CA Besançon, ch. corr., 27 avril 1999, n° 401
BESANÇON
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Bouvier, Association Franche-Comté Consommateurs
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Waultier (faisant fonction)
Conseillers :
M. Perron, Mme Vignes
Avocats :
Mes Pillot-Quenot, Perrin.
Par déclarations en date du 29 juin 1998, M. M ainsi que le Procureur de la République de Belfort ont régulièrement interjeté appel du jugement rendu le 24 juin 1998 par le Tribunal correctionnel de Belfort qui a :
Sur l'action publique
- déclaré M. M Jean-Michel coupable des faits qui lui sont reprochés,
- condamné M Jean-Michel à la peine d'amende de 50 000 F,
- ordonné aux frais du condamné la publication par extrait (prévention et dispositif) de la présente décision dans les journaux " L'Est Républicain " et " Le Pays de Franche-Comté ",
- dit que les coûts de ces publications ne devra pas dépasser la somme de 5 000 F par insertion.
Sur l'action civile
- reçu Mme Bouvier Monique en sa constitution de partie civile,
- déclaré M. M Jean-Michel responsable du préjudice subi par Mme B Monique,
- condamné M. M Jean-Michel à payer à Mme Bouvier Monique la somme de 5 000 F à titre de dommages-intérêts,
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire des dispositions civiles du jugement,
- reçu l'association Franche-Comté Consommateurs en sa constitution de partie civile,
- déclaré M. M Jean-Michel responsable du préjudice subi par l'association Franche-Comté Consommateurs,
- condamné M. M Jean-Michel à payer à l'association Franche-Comté Consommateurs la somme de 1 000 F à titre de dommages-intérêts,
- et au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale, la somme de 1 500 F.
LA COUR, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu l'arrêt suivant :
1° - Procédure et prétentions des parties
Cité à domicile, M. M, n'a pas signé l'accusé de réception prévu par les dispositions légales, présent et assisté de son avocat, il sollicite à titre principal sa relaxe au motif qu'il a déjà été poursuivi et condamné pour la même opération publicitaire par le Tribunal correctionnel de Paris.
Sur le fond, et à titre subsidiaire, il conteste la constitution de l'infraction qui lui est reprochée.
La société X, représentée par son liquidateur amiable M. M conclut aux même fins.
Le Ministère public requiert la confirmation de la décision.
Mme Bouvier, partie civile, régulièrement citée, représentée par son avocat, sollicite la confirmation de la décision déférée et le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire.
L'Association Franche-Comté Consommateurs, régulièrement citée n'a pas comparu.
2° - Prévention
M Jean-Michel est prévenu d'avoir à Belfort et Creil, du 23 décembre 1996 au 30 janvier 1997, effectué une publicité comportant des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur sur la portée des engagements pris par l'annonceur en l'espèce en ayant adressé un document publicitaire à Mme Monique Bouvier lui indiquant qu'elle avait gagné le premier prix de 33 000 F contrairement à la réalité (NAT. n° 193).
Fait prévu et réprimé par les articles L. 121-1, L. 121-5, L. 121-6, L. 121-6 al. 1, L. 213-1 et L. 121-4 du Code de la consommation.
3° Discussion
Sur l'action publique
Le 10 juillet 1997, Monique Bouvier déposait plainte à l'encontre de la société X, relatant avoir reçu de cette société le 26 décembre 1996 des documents publicitaires lui annonçant qu'elle avait gagné le 1er lot à savoir un chèque de 33 000 F et auquel étaient joints un communiqué officiel comportant le règlement du jeu et un bon de commande couplé à un bon de participation.
Elle précisait avoir renvoyé le bon de participation et que contrairement à ses engagements, l'annonceur ne lui avait jamais fait parvenir la somme promise.
Entendu, M. M, PDG de la société X expliquait que l'article 6 du règlement du jeu " grand tirage de la chance " mentionnait 6 prix présentés dans leur ordre de valeur croissant à savoir :
1er prix : 5 enveloppes vides décorées destinées à envoyer du courrier (5 F)
2e prix : 3 enveloppes contenant un chèque de 5 000 F
3e prix : 1 enveloppe contenant un chèque de 10 000 F
le gros lot : 1 enveloppe contenant un chèque de 33 000 F,
que ce gros lot n'était pas le premier prix.
Il produisait un procès-verbal d'huissier du 26 novembre 1996 constatant le pré-tirage au sort des gagnants.
Sur quoi,
Attendu qu'il est justifié que pour l'opération publicitaire " Grand tirage de la chance " menée courant novembre 1996, M. M a fait l'objet de poursuites et a été condamné le 6 novembre 1997 par le Tribunal correctionnel de Paris pour publicité trompeuse de nature à induire en erreur ;
Attendu que le délit de publicité de nature à induire en erreur, constitue une infraction unique, même s'il se manifeste lors de chaque communication au public de la publicité, qui ne peut être poursuivie et sanctionnée qu'une seule fois, dès lors qu'il s'agit d'allégations identiques, contenues dans le même message publicitaire et diffusées simultanément(Crim. 08/12/1987) ;
Or, attendu que l'enveloppe publicitaire reçue par la plaignante le 26 décembre 1996 contenait un message publicitaire et des allégations strictement identiques à celles de la publicité sanctionnée par le Tribunal correctionnel de Paris,qu'elle a également été diffusée au cours de la même période ;que dès lors il convient de constater l'extinction de l'action publique par l'effet de la chose jugée et d'entrer en voie de relaxe ;
Sur l'action civile
Attendu qu'eu égard à ce qui précède, les parties civiles doivent être déclarées irrecevables en leurs actions ;
Attendu qu'il convient toutefois d'accorder à Mme Bouvier le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;
Par ces motifs, LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire à l'égard de M. M et de Mme Bouvier, par arrêt contradictoire à signifier à l'égard de l'association Franche-Comté Consommateurs. Déclare les appels recevables, Sur l'action publique, Constate l'extinction de l'action publique et en conséquence relaxe M. M des fins de la poursuite. Sur l'action civile, Constate l'irrecevabilité de l'action civile, Accorde à Mme Bouvier le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire.