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Décisions

TA Pau, 1re ch., 16 mars 1994, n° 93-1282

PAU

Jugement

PARTIES

Demandeur :

Chambre syndicale française de l'affichage

Défendeur :

Anglet (Commune)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Girard

Commissaire du gouvernement :

M. Rey

Conseillers :

M. Madec, Mme Millié

Avocat :

Me Etchegaray.

TA Pau n° 93-1282

16 mars 1994

LE TRIBUNAL: - Vu la requête enregistrée au greffe du Tribunal administratif de Pau le 15 septembre 1993 sous le numéro 93-1282, présentée pour la Chambre Syndicale Française de l'Affichage ayant son siège social 40, bd Malesherbes, Paris 8e, représentée par son président en exercice;

La requérante demande que le tribunal annule pour excès de pouvoir l'arrêté en date du 5 avril 1993 par lequel le maire de la commune d'Anglet (Pyrénées Atlantiques) a institué une zone de publicité restreinte;

Vu le mémoire en défense enregistré comme ci-dessus le 27 décembre 1993 présenté pour la commune d'Anglet qui demande au tribunal:

- de rejeter la requête;

- de condamner la requérante à lui verser une somme de 10 000 F au titre de l'article L. 8-1 du Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel;

Vu le mémoire enregistré comme ci-dessus le 31 janvier 1994, présenté pour la requérante qui maintient les conclusions de la requête;

Vu la décision attaquée;

Vu l'ordonnance portant réouverture de l'instruction et nouvelle clôture au 18 février 1994;

(...)

Vu la loi n° 79-1150 du 29 décembre 1979 relative à la publicité, aux enseignes et préenseignes et ses décrets d'application;

Vu le Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel;

Considérant que la Chambre Syndicale Française de l'Affichage demande l'annulation de l'arrêté en date du 5 avril 1993 par lequel le maire de la commune d'Anglet (Pyrénées-Atlantiques) a institué une zone de publicité restreinte sur le territoire communal;

Sur la fin de non-recevoir opposée par le commune d'Anglet: - Considérant qu'en vertu de ses statuts, joints à sa requête, la Chambre Syndicale Française de l'Affichage a notamment pour but " la défense des droits et des intérêts matériels et moraux des professionnels de l'affichage "; qu'elle justifie ainsi d'un intérêt lui donnant qualité pour contester l'arrêté précité qui réglemente l'affichage dans la ville d'Anglet;

Sur la légalité de l'arrêté attaqué: - Considérant qu'en application de l'article 9 de la loi du 29 décembre 1979, il peut être institué des zones de publicité restreinte " dans tout ou partie d'une agglomération "; que, par suite, le moyen tiré de ce que le maire d'Anglet aurait excéder ses pouvoirs en instituant une zone de publicité restreinte recouvrant la totalité de l'agglomération ne peut, en tout état de cause, être accueilli;

Considérant que l'article 10 de la loi précitée confère, en vue de la protection du cadre de vie, aux autorités locales compétentes un large pouvoir de réglementation de l'affichage en leur permettant notamment de " déterminer dans quelles conditions et sur quels emplacements la publicité est seulement admise " et même d'" interdire la publicité ou des catégories de publicité définies en fonction des procédés ou des dispositifs utilisés "; que ces pouvoirs peuvent porter atteinte à la liberté de la publicité dès lors qu'ils sont utilisés, conformément à l'article 2 de la loi précitée, en vue d'assurer la protection du cadre de vie; que, par ailleurs, la délimitation desdites zones de publicité restreinte comme les prescriptions spéciales imposées aux dispositifs publicitaires, par nature plus restrictives que celles prévues par le décret n° 80-923 portant règlement national de la publicité en agglomération, arrêtées par le maire après délibération du conseil municipal à la suite d'une procédure fixée par l'article 13 de la loi précitée, ne peuvent être censurées par le juge administratif que si l'appréciation portée par l'autorité administrative est entachée d'une erreur manifeste, de détournement de pouvoir ou si elle a pour effet d'aboutir à une interdiction générale de la publicité sur le territoire communal;

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment des documents produits par la requérante et non contestés, que l'interdiction de tout mode de publicité à moins de 50 mètres de part et d'autre de l'alignement du boulevard du BAB, de la bretelle d'Aritxague, de la D 932 et des voies de raccordement vise au moins partiellement des secteurs à vocation commerciale et industrielle, où elle n'est pas justifiée par la protection du cadre de vie; que, par suite, une telle interdiction est entachée d'erreur manifeste d'appréciation et doit être annulée;

Considérant, en second lieu, que le paragraphe B du chapitre premier de l'arrêté attaqué contient, pour les dispositifs publicitaires scellés au sol ou installés directement sur le sol, un ensemble d'interdictions édictées sous les règles PUB P1 à PUB P7 et concernant notamment l'implantation par rapport aux voies publiques, aux limites séparatives, aux constructions voisines, aux autres dispositifs publicitaires et au surplomb du domaine public, dont la requérante apporte, sans être sérieusement contredite, des éléments de preuve selon lesquels leur application cumulée s'ajoutant à une réglementation nationale déjà précise aboutit à une quasi-interdiction de toute publicité utilement visible sur l'ensemble du territoire communal; que, par suite, ces règles restreignent la liberté d'affichage dans une proportion excessive par rapport au but recherché en dépit du caractère littoral et touristique de la commune d'Anglet, et sont, en conséquence, entachées d'erreur manifeste d'appréciation; qu'elles doivent, dès lors, être annulées;

Considérant, en troisième lieu, qu'en ce qui concerne les autres dispositions de l'arrêté attaqué, qui concernent les autres types de dispositifs publicitaires, et qui sont séparables des précédentes, la Chambre Syndicale requérante se borne à des indications générales et n'établit pas qu'elles seraient, elles aussi, entachées d'erreur manifeste d'appréciation; qu'il y a lieu, par suite, de rejeter le surplus des conclusions de la requête;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 8-1 du Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel: - Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 8-1 du Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, le tribunal ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge; que les conclusions présentées à ce titre par la commune d'Anglet doivent dès lors être rejetées;

Décide:

Article 1er: L'arrêté du maire d'Anglet du 5 avril 1993 portant création d'une zone de publicité restreinte est annulé d'une part en tant qu'il porte interdiction de tout dispositif publicitaire " à moins de 50 mètres de part et d'autre de l'alignement du boulevard du BAB, de la bretelle d'Aritxague, de la D 932 et voies de raccordement ", d'autre part dans ses dispositions relatives aux dispositifs publicitaires scellés au sol ou installés directement sur le sol (chapitre I-B).

Article 2: Le surplus de la requête de la Chambre Syndicale Française de l'Affichage est rejeté.

Article 3: Les conclusions de la commune d'Anglet tendant à l'application de l'article L. 8-1 du Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel sont rejetées.

Article 4: Le présent jugement sera notifié à la Chambre Syndicale Française de l'Affichage et à la commune d'Anglet.