CE, 2e et 6e sous-sect. réunies, 29 juin 1998, n° 151904
CONSEIL D'ÉTAT
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
société Art Vision Publicité (Eurl)
Défendeur :
Sallanches (Commune)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Rapporteur :
M. Ribadeau-Dumas
LE CONSEIL : - Vu la requête, enregistrée le 13 septembre 1993 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, présentée pour la société Art Vision Publicité, dont le siège est 25, rue Grenette, à Chambéry, représentée par son gérant en exercice, domicilié en cette qualité audit siège; la société Art Vision Publicité demande au Conseil d'État: 1°) d'annuler le jugement du 17 juin 1993 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 mai 1992 par lequel le maire de Sallanches l'a mise en demeure de déposer un dispositif publicitaire; 2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté; 3°) de condamner la commune de Sallanches à lui verser la somme de 10 000 F sur le fondement de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991; (...); Vu la loi n° 79-1150 du 29 décembre 1979; Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991; Vu le décret n° 63-766 du 30 juillet 1963; Vu le décret n° 80-923 du 21 novembre 1980; Vu le Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel; Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987;
Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 9 du décret n° 80-923 du 21 novembre 1980: "Les dispositifs publicitaires non lumineux, scellés au sol ou installés directement sur le sol, sont interdits dans les agglomérations de moins de 10 000 habitants qui ne font pas partie d'un ensemble multicommunal de plus de 100 000 habitants ";
Considérant qu'en l'absence d'authentification par décret du chiffre de la population de l'agglomération de la commune, tel qu'il résulterait d'un recensement général, il appartient au maire de déterminer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la population de l'agglomération pour l'application des dispositions précitées;
Considérant que, par un arrêté du 21 septembre 1991, le maire de la commune de Sallanches a fixé à 9 073 habitants la population de l'agglomération; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que cet arrêté soit fondé sur des faits matériellement inexacts, la société requérante se bornant à relever que la population résidant sur l'ensemble du territoire de la commune est évaluée à plus de 12 000 habitants par l'INSEE;
Considérant qu'il est constant que la commune de Sallanches n'est pas incluse dans un ensemble multicommunal de plus de 100 000 habitants; que, par suite, le maire de la commune n'a pas commis d'excès de pouvoir en prenant l'arrêté attaqué, mettant en demeure la société Art Vision Publicité de déposer le dispositif publicitaire implanté en méconnaissance des dispositions précitées; qu'ainsi, ladite société n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du maire de Sallanches en date du 19 mai 1992;
Considérant qu'aux termes de l'article 57-2 du décret du 30 juillet 1963 modifié par l'article 6 du décret n° 90-400 du 15 mai 1990: "Dans le cas de requête jugée abusive, son auteur encourt une amende qui ne peut excéder 20 000 F"; qu'en l'espèce, la requête de la société Art Vision Publicité présente un caractère abusif; qu'il y a lieu de la condamner à payer une amende de 10 000 F;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991: - Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que la commune de Sallanches, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamnée à payer à la société Art Vision Publicité, la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de condamner la société Art Vision Publicité à payer à l'État la somme qu'il demande au même titre;
Article 1er: La requête de la société Art Vision Publicité est rejetée.
Article 2: Les conclusions du ministre de l'Aménagement du Territoire et de l'Environnement tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 3: La société Art Vision Publicité est condamnée à payer une amende de 10 000 F
Article 4: La présente décision sera notifiée à la société Art Vision Publicité, à la commune de Sallanches et au ministre de l'Aménagement du Territoire et de l'Environnement.