CA Paris, 25e ch. A, 20 décembre 1994, n° 93-17403
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Sociétés d'éditions et de promotions (SA)
Défendeur :
Radio Nostalgie (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Duvernier (faisant fonction)
Conseillers :
Mme Renard-Payen, M. Faucher
Avoués :
SCP Lagourgue, SCP Régnier
Avocats :
Mes Tramoni, Flambard.
La SA d'Éditions et de Promotions ci-après " SEP " a relevé appel du jugement rendu le 4 juin 1993 par le Tribunal de commerce de Paris (5e chambre) qui dans le litige l'opposant à la SARL Radio Nostalgie, l'a déboutée de ses demandes et l'a condamnée à payer à cette société une indemnité de 20 000 F au titre de l'article 700 du NCPC.
Le 12 juillet 1990, la société SEP agissant en qualité de mandataire de l'Association Stade Rennais FC, a conclu avec la société Radio Nostalgie un contrat de " cosponsoring ".
Aux termes de ce contrat, en contrepartie de diverses opérations publicitaires, la société Radio Nostalgie s'engageait à verser à la SEP par saison, la somme de 1 300 000 F HT plus celle de 1 000 000 F HT d'espaces bruts sur les ondes de Radio Nostalgie Nationale.
Il était prévu à l'article 4 que ce contrat était conclu pour 3 saisons consécutives à compter du 1er juillet 1990 jusqu'au 30 juin 1993 et qu'il se renouvellerait à chaque échéance annuelle, sauf dénonciation, par lettre recommandée de l'une des parties, envoyée à l'autre, 3 mois avant sa date d'échéance annuelle.
Par lettre recommandée en date du 3 avril 1991, la société Radio Nostalgie a dénoncé cette convention avec effet au 12 juillet 1991 en invoquant les stipulations de l'article 4 du contrat.
La SEP qui contestait l'interprétation de cet article qu'en faisait sa cocontractante, a mis en cause la régularité de cette résiliation et assigné la société Radio Nostalgie pour voir constater qu'elle avait dénoncé le contrat de façon abusive et la voir condamner à lui payer 4 600 000 F à titre de dommages-intérêts et 25 000 F sur le fondement de l'article 700 du NCPC.
La défenderesse a résisté à cette action.
C'est dans ces conditions, le tribunal estimant que l'article 4 donnait la possibilité de dénoncer le contrat annuellement à chaque saison de football concernée, qu'a été rendu le jugement précité.
La SEP maintenant son interprétation de l'article 4 du contrat selon laquelle, celui-ci serait conclu pour une durée de 3 ans, sollicite la réformation du jugement et prétendant agir tant en sa qualité de mandataire du Club Rennais qu'en son nom propre, demande à titre principal la condamnation de la société Radio Nostalgie à lui payer 4 600 000 F à titre de dommages-intérêts et à titre subsidiaire, 1 000 000 F outre 30 000 F en vertu de l'article 700 du NCPC.
La société Radio Nostalgie conclut à la confirmation du jugement sauf à la cour de lui allouer 50 000 F de dommages-intérêts pour procédure abusive et 40 000 F sur le fondement de l'article du NCPC.
Sur ce, LA COUR,
Considérant que l'appelante soutient que le tribunal a interprété de façon erronée l'article 4 du contrat qu prévoit de façon claire dans son 1er alinéa que les parties sont liées pour 3 saisons consécutives à compter du 1er juillet 1990 jusqu'au 30 juin 1993 à l'issue desquelles, selon le 2e alinéa, le contrat se renouvellera à chaque échéance annuelle ;
Considérant que l'article 4 du contrat prévoyait :
" Le présent contrat est conclu pour trois saisons consécutives à compter du 1er juillet 1990 jusqu'au 30 juin 1993, que le club opère en 1re ou en 2e division du championnat de France. "
" Il se renouvelle automatiquement à chaque échéance annuelle, sauf dénonciation, par lettre recommandée de l'une des parties envoyée à l'autre, 3 mois avant sa date d'échéance annuelle. " ;
Considérant que contrairement à l'interprétation qu'en donne la SEP, le 2e alinéa ci-dessus rappelé signifie que, dans le cadre des 3 saisons consécutives prévues au 1er alinéa, du 1er juillet 1990 au 30 juin 1993, le contrat " se renouvelle " automatiquement à chaque échéance annuelle, sauf dénonciation ;
Considérant qu'une telle interprétation qui résulte logiquement de la rédaction même de ce texte, est par ailleurs confirmée, pour lever toute ambiguïté que veut y voir l'appelante, par les pourparlers ayant précédé la conclusion de la convention ;
Qu'en effet, le 6 juin 1990, la SEP a adressé à Radio Nostalgie 3 exemplaires du projet de contrat aux termes duquel le 2e alinéa de l'article 4 ainsi rédigé : " Il se renouvellera pour 3 saisons supplémentaires à de nouvelles conditions financières à déterminer en accord avec les parties sauf dénonciation par lettre recommandée de l'une des parties à l'autre, 3 mois au moins avant sa date d'échéance ", a été corrigé de la main de l'ancien directeur gérant de l'intimée qui a remplacé le futur par le présent " se renouvelle ", a ajouté " automatiquement à chaque échéance annuelle ", a rayé les mentions relatives aux 3 saisons supplémentaires et aux nouvelles conditions financières " ;
Que c'est cette nouvelle rédaction du 2e alinéa de l'article 4 qui a été reprise dans le contrat signé par les parties le 12 juillet 1990 et qui ne pouvait laisser à la SEP qui l'avait accepté en connaissance de cause, aucun doute sur l'interprétation à donner aux stipulations contractuelles sur la durée du contrat ;
Considérant que l'appelante soutient encore que la dénonciation intervenue le 3 avril 1991 pour l'échéance 1991/1992 était tardive puisque la date d'échéance était fixée au 30 juin et non à sa date anniversaire du 12 juillet ;
Mais considérant que si la date d'échéance était bien contractuellement fixée au 30 juin, le retard de trois jours avec lequel Radio Nostalgie a adressé la lettre de dénonciation, n'est pas de nature à avoir causé un préjudice quelconque à l'appelante, dans la mesure où le début de la saison ne commençait qu'après le 12 juillet;
Considérant que l'exercice d'une voie de droit, sans autre circonstance, n'est pas abusif et ne saurait entraîner l'octroi de dommages-intérêts sollicités de ce chef par Radio Nostalgie;
Considérant que le tribunal ayant suffisamment indemnisé l'intimée au titre de ses frais irrépétibles, il n'y a pas lieu de lui allouer d'indemnité complémentaire au titre de l'article 700 du NCPC ;
Par ces motifs, Déclare la SEP mal fondée en son appel et la déboute de l'ensemble de ses prétentions ; Confirme le jugement déféré, Rejette la demande de dommages-intérêts de la société Radio Nostalgie ; condamne SEP aux entiers dépens d'appel, admet la SCP Régnier, avoué, au bénéfice de l'article 699 du NCPC.