Livv
Décisions

CA Aix-en-Provence, 5e ch., 10 juin 1992, n° 491-92

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Défendeur :

Ministère public, Gauthrot

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Bujoli

Conseillers :

Mme Aubecq, M. Benard

Avocats :

Mes Chapelin, Boissonnet.

TGI Draguignan, 3e ch. corr., du 28 juin…

28 juin 1991

Par jugement contradictoire à signifier en date du 28 juin 1991, le Tribunal correctionnel de Draguignan a déclaré H Jacques coupable d'avoir :

- à Brignolles, courant 1988 et 1989, et depuis temps non couvert par la prescription :

1° - diffusé une publicité sous la forme d'étiquetages de bouteilles comportant des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur sur un ou plusieurs éléments ci-après : existence, nature, composition, qualités substantielles, teneur en principes utiles, espèce, origine, quantité, mode et date de fabrication, propriétés, prix et conditions de vente de biens ou services qui font l'objet de la publicité, conditions de leur utilisation, résultats qui peuvent être attendus en leur utilisation, motifs ou procédés de la vente ou de la prestation de services, portée des engagements pris par l'annonceur, identité, qualités ou aptitudes du fabricant, des revendeurs, des promoteurs ou des prestataires, en l'espèce : en réalisant des assemblages de vin avant la mise en bouteille,

2° - trompé le contractant sur les qualités substantielles du vin commercialisé, comme " non satisfaisant " et " non conforme " par suite de qualités organoleptiques ne correspondant pas aux types de l'appellation " Coteaux du Giennois " ,

3° - mis en vente un vin sous l'appellation " Coteaux du Giennois " à laquelle il ne pouvait prétendre du fait, notamment, des manipulations frauduleuses pratiquées.

Faits prévus et réprimés par les articles 44 de la loi du 27 décembre 1973, modifiés par la loi du 10 janvier 1978 et article 1er de la loi du 1er août 1905, modifiée, article 8 de la loi du 6 mai 1919.

L'a condamné à la peine de 100 000 F d'amende.

A reçu la Dame Gauthrot en sa constitution de partie civile, a condamné le prévenu à payer à la partie civile la somme de 30 000 F à titre de dommages-intérêts.

Ces appels formés dans le délai légal, doivent être déclarés recevables.

Attendu que le prévenu a comparu à l'audience, assisté de son conseil ; qu'il demande à la cour de prononcer la nullité du jugement en l'absence d'expertise contradictoire ;

Subsidiairement,

Vu l'absence de base légale, de fait matériel, d'intention frauduleuse, il sollicite de la cour que soit prononcé sa relaxe ;

A titre infiniment subsidiaire,

il sollicite que soit ordonnée une expertise contradictoire, laquelle comportera recherche de cépage ;

Qu'en l'absence de préjudice, la SCI Domaine de la Chaise soit déboutée de toutes ses demandes fins et conclusions.

Sur ce :

Sur la publicité mensongère :

Attendu qu'il résulte de la procédure et des débats que, le 17 juin 1991, la SCI Domaine de la Chaise agissant par son représentant légal la Dame Renée Gauthrot, déposait plainte à l'encontre de H ;

Qu'elle exposait que la SCI avait donné en métayage aux époux H une vigne à compter du 1er janvier 1984 ; que ceux-ci commercialisaient le vin sous l'appellation " Château de la Chaise " ; qu'ayant quitté l'exploitation le 5 novembre 1987, H vendait du vin sous l'appellation " Côteaux du Giennois ", avec mise en bouteille du " Château de la Chaise " de la cuvée 1987 ;

Attendu qu'il est constant et non contesté que le prévenu à la suite d'un litige l'opposant à Renée Gauthrot a quitté la SCI Domaine de la Chaise en emportant sa part de récolte lui revenant de la production de 1987, au Domaine X, où il exploite un vignoble ;

Qu'un procès-verbal de constat établissait que deux bouteilles " Château de la Chaise 1987 " achetées à l'établissement Maximarché de Bonny-sur-Loire, le 29 février 1992, portaient l'inscription " mis en bouteille au Château de la Chaise, par H viticulteur " ;

Que le délit de publicité sous la forme d'étiquetage de bouteilles comportant des allégations mensongères est établi, H ne pouvant indiquer une mise en bouteille au Château de la Chaise, pour l'année 1987, alors qu'il avait quitté le domaine en emportant sa part de récolte.

Tromperie sur les qualités substantielles du vin commercialisé :

Attendu qu'il est reproché au prévenu d'avoir vendu un vin sous l'appellation " Côteaux du Giennois ", ne correspondant pas à ce type par suite des qualités organoleptiques non conformes, non satisfaisantes, par suite d'assemblages de vin pratiqués avant la mise en bouteille ;

Attendu qu'à bon droit le prévenu explique que l'assemblage de vin qui lui est reproché ne saurait constituer un délit, que cette opération est différente du coupage où deux vins de qualités différentes sont mélangés, alors qu'en l'espèce il a mélangé plusieurs vins d'une même qualité et d'une même origine afin d'avoir un lot unique ;

Attendu que le délit reproché au prévenu n'est pas constitué, l'énoncé de la citation visant uniquement l'assemblage.

Sur les qualités substantielles du vin " Côteaux du Giennois " :

Attendu qu'un prélèvement de Côteaux du Giennois Rouge 1987 VDQS a été effectué le 14 septembre 1989 au Domaine X ; que le laboratoire administratif a conclu à la non conformité du vin prélevé pour mauvaise qualité organoleptique et avec un filtre alcoolétrique de 10,70 % vol. ;

Attendu qu'il convient de relever que le vin a quitté en vrac le Château de la Chaise à destination de Saint-Maurice de Sadonnay ; qu'il a circulé dans un seul fut de 80 HL avec laissez passé du 3 novembre 1987 ; que l'oxydation du vin est un incident, toujours possible, qui ne saurait être imputé au prévenu ; qu'il en est de même pour l'analyse ayant constaté les variations dans le degré d'alcool, qui ne sortent pas des tolérances admises ; que c'est donc à tort que les premiers juges ont retenu le prévenu dans les liens de la prévention sur ces chefs d'inculpations ; qu'en conséquence, l'expertise non contradictoire ne saurait donner lieu à nullité du jugement, la cour ne retenant pas l'infraction ; que seule la publicité mensongère sera retenue à l'encontre de H, et le jugement confirmé quant à la culpabilité sur la publicité mensongère, et infirmé sur le montant de l'amende.

Sur les dispositions civiles :

Attendu que les premiers juges ont exactement apprécié le montant des dommages-intérêts destinés à réparer le dommage subi par la partie civile ; que la cour confirme le jugement frappé d'appel en ses dispositions civiles.

Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement, contradictoirement, en matière correctionnelle ; En la forme : Reçoit les appels ; Au fond : Confirme sur la culpabilité du chef de publicité mensongère. Emendant, Relaxe H Jacques des autres chefs de prévention ; Condamne le prévenu à une amende de 40 000 F ; Confirme les dispositions civiles du jugement déféré ; Condamne le prévenu aux dépens et prononce la contrainte par corps s'il y a lieu de l'exercer.