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Décisions

CA Paris, 13e ch. B, 9 juin 1999, n° 96-07566

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Paul

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Sauret

Conseillers :

Mme Marie, M. Seltensperger

Avocat :

Me Rey.

TGI Paris, 31e ch., du 1er oct. 1996

1 octobre 1996

Rappel de la procédure :

La prévention :

G Jean-Yves est poursuivi pour avoir à Paris et en région parisienne, courant 1993,

- effectué une publicité comportant des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur sur la nature, les qualités substantielles et l'origine de vérandas vendues, les qualités des prestations en apposant sur les bons de commande et les documents publicitaires la marque Zonneranda sans être le dépositaire de cette marque et alors qu'il vendait des vérandas de marque Vérandalys,

- après avoir démarché Monsieur Paul à son domicile, à sa résidence, à son lieu de travail, exigé ou obtenu de lui, directement ou indirectement, une contrepartie ou un engagement en l'espèce la remise d'un chèque de 30 000 F.

Le jugement :

Le tribunal, par jugement contradictoire, a déclaré G Jean-Yves Coupable de publicité mensongère ou de nature à induire en erreur, faits commis courant 1993, à Paris et sa région, infraction prévue par les articles L. 121-1, L. 121-5, L. 121-6, alinéa 1 du Code de la consommation et réprimée par les articles L. 121-6, L. 213-1 du Code de la consommation.

Coupable de demande ou obtention de paiement ou d'accord avant la fin du délai de réflexion - démarchage, faits commis courant 1993, à Paris et sa région, infraction prévue par l'article L. 121-28, L. 121-26 du Code de la consommation et réprimée par l'article L. 121-28 du Code de la consommation et, en application de ces articles, l'a condamné à 6 mois d'emprisonnement et à une amende de 50 000 F,

L'a condamné (solidairement avec M. B) à payer à M. Paul la somme de 100 000 F à titre de dommages et intérêts,

a dit que cette décision est assujettie au droit fixe de procédure de 600 F dont est redevable le condamné.

Les appels :

Appel a été interjeté par :

- M. le Procureur de la République, le 3 octobre 1996 contre Monsieur Jean-Yves G,

- Monsieur G Jean-Yves, le 3 octobre 1996 contre Monsieur Paul Gérard,

- Monsieur Paul Gérard, le 16 octobre 1996 contre Monsieur Jean-Yves G.

Par arrêt en date du 26 novembre 1997 cette chambre a renvoyé l'affaire avec citation des parties au mercredi 29 avril 1998 à 9 heures.

Par arrêt contradictoire en date du 10 juin 1998, cette chambre

- a confirmé le jugement déféré sur la culpabilité de G Jean-Yves,

- a dit n'y avoir lieu à désignation d'un expert,

- a ajourné le prononcé de la peine au mercredi 18 novembre 1998 à 9 heures,

- a dit que cette décision est assujettie au droit fixe de procédure de 150 F dont est redevable le condamné.

A l'audience du 18 novembre 1998, le prononcé de la peine a été à nouveau ajourné au mercredi 5 mai 1999.

Décision :

Rendue contradictoirement après en avoir délibéré conformément à la loi,

G. Jean-Yves a interjeté appel le 3 octobre 1996, le Ministère public a interjeté appel incident le 3 octobre 1996, Paul Gérard, partie civile, a interjeté appel le 16 octobre 1996 des dispositions d'un jugement contradictoire rendu le 1er octobre 1996 par le Tribunal de grande instance de Paris l'ayant condamné à 6 mois d'emprisonnement et à une amende de 50 000 F et à payer solidairement la somme de 100 000 F à Paul Gérard pour avoir à Paris et dans la région parisienne, courant 1993,

- effectué une publicité comportant des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur sur la nature, les qualités substantielles et l'origine de vérandas vendues, les qualités des prestations en apposant sur les bons de commande et les documents publicitaires la marque Zonneranda sans être les dépositaires de cette marque et alors qu'il vendait des vérandas de marque Vérandalys,

- après avoir démarché Monsieur Paul à son domicile, à sa résidence, à son lieu de travail, exigé ou obtenu de lui, directement ou indirectement, une contrepartie ou un engagement, en l'espèce la remise d'un chèque de 30 000 F.

G Jean-Yves expose à la cour que les préventions mises à sa charge ne sont pas établies. Il sollicite sa relaxe et demande la désignation d'un expert qui sera chargé de se rendre sur les lieux, convoquer les parties, dire en motivant son appréciation si la véranda placée est de qualité équivalente, supérieure ou inférieure à celle commandée, d'examiner les devis et décrire les éventuels inachèvements, vices ou malfaçons, le cas échéant, d'évaluer le coût et la durée des réparations ou calculer la moins-value de prix réellement payé ;

Il fait valoir à la cour qu'il apparaît que Paul Gérard a passé commande d'une véranda auprès d'un vendeur de la société X, le sieur L, qu'il semble avoir été remis à ce client de la documentation concernant une véranda de marque Zonneranda et que la commande porte sur une véranda de cette marque ;

Qu'il ne connaît pas les raisons pour lesquelles une véranda de marque Vérandalys a été livrée au lieu et place de la véranda de marque Zonneranda, qu'il a été alerté de l'existence d'un problème par l'intermédiaire du personnel de la société qui recevait d'incessants appels téléphoniques du client mécontent et n'arrivait pas à joindre Monsieur B ;

Qu'en désespoir de cause, il a pris contact avec Paul Gérard sans pouvoir lui donner aucune explication et a tenté de trouver une solution puisqu'il semblait que la véranda, bien que de marque différente de celle commandée, présentait des caractéristiques semblables sinon meilleures ; que dans la déclaration de cessation de paiement déposée au greffe du Tribunal de commerce de Paris, l'administrateur judiciaire mentionne en qualité de personne responsable solidairement tenue des dettes sociales, M. B ;

Qu'il apparaît de documents transmis par la société X que celle-ci représentait bien la marque Zonneranda en France ; dès lors, outre le fait que la responsabilité personnelle de M. G ne peut être recherchée en l'espèce, il apparaît que la prévention n'est pas établie ; qu'à aucun moment, il n'a démarché M. Paul à son domicile ni ne s'est fait remettre aucune somme par celui-ci ; que le démarchage a été réalisé par un délégué commercial de la société X, dont il n'était que l'actionnaire ; que les fonds ont été remis à un autre représentant ; qu'il ne peut donc être tenu personnellement des actes des préposés de la société X, ni des actes de cette société, n'ayant à aucun moment eu la direction de cette entreprise ;

Il soutient que la véranda placée, bien que de marque différente, présente des caractéristiques semblables mais plus performantes que celle commandée, il sollicite en conséquence la désignation d'un expert ;

Le Ministère public soutient que G Jean-Yves est l'actionnaire principal de la société X, que Paul Gérard a passé commande d'une véranda auprès d'un représentant qualifié de cette société ; qu'il lui a été livré une Vérandalys en lieu et place d'une Zonneranda, que les travaux ont commencé, mais n'ont jamais été achevés, bien qu'ils aient été payés ; qu'il demande en conséquence à la cour d'ajourner sa décision pour permettre à G d'en achever la finition ;

Paul Gérard, qui sollicite la confirmation du jugement entrepris, de dire et juger G Jean-Yves coupable des faits qui lui sont reprochés, de lui allouer la somme de 100 000 F à titre de dommages et intérêts et en outre la somme de 15 000 F en application de l'article 475-1 du Code de procédure pénale ;

Il expose que dans le courant de l'année 1993, au vu de différents documents publicitaires, il a décidé de procéder auprès de la société X à la commande d'une véranda de marque Zonneranda Soleranda ; qu'il lui était livré les éléments d'une véranda de marque Vérandalys, marque inconnue et sans garantie du constructeur ; qu'il résulte des éléments du dossier que c'est bien G Jean-Yves qui gérait de fait la société, qu'il a pris les initiatives nécessaires pour la désignation d'un administrateur légal et le dépôt de bilan ; qu'il apparaît, d'après les éléments versés par la défense que G Jean-Yves en était le gérant de fait ;

Qu'enfin, en s'obstinant à soutenir que la société X a effectivement prétendu, notamment à la Foire de Paris de l'année 1993, représenter la société Zonneranda alors que les documents versés par G Jean-Yves démontrent le contraire et confirment la réalité de la publicité mensongère et la volonté délibérée d'organiser celle-ci au mépris du véritable titulaire du droit d'exploitation de la marque et du produit, au préjudice du client ;

Que si G Jean-Yves et la société X avaient été effectivement représentants de la société Zonneranda, on voit mal pour quelle raison ils n'auraient pas livré une véranda de cette marque ; en raison du préjudice qu'il a subi, M. Paul demande la confirmation du jugement sur les intérêts civils ;

Le 5 mars 1993, M. Paul a commandé à M. L, représentant de la société X [adresse], une véranda sophistiquée de marque Zonneranda-Soleranda au prix de 95 000 F TTC ;

Il a payé 30 000 F à la commande, puis 30 000 F le 2 avril, 15 000 F le 5 mai et 15 000 F le 13 juillet 1993 soit au total 90 000 F ;

X ne terminant pas l'installation de la véranda malgré deux courriers recommandés adressés à cet effet par M. Paul, celui-ci s'est adressé le 18 août 1993 à la société Europvéranda, concessionnaire de la marque Zonneranda-Soleranda. Il a alors appris que la véranda livrée par X était en réalité de marque Vérandalys ;

La société belge Zonneranda confirmait par courriers des 18 et 23 août 1993 n'avoir jamais conclu avec la société X aucun contrat l'autorisant à utiliser ses marques (Soleranda étant la marque des produits Zonneranda diffusés en France) et n'avoir jamais reçu commande d'une véranda de la part de cette société ;

Les recherches effectuées ont révélé que la SA X, immatriculée au registre du commerce et des sociétés le 14 janvier 1993, avait pour activité déclarée le négoce de tous produits se rapportant aux vérandas. Son président-directeur-général était René B, de nationalité belge, sans domicile connu ;

L'adresse du siège social correspondait à celle de la Chambre de Commerce belgo-luxembourgeoise ;

L'activité de la société se déroulait en réalité dans des vérandas d'exposition à Plaisir, sous la direction de Jean-Yves G, principal actionnaire d'X. C'est lui qui embauchait et contrôlait les salariés. C'est également à lui que M. Paul avait demandé de terminer ses travaux ;

Les salariés d'X ont expliqué avoir été brutalement licenciés fin juillet 1994 après avoir trouvé porte close en venant à leur travail ;

Jean-Yves G a demandé le 4 mai 1994 au Tribunal de commerce de Paris la désignation d'un administrateur judiciaire. Désigné le 10 mai 1994, M. Baronne a procédé le 15 novembre 1994 à la déclaration de cessation des paiements, la liquidation judiciaire de la société étant prononcée le 29 novembre 1994 ;

En l'absence de comptabilité, le passif était évalué à 145 723, 19 F français et 56 897 F belges ;

M. Paul a commandé une véranda à la société X après avoir reçu d'un représentant de cette société, au salon du bricolage puis à son domicile, une documentation sur les vérandas Zonneranda ou Soleranda portant le cachet X, cette société n'hésitant pas à se présenter comme " votre agent de Zonneranda " ;

La seule marque apparaissant sur le bon de commande signé par M. Paul par M. L, représentant d'X, le 5 mars 1993 est la marque Zonneranda ;

En diffusant des documents les laissant apparaître comme des revendeurs de la marque Zonneranda alors qu'ils n'avaient aucun accord de distribution avec ce constructeur et vendaient en réalité des vérandas de marque Vérandalys, les prévenus se sont rendus coupables des faits qui leur sont reprochés ;

Il n'est pas contesté que c'est après avoir connu la société X au Salon du Bricolage que M. Paul a reçu à son domicile la visite d'un représentant de cette société le 5 mars 1993 ;

M. Paul a passé commande le jour même, versant immédiatement un acompte de 30 000 F ;

En percevant cet acompte sans attendre l'expiration du délai de rétractation de sept jours, le prévenu s'est rendu coupable de l'infraction aux dispositions de l'article L. 121-26 du Code de la consommation qui leur est reprochée ;

Il résulte des différents éléments que G Jean-Yves se reconnaît impliqué dans l'installation d'une véranda Vérandalys au domicile de Paul Gérard,qu'il a accepté de terminer les travaux entrepris,que la désignation d'un expert n'est pas nécessaire, qu'il convient en conséquence de le déclarer coupable des faits objets de la prévention, publicité mensongère ou de nature à induire en erreur, demande ou obtention de paiement ou d'accord avant la fin du délai de réflexion, au cours d'une opération de démarchage ;

Que la cour a ajourné le prononcé de la peine au 18 novembre 1998 ; qu'à cette date, Paul Gérard a indiqué être en pourparlers avec Jean-Yves G ; que la cour a ajourné une seconde fois au 5 mai 1999 ; que Gérard Paul a fait connaître que les travaux de sa véranda étaient toujours au même point ;

Que G Jean-Yves a largement abusé de la clémence de la cour ; qu'il a été déjà condamné à un an d'emprisonnement par défaut par le Tribunal correctionnel de Grasse ;

Par ces motifs, LA COUR, statuant publiquement et contradictoirement, Vu l'arrêt en date du 10 juin 1998, Condamne G Jean-Yves à un an d'emprisonnement ; Décerne mandat d'arrêt à son encontre, Le condamne à payer la somme de 100 000 F à titre de dommages et intérêts et en outre la somme de 5 000 F en application des dispositions de l'article 475-1 du CPP. Dit que cette décision est assujettie au droit fixe de procédure de 800 F dont est redevable le condamné.