CA Paris, 13e ch. B, 29 octobre 1992, n° 3156-92
PARIS
Arrêt
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Lenormand
Avocat général :
Baccard
Conseillers :
Mmes Magnet, Barbarin
Avocats :
Mes Dourdin, Jeanjean.
Rappel de la procédure
Le jugement
Par jugement en date du 16 janvier 1992 le Tribunal de Bobigny (16e Chambre) a relaxé Xavier A des fins de la poursuite exercée à son encontre du chef d'apposition de trois enseignes lumineuses sans autorisation et a mis la société L hors de cause, et laissé les dépens à la charge du Trésor.
Appel
Appel a été interjeté par :
Le Procureur de la République près le Tribunal de grande instance de Bobigny le 20 janvier 1992,
Décision :
Rendue après en avoir délibéré conformément à la loi,
Sur l'appel régulièrement interjeté par le Ministère public d'un jugement du Tribunal de grande instance de Bobigny (16e Chambre) en date du 16 janvier 1992 dont le dispositif est rappelé ci-dessus.
Les premiers juges ayant exactement rappelé les termes de prévention et les faits de la cause, la cour s'en rapporte, sur ces points aux énonciations du jugement attaqué.
Assisté de son conseil, Xavier A demande à la cour, par voie de conclusions développées à l'audience, de :
- " dire d'une part impératives et non susceptibles d'interprétation les dispositions édictées par l'article 29 du décret 80-923 du 21 novembre 1980 pris en application de la loi 79-1150 du 29 décembre 1979 ".
- " dire que la seule notification régulière effectuée par la mairie de Paris est celle du 2 mai 1990, donc postérieure à l'expiration du délai imparti à la mairie de Paris ".
- " dire qu'en l'espèce, la notification par M. Petitjean ne présente aucune garantie habituelle, l'accusé de réception dont argue la mairie de Paris ne comportant aucune précision quant au représentant de la personne morale mentionnée comme destinataire et une signature illisible ".
- " en conséquence, confirmer le jugement de relaxe prononcé le 16 janvier 1992 et laisser les dépens à la charge du Trésor ".
Le 18 juin 1990, Xavier A, Président du Conseil d'Administration de la société L, qui a pour objet social l'étude, la réalisation et l'exploitation de la publicité sous toutes ses formes, adressait à la mairie de Paris une demande d'autorisation d'installer une enseigne lumineuse " Bercy 2 " composée de trois dispositifs sur la terrasse d'un immeuble situé 1/11, rue Fulton à Paris (13e) ;
Par lettre en date du 7 février 1990, le maire de Paris a demandé à la société L des renseignements complémentaires, à savoir le plan en coupe et le plan côté de l'ouvrage ou de l'objet projeté précisant la nature, la couleur des matériaux ainsi que les textes ou le graphisme.
Le 28 février 1990, la société L adressait par " fax " à la mairie de Paris le plan côté des ouvrages avec leur description et leur couleur.
Le plan en coupe demandé n'était adressé à la mairie de Paris, toujours par voie de télécopie, que le 5 mars 1990.
Par lettre datée du 26 avril 1990 et postée le même jour, ainsi qu'en fait foi le cachet de la poste, le maire de Paris a fait part à la S.A. L de sa décision de refus. Cette lettre est parvenue à son destinataire le 2 mai 1990, ainsi qu'en témoigne l'accusé de réception.
En outre, le 26 avril 1990, le maire de Paris a également notifié sa décision par voie de télécopie.
Enfin, le 27 avril 1990, à 11 h 35, M. Petitjean, agent assermenté de la ville de Paris, notifiait cette décision à la société L, sans que l'on puisse savoir avec certitude quel a été le signataire de l'accusé de réception.
Le 19 mars 1991, M. Thierry Bayle, agent de la ville de Paris, dûment assermenté, se rendait au devant de l'immeuble situé 1/11, rue Fulton à Paris (13e) et dressait un procès-verbal d'infraction à l'encontre de la SA L qui avait installé, sans autorisation et malgré le refus du 26 avril 1990, trois dispositifs publicitaires lumineux sur la toiture, savoir :
- côté Bellevue : " 120 magasins Bercy 2, Porte de Choisy " ;
- côté quai d'Austerlitz : " Bercy 2, Centre Commercial " ;
- côté rue Fulton : " Bercy 2, Porte de Bercy ".
De plus, indiquait le constat, ces publicités lumineuses ne comportaient pas la dénomination de la société installatrice et exploitante.
L'agent verbalisateur concluait que la société L était en infraction aux dispositions des articles 5 et 8 de la loi n° 79-1150 du 29 décembre 1979.
Le 29 mars 1991, le maire de Paris prenait un arrêté enjoignant à la société L de déposer les enseignes lumineuses litigieuses dans un délai de quinze jours sous astreinte ; le représentant légal de ladite société formait aussitôt un recours contre cet arrêté devant le Tribunal administratif de Paris.
Entendu le 7 mai 1991 au Commissariat de police d'Aubervilliers, Xavier A, Président du Conseil d'Administration de la SA L, déclarait que son entreprise avait bien monté une publicité lumineuse au 1/11, rue Fulton à Paris (13e) mais qu'il avait utilisé la procédure légale, à savoir une demande d'autorisation, et qu'il avait obtenu une autorisation tacite du maire de Paris, faut par celui-ci d'avoir notifié une décision de refus par lettre recommandée avec avis de réception de la demande par la mairie ; que le refus de la mairie de Paris, reçu deux mois et quelques jours plus tard, n'était donc pas valable.
Considérant qu'il résulte des pièces de la procédure que le maire de Paris a dû demander à la société L des renseignements complémentaires et que les pièces réclamées ont été adressées à la mairie de Paris, par télécopie, le 28 février 1990 et le 5 mars 1990 ; qu'il s'ensuit que le délai imparti au maire expirait le 5 mai 1990 conformément aux dispositions des articles 27 et 29 du décret du 21 novembre 1980 ;
Que le refus du maire de Paris en date du 26 avril 1990, notifié à la SA L par lettre recommandée le 2 mai 1990, ainsi qu'il apparaît de l'accusé de réception postale, est donc parfaitement régulier et qu'il serait surabondant d'examiner la validité des deux autres modes de notification qui ont été utilisés par la mairie de Paris ;
Considérant que Xavier A a, par conséquent, bien commis l'infraction qui lui est reprochée ; qu'il convient, en conséquence, en infirmant le jugement entrepris, de l'en déclarer coupable ;
Que, conformément aux dispositions de l'article 29, in fine, de la loi n° 79-1150 du 29 décembre 1979, il devra être prononcé autant de peines d'amende qu'il y a eu de dispositifs publicitaires lumineux en infraction, soit trois;
Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement et contradictoirement, Reçoit l'appel du Ministère public, infirmant le jugement attaqué, Déclare Xavier A coupable du délit d'apposition de trois dispositifs publicitaires lumineux sans autorisation et le condamne, en conséquence, à trois amendes de deux mille (2 000) francs chacune, Ordonne la suppression des dispositifs publicitaires lumineux en cause dans le délai d'un mois à compter du jour où le présent arrêt sera devenu définitif, sous astreinte de trois cent (300) francs par jour de retard, Condamne Xavier A aux dépens de première instance et d'appel, ces derniers étant liquidés à la somme de : 374,81 F. Le tout par application des articles 8, alinéa 2, 20, 29, 31 de la loi n° 79-1150 du 29 décembre 1979, 473, 512 du Code de procédure pénale.