuelle Smatis France dont distraction à la SCP Touton-Pineau, Avoué, conformément à l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.