CE, 2e et 6e sous-sect. réunies, 18 janvier 1991, n° 104197
CONSEIL D'ÉTAT
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Multypromotion (Sté)
Défendeur :
Paris (Commune)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Bauchet
Rapporteur :
M. Groshens
Avocats :
SCP Lesourd, Baudin, Me Foussard.
LE CONSEIL D'ÉTAT : - Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 26 décembre 1988 et 27 octobre 1989 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'État, présentés pour la société Multypromotion, dont le siège est 220, quai de Stalingrad à Issy-Moulineaux (92130) ; la société Multypromotion demande que le Conseil d'État : 1°) annule le jugement du 28 septembre 1988, par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'arrêté du maire de Paris en date du 10 décembre 1987 la mettant en demeure de réduire à 16 mètres carrés, dans un délai de 15 jours, la surface des affiches et supports d'un véhicule immatriculé 2258 LZ 92, sous peine d'astreinte ; 2°) annule pour excès de pouvoir ladite décision ; (...) ; Vu la loi n° 79-1150 du 29 décembre 1979 ; Vu le décret n° 82-764 du 6 septembre 1982 ; Vu le Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ; Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Considérant qu'aux termes de l'article 37 de la loi du 31 décembre 1982 relative à l'organisation administrative de Paris, Marseille, Lyon et des établissements publics de coopération intercommunale, "le maire de la commune peut donner sous sa surveillance et sa responsabilité, par arrêté, délégation de signature au secrétaire général de la mairie et aux responsables de services communaux" ; que cette délégation peut porter aussi bien sur les attributions que le maire exerce au nom de l'État que sur celles qu'il exerce au titre de son mandat municipal ; qu'il résulte de l'instruction que le signataire de l'arrêté du 21 avril 1987 avait reçu une délégation du maire de Paris pour signer les actes relevant de ses attributions ; que la société requérante n'est donc pas fondée à soutenir que ledit arrêté, en application duquel est intervenu la décision attaquée, émane d'une autorité incompétente ;
Sur le moyen tiré de l'illégalité du décret du 6 septembre 1982 : - Considérant que pour contester la légalité de l'arrêté susvisé du maire de Paris en date du 21 avril 1987, la société requérante se fonde sur l'illégalité du décret du 6 septembre 1982 dont il fait application ;
Considérant, d'une part, qu'il ressort de l'instruction que les dispositions de l'article 1er de ce décret réglementant l'usage de véhicules à des fins essentiellement publicitaires, aux termes desquelles "la surface totale des publicités apposées sur chaque véhicule ne peut excéder 16 m2", ont été régulièrement soumises par le gouvernement au Conseil d'État qui les a écartées après les avoir examinées en assemblée générale ; qu'elles ne sont donc pas entachées d'incompétence ;
Considérant qu'aux termes de l'article 14 de la loi du 29 décembre 1979 relative à la publicité, aux enseignes et préenseignes, "la publicité sur les véhicules terrestres peut être réglementée, subordonnée à autorisation ou interdite, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État" ; qu'en limitant la surface des publicités apposées sur les véhicules terrestres utilisés ou équipés à des fins publicitaires, en interdisant la circulation de ces véhicules en convoi et en réglementant leur vitesse ainsi que leur stationnement ou leur séjour, sous réserve de dérogations accordées à l'occasion de manifestations particulières, les auteurs du décret du 6 septembre 1982, pris pour l'application de cette disposition législative, n'ont pas méconnu la portée de la délégation ainsi consentie au gouvernement et édicté une interdiction générale et absolue de la publicité par véhicules terrestres ; qu'ils n'ont pas porté une atteinte illégale à la liberté de circulation ou à la liberté de commerce et de l'industrie ; qu'enfin, en fixant, pour l'affichage sur les véhicules terrestres, des règles différentes de celles retenues pour l'affichage sur supports fixes, ils n'ont pas non plus introduit une discrimination illégale entre les entreprises de publicité utilisant ces deux catégories de supports, lesquelles se trouvent dans des situations différentes ;
Considérant, dès lors que le moyen tiré de ce que la décision attaquée aurait été prise sur le fondement d'une disposition réglementaire illégale ne saurait être accueilli ;
Sur le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du décret du 6 septembre 1982 : - Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la loi du 29 décembre 1979 relative à la publicité, aux enseignes et préenseignes "constitue une publicité, à l'exclusion des enseignes et des préenseignes, toute inscription forme ou image destinée à informer le public ou à attirer son attention, les dispositifs dont le principal objet est de recevoir lesdites inscriptions, formes ou images étant assimilés à des publicités" et qu'aux termes de l'article 1er du décret du 6 septembre 1982 pris en application de l'article 14 de la loi précitée "la surface totale des publicités apposées sur chaque véhicule ne peut excéder 16 m2" ; qu'il résulte de ces dispositions combinées que les règles de dimension maximum ainsi rendues obligatoires concernent notamment les dispositifs qui ont pour principal objet de recevoir la publicité et dont la mise en conformité peut être ordonnée en utilisant la procédure d'astreinte instituée par l'article 25 de la loi ;
Considérant qu'il résulte du procès-verbal en date du 25 septembre 1987 que le véhicule immatriculé 2258 LZ 92 et utilisé à des fins publicitaires était doté d'un dispositif destiné à recevoir de la publicité d'une surface de 24 m2; qu'en mettant par l'arrêté attaqué la société Multypromotion en demeure de réduire à 16 m2 la surface totale dudit support, le maire de Paris n'a pas commis d'erreur de droit;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Multypromotion n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
Article 1er : La requête de la société Multypromotion est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société Multypromotion, à la ville de Paris et au ministre de l'Equipement, du Logement, des Transports et de la Mer.