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Décisions

CA Rennes, 3e ch. corr., 7 avril 1994, n° 507-94

RENNES

Arrêt

Infirmation partielle

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Philippot

Conseillers :

Mme Algier, M. Le Corre

Avocat :

Me Launay Masse.

TGI Quimper, ch. corr., du 26 oct. 1993

26 octobre 1993

Statuant sur l'appel interjeté par le Ministère public le 27 octobre 1993 d'un jugement contradictoirement rendu le 26 octobre 1993 par le Tribunal correctionnel de Quimper qui, pour publicité mensongère a relaxé X des fins de la poursuite ;

Considérant que l'appel est régulier et recevable en la forme ;

Considérant qu'il est fait grief au prévenu :

- d'avoir à Quimper, le 28 juillet 1992, effectué une publicité comportant des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur sur du matériel hi-fi (cassettes vidéo, cassettes audio, éléments de rangement) qui était fermement annoncé comme soldé à 50 %, d'un bien ou d'un service ;

Infraction prévue et réprimée par les articles 44-I, 44-II alinéa 7, 8, 44-II alinéa 9, 10, 44-II alinéa 6 de la loi n° 73-1193 du 27 décembre 1973 et 1 de la loi du 1er août 1905 ;

- d'avoir à Quimper, le 10 mars 1992, effectué une publicité comportant des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur sur un Rotofil vendu à 177,90 F alors que la publicité affichait un prix de 117,90 F, d'un bien ou d'un service ;

Infraction prévue et réprimée par les articles 44-I, 44-II alinéa 7, 8, 44-II alinéa 9, 10, 44-II alinéa 6 de la loi n° 73-1193 du 27 décembre 1973 et 1 de la loi du 1er août 1905 ;

- d'avoir à Quimper, le 15 mai 1992, effectué une publicité comportant des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur sur de la margarine pour laquelle était fermement annoncé 20 % de produit gratuit, d'un bien ou d'un service ;

Infraction prévue et réprimée par les articles 44-I, 44-II alinéa 7, 8, 44-II alinéa 9, 10, 44-II alinéa 6 de la loi n° 73-1193 du 27 décembre 1973 et 1 de la loi du 1er août 1905 ;

- d'avoir à Quimper, le 26 mai 1992, effectué une publicité comportant des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur sur une cafetière, un sécateur et une lampe halogène non disponibles, une inversion de prix concernant deux bains de soleils et deux radios-réveils, d'un bien ou d'un service ;

Infraction prévue et réprimée par les articles 44-I, 44-II alinéa 7, 8, 44-II alinéa 9, 10, 44-II alinéa 6 de la loi n° 73-1193 du 27 décembre 1973 et 1 de la loi du 1er août 1905 ;

- d'avoir à Quimper, le 5 juin 1992, effectué une publicité comportant des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur sur du melon présenté fermement un melon de Cavaillon, d'un bien ou d'un service ;

Infraction prévue et réprimée par les articles 44-I, 44-II alinéa 7, 8, 44-II alinéa 9, 10, 44-II alinéa 6 de la loi n° 73-1193 du 27 décembre 1973 et 1 de la loi du 1er août 1905 ;

- d'avoir à Quimper, le 21 août 1992, effectué une publicité comportant des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur sur des citrons présentés comme non traités après récolte, d'un bien ou d'un service ;

Infraction prévue et réprimée par les articles 44-I, 44-II alinéa 7, 8, 44-II alinéa 9, 10, 44-II alinéa 6 de la loi n° 73-1193 du 27 décembre 1973 et 1 de la loi du 1er août 1905 ;

Considérant qu'il ressort du dossier et des débats les éléments suivants :

Dans le magasin " Y " à Quimper, il a été constaté :

1) le 28 juillet 1992, qu'un certain nombre d'articles du rayon hi-fi (cassettes vidéo, cassettes audio et éléments de rangement) et des répondeurs téléphoniques, vendus à prix non réduits, étaient présentés avec d'autres articles vendus à prix réduits sous une mention indiquant une réduction de prix de 50 % ;

2) le 10 mars 1992, que l'article " Rotifil Eurovap ", annoncé au prix de 117,90 F dans un catalogue publicitaire intitulé " Chic, les jours rallongent " diffusé à l'extérieur, valable du 4 au 14 mars 1992, et marqué à ce même prix en rayon, était en réalité vendu au prix de 177,90 F ;

3) le 15 mai 1992, que l'article " margarine Fruit d'Or 500 grammes allégée " était vendu avec la mention " 20 % de produit gratuit ", au prix non modifié pratiqué hors promotion, donc sans l'avantage annoncé ;

4) le 26 mai 1992, que :

- les articles " sécateurs ébrancheurs Fiskars ", " cafetières Moka " et " Lampe halogène, annoncés par voie publicitaire, dans un dépliant intitulé " Pour toutes les mamans ", valable du 20 au 30 mai 1992, étaient indisponibles à la vente durant la période de validité de la publicité ;

- deux types de bains de soleil et deux références de radios-réveils étaient vendus à des prix différents de ceux annoncés dans ledit dépliant par suite de l'inversion de leurs prix dans les publicités. Les inversions de prix étaient signalées par des panonceaux portant la mention Erratum dans le magasin ;

5) le 5 juin 1992, que le melon, annoncé dans une publicité intitulé " Kermesse des prix du 1er au 13 juin 1992 " comme provenant de Cavaillon, était en réalité originaire d'Espagne ;

6) le 21 août 1992, que des citrons importés d'Argentine étaient proposés à la vente sous l'indication " sans traitement après récolte " inscrite sur une pancarte alors que l'emballage d'origine mentionnait l'emploi d'un traitement conservateur ;

X est le directeur de ce magasin propriété de Z qui lui en a confié l'entière responsabilité de gestion et qui dans un écrit du 14 juillet 1990 a précisé notamment qu'il pouvait déléguer ses pouvoirs aux cadres et agents de maîtrise du magasin, " selon leurs compétences, en leur donnant les moyens pour exercer ces pouvoirs ". Y est ajouté " Vous veillerez toujours à en contrôler l'application ".

X a délégué ses pouvoirs pour assurer le bon fonctionnement des départements en cause comme suit :

- à Jean-Michel B, chef du département Bazar, statut cadre, salaire de base 18 000 F mensuel,

- à Didier L, chef du département produits frais, statut cadre, salaire de base 21 000 F mensuel,

L'effectif en personnel du magasin varie entre 280 et 300 salariés. L'encadrement et la maîtrise comprennent 47 personnes. Il existe plus de 120 000 références.

Chaque chef du département dispose d'une autonomie pour gérer et administrer son secteur d'activité.

X soutient essentiellement dans ses conclusions qu'en l'espèce, ces délégations régulières l'exonèrent de sa responsabilité pénale.

Par le jugement entrepris, le Tribunal de Quimper a condamné B Jean-Michel et relaxé X ;

Considérant que X a délégué ses pouvoirs aux chefs de département B et Le G par un acte écrit qui prévoit notamment qu'entre dans leurs attributions de prendre toutes mesures et toutes décisions en vue d'appliquer ou de faire appliquer :

- les prescriptions issues de la loi du 1er août 1905 et plus généralement l'ensemble des règles de protection des consommateurs,

- les règles issues de l'ordonnance du 1er décembre 1986,

- la réglementation relative aux ventes sous formes de soldes avec remises et rabais ;

Que dès lors c'est à bon droit que le prévenu peut invoquer cette délégation pour s'exonérer de sa responsabilité pénale en ce qui concerne les faits visés à la prévention commis les 28 juillet, 15 mai et 21 août 1992 puisqu'il appartenait aux chefs de département de veiller au bon étiquetage des produits exposés à la vente ; qu'en effet la délégation de pouvoirs qui leur avait été consentie était valable et leur donnait les moyens propres à l'accomplissement de leur tâche pour laquelle ils avaient la compétence et l'autorité nécessaires ;

Considérant en revanche qu'en matière de publicité mensongère ou de nature à induire en erreur, la responsabilité à titre principal de l'infraction commise échoit à " l'annonceur pour le compte duquel la publicité est diffusée " ; qu'en l'espèce l'annonceur est le responsable légal de l'entreprise Z qui par la délégation des pouvoirs à X engage la responsabilité pénale de ce dernier, sans que celui-ci ne puisse s'en exonérer en invoquant les seules délégations de ses pouvoirs aux chefs de département en application de l'article 44 de la loi n° 73-1193 du 27 décembre 1973; que dès lors D S doit être déclaré coupable des faits commis les 10 mars, 26 mai et 5 juin 1992 pour lesquels la publicité a été effectuée au moyen de catalogues diffusés à l'extérieur du magasin;

Par ces motifs : Statuant publiquement et contradictoirement ; En la forme, Reçoit l'appel du Ministère public, Au fond, Confirme le jugement en ce qu'il a relaxé X pour les faits visés à la prévention commis à Quimper les 28 juillet, 15 mai et 21 août 1992 ; Infirme le jugement pour le surplus, Déclare X coupable des faits visés à la préventions commis à Quimper les 10 mars, 26 mai et 5 juin 1992 ; Le condamne à vingt mille francs d'amende (20 000 F) ; Dit que le présent arrêt sera publié par extrait aux frais du prévenu dans le journal Ouest France, édition de Quimper et dan le journal Le Télégramme de Brest éditions de Quimper sans que chaque insertions excède 3 000 F ; La présente décision est assujettie à un droit fixe de procédure de 800 F dont est redevable le condamné ; Prononce la contrainte par corps.