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Décisions

CA Versailles, 12e ch. sect. 1, 11 mai 2000, n° 98-00999

VERSAILLES

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Innothera (SA)

Défendeur :

Doms Adrian (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M Gallet

Conseillers :

MM. Raffejeaud, Dragne

Avoués :

SCP Bommart-Minault, SCP Lefèvre-Tardy

Avocats :

Mes de Cande, de Haas.

CA Versailles n° 98-00999

11 mai 2000

Faits et procédure

La société Laboratoire Innothera commercialise depuis 1995, sous la marque Ideos, un produit pharmaceutique se présentant sous forme de comprimés à sucer associant, s'agissant des principes actifs, calcium et vitamine D3.

Elle présente son produit comme couvert par le brevet français n° 94 11380 délivré, avec date de dépôt du 23 septembre 1994, pour une " association thérapeutique vitamino-calcique, son procédé d'obtention et son utilisation ", ainsi que par une demande internationale PCT tendant notamment à l'obtention d'un brevet européen, désignant la France.

La revendication 15 du brevet français vise effectivement une telle " association vitamino-calcique pour combattre l'ostéoporose ".

A la fin de l'année 1996, la société Laboratoire Innothera s'est émue de la délivrance, à la société Doms Adrian, d'une autorisation de mise sur le marché, pour un produit similaire dénommé "Calperos D3".

Dès le 6 janvier 1997, elle lui a fait notifier, par son conseil en propriété industrielle, une mise en garde rappelant l'existence de son titre français et de la demande de brevet européen en instance.

Peu avant d'y répondre, en contestant la validité et en tout cas les conséquences des titres invoqués, la société Doms Adrian l'a informée en ces termes, le 18 mars 1997, des conditions dans lesquelles elle procédait au lancement de son produit :

Dans le cadre du lancement ... d'un calcium associé à une vitamine D3, nous avons décidé de nous positionner à un prix inférieur de 30 % des produits concurrents et leaders de la classe, ayant une même posologie, une même forme pharmaceutique et un même dosage que notre produit Calperos D3.

Un réseau de Visite Médicale informera le corps Médical de notre décision avec un aide visuel, sans que le nom de votre produit y figure.

Dans la mesure où l'on pourrait considérer que votre produit, ldéos, est identifiable, nous vous adressons, ainsi que la loi le prescrirait dans cette hypothèse, copie des pages où il est fait référence, directement ou indirectement, aux leaders du Marché...

Etait effectivement annexée à cette correspondance, la photocopie d'une double page de l'aide visuel évoqué, faisant apparaître, sur l'une la mention "Calperos D3 - La qualité au meilleur coût", sur l'autre les suivantes :

Posologies et formes pharmaceutiques identiques

Les Leaders

Prix Public: 76,50 F

source IMS - source Vidal 96

La qualité au meilleur coût

Calperos D3

30 % moins cher

coût du traitement mensuel : 53,50 F

Le 1er avril 1997, la société Laboratoire Innothera a fait signifier à sa concurrente une sommation réitérant la mise en garde précédemment notifiée et précisant in fine qu'elle " ne saurait accepter le principe d'une commercialisation du produit Calperos D3 et a fortiori qu'une publicité comparative permettant d'identifier son produit, soit effectuée auprès des médecins prescripteurs, notamment par l'intermédiaire des visiteurs médicaux ".

Le jour même, elle recevait de la société Doms Adrian une nouvelle notification, datée du 27 mars, portant cette fois sur le texte d'une annonce publicitaire que l'intéressée se proposait de publier dans la presse médicale, et faisant apparaître les mentions ci-après :

Calcium + Vitamine D3

500 mg 400 UI

Comparons ce qui est comparable

Calperos D3

60 comprimés à sucer 53,50 F

jusqu'à

30 %

moins cher *

* comparaison établie sur le coût de traitement mensuel ou le prix public (source Vidal 1997) des associations contenant l'équivalent de 500 mg de calcium et de 400 UI de cholécalciférol sous la forme pharmaceutique de comprimés à sucer. Cette comparaison fait apparaître des différences de coûts allant de moins 23,3 %, pour les produits mis sur le marché en 1997, à 30 % pour les produits leaders (source G.E.R.S. février 1997).

Cette publicité a paru le 2 avril 1997 dans le Quotidien du Médecin, précédée d'une accroche " 500 mg + 400 UI / jusqu'à - 30 % ". Elle a été réitérée dans la même publication (7, 9 et 10 avril suivants) ainsi que dans la revue Le Généraliste (8 et 1l avril).

Parallèlement à une action en contrefaçon de brevet (14 avril 1997), la société Laboratoire Innothera a alors vainement saisi le juge des référés (ordonnance du 21 avril 1997; arrêt confirmatif du 19 septembre 1997) puis - conjointement avec une société Theramex commercialisant un produit analogue " Orocal D3 " - fait assigner au fond sa concurrente.

C'est dans ces conditions que, par jugement du 19 décembre 1997, le Tribunal de commerce de Nanterre a d'abord retenu que le contentieux entre les parties portait bien sur une publicité comparative, car "les produits de Innothera et Theramex sont identifiables de par la rédaction de ces publicités".

Il a ensuite estimé qu'il y avait lieu de faire application du droit commun de la concurrence déloyale (art. 1382 et suivants du Code civil) et non des articles L. 121-8 à L. 121-14 du Code de la consommation, au premier chef invoqué par la société Laboratoire Innothera.

Le motif a été que ces articles " ne sont pas applicables d'office à la publicité comparative réalisée par les laboratoires à destination des médecins en ce qui concerne les médicaments soumis à prescription médicale, ce qui ne s'oppose pas à ce que les laboratoires ... se conforment volontairement à une démarche éthique de communication avant d'entreprendre une campagne de publicité comparative ".

Le tribunal n'en a pas moins considéré que, sur le terrain du droit commun, la publicité litigieuse n'avait pas été " parfaitement loyale dans les relations entre sociétés responsables " car, s'étant placée sous l'empire des articles précités, la société Doms Adrian se devait d'en respecter les termes.

Sans doute peut-il être admis - a poursuivi en substance le tribunal - qu'il a été satisfait à la condition d'identité des produits, posée auxdits articles, dès lors que " les produits concernés sont essentiellement similaires sinon identiques et ... leurs circuits de distribution ... les mêmes, ainsi que les parties l'ont reconnu ".

S'agissant des autres conditions, il n'en reste pas moins que " si l'information préalable, stricto sensu, a été respectée... elle ne l'a été, tout au moins pour la publicité presse qu'avec un délai extrêmement court ... "; par ailleurs, en fait de caractère loyal et véridique, la publicité litigieuse " comporte la mention " la qualité au meilleur prix " laquelle peut recevoir une interprétation péjorative ou tendancieuse vis-à-vis des demanderesses ".

En conséquence, le tribunal a " dit que les articles L. 121-8 et suivants du Code de la consommation ne sont pas applicables ", " dit que la publicité de SA Doms Adrian n'est pas entièrement loyale ", ordonné à cette dernière " de supprimer de ses publicités la mention " la qualité au meilleur coût ", et condamné la société Doms Adrian " à payer à chacune des sociétés Laboratoire Innothera et Laboratoire Theramex la somme de 15 000 F à titre de dommages-intérêts ".

Appelante de ce jugement, la société Laboratoire Innothera (conclusions du 27 septembre 1999) insiste, à titre liminaire, sur ses investissements lui ayant permis d'apporter au corps médical " la première association vitamino-calcique à dose thérapeutique idéale réalisée au sein d'un seul et même comprimé ", ainsi que sur les titres de propriété industrielle en assurant la protection.

Contrairement à ce qu'a retenu le tribunal - ajoute-t-elle - les publicités litigieuses entrent bien dans le champ d'application des articles L. 121-8 et suivants du Code de la consommation. Et, force serait de constater que la société Doms Adrian s'est affranchie de leur respect, qu'il s'agisse du délai d'information préalable, comme de l'identité des produits (composition; conditionnement ... ) dont les prix sont comparés.

Ne seraient-elles pas soumises aux articles précités, les publicités litigieuses devraient être regardées comme constitutives de concurrence déloyale car la société Doms Adrian aurait profité indûment de ses investissements en recherche-développement, méconnu l'existence du brevet de sa concurrente, prétendu comparer les prix de produits pourtant non identiques et recouru à cet effet à un slogan dénigrant.

La cour devrait donc constater la non-conformité des publicités litigieuses aux dispositions des articles L. 121-8 et suivants du Code de la consommation et en tout cas la concurrence déloyale dont elles procèdent, en interdire la poursuite sous astreinte, ordonner la destruction des aides visuels et la publication de l'arrêt, condamner la société Doms Adrian au paiement de la somme de 1 000 000 F à titre de dommages-intérêts et de 70 000 F au titre de l'article 700 du NCPC.

La société Doms Adrian (conclusions du 18 mars 1999) s'est attachée à réfuter point par point cette argumentation, en mettant au premier chef en doute la validité du brevet invoqué, dont son adversaire serait d'autant moins convaincue qu'elle se serait gardée de solliciter, sur son fondement, une mesure d'interdiction provisoire.

Pour elle, les articles L. 121-8 et suivants du Code de la consommation ne seraient pas applicables, les médecins concernés par 1es publicités ne pouvant être considérés comme des consommateurs et aucun concurrent n'ayant été expressément identifié. De surcroît, ils auraient été respectés, qu'il s'agisse du délai de notification préalable ou du contenu des messages.

Les prétentions de son adversaire ne seraient pas plus fondées sur le terrain du droit commun de la concurrence déloyale, la comparaison portant sur le coût d'un traitement et non de produits, les concurrents n'étant pas identifiables et la preuve n'étant pas rapportée de la moindre indication, fausse, péjorative, dénigrante voire tendancieuse.

Il appartiendrait en conséquence à la cour de confirmer le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a retenu que les publicités litigieuses n'avaient pas été " entièrement loyales ", de le réformer de ce chef, de débouter l'appelante de l'intégralité de ses demandes, et de la condamner au paiement d'une indemnité de 70 000 F au titre de l'article 700 du NCPC.

Il est renvoyé au jugement entrepris et aux conclusions précitées, pour plus ample exposé des faits, de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties.

Sur ce, LA COUR

Sur l'objet du contentieux entre les parties

Considérant que l'affaire dont est saisie la cour s'inscrit dans le cadre d'un contentieux plus large opposant la société Laboratoire Innothera à la société Doms Adrian, en relation avec la commercialisation par cette dernière d'un médicament sous la marque Calperos D3 ;

Qu'en effet, le contentieux met tout à la fois en cause :

- le principe même de cette commercialisation, que la société Laboratoire Innothera dénonce comme portant atteinte aux droits de propriété industrielle qu'elle tient d'un brevet d'invention français (n° 94 11 380 du 23 septembre 1994), ainsi que d'une demande de brevet européen désignant la France ;

- les modalités retenues, et plus précisément le recours à ce qui serait, par rapport à son médicament de marque Ideos mettant en œuvre le brevet, une publicité comparative effectuée en violation des articles L 121-8 et suivants du Code de la consommation (issues de la loi n° 92-60 du 18 janvier 1992 renforçant la protection des consommateurs, dite loi Néiertz) et constitutive, en tout cas, d'une concurrence déloyale (art. 1382 du Code civil) ;

Considérant que le premier point de ce contentieux fait l'objet d'une instance en contrefaçon de brevet, pendante devant le Tribunal de grande instance de Paris, à l'occasion de laquelle la société Doms Adrian a formé une demande reconventionnelle en nullité et, subsidiairement, constatation qu'elle justifie d'une possession personnelle antérieure l'autorisant à exploiter, nonobstant l'existence du titre invoqué ;

Que sont étrangers aux présents débats, les développements que les deux parties y consacrent, bien qu'admettant que la cour n'en est pas saisie; que le contentieux soumis à cette dernière ne peut que rester circonscrit aux messages publicitaires litigieux, à l'exclusion du droit pour la société Doms Adrian de concurrencer son adversaire, même si - provision étant due au titre - le brevet invoqué doit être tenu pour valable aussi longtemps qu'il n'a pas été annulé ;

Qu'il sera à cet égard rappelé que le Code de la propriété intellectuelle attribue compétence exclusive aux tribunaux de grande instance limitativement désignés, pour connaître:

- du contentieux en matière de brevets d'invention (art. L. 615-17); or, la juridiction consulaire, comme la cour de ce siège statuant en appel, ne comptent pas au nombre de ces juridictions; la cour ne saurait donc se substituer au tribunal par ailleurs saisi, pour apprécier la réalité, la validité et la portée du brevet litigieux, comme l'éventuel caractère contrefaisant du produit de la société Doms Adrian ;

- des actions " mettant en jeu une contrefaçon de brevet et une question de concurrence déloyale connexes " (art. L. 615-19); or, la société Laboratoire Innothera a nécessairement entendu exclure toute connexité en choisissant de porter, devant la juridiction consulaire, ce qu'elle- même qualifie partiellement d'action en concurrence déloyale, et qui le reste lorsqu'elle invoque le Code de la consommation ou du Code de la santé publique; en effet, les manquements aux dispositions desdits codes - édictées dans l'intérêt des consommateurs, voire du public - ne sauraient être ici retenus que s'ils constituent également, par le trouble concurrentiel engendré, une faute au sens des articles 1382 et suivants du Code civil ;

Qu'il sera par ailleurs observé que la société Laboratoire Innothera n'a pas sollicité à l'encontre de la société Doms Adrian, comme l'article L. 615-3 du Code précité lui en ouvrait la faculté, une mesure d'interdiction provisoire de poursuivre les actes argués de contrefaçon ;

Sur les dispositions spécifiques invoquées

Considérant qu'en introduction du " Chapitre IV - Réglementation de la publicité ", du titre 1er de son Livre V " Pharmacie ", le Code de la santé publique pose pour principe, en son article L. 551, que:

On entend par publicité pour les médicaments à usage humain toute forme d'information, y compris le démarchage, de prospection ou d'incitation qui vise à promouvoir la prescription, la délivrance, la vente ou la consommation de ces médicaments, à l'exception de l'information dispensée, dans le cadre de leurs fonctions, par les pharmaciens gérant une pharmacie à usage intérieur...;

Qu'il ne fait pas de doute que les publicités litigieuses entrent dans cette définition, qu'il s'agisse des aides visuels remis par la société Doms Adrian à ses visiteurs, pour présenter son médicament aux médecins prescripteurs, ou des annonces dont elle a limité la publication à la presse spécialisée qui leur est propre, comme elle y était d'ailleurs tenue en application de l'article L. 551-3 du Code précité ;

Que toujours en application du même Code, ces publicités doivent notamment satisfaire à l'exigence de son article L. 551-1 selon lequel: " la publicité définie à l'article L. 551 ne doit pas être trompeuse ni porter atteinte à la protection de la santé publique. Elle doit présenter le médicament ou le produit de façon objective et favoriser son bon usage " ;

Considérant que, de son côté, le Code de la consommation prohibe d'une manière générale, en matière de publicité, toute allégation, indication ou présentation fausse ou de nature à induire en erreur (art. L. 121 et suivants) ; que, s'agissant de la publicité comparative, il énonce en son article L. 121-8 que:

La publicité qui met en comparaison des biens ou services en utilisant soit la citation ou la représentation de la marque de fabrique, de commerce ou de service, soit la citation ou la représentation de la raison sociale ou de la dénomination sociale, du nom commercial ou de l'enseigne d'autrui n'est autorisée que si elle est loyale, véridique et qu'elle n'est pas de nature à induire en erreur le consommateur. Elle doit être limitée à une comparaison objective qui ne peut porter que sur des caractéristiques essentielles, significatives, pertinentes et vérifiables de biens ou services de même nature et disponibles sur le marché. Lorsque la comparaison porte sur les prix, elle doit concerner des produits identiques vendus dans les mêmes conditions et indiquer la durée pendant laquelle sont maintenus les prix mentionnés comme siens par l'annonceur. La publicité comparative ne peut pas s'appuyer sur des opinions ou des appréciations individuelles ou collectives ;

Qu'il précise notamment que l'annonceur " avant toute diffusion.communique l'annonce comparative aux professionnels visés, dans un délai au moins égal à celui exigé, selon le type de support retenu, pour l'annulation d'un ordre de publicité " (Art. L. 121-12) ;

Que rien ne justifierait, ni de donner un sens différent au terme " publicité ", selon l'un ou l'autre des deux Codes précités (santé publique, d'une part, consommation, d'autre part), ni d'exclure du champ d'application du second, les publicités comparatives à destination exclusive des médecins prescripteurs, peu important qu'ils ne soient pas les consommateurs finaux ;

Qu'en effet, les textes n'invitent nullement à de telles distinctions;que, s'agissant de la publicité comparative, un amendement tendant à exclure expressément les médicaments, a été présenté lors des débats parlementaires ayant précédé l'adoption de la loi précitée n° 92-60 du 18 janvier 1992, dont sont issues les dispositions ci-dessus rappelées; qu'il a été écarté;

Qu'au demeurant, une telle exclusion priverait les dispositions correspondantes d'une partie de leur efficacité, les médecins prescripteurs - confrontés aux pressions sans cesse croissantes des organismes sociaux - étant de plus en plus sensibles aux arguments de prix et exposés à devenir les intermédiaires involontaires d'une tromperie, en définitive subie par le consommateur final dont il détermine l'achat, tout particulièrement en cas d'affirmation péremptoire que deux médicaments, nommément désignés, sont identiques ;

Sur les messages publicitaires litigieux

Considérant que la société Laboratoire Innothera fait d'abord grief à la société Doms Adrian de s'être livrée à une publicité comparative, en violation des articles L. 121-8 et suivants du Code de la consommation, en présentant son médicament de marque " Calperos D3 " comme entraînant, pour le traitement qu'il permet, une économie de 30 % par rapport aux produits " leaders " du marché ;

Qu'il apparaît cependant que les messages litigieux n'entrent pas dans les prévisions de ces articles qui ne concernent que les publicités comparatives citant la dénomination, marque ou autre signe distinctif du concurrent; que c'est vainement que l'on chercherait, dans celles critiquées, la citation de la société Laboratoire Innothera ou de sa marque Ideos;

Que sans doute doit-il être admis que la citation peut être implicite; qu'elle doit alors s'imposer à l'évidence; que force est ici de constater qu'elle ne s'infère nullement des messages, à la date des faits (1997) et pour les professionnels de santé concernés, dès lors que :

- les principes actifs mis en avant(cholécalciférol à une concentration de 400 UI ; carbonate de calcium à une concentration en calcium éléments de 500 mg) renvoyaient à pas moins de cinq autres marques, s'ajoutant à celle présentée: Cacit Vit 03, Calcidose Vit D3, Ideos, Orocal Vit D3 et Densical Vit 03 ;

- il n'est pas établi que la référence faite aux " leaders " (au pluriel), ne pouvait qu'être aussitôt associée au médicament que la société Laboratoire Innothera distribue sous la marque " Ideos ", les quelques pièces produites n'établissant pas sa position prépondérante sur le marché(qu'implique la référence précitée), qu'il s'agisse notamment des publicités limitées dont il est justifié, de l'avis émis en 1994 par la Commission de la transparence ou des 259 voix sur 1823 obtenues pour la distinction Medec 1996 ;

- les indications données se limitaient à un simple positionnement général du médicament présenté, par rapport à ceux de la concurrence, sur le terrain du coût des traitements, tel que résultant des documents de référence en possession des professionnels (dictionnaire Vidal) et auxquels ces derniers étaient implicitement invités à se reporter ;

- aucune conséquence ne saurait être tirée de la précaution prise par la société Doms Adrian de communiquer à toutes fins ses projets de publicité à la société Laboratoire Innothera, en l'état des incertitudes qui existaient sur l'application des articles L. 121-8 et suivants du Code de la consommation, ainsi que de la connaissance personnelle, qu'elle avait du produit de l'intéressée ;

Considérant que c'est exclusivement sur le terrain du droit commun de la concurrence déloyale (art. 1382 et suivants du Code civil) que doit être recherchée une éventuelle faute de la société Doms Adrian, celle-ci pouvant notamment résulter (par le trouble concurrentiel engendré) de la violation des autres dispositions du Code de la consommation, voire de celles du Code de la santé publique ;

Qu'à une exception près, les critiques articulées à l'encontre de la société Doms Adrian apparaissent infondées ; qu'en effet :

- le positionnement général de son médicament, par rapport à ceux de la concurrence, se limite à des produits essentiellement similaires sinon identiques : mêmes principes actifs et dosage, mêmes indications thérapeutiques, même posologie, même forme gallénique, même nombre de comprimés par conditionnement; les seules différences portent sur des caractéristiques secondaires, tels qu'excipients, subdivision de conditionnement, goût... ;

- les informations données ne sont, ni fausses, ni susceptibles d'induire en erreur, compte tenu surtout des destinataires (médecin) dont l'acte réflexe est de toujours se reporter (notamment pour les contre indications) à la fiche posologique, en l'espèce communiquée lors des visites et dont le contenu figurait, pour l'essentiel, dans le texte des annonces ;

Que l'exception concerne le slogan " la qualité au meilleur coût ", mis en exergue dans l'aide visuel remis aux visiteurs médicaux et opportunément remplacé, dans les annonces, par celui de " comparons ce qui est comparable ";

Qu'en effet, il apparaît ambigu, comme pouvant donner à penser que les médicaments concurrents n'atteignent pas le même niveau de qualité, bien qu'étant plus cher;que s'agissant d'une appréciation non exempte de subjectivité, il enfreint en tout cas l'obligation que l'article L. 551-1 du Code de la santé publique fait aux annonceurs, en matière de médicaments, de présenter ces dernier " de façon objective ";

Que ce manquement justifie la condamnation limitée, prononcée par les premiers juges ;

Sur les demandes des parties

Considérant que la société Laboratoire Innothera sera donc déboutée de son appel, la société Doms Adrian de son appel incident, et le jugement entrepris confirmé, sauf en ses motifs contraires au présent arrêt ;

Que la partie qui succombe doit supporter les dépens; que ni l'équité, ni la situation économique des parties ne justifient qu'il soit fait exception à l'application de l'article 700 du NCPC, afférent à la charge des frais non compris dans les dépens ;

Par ces motifs, LA COUR Statuant Publiquement, Contradictoirement et en dernier ressort, reçoit la Société Laboratoire Innothera en son appel, la société Doms Adrian en son appel incident, les en déboute, confirme le jugement entrepris, condamne la société Laboratoire Innothera à payer à la société Doms Adrian une somme de 15 000 F au titre de l'article 700 du NCPC.