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Décisions

Comm. CE, 6 février 1998, n° M.1096

COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

Décision

Société Générale/Hambros Bank

Comm. CE n° M.1096

6 février 1998

Le 7 janvier 1998, la Commission a reçu une notification d'un projet d'opération par lequel la banque française Société Générale acquiert auprès de la société britannique Hambros PLC le contrôle de trois sociétés: Hambros Bank Limited (située au Royaume Uni), Hambros America Incorporated (Etats Unis d'Amérique) et Banque Rüegg AG (Suisse). Après examen de cette notification, la Commission a abouti à la conclusion que l'opération notifiée entre dans le champ d'application du règlement du Conseil n° 4064-89 et ne soulève pas de doutes sérieux quant à sa compatibilité avec le Marché commun et le fonctionnement de l'Accord EEE.

I. LES PARTIES

La Société Générale est un établissement de crédit français. Elle est active dans la plupart des services financiers et banquiers. Hambros Bank a comme activités principales le "private banking", la banque commerciale et la banque d'investissement. Hambros America est une banque d'investissement. Banque Rüegg est uniquement active dans le "private banking".

II. L'OPERATION

L'opération consiste en l'acquisition par la Société Générale auprès de Hambros PLC de l'entièreté du capital social de Hambros Bank, de la totalité des actions de Hambros America qui ne sont pas déjà détenues par Hambros Bank et de la totalité des actions de la Banque Rüegg détenues par Hambros PLC (soit 63 % du capital social de Rüegg).

III. CONCENTRATION DE DIMENSION COMMUNAUTAIRE

Une fois la transaction réalisée, la Société Générale détiendra la totalité du capital de Hambros Bank, Hambros America et le contrôle à hauteur de 63 % de Rüegg. L'opération constitue donc une concentration au sens de l'article 3 paragraphe 1 lettre b) du règlement n° 4064-89. L'ensemble réalise un chiffre d'affaires de l'ordre de 27 milliards d'écus et les cibles, Hambros Bank, Hambros America et Banque Rüegg un chiffre d'affaires de l'ordre de 800 millions d'écus. Les entreprises concernées ne réalisent pas plus des deux tiers de leur chiffre d'affaires à l'intérieur d'un seul et même Etat membre. La présente concentration revêt donc une dimension communautaire au sens de l'article premier du règlement n° 4064-89. Elle ne constitue pas un cas de coopération dans le cadre de l'Accord EEE (articles 57 et 2 du protocole 24 de cet Accord).

IV. COMPATIBILITE AVEC LE MARCHE COMMUN

L'opération notifiée ne présente de chevauchements en termes de services que pour les activités de "private banking", de banque commerciale et de banque d'investissement. Les seules possibilités de chevauchement géographique significatives concernent soit les activités exercées en France, soit les activités exercées au Royaume Uni soit enfin les activités exercées globalement.

Marché de produit pertinent

Trois grands secteurs séparés peuvent être distingués au sein du secteur bancaire : les services bancaires de détail à l'attention des particuliers et des ménages (banque de détail), les services bancaires aux entreprises (banque commerciale) et les opérations sur les marchés financiers (banque d'investissement). Cette distinction traditionnelle a été présentée par la Commission dans plusieurs décisions [voir notamment l'affaire n° IV/M.342-Fortis/CGER, l'affaire n° IV/M.643-CGER/SNCI, l'affaire n° IV/M.573-ING/Barings, l'affaire n° IV/M.850-Fortis/MeesPierson, l'affaire n° IV/M.873-Bank Austria/Creditanstalt]. Ces secteurs peuvent être à leur tour subdivisés en un certain nombre de prestations spécifiques. Tout d'abord, le secteur de la banque de détail comprend la banque universelle, qui regroupe les activités liées aux systèmes de paiement (comptes à vue) et les services connexes, les comptes courants, les comptes de dépôt, l'épargne (comptes à vue, bons de caisse, livrets et comptes à terme), l'épargne hors bilan (SICAV, fonds communs de placement et fonds de pension), les crédits aux particuliers (les prêts à la consommation et autres financements, les prêts hypothécaires) et le "private banking". Ensuite, le secteur des services bancaires aux entreprises se divise également en divers produits tels que les crédits d'investissements, les produits à court terme, les dépôts, le leasing, les émissions de dettes. Enfin, les opérations sur les marchés financiers comprennent entre autres le conseil en fusions-acquisitions, les émissions de titres de sociétés, les émissions d'emprunts obligataires, les activités sur les marchés financiers (en actions, obligations, produits dérivés ou devises), les activités liées à la gestion d'actifs. Au cas d'espèce, il n'est pas nécessaire de procéder à une définition précise des marchés de produits pertinents dans la mesure où, quelle que soit la délimitation retenue, l'opération ne créera pas ou ne renforcera pas une position dominante.

Marché géographique pertinent

La Commission a déjà eu l'occasion de considérer que du point de vue géographique les services bancaires de détail étaient des marchés qui revêtaient encore une dimension nationale, tandis que certains services bancaires aux entreprises et les opérations sur les marchés financiers revêtaient un caractère international. Cependant la dimension géographique de services bancaires aux entreprises peut dans certains cas être limitée à un niveau encore national par le fait que les prestations sont souvent offertes au niveau des agences nationales à des clients locaux. En tout état de cause, au cas d'espèce, il n'est pas nécessaire de procéder à une définition précise des marchés géographiques pertinents dans la mesure où, quelle que soit la délimitation retenue, l'opération ne créera pas ou ne renforcera pas une position dominante.

Analyse concurrentielle

Les activités de SG s'étendent à tous les types de clientèle en France et se limitent à la banque commerciale et d'investissement hors de France. Inversement, Hambros est présente de façon marginale en France pour les activités de banque commerciale et d'investissement. Quels que soient les secteurs retenus, il n'y a que des recouvrements marginaux d'activités entre la Société Générale et Hambros au niveau respectivement de la France et du Royaume Uni. De plus, ni Société Générale ni Hambros pris isolément ne représente plus de 10% des activités dans l'un quelconque des secteurs identifiables en France ou au Royaume Uni. Si une dimension européenne ou internationale était adoptée pour évaluer l'impact de cette opération, les parts cumulées de Société Générale et de Hambros ne dépassent jamais 5 % quel que soit le secteur retenu. Compte tenu de ce qui précède, la Commission considère que l'opération ne soulève pas de doutes sérieux quant à sa compatibilité avec le Marché commun ou l'Accord EEE.

V. RESTRICTIONS ACCESSOIRES

La partie notifiante a soumis à la Commission six restrictions incluses dans la convention de cession d'actions signée avec Hambros PLC, et qu'elle considère comme directement liées et nécessaires à la réalisation de l'opération. Premièrement, pour une période s'étalant entre la date de signature de la convention et la date de clôture de l'opération, Hambros Bank et ses filiales ne pourront accomplir certains actes qu'avec l'accord préalable écrit de la Société Générale. Deuxièmement, pour une période d'un an après la clôture de l'opération, Hambros PLC et ses filiales ne pourront solliciter ou inciter toute personne employée par Hambros Bank à travailler pour Hambros PLC. Troisièmement, Hambros PLC s'engage à ne pas utiliser les informations confidentielles concernant Hambros Bank qu'elles détiennent. Quatrièmement, Hambros PLC et ses filiales (à l'exception de deux d'entre elles) s'engagent à ne pas poursuivre des activités pour lesquelles est exigé l'octroi d'une licence conformément à la section 3 du Banking Act 1987 ou toute autre licence équivalente dans les autres juridictions. Cinquièmement, Société Générale s'engage à cesser d'utiliser les armoiries Hambros ainsi que l'appellation "Hambros Group" dans un délai de trois mois après la date de clôture. Sixièmement, un certain nombre de services administratifs seront fournis pour une période de six mois après la date de clôture par Hambros Bank à Hambros PLC et ses filiales. Pour ce qui concerne les trois premières restrictions identifiées, elles apparaissent directement liées à l'opération en ce qu'elles permettent de protéger la valeur des actifs acquis pendant une durée limitée. La cinquième et la sixième restriction identifiée sont également directement liées à l'opération puisqu'elles visent à garantir, pendant une durée limitée, la continuité des activités de Hambros Bank et Hambros PLC et ses filiales. La quatrième restriction apparaît nécessaire pour garantir à l'acheteur la pleine reprise de la valeur des actifs qui lui sont cédés pour ce qui concerne son application aux territoires sur lesquels les entreprises cédées sont actives et sur une période ne pouvant excéder cinq années.

VI. CONCLUSION

Pour les raisons exposées ci-dessus, la Commission a décidé de ne pas s'opposer à l'opération notifiée et de la déclarer compatible avec le Marché commun et avec l'Accord EEE. Cette décision est prise sur la base de l'article 6, paragraphe 1, point b, du règlement du Conseil n° 4064-89.