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Décisions

CA Pau, 1re ch. corr., 5 octobre 1994, n° 94-00377

PAU

Arrêt

Infirmation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Riboulleau (faisant fonction)

Conseillers :

MM. Masson, Laventure

Avocat :

Me Ardauny.

TGI Dax, ch. corr., du 3 juin 1994

3 juin 1994

Rappel de la procédure :

Le jugement :

Le Tribunal correctionnel de Dax, par jugement contradictoire en date du 3 juin 1994, a :

- renvoyé F Philippe des fins de la poursuite sans peine, ni dépens en application des dispositions de l'article 470 du Code de procédure pénale.

(Infraction publicité mensongère ou de nature à induire en erreur, le 7 mai 1993, à Vielle-Saint-Girons, prévue par les articles L. 121-1, L. 121-5, L. 121-6 alinéa 1 du Code de la consommation et réprimée par les articles L. 121-6, L. 213-1 du Code de la consommation).

Les appels :

Appel a été interjeté par :

M. le Procureur de la République, le 9 juin 1994.

F Philippe, prévenu, fut assigné à la requête de M. le Procureur général, par acte en date du 23 août 1994, d'avoir à comparaître devant la cour à l'audience publique du 14 septembre 1994 ;

La Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes fut avisée à la requête de Monsieur le Procureur général, par courrier en date du 27 juin 1994, d'avoir à comparaître devant la cour à l'audience publique du 14 septembre 1994.

Décision :

Vu l'appel régulier interjeté le 9 juin 1994 par le Ministère public à l'encontre de F Philippe, prévenu, d'un jugement contradictoirement rendu par le Tribunal correctionnel de Dax le 3 juin 1994.

Il est fait grief au prévenu F Philippe d'avoir à Vielle-Saint-Girons, le 7 mai 1993 :

- effectué une publicité comportant des allégations, indications ou présentation fausses ou de nature à induire en erreur sur un désinfectant dénommé " X " d'un bien ou d'un service,

(infraction prévue et réprimée par les articles L. 121-1, L. 121-5, L. 121-6 alinéa 1, L. 213-1, L. 121-4 et 121-6 du Code de la consommation - RI 28).

Discussion :

La société Y, dont un département est dirigé par Philippe F, fabrique et commercialise sous le nom " X " un produit désinfectant des sols et surfaces ;

Cette spécialité est conditionnée par sachets de 10 ml comportant, recto et verso, diverses indications : composition, mode d'emploi, et allégations relatives à son activité ;

Il est précisé, dans une présentation attirant particulièrement le regard (fond vert) qu'il est " Actif sur le virus HIV (Sida) et encore qu'il est " Actif sur le virus du Sida (HIV) " à la dose d'emploi préconisée ;

Ces mentions, sur l'activité bactéricide du produit sur le HIV sont d'ailleurs exactes et ont été vérifiées scientifiquement ;

Confronté à des dénonciations émanant d'associations de consommateurs ou de Directions Départementales de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression Des fraudes (Loire-Atlantique - Aisne - Ille-et-Vilaine), Philippe F, qui a fait l'objet d'un procès-verbal de délit dressé par la Direction Départementale des Landes, soutient que, contrairement à ce qui lui est reproché, les indications litigieuses ne peuvent pas induire l'utilisateur en erreur, notamment sur une efficacité du produit sur la maladie du Sida car ce produit n'est commercialisé que dans des circuits ciblés et à l'intention de professionnels, hôpitaux, cliniques, collectivités locales (crèches, écoles...) qui ne l'utilisent que pour ce à quoi il est destiné : nettoyer les sols et surfaces ;

De plus, il affirme que les établissements qui s'adressent à son entreprise exigent des produits ayant des qualités particulières, virucides, bactéricides, actifs aux virus HIV et hépatite B, et produit pour en justifier un appel d'offre des Hôpitaux Publics de Rennes ;

Sur quoi,

Attendu qu'il essentiellement reproché au prévenu d'avoir précisé la mention " Sida " sur ses emballages, se référant ainsi à une maladie déclarée, et non à la seule mention " virus HIV " qui n'est que le vecteur de ladite maladie,

Que cette mention est de nature à faire ou laisser croire que le produit est actif contre la maladie ou que ce désistement permet de s'en protéger ;

Attendu, si la clientèle est " ciblée " exclusivement dans les milieux professionnels de la santé (ce qui n'est d'ailleurs pas exact, puisque des écoles utilisent ce type de produit), que les utilisateurs sont, en fait, non du personnel informé (infirmiers ou médecins) mais de simples agents non qualifiés (agents d'entretien ou techniciens de surfaces),

Qu'ainsi le délit de publicité de nature à induire en erreur est établi,

Que la cour en déclarera Philippe F coupable ;

Mais, attendu qu'il est justifié que, dès qu'il a été entendu par les services enquêteurs, Philippe F a préféré, sans plus attendre, faire modifier les emballages et supprimer la mention " Sida ",

Qu'à l'heure actuelle l'infraction n'existe plus, le trouble qu'elle a causé a cessé,

Que la cour dispensera donc Philippe F de peine ;

Par ces motifs : LA COUR, Statuant publiquement et contradictoirement, En la forme, reçoit le Ministère public en son appel, Au fond, Infirme le jugement déféré, Déclare Philippe F coupable des faits qui lui sont reprochés. Le dispense de peine. La présente décision est assujettie à un droit fixe de procédure d'un montant de 800 F dont est redevable le condamné ; Fixe la contrainte par corps conformément à la loi. Le tout par application du titre XI de la loi du 4 janvier 1993, l'article 132-58 du nouveau Code pénal, les articles L. 121-1, L. 121-5, L. 121-6 alinéa 1 du Code de la consommation et réprimée par les articles L. 121-6, L. 213-1 du Code de la consommation.