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Décisions

CCE, 7 juin 1994, n° M.445

COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

Décision

BSN/Euralim

CCE n° M.445

7 juin 1994

LA COMMISSION DES COMMUNAUTES EUROPEENNES,

1. Le 2 mai 1994, BSN a notifié à la Commission un projet d'acquisition du contrôle de Panzalim, société holding nouvellement créée, qui regroupe les activités "plats préparés" du groupe BSN et d'Euralim.

Après examen de cette notification, la Commission a abouti à la conclusion que l'opération notifiée entre dans le champ d'application du règlement (CEE) du Conseil n° 4064-89 et ne soulève pas de doutes sérieux quant à sa compatibilité avec le Marché commun.

I. LES PARTIES

2. BSN est un important groupe français de l'agro-alimentaire, dont les activités se déploient dans les secteurs suivants: les produits frais, l'épicerie et les pâtes, les biscuits, la bière, les eaux minérales, et l'emballage.

3. Euralim est une filiale française du Groupe Saint-Louis. Ce groupe français est actif dans l'agro-alimentaire (plats préparés et champignons - Euralim - et sucre - Générale Sucrière), ainsi que dans l'industrie papetière (Arjomari-Prioux).

II. L'OPERATION

4. La concentration notifiée aboutira à la fusion des activités "plats cuisinés" de BSN (Panzani) et du Groupe Saint-Louis (Euralim) dans un nouvel ensemble qui portera le nom de Panzalim.

5. L'opération proposée consiste en plusieurs transactions qui forme un tout, à savoir:

- reprise de l'activité "champignons" par le Groupe Saint-Louis, par le rachat à Euralim de 100 % des actions de la société Royal Champignons SA;

- regroupement interne des activités "plats cuisinés" en France et en Espagne par l'apport à la société Panzani de 100 % des actions de BSN dans Pycasa-La Cocinera;

- apport par BSN à Euralim de 100 % des actions de Panzani, avec en contre-partie cession par Euralim à BSN de 65,5 % de son capital sous forme d'actions Euralim, le Groupe Saint-Louis conservant une participation minoritaire de 34,5 %.

6. Par ailleurs, indépendamment de la prise de contrôle de BSN sur Panzalim, une participation majoritaire dans Vivagel SA sera acquise soit directement par Panzani, soit par une autre entité du groupe BSN avec rétrocession à Panzani. Les activités "plats préparés" de Vivagel seront donc également apportées à Panzalim par BSN. Cette dernière opération n'est cependant pas de dimension communautaire, le chiffre d'affaires réalisé par Vivagel SA dans la Communauté étant d'environ 100 millions d'Ecus.

7. Suite à l'opération proposée, le groupe BSN détiendra la majorité du capital social du nouvel ensemble, légèrement inférieure aux deux tiers. Il sera en mesure de désigner la majorité des membres du Conseil d'administration et d'exercer une influence déterminante sur l'activité de Panzalim.

Le Groupe Saint-Louis conservera une participation minoritaire qu'une option lui permettra de céder selon des modalités et à un prix convenus entre les parties. Il n'exercera aucun droit excédant la protection de ses intérêts d'actionnaire minoritaire.

8. L'opération proposée constitue donc une concentration par voie d'acquisition au sens de l'article 3(b) du règlement n° 4064-89.

III. DIMENSION COMMUNAUTAIRE

9. Les entreprises concernées sont BSN et Euralim, partie du groupe Saint-Louis. Elles réalisent ensemble un chiffre d'affaires total (au sens de l'article 5 du règlement n° 4064-89) qui dépasse 5 milliards d'Ecus sur le plan mondial. Chacune réalise individuellement un chiffre d'affaires communautaire total supérieur à 250 millions d'Ecus. Les parties ne réalisent pas plus des deux tiers de leur chiffre d'affaires communautaire dans un seul et même Etat membre.

La concentration notifiée a dès lors une dimension communautaire au sens de l'article 1er du règlement n° 4064-89.

IV. COMPATIBILITE AVEC LE MARCHE COMMUN

Détermination des marchés

Les marchés de produit pertinents

10. Les secteurs économiques concernés par la concentration sont ceux des plats cuisinés produits par l'industrie agro-alimentaire. Comme l'opération affecte essentiellement la France et l'Espagne, il y est fait référence dès ce stade de l'analyse.

Il apparaît que le secteur des plats cuisinés peut être divisé en plusieurs segments de produits différents.

Consommation à domicile et restauration hors foyer

11. La première segmentation s'effectue entre la consommation à domicile et la restauration hors foyer. Les parts respectives de ces secteurs sont:

<emplacement tableau>

12. Il n'est pas nécessaire toutefois de décider si ces deux secteurs constituent deux marchés distincts dans la mesure où l'opération ne conduit ni à la création ni au renforcement d'une position dominante, même en retenant la définition la plus étroite.

Par ailleurs, compte tenu des positions modestes des parties et de la quasi-absence d'Euralim sur le secteur de la restauration hors foyer, seul le secteur de la consommation à domicile fera l'objet d'une évaluation de position dominante.

Technologie et type de produits

13. La détermination des secteurs (ou segments) les plus étroits crédibles repose sur une segmentation par technologie de fabrication et par catégorie de produit au sein de chaque technologie.

a. Segmentation par technologie

14. Les différentes technologies sont:

- le déshydraté

- l'appertisé (conserves stérilisées)

- le surgelé

- le frais

15. Le déshydraté ne représente que 5 % de l'ensemble des plats préparés; aucune addition de parts de marché ne résultera de la concentration, Euralim n'étant pas présent sur ce secteur; par ailleurs, BSN n'y est que faiblement actif. Ce secteur ne sera donc pas considéré comme "affecté" par l'opération.

16. Les autres technologies (appertisé, surgelé et frais) se distinguent en fonction des critères d'analyse suivants:

- modes de conservation

- pour l'appertisé: température ambiante, conditionnement en boîte métallique ou en barquette, présentation et stockage en linéaire.

- pour le surgelé: froid fortement négatif, conditionnement en barquette, présentation et stockage en congélateur.

- pour le frais: des températures légèrement positives, conditionnement sous vide, présentation et stockage en vitrine réfrigérée.

- prix

Compte tenu notamment du nécessaire respect de la chaîne du froid et de leur durée de conservation, les produits surgelés et frais se caractérisent par des prix supérieurs à ceux des produits appertisés.

En France, les écarts de prix moyens sont les suivants (base 100 pour l'appertisé):

- appertisé: 1

- surgelé: 2

- frais: 2,5

- utilisation par le consommateur

Chaque type de technologie correspond à une utilisation différenciée par les consommateurs.

- appertisé: facilité de transport et de stockage, simplicité et rapidité de préparation.

- surgelé: diversité et originalité des recettes, préservation des valeurs nutritionnelles.

- frais : appétence, rapidité de préparation.

b. Segmentation par catégorie

17. Des segmentations plus fines des secteurs du surgelé, du frais et de l'appertisé permettent d'isoler au sein de chaque technologie des catégories de produits qui, du point de vue des offreurs, constituent des familles de produits.

Les produits appertisés

18. Concernant les produits appertisés, les parties et l'ensemble des tiers ont proposé une segmentation par familles de recettes, correspondant à une détermination géographique.

- les plats français (choucroute, cassoulet, quenelles, saucisses aux lentilles, gratin dauphinois) représentent 63 % de l'appertisé

- les plats italiens (raviolis, lasagnes, etc.) représentent 18 % de l'appertisé

- les plats exotiques (couscous, paëlla, taboulé, etc.) représentent 19 % de l'appertisé.

Ce type de répartition correspond non seulement aux pratiques des producteurs mais aussi à celle des distributeurs (organisation en linéaire) .L'organisation des marques confirme d'ailleurs cette segmentation, aucune marque importante n'étant présente à la fois sur les différents segments de l'appertisé. De plus, les prix varient d'un segment à l'autre: 11,70 FF pour les plats italiens, 19,10 FF pour les plats français et 21,30 FF pour les plats exotiques (prix moyen au kg en 1993).

19. Les segments de l'appertisé, en particulier celui des plats français, se caractérisent par la présence de trois grandes catégories d'opérateurs :

- les fabricants de marques notoires (William Saurin, Saupiquet, Raynal et Roquelaure et sur certains sous-segments, Christ, Henaff, Maggi, La belle Chaurienne)

- les distributeurs qui vendent les appertisés sous leur propre marque. Cette catégorie d'opérateurs connaît une évolution croissante de sa part de marché. En volume, les marques distributeurs ont progressé de 6,1 % de 1991 à 1993, et en valeur de 4,8 %. En 1993, les produits sous marque distributeur ont représenté 28,3 % en volume et 20,3 % en valeur du segment de l'appertisé "plats français".

- enfin, une dernière catégorie d'opérateurs qui occupe 20% environ du secteur de l'appertisé (près de 30% du segment "plats français") est constituée par:

- les fabricants de produits "premiers prix" (produits de qualité et de prix sensiblement inférieurs aux produits sous marque distributeur, qui peuvent être vendus par plusieurs enseignes et ne sont pas garantis par le distributeur mais par le fabricant). Ils comptent pour environ 11 % en valeur et 15 % en volume du secteur de l'appertisé "plats français".

- les fabricants de produits dits régionaux ou gastronomiques. Ces derniers vendent du haut de gamme et sont souvent spécialisés sur des "niches" particulières. Ils représentent environ 6 % en valeur et 4 % en volume du segment des plats cuisinés appertisés "français".

- les fabricants de produits de qualité standard. Ils sont spécialisés sur certains produits déterminés. Ils détiennent approximativement 13 % en valeur et 9 % en volume des plats cuisinés appertisés "français".

20. Les surgelés et les produits frais

Les parties ont proposé une segmentation par plats, liée à leur place et consistance à l'intérieur d'un repas, à savoir:

- entrées (pizzas, quiches, tourtes, crêpes, feuilletés et, plus particulièrement en Espagne en surgelé, croquettes, empanadas, calamars, etc)

- plats principaux (plats cuisinés, à base de viande, de poisson, de pâtes, etc).

Tant pour le frais que le surgelé, la segmentation entrées/plats principaux, confirmée par les revues professionnelles de l'industrie, s'explique principalement par les traditions culinaires et les habitudes alimentaires des consommateurs.Par ailleurs, l'organisation des présentoirs réfrigérés et des congélateurs en grandes et moyennes surfaces (GMS) notamment est le reflet de cette segmentation.

21. Cependant, concernant les produits surgelés, une autre segmentation peut être opérée (elle a été proposée par des tiers tant concurrents que distributeurs). Les plats surgelés sont distingués selon l'ingrédient ou le caractère culinaire prédominant dans le plat, à savoir:

- plats cuisinés à base de viande

- plats cuisinés à base de poisson

- plats cuisinés à base de légumes

- plats cuisinés "tradition"

- plats cuisinés "étrangers"

- plats cuisinés allégés.

Par ailleurs, certains tiers ont proposé de segmenter les plats préparés frais en libre service et produits à la coupe. Les parties ne sont que très marginalement présentes sur le segment "à la coupe".

La question de savoir si ces différents sous-segments constituent des marchés de produits pertinents distincts sera laissée ouverte dans la mesure où la Commission n'a constaté aucune création ni renforcement de position dominante dans chacun de ces sous-segments.

22. Enfin, en Espagne, les parties sont présentes également sur les segments des produits suivants:

- les desserts (différentes sortes de beignets)

- les pâtes à tarte et à pizza.

23. Tant sur le secteur des produits appertisés que sur ceux des produits surgelés et des produits frais, les segmentations proposées, justifiées pour l'essentiel du point de vue des offreurs, recoupent en partie le point de vue de la demande bien qu'il soit possible d'émettre certaines réserves aussi bien sur l'existence de franges de substituabilité entre certaines catégories que sur l'absence totale de substituabilité entre certains produits à l'intérieur d'une même catégorie.

24. Il n'est pas nécessaire de décider si l'ensemble des secteurs ou segments déterminés ci-avant constitue un seul marché des plats cuisinés ou si chacun d'entre eux constitue un marché de produit distinct puisque même en retenant la définition la plus étroite, la concentration ne conduit ni à la création ni au renforcement d'une position dominante.

Les marchés géographiques de référence

25. Les marchés géographiques de référence tant au niveau de la production que de la distribution sont encore essentiellement nationaux. En effet, les plats cuisinés (appertisés, surgelés, frais) sont encore fortement liés aux différences de goût et d'habitudes alimentaires qui varient d'un Etat membre à l'autre.

Dans chaque Etat membre, on observe la présence d'un nombre limité de producteurs et de marques. Les grands groupes (Unilever, Nestlé et BSN) bien que présents dans pratiquement tous les Etats membres ont des parts de marché très contrastées d'un Etat à l'autre. Leur moyenne de parts de marché communautaires ne reflète pas leur position Etat par Etat. A titre d'exemple, Unilever se situe au premier rang en Europe avec 13,4 % de parts de marché (tous plats préparés confondus) alors qu'il détient 33,1 % en Italie et 2,4 % en France; Nestlé se place au 2e rang européen avec 13,3 % alors qu'il détient des parts de 7,1 % au Royaume Uni et de 25,8 % en France.

La présence significative des marques distributeurs et des produits sans marque aucune, commercialisés uniquement au niveau national, renforce le caractère national des marchés géographiques.

Les flux d'échange intra-communautaires apparaissent faibles. En France, l'ensemble des achats réalisés en dehors du territoire national représente 5 % des ventes en volume de plats cuisinés.

26. Seul le segment de produit constitué par les pizzas surgelées pourrait être qualifié de transnational voire communautaire. En effet, 20 % de la consommation française (45 000 T) est satisfaite par des importations. En Espagne, cette part s'élève à 50 % de la consommation (6 700 T). De plus, 3 % des pizzas produites en France sont exportées. Toutefois, étant donné l'absence de création ou de renforcement de position dominante, la question du caractère transnational du segment de la pizza surgelée sera laissée ouverte.

27. Ainsi, les parties sont conjointement présentes en France, Espagne, Portugal et Grèce; seules la France et l'Espagne doivent être considérées comme affectées par l'opération et feront l'objet d'une évaluation de position dominante.

Appréciation de l'opération

28. Les effets de l'opération qui touche un grand nombre de produits sont plus ou moins sensibles en termes d'addition de parts de marché. Il apparaît néanmoins que ces effets sont notables sur les secteurs ou segments suivants(cf tableau joint en Annexe 1):

- secteur du plat préparé appertisé en France[Dans la version publique de cette décision, certaines informations ont été omises ou remplacées conformément à l'article 17 (2) du règlement du Conseil (CEE) n° 4064-89, et en conséquence, toutes les [ parenthèses ] remplacent des informations supprimées comme relevant du secret d'affaires.] [35-40 %]

- segment du plat préparé appertisé "plats français" en France [38-43 % ]

- segment du plat préparé surgelé "entrées" en France [25-30 %]

- segment du plat préparé surgelé "entrées" en Espagne [35-40 %]

- segment des pâtes à tarte et à pizza surgelées en Espagne [40-45 %]

- sous-segment des beignets sucrés surgelés en Espagne [43-48 %]

- sous-segment des "plats italiens" surgelés en Espagne [30-35 %]

Sur tous les autres secteurs ou segments, les parts combinées des parties résultant d'une addition des parts de marché sont inférieures à [20-25 %] en valeur. Par ailleurs, dans tous les cas, les parties sont confrontées à l'existence de concurrents détenant des positions de marché équivalentes ou supérieures (cf Annexes 2 et 3).

C'est pourquoi l'analyse portera sur les sept secteurs ou segments où les effets de l'opération peuvent être considérés comme sensibles.

29. Il convient toutefois d'apporter quelques éléments d'appréciation sur ces secteurs ou segments concernés afin de relativiser l'importance des parts de marché, résultant de la combinaison mathématique des positions respectives des parties avant l'opération.

Le secteur de l'appertisé en France se caractérise depuis trois ans par une certaine stagnation en volume et une baisse en valeur qui traduisent à la fois la maturité du produit et la tension sur les prix. Les parts de marché des parties sont stagnantes (BSN) ou décroissantes (Euralim: [entre -3 et -7 points] points en volume, [entre -3 et -7 points] points en valeur, sur la période de 1991-1993).

En ce qui concerne le segment de l'appertisé "plats français", l'addition somme toute conséquente des parts de marché doit prendre en compte la modestie de l'apport de BSN à la nouvelle structure ([3-6 %] en valeur), constitué essentiellement de plats à base de quenelles.

Les secteurs du surgelé et du frais, aussi bien en France qu'en Espagne, se distinguent par leur caractère dynamique. Ils sont en forte progression (+ 16,25 % en deux ans pour le surgelé français, + 38,17 % pour le frais). En Espagne, où ces types de produit sont moins développés qu'en France, les perspectives d'expansion sont importantes.

D'une façon générale, les positions de marché des parties sur ces deux derniers secteurs apparaissent stables, pour la période 1991-1993.

30. En dépit de parts de marché parfois élevées, il ne semble pas que l'opération conduise à la création ou au renforcement d'une position dominante sur les secteurs ou segments considérés compte tenu notamment:

- de la présence de concurrents puissants,

- de la puissance des acheteurs (grande distribution).

- de faibles barrières à l'entrée,

Présence de concurrents

France

31. La situation de la concurrence en France, en ce qui concerne les secteurs ou segments affectés par l'opération est la suivante :

<emplacement tableau>

1. Concurrence des marques des industriels

32. Sur ces trois secteurs ou segments, la nouvelle entité se trouve en concurrence directe avec un groupe agro-alimentaire de puissance comparable, à savoir Nestlé qui, notamment sur le segment surgelé "entrées" dispose d'une marque à forte notoriété (Findus).Sur l'appertisé, la présence de Nestlé qui dispose des marques Buitoni et Maggi, est significative sur les segments "plats italiens" et "plats exotiques". Nestlé n'a qu'une position marginale sur le segment "plats français", position qu'elle pourrait, en tant que grand groupe de l'agro-alimentaire, développer.

En ce qui concerne les autres opérateurs industriels Saupiquet et Cofigeo, qui contrôle Raynal et Roquelaure, ils apparaissent en 1993, avec ensemble près de [8-13 %] de parts de marché sur le segment "plats français", comme des concurrents crédibles.

33. En 1994, la configuration de la concurrence s'est légèrement modifiée avec le retrait de Saupiquet de la quasi-totalité du segment appertisé "plats français". Saupiquet devrait conserver une position très modeste sur ce segment [< 2 %]. Les quatre points restants vont donc se répartir entre les différents acteurs dont Panzalim, puisque Saupiquet lui a cédé certains plats qui représentent [< 2 %] en volume et [< 2 %] en valeur du segment. Ce gain probable ne saurait toutefois remettre en cause l'appréciation des effets de l'opération. Par ailleurs, malgré sa taille, Raynal et Roquelaure est en mesure de proposer sur certains plats des alternatives aux produits de William Saurin.

2. Concurrence des marques distributeurs (MDD)

34. Dans tous les cas de figure, les parties se trouvent en concurrence avec les "marques distributeurs" qui représentent au moins 20 % de parts de marché en valeur et beaucoup plus en volume, compte tenu de leur politique tarifaire:

<emplacement tableau>

Le poids des marques distributeurs doit également s'analyser dans le cadre d'une dynamique qui leur est favorable, sur l'appertisé notamment.

<emplacement tableau>

Les prix pratiqués par les distributeurs sur leurs produits à marque par rapport aux prix des produits distribués sous la marque des industriels sont particulièrement compétitifs. Ils sont en général inférieurs à ceux des produits à marque des industriels de l'agro-alimentaire comme le montre le rapport volume/valeur, décrit plus haut.

Cette tension concurrentielle sur les prix est illustrée par l'évolution tarifaire moyenne des trois grandes catégories de produits : appertisé (- 4 %), surgelé (-5,7 %), frais (- 3 %) sur la période 1991-1993.

35. Sous la rubrique "marques distributeurs" figurent les produits des "hard- discounters" qui connaissent un développement récent et rapide. Entre 1991 et 1993, les MDD "hard-discounters" ont doublé leurs positions tant en volume qu'en valeur, atteignant respectivement [5-10 %] et [< 5 %] sur le segment "plats français". Les "hard-discounters" sont donc des acteurs particulièrement offensifs dans le secteur de l'appertisé.

Figurent également sous cette rubrique les produits MDD surgelés des chaînes spécialisées ("freezer centers" où les produits MDD représentent le quart des ventes).

3. Concurrence d'autres acteurs

36. Il convient également de tenir compte de la concurrence exercée sur les différents secteurs et segments concernés, notamment en appertisé, par deux catégories d'acteurs qui totalisent plus de 20% de parts de marché. Il s'agit d'une part des produits dits de "premier prix", produits de qualité et de prix sensiblement inférieurs aux produits MDD et qui sont vendus dans les circuits GMS, d'autre part, des produits d'entreprises de taille modeste qui ont choisi des stratégies de niche et ont acquis sur certains sous-segments des positions non-négligeables(Christ, Henaff, etc.).

Espagne

37. La situation de la concurrence sur le marché espagnol, en ce qui concerne les secteurs ou segments affectés par l'opération est la suivante:

<emplacement tableau>

Il résulte d'un tel tableau que face à Panzalim, des concurrents internationaux de taille équivalente en termes de puissance financière et commerciale tels Nestlé et Unilever, sont déjà présents sur le marché espagnol et que cette présence est loin d'être négligeable; qu'un opérateur national, Pescanova, dispose de positions de marché comprises entre [15-20 %] et [20-25 %] et demeure un concurrent crédible d'autant qu'il a gagné presque [entre 0 et 5 points] de parts de marché en deux ans. Contrairement au marché français, les produits MDD ne constituent pas sur ces segments des concurrents réellement puissants.

Puissance des acheteurs

38. La demande est extrêmement concentrée, en particulier dans les secteurs de la grande distribution (GMS) et des circuits spécialisés pour le surgelé.

- 75% du secteur de l'appertisé en France est réalisé dans le secteur "GMS".

- 45% du secteur du surgelé en France est réalisé dans le circuit "GMS" et 30% dans celui des circuits spécialisés pour le surgelé.

- 62% du secteur du frais en France est réalisé dans le circuit "GMS".

Ces acheteurs constituent l'essentiel de la clientèle des parties. Les GMS, soit les 9 premiers clients de BSN, représentaient en 1989 [>75 %] de son chiffre d'affaires total en plats cuisinés; en 1993, ils en représentaient [>75 %].

La présence de la grande distribution en Espagne est sans doute moins forte qu'en France. Toutefois, ceci n'est pas de nature à remettre en cause les effets de leur pouvoir de négociation en Espagne.

39. La grande distribution exerce une double pression concurrentielle: "en amont" au stade de la négociation commerciale avec les industriels, "en aval" au stade de la commercialisation de leurs produits à marque propre.

Les relations entre les industriels et la grande distribution se caractérisent par une tension croissante en ce qui concerne les prix et avantages consentis ou acquis.

40. L'opération renforce le pouvoir de négociation des parties compte tenu de la complémentarité des gammes de BSN et d'Euralim, notamment dans l'appertisé. Toutefois, rien n'indique qu'un tel renforcement serait de nature à favoriser la création d'une position dominante compte tenu, en particulier, de la spécificité de chacune des gammes identifiée à une marque distincte et de l'existence d'alternatives, en terme de produit comme de marque.

41. Par ailleurs, la pression qu'exercent en aval les marques MDD ne saurait être remise en cause par l'opération dans la mesure où la grande distribution ne sera pas dépendante de Panzalim pour ses approvisionnements. En effet, la part de la production de Panzalim dans le tonnage total des MDD ne représente pas plus de [20-25 %] du secteur des appertisés et de [15-20 %] du segment des plats français.

Enfin, les contrats de fourniture entre les industriels et la grande distribution sont de courte durée, inférieure ou égale à une année.

Par conséquent, la puissance de négociation commerciale des acheteurs ne saurait être affaiblie par l'opération et devrait continuer d'agir comme aiguillon concurrentiel.

Faiblesse des barrières à l'entrée

42. Ni les réglementations nationales ou communautaires concernant notamment la protection du consommateur, ni la disponibilité en matières premières, ni la recherche et le développement dans un secteur sans innovation technologique majeure, ni les systèmes de distribution ne constituent de barrières à l'entrée susceptibles d'entraver l'accès d'un nouvel opérateur sur les secteurs ou segments concernés.

Détention de marques

43. La détention de marques disposant d'une certaine notoriété est un élément important de l'accès au marché.

Les parties disposeront à la suite de l'opération des marques d'Euralim et de BSN pour l'appertisé, notamment William Saurin ([15-20 %] en valeur du secteur de l'appertisé), Panzani ([5-10 %] en valeur du secteur de l'appertisé) et Garbit [5-10 %], chacune identifiée respectivement aux trois segments "plats français", "plats italiens" et "plats exotiques".

Elles détiendront également dans le secteur du surgelé les marques Vivagel et Marie, et dans celui du frais, de Marie et d'Honoré Janin.

44. La détention de ces marques ne constitue pas une "rente de situation".En effet, les parts de marché de la marque William Saurin sur le segment des plats français ont diminué de [entre 5 et 10] points en deux ans (de [30-35 %] à [25-30 %]) alors que croissaient les parts de marché des MDD.

45. Par ailleurs, des entrées de marques nouvelles sur les trois secteurs concernés démontrent leur accessibilité à de nouveaux acteurs.Une dizaine d'entrées est répertoriée en France, et notamment McCain (pizzas surgelés), Weight Watchers (plats cuisinés allégés) ou Spanghero (cassoulet appertisé).

Publicité

46. Selon les parties, l'acquisition d'une part de marché de [< 5 %] du secteur français des plats cuisinés coûte environ [65-70 millions FF], soit [10-15 millions d'Ecus] dont environ [40- 60%] sont consacrés à la promotion et à la commercialisation.

Les dépenses publicitaires varient selon les trois types de secteurs isolés:

- appertisé: 1,2 % du chiffre d'affaires.

- surgelé: 1,9 % du chiffre d'affaires.

- frais: 2,5 % du chiffre d'affaires.

Ces dépenses sont relativement faibles comparées à d'autres secteurs de l'industrie agro-alimentaire: eaux minérales (4,3 %), céréales de petit déjeuner (12,9 %).

47. Une entrée sur ce secteur ne paraît pas nécessiter de dépenses publicitaires significatives.De plus, les concurrents de Panzalim comme Nestlé ont les capacités financières d'investir dans la promotion de leurs produits et marques.

V. Conclusion

48. Pour les raisons exposées ci-dessus, la Commission a décidé de ne pas s'opposer à l'opération notifiée et de la déclarer compatible avec le Marché commun. Cette décision est prise sur la base de l'article 6, paragraphe 1, point b, du règlement du Conseil n° 4064-89.

Annexe 1

Addition des parts de marché résultant de la concentration, en France et en Espagne

[Dans la version publique de cette décision, certaines informations ont été omises ou remplacées par des "fourchettes" conformément à l'article 17(2) du règlement du Conseil (EEC) n° 4064-89, et en conséquence, toutes les [parenthèses] remplacent des informations supprimées comme relevant du secret d'affaires]

<emplacement tableau>

Annexe 2

Situation de la concurrence en France et en Espagne après l'opération

[Dans la version publique de cette décision, certaines informations ont été omises ou remplacées par des "fourchettes" conformément à l'article 17(2) du règlement du Conseil (EEC) n° 4064-89, et en conséquence, toutes les [parenthèses] remplacent des informations supprimées comme relevant du secret d'affaires]

<emplacement tableau>

<emplacement tableau>

Annexe 3

Situation de la concurrence sur le segment des plats préparés surgelés après l'opération

[Dans la version publique de cette décision, certaines informations ont été omises ou remplacées par des "fourchettes" conformément à l'article 17(2) du règlement du Conseil (EEC) n° 4064-89, et en conséquence, toutes les [parenthèses] remplacent des informations supprimées comme relevant du secret d'affaires.]

<emplacement tableau>

<emplacement tableau>