Ministre des Finances, 26 septembre 1996, n° FCEC9610472Y
MINISTRE DES FINANCES
Lettre
PARTIES
Demandeur :
MINISTRE DES FINANCES
Défendeur :
Conseil des sociétés Champi-Jandou et Royal Champignon
MINISTRE DÉLÉGUÉ AUX FINANCES ET AU COMMERCE EXTÉRIEUR
Maître,
Par dépôt de dossier dont il a été accusé réception le 21 août 1996, vous m'avez notifié le projet d'acquisition des activités de production de semences, de culture, de transformation et de commercialisation de champignons de Paris du groupe Royal Champignon par le groupe Champi-Jandou.
Cette opération, en tant qu'elle entraîne transfert de propriété et de jouissance, au profit du groupe Champi-Jandou, des activités et actifs des deux groupes susvisés, constitue une opération de concentration au sens de l'article 39 de l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986.
Elle n'est pas contrôlable au regard des seuils en valeur absolue définis par l'article 38 de l'ordonnance précitée, les entreprises parties à l'acte réalisant en France un chiffre d'affaires cumulé inférieur à 7 milliards de francs. II convient donc de rechercher si le seuil en valeur relative prévu par ce même article est atteint, - ce qui suppose de définir le ou les marché(s) pertinent(s).
En l'espèce, le marché des champignons de Paris se divise en cinq secteurs affectés par l'opération : le frais, l'appertisé, le surgelé, le pasteurisé et le lyophilisé. Ces cinq secteurs se caractérisent par des modes de production et des débouchés différents et constituent de ce fait autant de marchés pertinents.
Les ventes en France réalisées par le nouvel ensemble dans les secteurs de l'appertisé, du surgelé et du pasteurisé sont largement supérieures au seuil de 25 %.
Le seuil en valeur relative prévu par l'article 38 de l'ordonnance est donc dépassé.
En dépit des fortes positions du nouveau groupe, cette opération n'est toutefois pas de nature à porter atteinte à la concurrence, compte tenu des éléments suivants :
- le marché économiquement pertinent est de dimension européenne et caractérisé par l'absence de barrières liées à la technologie, à l'image de marque ou aux coûts de transport;
- les producteurs nationaux sont d'ores et déjà confrontés à la pression concurrentielle des importations, notamment celles en provenance des Pays-Bas et de l'Espagne qui ont entraîné une baisse constante des prix ces dix dernières années et qui se sont accrues de 280 % entre 1994 et 1996;
- le nouveau groupe ne sera pas en mesure de mener une politique tarifaire indépendante de ses concurrents, sous peine d'être immédiatement sanctionné par le marché;
- la demande émane pour l'essentiel de la grande distribution, qui dispose d'une réelle puissance de négociation, et de groupes industriels nationaux ou internationaux en mesure de diversifier leurs sources d'approvisionnement à une échelle européenne dans l'hypothèse où les prix de la nouvelle entité ne seraient plus attractifs.
Au surplus, l'opération doit permettre d'améliorer la compétitivité de la filière et d'en faciliter les rationalisations, dans un contexte de très forte pression concurrentielle des producteurs étrangers.
Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, je vous informe qu'il n'est pas dans mon intention de saisir le Conseil de la concurrence de cette opération.