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Décisions

CCE, 21 juin 1999, n° M.1567

COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

Décision

Lucchini/Ascometal

CCE n° M.1567

21 juin 1999

1. Le 17 mai 1999, la Commission a reçu une notification, au titre de l'article 4 du règlement du Conseil (CEE) n° 4064-89, d'un projet de concentration aux termes duquel l'entreprise Lucchini Spa (Italie) acquiert, au sens de l'article 3 paragraphe I point b du règlement du Conseil, le contrôle exclusif de l'entreprise Ascoinétal (France), appartenant au groupe Usinor, par achat d'actions.

2. Après examen de la notification, la Commission est arrivée à la conclusion que l'opération notifiée relève du règlement (CEE) n° 4064-89 du Conseil et ne soulève pas de doutes sérieux quant à sa compatibilité avec le Marché commun et avec l'accord EEE. Cette concentration tombe également dans le champ d'application de l'article 66 du Traité CECA pour les marchés de produits relevant de ce traité.

1. LES ACTIVITÉS DES PARTIES ET L'OPERATION NOTIFIEE

3. Lucchini Spa, actuellement contrôlée à 100 % par la famille Lucchini, produit et distribue des produits en acier, notamment des produits longs en aciers spéciaux. Les activités CEE de Lucchini Spa couvrent en particulier les marchés des barres transformées à froid et des pièces forgées de grandes tailles. La majorité des activités de Lucchini Spa est concentrée en italie.

4. Ascométal produit et distribue des produits longs en acier, notamment en France, Allemagne, Bénélux et Italie. Cette société est entièrement détenue par le groupe français Usinor qui opère actuellement un recentrage de ses activités sur les marchés des produits plats au carbone et des aciers inoxydables. Ascométal produit notamment des barres transformées à froid, des fils tréfilés et, au travers de sa filiale Ascoforge Safe, des pièces forgées destinées au secteur automobile.

5. L'opération notifiée consiste dans l'acquisition par Lucchini Spa de 100 % du capital d'Ascométal. L'ensemble cédé représentait, en 1998, un chiffre d'affaires de près de 740 millions d'euros et un effectif d'environ 3 500 personnes.

6. La transaction entraîne l'acquisition du contrôle unique de la société Ascométal par le groupe Lucchini et constitue donc une opération de concentration au sens de l'article 3-1-b du règlement n° 4064-89.

II. DIMENSION COMMUNAUTAIRE

7. Le groupe Lucchini et la société Ascométal réalisent un chiffre d'affaires total sur le plan mondial de plus de 2 500 millions d'euros (groupe Lucchini 2 090 millions d'euros et Ascométal : 740 millions d'euros). Dans chacun d'au moins trois Etats membres, à savoir l'Italie, la France et l'Allemagne, le chiffre d'affaires total réalisé par les deux entreprises concernées est supérieur à 100 millions d'euros. Chacune d'entre elles réalise un chiffre d'affaires de plus de 25 millions d'euros dans chacun des trois Etats membres mentionnés ci-dessus. Le chiffre d'affaires total réalisé individuellement dans la Communauté par les deux entreprises concernées représente un montant supérieur à 100 millions d'euros (groupe Lucchini : 1 943 millions d'euros et Ascométal : 623 millions d'euros) mais aucune d'entre elles ne réalise plus des deux tiers de son chiffre d'affaires communautaire dans un seul et même Etat membre. L'opération a donc une dimension communautaire au sens de l'article 1, paragraphe 3, du règlement concentrations.

III. ANALYSE DU MARCHE

A. Marchés de produits en cause

8. Lucchini Spa et Ascométal produisent et distribuent tout deux des barres transformées à froid. Ascométal est également présent dans le domaine des fils tréfilés, marché sur lequel Lucchini Spa n'est pas actif. De même, les activités des parties ne se recoupent pas dans le domaine des pièces forgées en acier, les produits fabriqués par Ascométal n'étant destinés qu'au secteur de l'automobile (dans les domaine de la transmission, l'injection diesel, la liaison au sol et la motorisation), alors que la société Lucchini Spa produit, quant à elle, des pièces forgées de grandes tailles (roues, essieux) ou pièces destinées au secteur ferroviaire.

9. Ainsi, les activités des parties ne se chevauchent que dans le domaine des barres transformées à froid qui sont des produits destinées à l'industrie automobile, aux équipementiers, au secteur ressort ainsi qu'aux industries mécaniques. Une distinction est traditionnellement opérée au sein de la profession entre les barres transformées à froid en aciers alliés et les barres en aciers non alliés. Dans le cas d'espèce, il n'y a pas lieu de déterminer en dernière analyse si les deux types de produits en question constituent des marchés de produits distincts ou s'ils appartiennent à un marché de produits homogène, car la concentration envisagée ne soulève pas de doutes concurrentiels, quelle que soit la définition considérée.

B. Marché géographique de référence

10. Les parties considèrent que le marché géographique de référence pour les barres transformées à froid est de dimension au moins communautaire. Les acteurs présents sur ce marché livrent en effet leurs produits sur l'ensemble de l'Union européenne et il existe donc une interpénétration importante entre les différents Etats membres (les flux intra communautaires représentaient environ 30 % de la consommation apparente totale en 1998). De plus, les coûts de transport au sein de l'Union ne sont pas élevés (environ 4 %). Le marché géographique en cause correspond donc au moins au territoire de l'Union européenne.

C. Appréciation

11. Sur le marché total des barres transformées à froid, la nouvelle entité détiendra après l'opération une part combinée, en volume, de [<10 %] Lucchini Spa [<5 %] et Ascométal [<5 %] au sein de l'Union Européenne. Si l'on distingue les barres transformées à froid en aciers alliés des barres transformées à froid en aciers non alliés, les parts combinées respectives s'établissent respectivement à [<5 %] (Lucchini Spa [<5 %] et Ascométal [<5 %] et [5-15 %] Lucchini Spa [<5 %] et Ascométal [5-15 %]. La nouvelle entité devra, à tous les niveaux, faire face à la concurrence d'acteurs de poids comme Saarstahl, Georgsmarienhutte, British Steel ou Ovako Steel. Enfin, l'addition de la part de marché de Lucchini à celle détenue par Ascométal est très limitée.

12. Compte tenu de la position sur le marché des parties à la concentration, il apparaît que l'opération notifiée ne crée pas ou ne renforce pas une position dominante qui aurait pour résultat d'entraver la concurrence effective de manière significative dans l'EEE ou une partie substantielle de celui-ci.

IV. RESTRICTIONS ACCESSOIRES

13. Usinor s'engage pendant cinq ans, à compter de la date de la signature de la Convention d'acquisition, à ne pas concurrencer Ascométal et ses filiales au sein de l'Union européenne et des Etats-Unis, directement ou indirectement, pour les produits qui fait l'objet de l'activité économique de l'entreprise cédée. De même, Usinor s'engage pendant cette durée à ne pas tenter de recruter directement ou indirectement, le personnel de direction, ingénieurs et cadres supérieurs de l'entreprise cédée.

14. Ces clauses visent à garantir le retrait durable d'Usinor et protège Lucchini Spa contre le retour d'Usinor sur les marchés de l'entreprise cédée. Elles visent donc à garantir le transfert à l'acquéreur de la pleine valeur des actifs cédés et peuvent ainsi être considérées comme des restrictions accessoires à la concentration, en conformité avec les critères établis dans le chapitre III, lettre A, "Engagements de non-concurrence", paragraphes 1 à 4 de la communication de la Commission relative aux restrictions accessoires aux opérations de concentration. En outre, la Commission a reconnu, dans cette même communication, qu'une période acceptable d'interdiction de concurrence de cinq ans peut être appropriée lorsque la cession s'étend également à l'achalandage et au savoir-faire, ce qui est le cas en l'espèce. Les clauses sont donc couvertes pour une durée de cinq ans.

V. CONCLUSION

15. Pour les motifs exposés ci-avant, la Commission a décidé de ne pas s'opposer à l'opération notifiée et la déclare compatible avec le Marché commun et avec l'accord EEE. La présente décision est adoptée en application de l'article 6 paragraphe 1 point b du règlement (CEE) n° 4064-89 du Conseil.